Question de M. LAURENT Daniel (Charente-Maritime - Les Républicains) publiée le 28/07/2022

M. Daniel Laurent attire l'attention de Mme la ministre de la transition énergétique sur les préoccupations de la filière cognac quant à l'approvisionnement en gaz naturel indispensable pour faire fonctionner les alambics, alors que débutera en novembre 2022 la campagne de distillation. En effet, une fois les cycles de distillation lancés, il est impossible de les arrêter. Une quinzaine d'opérateurs a une consommation d'énergie dépassant les 5 GWh/an, quand la consommation moyenne d'un alambic chauffé au gaz est autour de 600 kilowatts heure pour produire un hectolitre d'alcool. Dans l'hypothèse d'une campagne de distillation mal approvisionnée, l'impact serait très négatif sur l'ensemble de l'économie de la région délimitée cognac, non seulement pour 2022 mais également pour les années suivantes. Il convient de rappeler que le secteur des vins et spiritueux est le 2e secteur à contribuer à la balance commerciale de notre pays avec plus de 14 milliards d'euros d'excédent. La filière cognac attend des garanties pour que les volumes de gaz nécessaires soient disponibles. En conséquence, il lui demande quelles sont les moyens mis en œuvre pour éviter tout délestage.

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Réponse du Ministère de la transition énergétique publiée le 22/12/2022

La décision de la Russie de réduire fortement les exportations de gaz vers l'Europe fait peser une réelle menace sur la sécurité d'approvisionnement en gaz de l'Union Européenne et de la France. Le Gouvernement a mis en place, y compris de manière coordonnée au sein de l'Union Européenne, plusieurs mesures pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en gaz pour l'hiver 2022-2023 et pour les hivers suivants. Ainsi les stockages sont désormais remplis à 100 %, à plus de 130 TWh, soit plus de 25 % de la consommation annuelle française. Les capacités de débarquement de GNL dans les terminaux méthaniers français ont été renforcées sur les terminaux de Montoir, Fos et Dunkerque et un terminal méthanier flottant sera mis en place au Havre en 2023. Des mesures réglementaires ont été prises pour débloquer des projets de production de biométhane, notamment en prenant mieux en compte l'inflation qui menaçait leur équilibre économique. Des mesures de soutien renforcé à la rénovation énergétique, à la production de chaleur renouvelable et à la décarbonation de l'industrie ont été mises en place dès le printemps 2022, par exemple en augmentant le budget du fonds chaleur renouvelable à hauteur de 520 M€ en 2022 contre 370 initialement prévus. Enfin le plan de sobriété présenté le 6 octobre dernier comporte un ensemble de dispositifs de mobilisation pour les ménages (dont une campagne d'information sur les éco-gestes), pour les différents secteurs professionnels, d'actions d'accompagnement (par exemple le programme CEE ACTEE+ qui vise à accompagner les collectivités dans l'ingénierie de leurs projets de rénovation des bâtiments), de dispositifs financiers d'accompagnement et d'évolutions réglementaires, dans l'objectif de parvenir à une réduction de consommation d'énergie finale de 10 % d'ici deux ans. Du fait de l'ensemble de ces mesures, la France aborde l'hiver dans de bonnes conditions compte tenu du contexte. Cependant au-delà des mesures précédentes, notre situation d'approvisionnement peut varier en fonction de la rigueur climatique et des évolutions des approvisionnements externes, et nous devons donc préparer les mesures permettant de faire face à toutes les situations. En particulier des difficultés peuvent survenir en fin d'hiver, en cas de pointe de froid important, et si les stockages sont moins remplis, ce qui diminue alors mécaniquement leur capacité d'injection dans le réseau. Ainsi la préparation du délestage a pour but en cas de très forte demande qui ne pourrait être satisfaite par les importations, les émissions depuis les terminaux méthaniers et les stockages, de réduire rapidement la consommation de manière organisée pour éviter une baisse de pression brutale dans le réseau, amenant à un écroulement généralisé du réseau de gaz, ne pouvant être remis en service que sur plusieurs semaines et qui aurait des conséquences économiques, sociales et environnementales très lourdes. A la différence de l'électricité le délestage en gaz ne peut concerner que des gros consommateurs, qui sont prévenus individuellement de la nécessité de réduire leur alimentation, pour une courte période. Définies par le décret n° 2022-495 du 7 avril dernier, les modalités de délestage de la consommation de gaz naturel prévoient, en cas de nécessité, de réduire l'alimentation en gaz en premier lieu aux « consommateurs produisant de l'électricité (jusqu'au niveau d'alimentation susceptible de remettre en cause la sécurité d'approvisionnement en électricité) », puis « les consommateurs de gaz naturel consommant plus de 5 gigawattheures par an » qui n'assurent pas « des missions d'intérêt général liées à la satisfaction des besoins essentiels de la nation, en matière notamment de sécurité, de défense et de santé » ou qui ne sont pas « susceptibles de subir des conséquences économiques majeures en cas de réduction ou d'arrêt de leur consommation de gaz naturel » et enfin tous les autres consommateurs de gaz naturel. Ceci permettra d'établir un ordre de priorité dans la mise en œuvre d'un éventuel délestage. À Cognac, la filière a recensé une quinzaine d'opérateurs dont la consommation d'énergie dépasse les 5 GWh/an. Le fournisseur GRDF a mené au mois de juillet 2022 une enquête nationale pour établir la liste des « consommateurs sensibles économiquement ». Sur la base des informations, l'autorité compétente sera amenée à décider quels sont les consommateurs qui relèvent de la liste de ceux qui sont susceptibles de subir des conséquences économiques majeures en cas de réduction ou d'arrêt de leur consommation de gaz naturel. Il est important de manière générale pour les entreprises de la filière d'une part d'accélérer les actions d'économie d'énergie et de développement de moyens de chauffage décarbonés, que l'Etat peut soutenir financièrement, d'autre part d'étudier la mise en place de moyens permettant de faire face à d'éventuels délestages (même si ceux-ci seront exceptionels et de courte durée) ou même à des coupures inopinées de gaz qui peuvent survenir, par exemple en cas de situations accidentelles. La filière Cognac est engagée en faveur de l'innovation pour la décarbonation de ses procédés et la réduction de sa consommation de gaz, ce que le gouvernement encourage. Afin de suivre les prévisions de consommation par rapport à l'approvisionnement pour les jours à venir, les gestionnaires de réseau de transport ont développé le service Ecogaz, à l'instar du service EcoWatt pour l'électricité, ce qui permettra de prévoir les moments où des efforts de réduction volontaire seront nécessaires. Enfin, les gros consommateurs qui le souhaitent peuvent aussi conclure un contrat d'interruptibilité garantie avec le gestionnaire de réseau de transport de gaz. Cela permet d'avoir un préavis plus important pour réduire volontairement sa consommation en cas de risque sur le réseau (16h la veille) et d'être rémunéré pour cette action. Des arrêtés renforçant et précisant le dispositif ont été publiés début octobre. L'État a enfin mis en place un guichet d'aides simplifié pour faire face à l'augmentation des prix qui résulte de cette crise énergétique, et accessible à toute entreprise pour laquelle le prix de l'énergie a augmenté de plus de 50% sur la période de demande d'aide par rapport au prix moyen de 2021, et dont l'énergie sur la période de demande d'aide représente plus de 3% du Chiffre d'Affaires sur la même période en 2021.

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