Question de M. SUEUR Jean-Pierre (Loiret - SER) publiée le 08/04/2021

M. Jean-Pierre Sueur appelle l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur les termes de la circulaire du 8 février 2021 relative au schéma de procédure pour la prise en charge de mineurs non accompagnés marocains. Cette circulaire donne instruction aux juridictions de suivre le schéma de procédure arrêté lors d'une réunion interministérielle franco-marocaine le 11 octobre 2019 et évoqué dans la déclaration signée le 7 décembre 2020 à Rabat. Ce schéma de procédure prévoit la possibilité pour le procureur de la République de requérir le concours de la force publique à l'égard des mineurs qui refuseraient d'embarquer vers le Maroc sur le fondement de l'article 375-3 du code de procédure civile . Or, l'article L. 521-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : « L'étranger mineur de dix-huit ans ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion. » Il lui demande, en conséquence, s'il compte abroger cette circulaire.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 14/10/2021

Le schéma de procédure du 11 octobre 2019 est une procédure à droit constant, en matière civile exclusivement, qui permet le placement transfrontière d'un mineur auprès d'un établissement de protection de l'enfance ou son retour dans sa famille au Maroc. Ce schéma rappelle les modalités de mise en œuvre de la coopération judiciaire internationale, qui trouve son fondement dans la convention de La Haye du 19 octobre 1996, ainsi que les dispositions de droit français relatives à la procédure d'assistance éducative. La procédure confirme la possibilité pour le juge des enfants, si l'intérêt supérieur du mineur le requiert, de prendre la décision d'organiser sa prise en charge au sein d'une institution de protection de l'enfance de son pays d'origine ou auprès de sa famille en se dessaisissant au profit de la juridiction du pays d'origine. Elle décline les modalités pratiques d'entraide civile permettant au juge des enfants de préparer, prendre sa décision puis en assurer l'exécution et le suivi. L'adhésion du mineur est recherchée par le juge des enfants. Celui-ci pourra néanmoins décider, comme dans toute autre procédure en matière de protection, que l'absence de consentement de l'enfant ne fait pas obstacle à la décision d'un placement dans un établissement de protection de l'enfance au Maroc, ou le cas échéant auprès de sa famille, si les modalités de sa prise en charge sont garanties et dans son intérêt supérieur. La juridiction française pourra alors se dessaisir au profit de la juridiction marocaine et le mineur bénéficiera d'une mesure de protection de l'enfance auprès du juge marocain. L'article 375-3 du code civil dispose que le procureur de la République peut requérir directement le concours de la force publique pour faire exécuter les décisions de placement rendues en assistance éducative. Cette disposition a été introduite par la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique pour les cas où le mineur refuserait d'intégrer son lieu d'accueil. Cette procédure n'est donc pas spécifique aux décisions de placement ordonnées au Maroc ou dans tout autre pays étranger. Le schéma de procédure rappelle également que l'opportunité et les modalités du recours à la force publique doivent être appréciées au cas par cas, et que l'intérêt du mineur demeure l'élément essentiel à prendre en considération. Ce recours à la force publique doit être limité aux situations les plus graves, lorsqu'il n'existe pas de perspective de convaincre le mineur, ni de possibilité pour le service auquel l'enfant est confié de procéder autrement. Ainsi, le recours à la force publique dans le cadre du schéma de procédure du 11 octobre 2019 s'inscrit pleinement et exclusivement dans le cadre de la procédure judiciaire d'assistance éducative. Il permet l'exécution d'une décision de protection prise par le juge des enfants qui estime, au regard de la situation du mineur, qu'il est dans son intérêt d'être confié au Maroc. En l'espèce, cette procédure n'est en rien comparable à une décision d'expulsion et ne contrevient donc pas aux dispositions de l'article L. 521-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers.

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