Question de Mme DARCOS Laure (Essonne - Les Républicains) publiée le 27/01/2022

Mme Laure Darcos appelle l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées sur les difficultés d'accès des jeunes porteurs de handicap accueillis dans les instituts médico-professionnels (IMPro) au statut d'apprenti. La faculté des métiers de l'Essonne a mis en place, depuis plusieurs années, un dispositif dit « passerelle bleue » dont l'objectif est de préparer des jeunes porteurs de handicap cognitif à se former par la voie de l'apprentissage dans un des champs professionnels proposés, cuisine-restauration, carrosserie, vente, boulangerie, logistique, espaces verts, maçonnerie, peinture bâtiment et propreté. Les jeunes en IMPro, dont le handicap nécessite un accompagnement éducatif, thérapeutique et professionnel relevant d'un établissement du secteur médico-social, ont la possibilité d'accéder à ce dispositif pour préparer un titre professionnel, et de percevoir une rétribution. Ils ont alors le statut de stagiaires de la formation professionnelle. En revanche, en fin de parcours « passerelle bleue », dès lors qu'ils décident de préparer un certificat d'aptitude professionnelle, ils rencontrent un obstacle pour accéder au statut d'apprenti et, partant, de salarié. Cette difficulté d'accès au statut d'apprenti représente un facteur d'exclusion sociale et professionnelle inacceptable à l'heure où se mène le combat pour une société plus inclusive. Aussi, elle lui demande si le Gouvernement envisage une réponse appropriée pour mettre fin à cette situation douloureusement vécue par les jeunes concernés.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 16/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2022

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, auteure de la question n° 2104, adressée à Mme la secrétaire d'État auprès du Premier ministre, chargée des personnes handicapées.

Mme Laure Darcos. Madame la ministre, la faculté des métiers de l'Essonne (FDME) propose aux jeunes, aux salariés, aux demandeurs d'emploi et aux entreprises une offre élargie de formation par la voie de l'apprentissage et de la formation professionnelle. Elle est actuellement le plus grand centre de formation d'apprentis du sud francilien : 3 000 apprentis sont formés chaque année dans de très nombreux métiers, du certificat d'aptitude professionnelle (CAP) au bac+5.

Parce que la faculté des métiers est consciente de son rôle essentiel en matière d'insertion, elle accorde une attention toute particulière au public en situation de handicap. C'est ainsi qu'elle a mis en place depuis plusieurs années un dispositif dit « passerelle bleue », dont l'objectif est de préparer des jeunes porteurs de handicap cognitif à se former par la voie de l'apprentissage dans un des champs professionnels proposés, notamment la restauration, la carrosserie, la vente, la boulangerie, la logistique, les espaces verts ou bien encore le bâtiment.

Durant cette année de « passerelle bleue », une adaptation pédagogique personnalisée est mise en place, qui donne lieu à une individualisation des parcours et à la réalisation d'un accompagnement médico-psychosocial.

Au terme de celle-ci, les jeunes poursuivent leur formation par leur entrée en CAP. La signature d'un contrat d'apprentissage avec une entreprise sensibilisée à la problématique du handicap permet la formation en alternance. Or les jeunes des instituts médico-professionnels se trouvent face à une injustice tout à fait intolérable qui m'a été signalée par cette faculté des métiers. En effet, lorsqu'ils décident de préparer un CAP, ils rencontrent un obstacle pour accéder au statut d'apprenti et, ce faisant, de salarié.

Cette difficulté d'accès au statut d'apprenti représente un facteur d'exclusion sociale et professionnelle inacceptable à l'heure où se mène le combat pour une société plus inclusive.

Aussi, ma question est la suivante, madame la ministre : quelle réponse pouvez-vous proposer pour mettre fin à une situation douloureusement vécue, comme vous pouvez l'imaginer, par les jeunes concernés ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. Madame la sénatrice, je vous réponds au nom de Mme Sophie Cluzel, retenue par d'autres obligations.

Je veux tout d'abord saluer votre engagement, que chacun connaît, sur ce sujet. L'apprentissage est l'une des priorités du Gouvernement ; en témoigne le prolongement jusqu'en juin 2022 de la prime octroyée, dans le cadre du plan France Relance, aux entreprises qui recrutent un apprenti.

Il est vrai que, pour les personnes en situation de handicap, l'apprentissage est un véritable levier vers l'emploi durable. Il permet non seulement d'améliorer leur niveau de formation initiale, mais aussi de mettre en place des parcours de reconversion professionnelle pour des adultes dont le handicap est survenu en cours de vie ou bien s'est aggravé.

Plus que d'inciter les employeurs, notre ambition est d'éviter de mener une politique « à part » pour ces personnes. Les centres de formation d'apprentis (CFA) de droit commun doivent pouvoir accueillir toutes les personnes, quelle que soit la situation de handicap rencontrée.

La loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel oblige tout CFA à avoir un référent handicap chargé de mettre en œuvre des adaptations techniques, matérielles et pédagogiques, des heures de soutien individualisé, un aménagement des sélections, etc. Depuis la réforme de la formation professionnelle, ces accompagnements sont financés et ne sont plus à la charge des CFA.

Nous déployons également un accompagnement spécifique vers l'emploi pour éviter les ruptures professionnelles, lequel est particulièrement adapté au public de la « passerelle bleue » puisqu'il vise des situations de handicap psychique – troubles de l'autisme et du neurodéveloppement ou déficience intellectuelle.

Un expert de ces troubles suit la personne tout au long de son parcours, en amont, en apprentissage, puis en poste. Il fait le lien avec son environnement professionnel, qui ne sait pas toujours bien appréhender ces handicaps invisibles.

Enfin, le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dit 3DS, pose le principe d'une délivrance automatique de la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) pour les jeunes de plus de 16 ans déjà accompagnés dans le cadre des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH). Il s'agit précisément de faire en sorte que soient mis en place dès leur entrée en apprentissage tous les moyens nécessaires à la sécurisation de leur parcours de formation.

Ces mesures commencent à porter leurs fruits. Les derniers chiffres du chômage confirment la baisse continue du nombre de demandeurs d'emploi handicapés, entamée depuis novembre 2019, tandis que le nombre d'apprentis en situation de handicap a bondi de 79 % entre 2019 et 2021.

M. le président. La parole est à Mme Laure Darcos, pour la réplique.

Mme Laure Darcos. J'accompagnais votre collègue Sophie Cluzel lors de sa visite à la faculté des métiers de l'Essonne ; malheureusement, ce n'est qu'après notre venue que m'a été rapportée cette injustice.

De fait, vous n'avez pas totalement répondu à ma question ; c'est pourquoi je la poserai une nouvelle fois à votre collègue. Il importe que les jeunes issus des instituts médico-professionnels puissent accéder, au moment de l'obtention de leur diplôme, au statut d'apprenti, puis de salarié. C'est là qu'il y a un « trou dans la raquette ». J'insiste donc, en vous demandant de relayer ce message à votre collègue. Vous souhaitez tout comme nous que notre société soit véritablement plus inclusive ; or, en l'espèce, quelque chose ne va pas.

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