Question de M. GAY Fabien (Seine-Saint-Denis - CRCE) publiée le 20/10/2022

M. Fabien Gay attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports sur la dégradation alarmante des transports en commun en Seine-Saint-Denis.
Déjà grandement pénalisés par les travaux en cours sur le CDG Express, les habitantes et habitants de Seine-Saint-Denis sont désormais particulièrement impactés par la pénurie de conducteurs qui sévit partout en Ile-de-France. Signe que la situation est grave, la présidence d'Ile-de-France Mobilités fait part d'un taux de 25 % d'offre de transports non réalisés par rapport à l'objectif fixé par le contrat qui lie la RATP et Ile-de-France Mobilités.

Depuis la rentrée, ces difficultés ont aggravé les problèmes déjà existants sur les lignes de bus en Seine-Saint-Denis et confrontent les voyageurs et voyageuses à des temps d'attente dépassant la demi-heure. Ces délais se répercutent directement sur les conditions d'accès des habitantes et habitants au travail, à l'école, et à tout type d'obligations pour lesquels les transports en commun sont souvent leur seul moyen de se rendre.

Il leur faut également faire face à des annulations de bus sans information préalable ni solution de report ; à des retards conséquents, ou encore à des défauts d'affichage dans les abris-bus.

Ces dysfonctionnements sont directement issus des difficultés de recrutement rencontrées par la RATP et par les autres opérateurs (le taux d'annulation des réseaux OPTILE s'élève à 7 ou 8 %). La privatisation en cours des réseaux de surface en Île-de-France fait d'ailleurs craindre une nette aggravation de la situation.

En effet, de nombreux mouvements de grève ont vu le jour en réaction à la première étape de la mise en oeuvre de la privatisation des réseaux de bus de grande couronne, dit réseau OPTILE, conduite par vagues depuis 2018. Alors que la deuxième étape décisive de cette privatisation a été lancée au printemps 2022, avec la publication des appels d'offres sur le réseau opéré par la RATP à Paris et en petite couronne, les salariés ont dû faire face à une remise en cause unilatérale des accords sur le temps de travail par la direction de la RATP.

Cette nouvelle régression a soulevé d'importants mouvements de grève et de protestation de la part des salariés de la RATP, qui s'opposent fortement à l'impact de l'ouverture à la concurrence sur leurs conditions de travail (accélération des cadences, perte de salaire, réduction des temps de pause).

Des centaines de démissions et d'abandons de postes ont d'ailleurs suivi cette seconde étape. La profession subit en plus les discours dégradants auxquels sont confrontés l'ensemble des salariés des services publics, qui accélèrent également sa perte d'attractivité.

Face à cette situation, de nombreux élus locaux, habitantes et habitants se mobilisent désormais aux côtés des salariés. A ce mouvement de solidarité s'ajoutent également des pétitions ayant recueilli des dizaines de milliers de signatures et des rassemblements pour qu'un service de bus fonctionnel soit rétabli, comme à Montreuil et sur le territoire d'Est Ensemble où les populations sont particulièrement mobilisées.

Il souhaite ainsi savoir quelles interventions du Gouvernement sont prévues afin que les voyageuses et voyageurs des bus de Seine-Saint-Denis puissent retrouver des conditions décentes de transport. Il se demande également quel bilan sur les conditions de travail et effectifs de conducteurs et conductrices de bus ressort des premières étapes de mise en concurrence des transports en Île-de- France. Il s'interroge enfin sur les possibilités, dans le cadre juridique actuel, de mettre un terme à la mise en concurrence des opérateurs de transports publics urbains en Île-de-France.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports publiée le 16/11/2023

L'organisation des transports publics de personnes en Île-de-France relève d'une compétence dévolue à Île-de-France Mobilités (IDFM), qui contractualise avec les opérateurs de transports pour assurer la production de l'offre. Le secteur des transports routiers connaît, depuis plusieurs années, d'importantes difficultés de recrutement, en particulier parmi les conducteurs. La RATP, qui compte 15 000 machinistes-receveurs, est également confrontée à ce phénomène. Le recrutement de conducteurs est donc un enjeu crucial pour assurer la qualité de service des dessertes par bus en Seine-Saint-Denis et plus globalement sur tout le territoire francilien. La RATP est mobilisée pour limiter l'impact de cette situation exceptionnelle et préparer dans les meilleures conditions possibles le retour à un service nominal. L'entreprise a mis en oeuvre en 2022 un ambitieux plan de recrutement de conducteurs de bus, métro et RER (accélération des recrutements, campagne de communication, partenariats avec les Pôles Emplois locaux et les mairies, job dating …). Ces efforts portent leurs fruits, avec un redressement de la production depuis décembre 2022. Pour 2023, la RATP a annoncé une campagne de recrutements sans précédent : 6 600 agents seront embauchés afin d'assurer le retour à l'offre de transport nominale mais aussi de couvrir un plan de transport renforcé dans la perspective des grands événements sportifs de 2023 et 2024. Outre les conducteurs de bus, métro et RER, cette campagne vise le recrutement sur les métiers en tension, en particulier la maintenance. Par ailleurs, la RATP a engagé l'élaboration de plans d'actions visant à renforcer la qualité de vie au travail et à faciliter la conciliation entre vie personnelle et vie professionnelle des conducteurs. L'ouverture à la concurrence des services de transport collectifs franciliens relève de la loi du 8 décembre 2009 relative à l'organisation et à la régulation des transports ferroviaires (dite loi ORTF) et de la loi du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire. Ce cadre national découle du règlement (CE) n° 1370/2007 du 23 octobre 2007 relatif aux services publics de transport de voyageurs par chemin de fer et par route, également désigné règlement sur les obligations de service public (ROSP). Ces textes fixent le calendrier d'ouverture des transports collectifs franciliens jusqu'en 2040 : le 1er janvier 2021 pour les lignes de grande couronne (réseau de bus Optile), le 1er janvier 2025 pour les services réguliers de transport routier à Paris et en petite couronne (réseau historique de la RATP), le 1er janvier 2030 pour les services réguliers par tramway, le 1er janvier 2040 pour les autres services réguliers de transport guidé. Un aménagement du calendrier d'ouverture à la concurrence sur les bus fait actuellement l'objet d'une proposition de loi en cours de discussion au Parlement. Le calendrier d'ouverture à la concurrence a été défini après une large concertation avec l'ensemble des parties prenantes, au terme de laquelle le Gouvernement a pris des engagements forts visant à assurer un cadre social protecteur pour l'ensemble des agents concernés. Ainsi, des règles particulières en matière de durée de travail et de repos ont notamment été prévues, sous certaines conditions, pour les conducteurs et conductrices de bus amenés à intervenir dans la zone dense urbaine francilienne afin de tenir compte des contraintes d'exploitation qui pèsent sur eux. Par ailleurs, s'agissant de l'ouverture à la concurrence des lignes de grande couronne du réseau de bus Optile intervenue à compter du 1er janvier 2021, IDFM a travaillé sur un projet de cahier des charges imposant aux employeurs des exigences sociales renforcées. Ce cahier pourra le cas échéant également être utilisé par l'autorité organisatrice dans le cadre des mises en concurrence des lignes de bus aujourd'hui exploitées par la RATP et qui doivent devenir effectives à compter du 1er janvier 2025, date à compter de laquelle il sera possible de recueillir les éléments utiles à un possible bilan.

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