Question de M. GILLÉ Hervé (Gironde - SER) publiée le 04/08/2022

M. Hervé Gillé attire l'attention de M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur la dégradation du pouvoir d'achat des ménages les plus modestes bénéficiant de l'aide alimentaire.
Le pays traverse une crise inflationniste depuis quelques mois. En juin 2022, la hausse des prix des produits alimentaires a été de 5,7 % sur un an selon l'institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), niveau record depuis 40 ans. Certains produits comme l'huile ou la viande ont subi des hausses de prix de plus de 10 %. Les ménages les plus modestes, notamment ceux bénéficiant de l'aide alimentaire, subissent de front les effets de l'inflation, faisant émerger de nouveaux profils en précarité alimentaire.

Une enquête flash réalisée par les banques alimentaires, premier réseau d'aide alimentaire en France accompagnant 2,2 millions de personnes, en témoigne : l'inflation affecte fortement le comportement d'achat des plus modestes, par une hausse de leurs dépenses alimentaires pour au moins la moitié des foyers. Or, l'alimentation constitue la première variable d'ajustement du budget quotidien des ménages.
Par conséquent, les familles modestes se reportent massivement vers les produits discount pour compenser l'inflation alimentaire. La demande concernant les denrées les plus coûteuses telles que les fruits et légumes, ou la viande a été renforcée.

Le projet de loi visant à protéger le pouvoir d'achat des ménages face à l'inflation a été présenté par l'exécutif en conseil des ministres début juillet. Il inclut ainsi une aide alimentaire d'urgence (ou prime inflation) de 100 € majorée de 50 € par enfant, devant être versée à la rentrée aux foyers les plus modestes.
Cette mesure reste soumise avant tout à l'approbation du budget rectificatif par l'Assemblée nationale, où le Gouvernement ne dispose que d'une majorité relative. Ensuite, elle n'aura une portée que restreinte. Elle est en effet limitée en montant, et en un seul versement. Elle ne couvrirait que 5 % des dépenses annuelles de nourriture d'une famille de quatre personnes, sur la base d'un budget alimentaire minimal calculé par les banques alimentaires.

Le chèque alimentaire quant à lui, peine à voir le jour. Il avait été décidé lors de la crise du covid en période hors inflation. Son objectif premier était de permettre l'accès aux familles modestes à des produits locaux et de qualité. Un problème de temporalité persiste : annoncé fin 2020, le chèque alimentaire ne sera mis en place qu'en 2023, les modalités faisant encore l'objet d'études.

Ainsi, il lui demande pourquoi la question de l'aide alimentaire, dont le caractère d'urgence est avéré, reste aujourd'hui encore en suspens. D'autre part, il l'interroge sur les moyens qu'il compte employer lors de la mise en place de cette aide, essentielle au quotidien pour les foyers en difficulté, afin d'en garantir sa pérennité.

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Transmise au Ministère des solidarités et des familles


Réponse du Ministère des solidarités et des familles publiée le 26/10/2023

Dans le contexte économique de hausse des prix notamment s'agissant des denrées alimentaires, le Gouvernement est particulièrement mobilisé pour engager en 2022 plusieurs mesures fortes visant à lutter contre la précarité alimentaire, faire face à l'accroissement des files actives des associations et à compenser les conséquences de la hausse des prix et les baisses de dons de la grande distribution. Ainsi, un effort important en faveur de l'aide alimentaire pour aider les associations de solidarité a été financé en 2022 à hauteur de 95 M€ de crédits supplémentaires obtenus en lois de finances rectificatives et se décomposant de la façon suivante. Un soutien exceptionnel de 55 M€ de crédits supplémentaires a été accordé au programme budgétaire consacré à la lutte contre la précarité alimentaire en août 2022, soit un doublement des crédits initialement prévus (56 M€ inscrits en loi de finances initiale 2022). Ces crédits exceptionnels avaient pour objectif de compenser la quasi-intégralité de la perte de ressources des associations qui ont été mises en difficulté par des marchés européens infructueux (avec + 28,5 M€ pour financer des achats directs auprès des producteurs), de doubler les crédits locaux disponibles pour soutenir les associations de proximité (11,5 M€) et de tenir compte de la vulnérabilité particulière des territoires d'outre-mer (avec + 15 M€) pour les associations locales d'aide alimentaire. Outre ces crédits, 40 M€ complémentaires ont été ouverts en fin d'année pour l'aide alimentaire, se répartissant en deux enveloppes. Une enveloppe de 10 M€ pour lutter spécifiquement contre la précarité alimentaire des étudiants ayant fait l'objet d'annonces ministérielles en novembre 2022, dont 3,5 M€ accordés au niveau national, les 6,5 M€ restants étant délégués aux services déconcentrés pour la mise en oeuvre d'actions en lien avec les Rectorats et les Crous. Une seconde enveloppe de 30 M€, qui doit se déployer début 2023, est quant à elle destinée à faire face à la hausse des dépenses énergétiques, à l'inflation des prix des denrées et à l'accroissement du nombre de bénéficiaires de l'aide alimentaire. Le Gouvernement a par ailleurs mis en place une aide exceptionnelle de solidarité (AES), votée en 2022 par le Parlement, qui est une nouvelle « prime inflation », qui a été versée à 11 millions de ménages. D'un minimum de 100 euros, elle est majorée de 50 euros par enfant à charge, elle est destinée à soutenir le pouvoir d'achat de foyers les plus modestes. Plus précisément, 8 millions de foyers aux minima sociaux sont concernés, auxquels s'ajoutent 2,8 millions de ménages touchant la prime d'activité. Les étudiants boursiers sont aussi concernés. Cela concerne plus de 1,5 million d'étudiants en France. En 2023, la mobilisation de l'Etat en faveur de la lutte contre la précarité alimentaire se concrétise par la mise en place d'un fonds pour une aide alimentaire durable au travers du programme « mieux manger pour tous ». Ce fonds d'amorçage doté de 60 M€ en 2023, a vocation à financer des approvisionnements supplémentaires en denrées de qualité des associations habilitées pour l'aide alimentaire et à promouvoir de nouvelles solidarités alimentaires au niveau local. Ces moyens nouveaux s'inscrivent dans la suite des travaux de la convention citoyenne pour le climat et de la loi Egalim et sont ancrés au sein du Comité de coordination de la lutte contre la précarité alimentaire (COCOLUPA). Les objectifs de cette politique sont d'assurer une alimentation saine et diversifiée aux personnes en situation de vulnérabilité économique ou sociale, mais aussi de favoriser leur inclusion sociale. Le programme « mieux manger pour tous » est réparti en deux volets : le volet national (40 millions d'euros), et le volet local (20 millions d'euros). Le volet national a pour but d'enrichir l'offre de l'aide alimentaire en fruits et légumes, légumineuses, et produits sous labels de qualité, afin de favoriser l'accès des plus démunis à des denrées plus saines et durables. Le volet local, piloté par les services déconcentrés, répond à l'objectif de développement d'alliances locales de solidarité alimentaire permettant aux plus modestes l'accès à une alimentation saine et durable. Il vise à soutenir des expérimentations de chèques alimentation durable mais aussi à encourager la participation à des Projets Alimentaires Territoriaux (PAT) soutenant des actions portant la transformation de l'organisation de la lutte contre la précarité alimentaire et la lutte contre les zones blanches de l'aide alimentaire. Ainsi, le programme Mieux manger pour tous visera à déployer des initiatives de type groupements d'achat en lien avec les bailleurs sociaux, et favorisera les expérimentations de chèques alimentaires locaux déployés par les collectivités et les associations.

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