Question de Mme GACQUERRE Amel (Pas-de-Calais - UC) publiée le 10/02/2022

Mme Amel Gacquerre attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique sur le financement des agences de l'eau. Les dernières lois de décentralisation ont confié les compétences « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » (GEMAPI), « assainissement » et « eau potable » aux intercommunalités sans que ces transferts soient toujours accompagnés de financements correspondants. Aussi, en complément des subventions que reçoivent des agences de l'eau, beaucoup d'intercommunalités ont instauré une contribution GEMAPI afin d'accélérer les programmes d'investissement. Or aujourd'hui, le financement des opérations prévues devient critique du fait de la baisse annoncée des subventions aux agences de l'eau.
Déjà, en 2018, le Gouvernement décidait d'accroitre l'écrêtement du produit des redevances sur l'eau pour financer les opérateurs du ministère de l'environnement. De même, en 2021, dans le cadre du plan « France relance », les crédits des agences de l'eau ont été fortement mobilisés sur des actions qui n'étaient pas prévues dans leurs programmes pluriannuels.
Et, sans surprise, ces deux décisions ont entraîné d'importantes difficultés financières pour les agences de l'eau qui, en l'absence d'un soutien de l'État, ont indiqué qu'elles seraient contraintes d'appliquer l'austérité et de réduire, de manière inédite, les financements qu'elles accordent aux intercommunalités et à leurs syndicats, ce qui va, manifestement, à l'encontre de la nécessaire adaptation au changement climatique et aux impératifs de la préservation de la ressource en eau !
À titre d'exemple, sur le territoire de la communauté d'agglomération Béthune-Bruay Artois Lys Romane, le syndicat en charge de la préservation de la ressource en eau et de la prévention des inondations perdra en moyenne 3,4 millions d'euros chaque année. L'agence de l'eau Artois-Picardie a en effet décidé, en 2021, de réduire son taux de subventionnement des opérations prévues au programme d'actions de prévention des inondations (PAPI), entraînant une perte de 8 millions d'Euros. De même, l'agence ne subventionnera plus les travaux de renouvellement des réseaux d'eau potable représentant une perte de 1,5 millions d'euros. Et, en ce qui concerne la lutte contre l'érosion, la perte sera également à 1,5 millions d'euros.
Au total, jusqu'en 2024, les pertes financières s'élèveront à près de 11 millions d'euros et toutes les agglomérations du bassin Artois-Picardie sont concernées par ces pertes de financement dans le même ordre de grandeur.
Certes, une augmentation de la contribution GEMAPI est possible. Pour exemple, pour compenser le manque, la communauté d'agglomération Béthune-Bruay devrait l'augmenter de 50 € par foyer fiscal. Cela remettrait alors en cause les effets de la suppression de la taxe d'habitation !
En cette période où la préservation du pouvoir d'achat des habitants est une préoccupation de l'ensemble des élus, ce n'est pas une voie envisageable pour la plupart des collectivités locales qui ont déjà pris leur responsabilité en instaurant, pour beaucoup d'entre elles, la contribution GEMAPI.
Les capacités financières des agences de l'eau doivent donc être pérennisées pour répondre aux engagements pris.
Aussi, elle lui demande s'il lui est possible d'affirmer que l'État n'entend pas se désengager totalement du financement des agences de l'eau. La prévention des inondations et la préservation de la ressource en eau est effectivement l'affaire de tous. Elle n'est pas uniquement celle des territoires soumis aux aléas climatiques. Une part du financement de ces actions doit continuer de relever de la solidarité nationale et donc de l'aide apportée aux agences de l'eau.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Transports publiée le 16/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 15/02/2022

M. le président. La parole est à Mme Amel Gacquerre, auteure de la question n° 2132, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Amel Gacquerre. Ma question s'adresse à Mme la ministre de la transition écologique et concerne le financement des agences de l'eau.

Les dernières lois de décentralisation ont confié les compétences de gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (Gemapi), d'assainissement et d'eau potable aux intercommunalités. Or, une fois de plus, ces transferts n'ont pas été suivis des financements correspondants.

Aussi, en complément des subventions des agences de l'eau, un grand nombre d'intercommunalités ont pris leurs responsabilités et ont instauré une contribution Gemapi, afin d'accélérer leurs programmes d'investissement.

Aujourd'hui, le financement des opérations prévues est menacé en raison de la baisse annoncée des subventions des agences de l'eau.

Pour rappel, en 2018, le Gouvernement a décidé d'accroître l'écrêtement du produit des redevances pour financer les opérateurs du ministère de l'environnement. En 2021, dans le cadre du plan France Relance, le Gouvernement a cette fois-ci fortement mobilisé les crédits des agences pour financer des actions qui n'étaient pas prévues dans leurs programmes pluriannuels.

Depuis ces deux décisions, les agences de l'eau connaissent de graves difficultés financières. Elles ont d'ailleurs indiqué qu'elles seraient contraintes, en l'absence d'un soutien de l'État, de réduire fortement le montant des aides qu'elles accordent aux intercommunalités et à leurs syndicats.

Je crois important d'illustrer mon propos par un exemple tiré de mon territoire, celui de la communauté d'agglomération de Béthune-Bruay, Artois Lys Romane.

En 2021, l'agence de l'eau Artois-Picardie a décidé de réduire son taux de subventionnement des opérations prévues au programme d'actions de prévention des inondations (PAPI). Elle ne subventionnera plus les travaux de renouvellement des réseaux d'eau potable et réduira son soutien à la lutte contre l'érosion.

En conséquence, le syndicat chargé de la préservation de la ressource en eau et de la prévention des inondations perdra en moyenne 3,4 millions d'euros chaque année. Au total, les pertes financières s'élèveront à près de 11 millions d'euros d'ici à 2024.

Pour répondre à ces difficultés, il serait certes possible d'augmenter la contribution Gemapi, mais la préservation du pouvoir d'achat des habitants est une préoccupation majeure de l'ensemble des élus, qui ne veulent pas envisager cette perspective.

La prévention des inondations et la préservation de la ressource en eau sont l'affaire de tous et non des seuls des territoires soumis aux aléas climatiques.

Pouvez-vous nous assurer, monsieur le ministre, que l'État maintiendra les capacités financières des agences de l'eau pour répondre aux engagements qui ont été pris ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Jean-Baptiste Djebbari, ministre délégué auprès de la ministre de la transition écologique, chargé des transports. Madame la sénatrice, vous interrogez Mme Pompili, qui, ne pouvant être présente ce matin, m'a chargé de vous répondre.

Comme nous avons pu en débattre le 25 janvier dernier, la mise en œuvre d'un plafond de recettes des agences de l'eau, qui a effectivement été abaissé en 2019, a permis de réduire d'environ 12 % la fiscalité appliquée à l'eau potable.

Ce nouveau plafond a conduit les comités de bassin à baisser le taux des redevances affectées aux agences de l'eau pour éviter d'avoir à reverser le trop-perçu au budget général de l'État. Tel était bien l'objet de cette mesure.

En parallèle de cette baisse, le Gouvernement a mis un terme aux prélèvements sur la trésorerie des agences de l'eau au profit du budget général de l'État.

Ces évolutions ont conduit à réduire le montant total des interventions des agences de l'eau de 12,63 milliards d'euros dans le cadre de leur onzième programme prévu pour la période 2019-2024, ce qui a ensuite nécessité un recentrage des aides.

S'agissant de la gestion des milieux aquatiques et de la prévention des inondations, les agences de l'eau restent mobilisées face à cet enjeu majeur qu'est le changement climatique. Les aides consacrées aux programmes d'actions de prévention des inondations ciblent prioritairement les ouvrages qui ont un effet positif sur les milieux naturels et le bon état des masses d'eau.

À titre d'exemple, sur le bassin Artois-Picardie, les taux d'aides s'élèvent à 40 % pour les ouvrages priorisés et à 20 % pour les autres. Le PAPI du bassin de la Lys bénéficiera dans les trois ans de la moitié des crédits réservés aux PAPI du bassin, soit 9 millions d'euros, dont une rallonge de 1,8 million d'euros de l'enveloppe initialement prévue.

En matière du petit cycle de l'eau, la communauté d'agglomération de Béthune-Bruay, Artois Lys Romane bénéficie également d'aides importantes de la part de l'agence en matière d'eau potable, d'assainissement et de gestion des eaux pluviales pour la période 2019-2021.

En 2021, les agences de l'eau ont également recouru aux crédits complémentaires du plan de relance, principalement au bénéfice des projets des collectivités en matière d'eau et d'assainissement.

Pour l'avenir, le rapport du sénateur Richard et du député Jerretie sur les besoins en financement des agences de l'eau, élaboré dans le cadre des travaux du Comité pour l'économie verte, contribue à la réflexion sur la définition d'une nouvelle trajectoire pour la dépense publique en matière d'eau et de biodiversité, notamment via la stratégie nationale pour la biodiversité, appelée Biodiversité 2030.

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