Question de M. HINGRAY Jean (Vosges - UC) publiée le 29/07/2021

M. Jean Hingray attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur les grandes difficultés qu'éprouvent les exploitants agricoles à se situer dans la cartographie des aides et donc à en bénéficier.
Les agriculteurs sont éligibles à des aides compensatoires de l'Union européenne selon leur localisation dans la carte des zones agricoles défavorisées. Ces zones sont des territoires présentant des handicaps spécifiques (économiques, agricoles, physiques et démographiques), naturels et permanents, liés au relief, à l'altitude, à la pente et aux sols, dans lesquels le maintien de l'activité agricole est nécessaire à l'entretien de l'espace naturel. La réglementation européenne distingue 3 types de zones agricoles défavorisées : les zones de montagne ; les zones soumises à des contraintes naturelles importantes (ZSCN) ; les zones soumises à des contraintes spécifiques (ZSCS). Il se trouve que, dans un certain nombre de département de l'hexagone, les exploitations se répartissent entre ces 3 typologies selon des frontières géographiques difficiles à comprendre. À titre d'exemple dans le département des Vosges, la distinction montagne, piémont, plaine pourrait à la rigueur être opérante mais la répartition géographique entre ZSCN et ZSCS ne recoupe pas ces réalités voire est susceptible de créer des lignes de partage au sein d'une même exploitation. Ajoutons que ces zonages ne tiennent pas compte des zones dites « intermédiaires » qui sont absents des zonages européens. En effet, les territoires de plaine sont contraints par des conditions physiques de sols et de climats qui ne relèvent pas des zonages existants. Présentes dans plusieurs départements de l'hexagone, ces zones intermédiaires ont pourtant vocation à bénéficier d'un accompagnement équivalent. Constituées de nombreuses exploitations pratiquant polyculture ou élevage, celles-ci participent efficacement à l'aménagement du territoire et au maintien et développement de nos filières agro-alimentaires. Et la diversité des cultures proposées alliée à des activités d'élevage définit un modèle particulièrement résilient pour s'adapter aux changements climatiques que nous subissons.
Il lui demande de contribuer à rendre le fléchage des aides compensatoires de l'Union européenne en faveur des exploitations agricoles plus explicite et opératoire.

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Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 07/10/2021

Les zones défavorisées simples (ZDS) avaient été définies à la fin des années 1970 en se fondant sur des critères socio-économiques mais aussi, parfois, d'opportunité. Un rapport de la Cour des comptes européenne de 2003 avait pointé l'utilisation de critères non harmonisés conduisant à des situations très disparates au sein de l'Union européenne et à un classement contestable dans un certain nombre de cas. Une révision était donc nécessaire pour pérenniser les soutiens prévus aux agriculteurs de ces zones, en particulier l'indemnité compensatoire de handicaps naturels (ICHN) en assurant une homogénéité de traitement pour les agriculteurs européens. Le règlement européen n° 1305-2013 relatif au soutien au développement rural par le fonds européen agricole pour le développement rural obligeait l'ensemble des États membres à réviser leur zonage avant la fin de l'année 2019. Des discussions ont donc été engagées dès 2016 avec les professionnels agricoles et les régions afin d'établir ce nouveau zonage, qui se compose de deux parties : - une première partie, les « zones soumises à contraintes naturelles » (ZSCN), qui découle de l'application stricte de critères européens biophysiques et climatiques, sur laquelle il n'y a pas de marge de discussion. La carte établie sur la base de ces critères a été soumise à l'approbation du centre commun de recherche de la Commission européenne ; - une deuxième partie, les « zones soumises à contraintes spécifiques » (ZSCS), sur laquelle la prise en compte de certaines spécificités est permise. Ainsi, dans le respect du plafond de 10 % du territoire pouvant être classé sous cette catégorie, le caractère extensif de l'élevage dans certains territoires, ou encore certaines particularités d'intérêt pour l'environnement ou le paysage (présence de haies ou parcellaire morcelé, présence de surfaces peu productives ou de zones humides, zones soumises à déprise agricole, ou encore insularité) ont été prises en compte. La détermination des différents critères étudiés et retenus a fait l'objet d'une concertation étroite avec l'ensemble des organisations professionnelles agricoles. Un réglage fin est appliqué de manière transversale à l'ensemble de ces critères. Il permet de s'assurer que les territoires soumis à contraintes n'ont pas surmonté par ailleurs leurs handicaps. Il s'opère en comparant aux valeurs moyennes nationales, les valeurs locales de la production brute standard (PBS), du chargement des exploitations d'élevage et du rendement du blé. Le projet de zonage présenté par la France a été adopté par la Commission européenne le 27 février 2019. Les textes réglementaires nationaux, c'est-à-dire le décret n° 2019-243 du 27 mars 2019 relatif à la révision des critères de délimitation des zones agricoles défavorisées autres que les zones de montagne, et l'arrêté du 27 mars 2019 portant délimitation des zones agricoles défavorisées, ont été publiés le 29 mars 2019 permettant ainsi l'entrée en vigueur du nouveau zonage au 31 mars 2019. Le classement en zone de montagne repose sur des règles différentes, qui relèvent des cadres réglementaires européen et français. Les critères à respecter sont les suivants : - une altitude moyenne supérieure ou égale à une valeur minimale, variable entre les massifs, supérieure à 600 mètres dans les Vosges, 800 mètres dans les versants méditerranéens, 700 mètres dans les autres massifs ; - ou bien une pente moyenne supérieure ou égale à 20 % ; - ou bien une combinaison pente/altitude, avec une altitude minimale supérieure à 500 mètres et une pente moyenne minimale de 15 %. Dans le cas d'une combinaison pente/altitude, une évaluation de handicap pente/altitude (HPA) peut être utilisée. Cette évaluation est opérée par l'institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (INRAE), qui calcule une note HPA en fonction de la topographie du territoire. Le critère combiné est considéré comme respecté dès lors que le HPA est supérieur ou égal à 2 et qu'un des sous-critères -altitude minimale de 500 mètres et pente moyenne minimale de 15 %- est lui aussi respecté. Le calcul par l'INRAE des pentes, des altitudes et du HPA du territoire considéré est un préalable à tout classement en zone de montagne. Si les critères calculés sont respectés, le classement peut être étudié sur des bases agricoles, économiques et géographiques montrant le caractère montagnard du territoire. Les différents critères applicables aux ZSCN, ZSCS et aux zones de montagne s'attachent donc à prendre en compte la réalité biophysique et technico-économique des territoires, ce qui peut conduire à obtenir différents zonages au sein d'une même exploitation agricole. Pourtant, ces critères sont les seuls à pouvoir confirmer que la décision de classement repose sur des critères objectifs, fondés sur des données fiables, exhaustives. Ils sont par ailleurs validés par la Commission européenne. Les « zones intermédiaires » constituent, quant à elles, des zones où les conditions agro-climatiques sont peu favorables. Si le zonage des zones intermédiaires n'est pas défini dans la réglementation européenne, ces zones peuvent être concernées par un zonage en ZDS ou en zone de montagne dès lors qu'elles respectent les critères de classement. Elles sont dans certains cas classées en ZSCS ou ZSCN. La situation des exploitations agricoles des zones intermédiaires est une priorité du ministère de l'agriculture et de l'alimentation. La future politique agricole commune (PAC) est résolument tournée vers la création de valeur sur les territoires. Les arbitrages du ministère de l'agriculture et de l'alimentation sur la future PAC, annoncés à l'occasion des conseils supérieurs d'orientation des 31 mai et 13 juillet 2021 permettent ainsi d'apporter un soutien particulier aux zones à faible potentiel agronomique, telles que les zones intermédiaires, notamment au travers du maintien de l'ICHN. Un montant de 30 millions d'euros de mesures agro-environnementales et climatique sera, en outre, spécifiquement déployé en direction de ces zones. Enfin, pour faire face à la crise, le Gouvernement a aussi décidé d'inscrire le soutien aux secteurs agricoles comme une priorité du plan de Relance national dont le volet agricole est doté de 1,2 milliard d'euros. Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation invite l'ensemble des agriculteurs en difficulté à se saisir de cette opportunité qui permettra, notamment, d'accompagner la transition de leurs exploitations vers un modèle durable, respectueux de l'environnement et économiquement robuste.

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