Question de Mme VOGEL Mélanie (Français établis hors de France - GEST) publiée le 17/02/2022

Question posée en séance publique le 16/02/2022

M. le président. La parole est à Mme Mélanie Vogel, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

Mme Mélanie Vogel. Selon les derniers chiffres qui ont été publiés, la progression des salaires en France sera cette année plus faible que l'inflation. Pour le dire simplement, les Françaises et les Français – ou du moins 99 % d'entre eux, les plus pauvres en premiers… – sont en train de s'appauvrir.

En même temps, les profits des grandes entreprises explosent : 137 milliards d'euros pour les entreprises du CAC 40 en 2021. En vingt ans, les dividendes distribués à leurs actionnaires ont augmenté de 269 %.

Est-ce un hasard ? Une fatalité ? Est-ce hors du champ de l'action politique ? Pas du tout. C'est le résultat, implacable et mécanique, d'une politique. Une politique qui encourage la concentration des richesses et fait le choix, conscient, de ne pas se donner les moyens de les redistribuer.

S'il y a bien un domaine où on ne peut pas faire du « en même temps », c'est la justice sociale. C'est mathématique, il n'y a pas d'argent magique. On ne peut pas enrichir les plus riches et, en même temps, redistribuer les richesses. Ce n'est pas possible.

Donc il faut faire un choix. Et ce choix, le Gouvernement l'a fait.

Vous nous dites que vous ne pouvez rien faire pour les salaires, mais supprimer l'impôt de solidarité sur la fortune, l'ISF, vous pouviez le faire… La flat tax, vous pouviez le faire… Baisser l'impôt des sociétés, vous pouviez le faire… Baisser les APL (aides personnalisées au logement), vous pouviez le faire… Baisser les allocations chômage, vous pouviez le faire…

Et pour la justice sociale ? Décider une hausse réelle du SMIC n'est pas possible… C'est possible en Allemagne, en Espagne et même au Royaume-Uni, qui a pourtant un gouvernement ultralibéral ; mais en France, non…

Conditionner les milliards d'euros d'aides publiques, ce n'est pas possible. Le RSA (revenu de solidarité active) pour les jeunes, ce n'est pas bien… Le revenu citoyen, non plus… Un bonus-malus fiscal écologique, ce n'est pas possible…

La vérité, c'est que tout cela est tout à fait possible ! (Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.) C'est possible, si on choisit la justice sociale et le partage des richesses.

M. Stéphane Piednoir. N'importe quoi !

Mme Mélanie Vogel. Madame la ministre, ma question est la suivante : pourriez-vous simplement assumer devant la représentation nationale le fait que, si les salaires ne progressent pas, c'est dû, non pas à la fatalité ou à la malchance, mais au résultat de choix politiques ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE.)


Réponse du Ministère du travail, de l'emploi et de l'insertion publiée le 17/02/2022

Réponse apportée en séance publique le 16/02/2022

M. le président. La parole est à Mme la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Mme Élisabeth Borne, ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion. Madame la sénatrice Mélanie Vogel, le Gouvernement est très attentif à la préservation du pouvoir d'achat des Français (Exclamations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.), alors que, partout dans le monde, la flambée des prix de l'énergie et l'inflation sont une source d'inquiétude.

Face à cette situation, nous avons pris très tôt un ensemble de mesures pour protéger les Français. Je pense à l'aide exceptionnelle de 100 euros pour les près de 6 millions de bénéficiaires du chèque énergie, à la mise en place d'un bouclier tarifaire sur les prix du gaz et de l'électricité, à l'indemnité inflation, qui bénéficie à près de 40 millions de Français, ou encore, plus récemment, à l'augmentation de 10 % du barème des indemnités kilométriques. (Nouvelles exclamations sur les mêmes travées.)

Je rappelle que l'ensemble de ces mesures représente près de 15 milliards d'euros.

Mme Marie-Noëlle Lienemann. Énorme !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Dans le même temps, les branches professionnelles et les entreprises doivent entendre les attentes des salariés concernant le pouvoir d'achat. C'est pour cette raison que, depuis l'automne, j'ai engagé un important travail avec la quarantaine de branches professionnelles dont les minima conventionnels sont inférieurs au SMIC.

Je rappelle d'ailleurs que nous sommes l'un des seuls pays au monde qui disposent d'un mécanisme de revalorisation automatique du SMIC et que celui-ci a permis une augmentation de 3,1 % au cours des derniers mois. (Murmures sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

M. Guy Benarroche. On ne s'en est pas rendu compte !

Mme Élisabeth Borne, ministre. Un tiers des branches que je viens d'évoquer a d'ores et déjà conclu un accord. Je pense notamment au secteur des hôtels, cafés et restaurants, qui a revalorisé de 16 % en moyenne sa grille salariale. Une bonne moitié de ces branches est encore en train de négocier. Bien évidemment, je suivrai avec attention ces négociations.

J'invite également les entreprises à se saisir de tous les outils de partage de la valeur. Je pense en particulier à la prime exceptionnelle de pouvoir d'achat, que nous avons prolongée jusqu'au 31 mars 2022 – elle a d'ores et déjà bénéficié à près de 4 millions de salariés au cours de l'année 2021. (Nouveaux murmures sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

Mme Éliane Assassi. Tout va bien, alors ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Pour conclure, madame la sénatrice, je voudrais vous dire que le meilleur outil pour protéger le pouvoir d'achat, c'est la croissance et l'emploi !

M. Guy Benarroche. Quelle croissance ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. Avec plus de 500 000 demandeurs d'emploi en moins au cours de l'année 2021, je pense que nous sommes sur la bonne voie ! (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – M. Pierre Louault applaudit également. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.)

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