Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 27/05/2021

M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur l'accès aux soins en Seine-Saint-Denis, et notamment sur la situation du centre hospitalier intercommunal André Grégoire de Montreuil.
Le système de santé français a été gravement mis à mal au cours des vingt dernières années ; au total, ce sont 100 000 lits d'hôpitaux qui ont été fermés. Cette détérioration, issue de logiques de gestion et de rentabilité inadmissibles au sein d'un service public, entraîne des difficultés majeures, pour les patients mais également pour les soignants qui se trouvent surchargés de travail, ce qui a été profondément aggravé depuis le début de la crise sanitaire due à la pandémie de Covid-19.
La Seine-Saint-Denis est particulièrement concernée, notamment en cette période de crise sanitaire ; le taux d'incidence comme celui d'occupation des lits de réanimation y sont plus élevés que la moyenne nationale. Le taux de surmortalité y a atteint 134 % durant le pic de la pandémie de Covid-19, entre le 1er mars et le 19 avril 2020. La population de Seine-Saint-Denis s'est trouvée en première ligne, au travail et dans les transports en commun, pour que le pays puisse continuer à fonctionner. Elle est également davantage sujette aux comorbidités et à une contagion élevée, avec ses 20,6 % de logements surpeuplés, contre 5 % sur le reste du territoire.
Or, le département est le 12ème avec le moins de médecins généralistes, le 3ème avec le moins de lits de médecine dans les hôpitaux publics, et le 10ème avec le moins de lits médicalisés pour les plus de 75 ans. La Seine-Saint-Denis fait donc face à une véritable rupture de l'égalité républicaine dans le domaine de la santé, comme d'ailleurs dans les domaines de la justice et de l'éducation.
Dans ce contexte, le centre hospitalier intercommunal André Grégoire de Montreuil rencontre des difficultés multiples. L'hôpital ne comporte que douze lits de réanimation, alors qu'il couvre 9 villes et 400 000 habitants. Il rencontre également des difficultés financières, avec 98 millions d'euros de dette et un taux de 78 % d'endettement. La ville de Montreuil a d'ailleurs lancé une grande campagne de soutien à l'hôpital, qui a recueilli plus de 10 000 signatures. En effet, cette situation ne peut durer et il est impératif que la santé des populations de Montreuil et des alentours ne soit pas menacée.
En conséquence, il souhaite savoir, à la suite des annonces gouvernementales relatives à la reprise de la dette des hôpitaux, quand et dans quelle proportion la dette de l'hôpital intercommunal de Montreuil sera reprise et ce que le gouvernement prévoit pour relancer l'investissement dans cet hôpital et plus largement dans les hôpitaux de Seine-Saint-Denis.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles publiée le 04/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 03/06/2021

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, auteur de la question n° 1695, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Fabien Gay. Monsieur le secrétaire d'État : 100 000 ! C'est le nombre de lits d'hôpitaux qui ont été fermés ces vingt dernières années.

On voudrait aujourd'hui appliquer à l'hôpital public les logiques de gestion et de rentabilité qui prennent le pas partout dans notre société.

La qualité des soins, pourtant indispensable, coûte cher ? Il faut donc faire davantage d'actes, plus vite, coûter moins, réduire le temps d'occupation, accélérer le turnover et, bien entendu, fermer des lits.

Ce genre de logique entraîne une hausse des soins ambulatoires, donc un accroissement des risques de mauvaise guérison pour les patients, une prise en charge de moindre qualité, mais aussi un épuisement généralisé et une tension croissante pour les personnels, surchargés de travail et à bout de forces.

La pandémie de la covid-19 a mis au jour les failles de ces logiques, de manière brutale, et aggravé le phénomène.

C'est tout particulièrement le cas en Seine-Saint-Denis, où la population a été en première ligne, y compris pendant les confinements, au travail et dans les transports en commun, et où 20 % des logements sont surpeuplés.

Notre département est le douzième avec le moins de médecins généralistes, le troisième avec le moins de lits de médecine dans les hôpitaux publics et le dixième avec le moins de lits médicalisés pour les plus de 75 ans.

Entre le 1er mars et 19 avril 2020, la surmortalité y a été de 134 %.

En matière de santé, comme dans les secteurs de la justice et de l'éducation, la Seine-Saint-Denis souffre d'une rupture de l'égalité républicaine.

Le centre hospitalier intercommunal André-Grégoire de Montreuil fait face à des difficultés financières, avec 98 millions d'euros de dette et un taux d'endettement de 78 %.

Je rappelle que cet hôpital compte seulement 12 lits de réanimation, alors qu'il couvre 9 villes et 400 000 habitants. Son bon fonctionnement, tout comme les investissements pour le développer afin qu'il ait les capacités pleines et entières de remplir sa fonction de service public, est essentiel.

C'est en ce sens que la ville de Montreuil, sous la houlette de son maire Patrice Bessac, a lancé une campagne de soutien qui a déjà recueilli plus de 10 000 signatures.

Monsieur le secrétaire d'État, à la suite des annonces gouvernementales concernant la reprise de la dette des hôpitaux, pouvez-vous nous dire dans quelles proportions sera reprise celle de l'hôpital de Montreuil ? Comment prévoyez-vous de relancer l'investissement dans les hôpitaux de Seine-Saint-Denis, tout particulièrement dans cet établissement ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Adrien Taquet, secrétaire d'État auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargé de l'enfance et des familles. Monsieur le sénateur Gay, les constats que vous faites sont justes et interpellent bien évidemment quant aux difficultés du centre hospitalier intercommunal André-Grégoire, à Montreuil. Ce CHI compte de fait parmi les établissements les plus lourdement endettés de la région d'Île-de-France.

Au-delà de cette situation particulière, nous savons que l'hôpital public dans son ensemble fait face à un certain nombre d'enjeux pressants. Le Gouvernement en est parfaitement conscient et son action depuis 2017, en particulier ces derniers mois au travers du Ségur de la santé et de son volet « investissement », montre bien sa détermination.

Élément phare de notre stratégie, la mesure relative à la restauration des marges financières, destinée à alléger le poids de la dette qui pèse sur les établissements de santé, est mise en œuvre dès cette année. Elle doit passer par un contrat entre l'agence régionale de santé (ARS) et l'établissement, dont la signature doit intervenir au plus tard le 31 décembre 2021.

Les montants précis seront connus progressivement, au rythme de la signature de ces contrats. Je peux néanmoins d'ores et déjà vous indiquer que l'aide versée au CHI de Montreuil devrait se situer aux alentours de 20 millions d'euros.

Je tiens par ailleurs à rappeler que ce CHI fait l'objet depuis déjà de nombreuses années d'une attention toute particulière de la part des pouvoirs publics. Cette attention se traduit concrètement par le déploiement annuel d'aides financières de grande ampleur. Une aide pérenne depuis 2014 de 2 millions d'euros par an a ainsi été débloquée pour soulager l'établissement du poids d'un ancien emprunt toxique, de même que des aides en trésorerie, dont le montant annuel se situe entre 3 millions d'euros et 5 millions d'euros. La rénovation du service des urgences est également financée à 100 %, incluant le coût des équipements, pour un montant de 13 millions d'euros. Enfin, ce CHI bénéficie d'aides historiques à l'investissement, pour 1,9 million d'euros par an.

Le groupement hospitalier de territoire Grand Paris Nord-Est, dont fait partie le CHI de Montreuil, finalise par ailleurs actuellement, en coopération étroite avec l'ARS, son projet de transformation immobilière afin d'offrir aux personnels une meilleure qualité de vie au travail et un cadre de prise en charge rénové pour la population.

Cette vaste opération immobilière, d'un montant estimé à plus de 600 millions d'euros, fait partie des projets prioritaires soutenus par l'ARS en Île-de-France. Elle est bien entendu liée à l'opération de rénovation globale des sites des hôpitaux universitaires de Seine-Saint-Denis, qui assurera une modernisation de l'offre de soins sur ce territoire de santé. Les habitants et les élus l'attendent ; le ministère des solidarités et de la santé s'y attelle.

M. le président. La parole est à M. Fabien Gay, pour la réplique.

M. Fabien Gay. Monsieur le secrétaire d'État, en Seine-Saint-Denis, on ne fait pas l'aumône, on souhaite simplement l'égalité républicaine.

Si vous êtes véritablement attentif à ce territoire, arrêtez de fermer des lits en pleine pandémie – Jean-Verdier, Bichat-Beaujon – et investissez au moins autant que dans les autres départements franciliens. Nous voulons juste la même chose que les autres – pas plus !

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