Question de Mme GRÉAUME Michelle (Nord - CRCE) publiée le 10/11/2022

Mme Michelle Gréaume attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les condition de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle pour les communes des Hauts de France touchées par la tornade d'octobre 2022.

La région des Hauts-de-France a été frappée le 23 octobre 2022 par de très violents orages et une tornade d'une intensité rarissime (EF3) et d'une étendue exceptionnelle selon les observations de l'observatoire français des tornades et des orages violents (Keraunos).

Sur un couloir de plus de 147 kilomètres allant de la Somme au Hainaut belge, de nombreuses communes, exploitations agricoles, maisons particulières, équipements publics ont été endommagés par des vents et des rafales enregistrés entre 220 et 270 km/h. Le village de Bihucourt dans le Pas-de-Calais a été le plus touché ; 30 maisons sur 233 sont d'ores et déjà déclarées inhabitables.

Malgré ces éléments, la force des vents et les dégâts considérables enregistrés, il semble que l'état de catastrophe naturelle ne sera pas reconnu, le phénomène observé n'entrant pas strictement dans les caractéristiques fixées par le code des assurances.

Une subtilité difficilement acceptée et comprise par les communes, les sinistrés, qui pour certains voient disparaître le fruit d'années de travail ou d'économies, qui ne peuvent être indemnisés qu'au titre des garanties prévues par les contrats d'assurance, excluant nombre de dégâts et de dommages subis, et au prix d'une franchise.

Au-delà, elle met en évidence l'inadéquation des règles et critères qui régissent aujourd'hui le système de caractérisation des catastrophes naturelles, au regard de la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes : tornades, sécheresse, inondations, mouvements de terrain... dont le nombre devrait progresser de 50 % d'ici à 2050, selon plusieurs études.

Il y a urgence à adapter, clarifier, renforcer l'indemnisation et la prévention, ainsi que le préconisait déjà en 2019 le rapport de la mission sénatoriale « Catastrophes climatiques : mieux prévenir, mieux reconstruire » adopté à l'unanimité.

En conséquence, elle lui demande de bien vouloir lui indiquer, d'une part, les intentions du Gouvernement à ce sujet, et d'autre part, d'accorder le bénéfice du classement en état de catastrophe naturelle aux communes touchées par la tornade d'octobre 2022.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des collectivités territoriales et de la ruralité publiée le 30/11/2022

Réponse apportée en séance publique le 29/11/2022

Mme la présidente. La parole est à Mme Michelle Gréaume, auteure de la question n° 253, adressée à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Mme Michelle Gréaume. Madame la ministre, les Hauts-de-France ont été frappés, en octobre dernier, par une tornade d'une intensité et d'une étendue exceptionnelles, selon l'observatoire français des tornades et orages violents Keraunos.

Sur un couloir de 206 kilomètres allant de la Normandie au Hainaut belge, des exploitations agricoles, des maisons particulières, des équipements publics de 102 communes ont été endommagés par des vents et des rafales enregistrés entre 220 et 270 kilomètres par heure.

Le village de Bihucourt, dans le Pas-de-Calais, a été dévasté. Malgré la force de ce phénomène hors norme et les dégâts considérables, le ministre de l'intérieur a d'emblée annoncé que l'état de catastrophe naturelle ne serait pas reconnu, ce que le préfet a ensuite confirmé, le phénomène observé n'entrant pas strictement dans les caractéristiques fixées par le code des assurances.

Plus précisément, si certaines rafales ont bien dépassé 215 kilomètres par heure, elles se sont concentrées sur un périmètre physique et temporel limité et non pendant dix minutes ou en rafales. Vous admettrez avec moi, madame la ministre, que cette subtilité peut difficilement être comprise et acceptée par les communes, et encore moins par les sinistrés, dont certains ont vu disparaître en moins de dix minutes le fruit d'années de travail ou d'économies.

Ne pouvant bénéficier du régime de l'état de catastrophe naturelle, ces derniers ne pourront être indemnisés qu'au regard des garanties prévues dans leur contrat d'assurance, au titre de la garantie tempête, dont nombre de dégâts et dommages sont exclus. Certains sinistrés n'étaient même pas assurés, faute de moyens financiers suffisants.

Soyons clairs : la formidable solidarité et les autres dispositifs d'aide ne suffiront pas à effacer les préjudices subis.

Cette situation, qui n'est pas isolée, met en évidence l'inadéquation des règles et critères régissant le système de caractérisation des catastrophes naturelles au regard de la multiplication des phénomènes climatiques extrêmes – tornades, sécheresse, inondations, mouvements de terrain… – dont les conséquences sont de plus en plus lourdes et dont le nombre devrait augmenter de 50 % d'ici à 2050.

Il est urgent d'adapter, de clarifier et de renforcer notre régime d'indemnisation, que d'aucuns jugent dépassé et qui ne permet pas aux victimes d'obtenir une pleine et juste réparation. Le Sénat, qui mène un travail important sur cette question depuis plusieurs années, a posé les bases de possibles réformes, y compris en matière de prévention des risques.

Madame la ministre, quelles sont les intentions du Gouvernement à ce sujet ? Comptez-vous accorder le bénéfice de l'état de catastrophe naturelle aux communes sinistrées en octobre dernier ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. Madame la sénatrice Michelle Gréaume, le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, s'est rendu dans le village de Bihucourt quelques heures après ces événements dramatiques afin de témoigner du soutien du Gouvernement aux victimes.

Les tornades et, plus largement, l'ensemble des phénomènes venteux violents sont en effet exclus du régime de la garantie catastrophe naturelle dès lors qu'elles ne sont pas associées à un événement cyclonique.

En revanche, les dégâts sur les biens assurés des particuliers, des entreprises et des collectivités, causés par ces vents violents, sont couverts dans le code des assurances par un régime de garantie dédié, la garantie tempête.

Contrairement à ce que vous affirmez, le régime de la garantie tempête n'est pas moins généreux que celui de la garantie catastrophe naturelle. Rendue obligatoire par le législateur dans chaque contrat d'assurance, à l'instar de la garantie catastrophe naturelle, la garantie tempête permet aux sinistrés d'être indemnisés par leur assureur sans qu'aucune intervention préalable des pouvoirs publics soit nécessaire.

L'État mobilise par ailleurs d'autres dispositifs d'aide au profit de certaines catégories de sinistrés, tels que le régime des calamités agricoles pour les agriculteurs ou la dotation de solidarité en faveur des équipements publics non assurables pour les collectivités territoriales.

Enfin, sur l'initiative du ministre de l'intérieur, 22 000 euros de crédits de secours d'extrême urgence ont été mobilisés en quelques jours au profit des trente-trois familles de Bihucourt dont les habitations ont été durablement endommagées par la tornade, afin de leur permettre de faire face à leurs besoins de toute première nécessité.

Vous le voyez, le Gouvernement est pleinement mobilisé et déterminé à répondre à la souffrance des propriétaires sinistrés.

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