Question de M. OUZOULIAS Pierre (Hauts-de-Seine - CRCE) publiée le 21/07/2022

M. Pierre Ouzoulias interroge Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur le soutien et la protection que le Gouvernement entend apporter à une sociologue française, menant des recherches en Turquie.
Le 21 juin 2022, la cour suprême de Turquie a rendu un arrêt d'annulation de son acquittement, la condamnant de fait à la prison à perpétuité. Injustement accusée d'avoir commis un attentat sur le marché d'Istanbul, en juillet 1998, elle a en réalité été emprisonnée puis torturée par l'État turc, en sa qualité de sociologue menant des recherches sur la situation des minorités en Turquie.
Innocentée à cinq reprises par la justice turque, après que le principal témoin ait avoué avoir livré son récit sous la contrainte de la torture, la décision de la cour suprême atteste de la volonté du pouvoir turc de réduire au silence les recherches universitaires jugées trop critiques à son encontre.
Exilée dans notre pays depuis 2011, ayant reçu la nationalité française en 2017, cette sociologue a soutenu sa thèse de doctorat à l'université de Strasbourg, avant de devenir enseignante à l'université Nice-Sophia-Antipolis. Ses travaux consacrés aux mouvements sociaux en Turquie font autorité dans le champ académique.
Il souhaite connaître les intentions du Gouvernement français suite à la décision de la cour suprême de Turquie. Il attire son attention sur les nécessaires protections que l'État français doit garantir à cette citoyenne et universitaire française.
Dans la lignée de la déclaration de Bonn, il l'interroge plus largement sur les actions qui seront les siennes pour préserver et promouvoir la liberté académique et l'autonomie de la recherche au sein de l'Union européenne et dans des instances internationales, telles que le Conseil de l'Europe, qui compte la Turquie parmi ses membres actifs.

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Réponse du Ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 01/12/2022

La sociologue française exilée en France depuis fin 2011, a pu bénéficier de la protection académique de la part de l'université de Strasbourg, obtenu le statut de réfugiée en 2013 et reçu la nationalité française en 2017. A ce titre, elle bénéficie de la protection de l'État sur le territoire national. De même, la sociologue a trouvé en France un espace pour s'exprimer, enseigner la sociologie et les sciences politiques en tant que maître de conférences à l'université Côte d'azur, et poursuivre son travail de recherche en toute liberté et sécurité au sein du laboratoire « unité de recherches migrations et société (URMIS) », unité mixte de recherche sous tutelle de l'université Côte d'azur, de l'université Paris cité, de l'Institut de recherche pour le développement (IRD, UMR 205) et du Centre national de la recherche scientifique (CNRS, UMR 8245). Le ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche s'appuie sur les principes juridiques que doivent respecter les États européens, notamment l'article 13 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne qui proclame : "Les arts et la recherche scientifique sont libres. La liberté académique est respectée. » La liberté des chercheurs doit être garantie partout dans le monde. Dans la lignée de la déclaration de Bonn, la France, à l'occasion de sa présidence du Conseil de l'Union européenne, a engagé un dialogue avec ses homologues européens dans le but de préserver la liberté de la recherche, de promouvoir effectivement les principes et valeurs de l'Union européenne et de favoriser un dialogue multilatéral (« déclaration de Marseille relative à la coopération internationale en matière de recherche et d'innovation » adoptée à l'occasion de la Conférence ministérielle organisée sous Présidence française, suivie de l'adoption de Conclusions du conseil le 10 juin 2022 sur les « valeurs et principes pour la coopération internationale dans la recherche et l'innovation »). La dynamique qui en résulte amènera d'autres travaux et la France continuera d'y jouer pleinement son rôle.

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