Question de Mme IMBERT Corinne (Charente-Maritime - Les Républicains-R) publiée le 20/10/2022

Mme Corinne Imbert attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention concernant l'évolution inquiétante du phénomène de l'antibiorésistance. Apparue dès les années 40, l'antibiorésistance est la capacité d'un micro-organisme à résister aux effets des antibiotiques. À partir des années 2000, cette tendance s'est accélérée avec l'apparition des bactéries hautement résistantes. L'utilisation exponentielle des antibiotiques est la cause principale de ce phénomène et nous nous dirigeons probablement vers des impasses thérapeutiques dans le traitement de nombreuses maladies comme la méningite, les infections sexuellement transmissibles ou encore les infections de la peau. À terme, l'antibiorésistance pourrait devenir un phénomène mondial incontrôlable. Cette réalité est encore trop méconnue du grand public malgré une sensibilisation constante auprès de nos concitoyens. Aussi, lui demande-t-elle si le Gouvernement entend accélérer la prévention de ce phénomène et ainsi limiter les coûts humains et financiers dans les années à venir.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 14/12/2022

Réponse apportée en séance publique le 13/12/2022

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, auteure de la question n° 222, adressée à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Mme Corinne Imbert. Madame la ministre, en déposant cette question orale sur l'antibiorésistance – sujet que vous connaissez parfaitement –, je ne pensais pas que nous serions en pleine pénurie d'amoxicilline.

Apparue dès les années 1940, l'antibiorésistance se définit comme la capacité d'un micro-organisme à résister aux effets des antibiotiques. En raison du cocktail entre antibiotiques anciens et nouvelles bactéries, cette tendance s'est accélérée à partir des années 2000 avec l'apparition de bactéries hautement résistantes.

L'utilisation exponentielle des antibiotiques, en santé tant humaine qu'animale, est la cause principale de ce phénomène, et nous nous dirigeons probablement vers des impasses thérapeutiques dans le traitement de nombreuses maladies infectieuses.

L'antibiorésistance est un problème mondial, qui pourrait devenir incontrôlable. Cette réalité est encore trop méconnue du grand public, malgré une sensibilisation régulière de nos concitoyens et une mortalité attribuable à l'antibiorésistance en France estimée à 5 500 décès.

Madame la ministre, je souhaiterais savoir ce que le Gouvernement entend mettre en place, le cas échéant en concertation avec d'autres pays, afin de lutter efficacement et durablement contre l'antibiorésistance.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Madame la sénatrice, vous le savez, l'antibiorésistance est un phénomène naturel dont l'ampleur est fortement associée à une consommation trop importante d'antibiotiques. « Les antibiotiques, c'est pas automatique » : nous nous en souvenons tous.

La prévention de l'antibiorésistance appelle un engagement fort des pouvoirs publics, intégrant la santé animale et des écosystèmes, dans une approche globale. La feuille de route interministérielle dédiée, publiée en 2016, est ainsi en cours d'actualisation.

Des progrès sont à souligner : les prescriptions d'antibiotiques en ville ont baissé de 20 % entre 2009 et 2019 et la consommation en établissement connaît une tendance baissière.

Pour autant, notre consommation d'antibiotiques reste trois fois supérieure à celle des plus faibles consommateurs européens et les niveaux d'antibiorésistance sont toujours préoccupants en France.

Dans le sillage des plans précédents, le ministère de la santé a publié en février 2022 sa stratégie nationale 2022-2025 de prévention des infections et de l'antibiorésistance, avec une vision renouvelée et ambitieuse. Elle repose sur deux piliers complémentaires : le bon usage des antibiotiques et les actions de prévention et de contrôle des infections. Ne pas tomber malade réduit en effet le recours à l'antibiothérapie et donc l'antibiorésistance.

Les professionnels et citoyens y sont fortement associés, par une formation renforcée et des campagnes de communication dédiées.

Ces objectifs sont pilotés au niveau régional par les ARS, appuyées par des structures locales et des équipes mobiles. Ce maillage territorial fin est une spécificité française.

La France travaille également au développement de nouveaux produits luttant contre l'antibiorésistance, en complément d'une prévention renforcée.

Enfin, il convient de souligner le vif engagement international de la France sur ces thématiques, notamment à l'échelle européenne.

M. le président. La parole est à Mme Corinne Imbert, pour la réplique.

Mme Corinne Imbert. Je salue toutes les campagnes de sensibilisation qui sont effectivement conduites auprès du grand public. Elles sont indispensables, car la pandémie d'antibiorésistance est silencieuse. Il s'agit non pas d'un phénomène accessoire et limité dans le temps, mais bien d'un fléau qui pourrait, à terme, compromettre toutes les avancées réalisées dans le domaine de la médecine et de la recherche. Ce risque est parfois, à mon sens, trop sous-estimé.

Les coûts engendrés par l'antibiorésistance se chiffrent en centaines de milliards d'euros à l'échelle mondiale et, vous l'aurez compris, l'urgence est là.

« Les antibiotiques, c'est pas automatique » – la formule est en effet dans tous les esprits –, mais ce n'est pas magique non plus. Il faut un engagement de la part, à la fois, des prescripteurs et des pharmaciens. La bonne observance thérapeutique est évidemment essentielle.

Enfin, la dispensation à l'unité n'est pas forcément la bonne solution. Nous avons bien vu que l'expérimentation n'avait pas été véritablement concluante. Nous devons garder du bon sens.

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