Question de M. DÉTRAIGNE Yves (Marne - UC) publiée le 31/03/2022

M. Yves Détraigne souhaite appeler l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur la décision des Talibans d'interdire aux jeunes filles en Afghanistan d'aller au collège et au lycée.

Quelques heures seulement après avoir annoncé la réouverture des établissements scolaires aux filles – pour la première fois depuis la prise de pouvoir en août 2021 –, elles ont finalement été sommées de rentrer chez elles.

Ce n'est qu'une brimade supplémentaire imposée aux femmes après sept mois de gouvernance et elle s'ajoute malheureusement aux multiples restrictions déjà en place : exclusion de nombreux emplois publics, contrôle de l'habillement, interdiction de voyager seules…

Pourtant, la communauté internationale avait fait du droit à l'éducation pour tous une des conditions dans les négociations sur l'aide et la reconnaissance du régime des islamistes fondamentalistes. Plusieurs pays et des organisations avaient ainsi proposé de rémunérer les enseignants.

Aussi, il lui demande si le Gouvernement français – en lien avec ses partenaires européens – entend intervenir auprès des talibans pour que les Afghanes soient respectées, entendues et qu'elles occupent toute leur place dans le pays.

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Transmise au Ministère de l'Europe et des affaires étrangères


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 30/06/2022

La France suit avec la plus grande attention et préoccupation l'évolution de la situation humanitaire, sécuritaire et politique en Afghanistan. Elle condamne la multiplication des exactions et violations des droits de l'Homme et en particulier des droits des femmes par les Talibans depuis leur prise de pouvoir par la force, le 15 août 2021. Force est de constater qu'en dépit des assurances qu'ils avaient données, les Talibans répriment violemment les militants et militantes qui tentent de défendre leurs libertés publiques. Ils bafouent les droits les plus fondamentaux des Afghans, et en particulier des Afghanes, qu'ils s'appliquent à exclure systématiquement des sphères économique, politique, sociale et éducative du pays, comme le démontre leur récente interdiction aux filles d'enseignement secondaire, en contradiction avec leur engagement. Cette décision a été condamnée par la France, en coordination avec ses partenaires européens et internationaux. Nous avons ainsi, conjointement, appelé les Talibans à revenir sans délai sur leur décision, qui aura des conséquences lourdes pour les filles afghanes, la cohésion sociale du pays et son développement économique. Cette nouvelle interdiction affaiblit encore plus la crédibilité des Talibans auprès de la communauté internationale et leur souhait de reconnaissance et de légitimité.  Chaque citoyen afghan, garçon ou fille, homme ou femme, a un droit égal à une éducation à tous les niveaux, dans toutes les provinces du pays. Dans ce contexte de crise, nous sommes parvenus à ce jour à évacuer près de 3 650 Afghans et Afghanes et leurs familles, menacés en raison notamment de leur engagement pour la défense de leurs droits fondamentaux, dont un grand nombre de femmes et de filles. La France n'a de cesse d'appeler au respect des exigences fixées vis-à-vis des Talibans dans la résolution 2593 du Conseil de sécurité des Nations unies, et d'user des instruments dont elle dispose pour tenter d'infléchir la politique de répression talibane. C'est sur la base de cette résolution que nous exigeons des Talibans, aux côtés de nos partenaires, la levée des entraves pour celles et ceux qui souhaitent quitter le pays, et redoublons d'effort pour appeler au respect des droits humains, en particulier des filles et des femmes, à commencer par leur droit à l'éducation. L'aide au développement européenne et française, actuellement gelée, est également conditionnée au respect des conditions fixées dans cette résolution. Leur non-respect expose les Talibans à l'isolement international, alors qu'ils sont déjà ciblés par des sanctions internationales, mettant ainsi en échec leur souhait de reconnaissance et de légitimité aux yeux du monde. Ces instruments (sanctions, reconnaissance, aide publique au développement) sont des leviers majeurs dont nous ne devons pas nous priver. La France, qui a d'ores et déjà fourni une aide humanitaire exceptionnelle de 100 millions d'euros en soutien à la population afghane, a annoncé une contribution additionnelle de 23,5 millions d'euros le 31 mars dernier. Elle poursuivra son engagement aux côtés des Afghans, en particulier des femmes et filles, en réponse à la gravité des menaces et violations des droits fondamentaux qu'elles subissent, en vue de favoriser toutes les garanties possibles de sécurité et la préservation de leurs libertés.

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