Question de M. LEVI Pierre-Antoine (Tarn-et-Garonne - UC) publiée le 17/11/2022

M. Pierre-Antoine Levi attire l'attention de Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les conséquences de la réforme de la sélection en master 1 sur les concours de niveau bac + 4. En effet, dans les facultés de droit et de science politique, la sélection des étudiants intervient, depuis la rentrée de septembre 2020, dès le master 1. Cette réforme est bénéfique pour les étudiants qui, dans l'ancien système, seraient passés en master 1 sans obtenir un master 2. L'étudiant qui n'avait pas été retenu, malgré l'obtention de son master 1, devait trouver un master 2 loin de son université d'origine, accepter un master 2 dans une spécialité qui n'était pas la sienne, ou abandonner l'université en passant des concours ouverts par exemple aux bacs + 4.
Aujourd'hui, avec la sélection en master 1, l'étudiant qui n'arrive pas à passer la sélection peut engager des démarches auprès des services rectoraux pour qu'une place dans un master 1 lui soit proposée. Le Gouvernement a d'ailleurs mis en place un site internet intitulé « trouver mon master.fr ».
Cependant, si l'étudiant ne parvient pas à trouver de master 1, c'est précisément à ce moment qu'il subit les travers de la réforme : lorsqu'il va choisir la voie du concours et arrêter son cursus universitaire. En fermant les portes du master 1 par la nouvelle sélection, cette réforme prive les étudiants qui souhaiteraient passer un concours où un examen de niveau bac + 4 : alors que les étudiants de l'ancien système pouvaient le faire.
Il attire son attention, notamment, sur le centre régional de formation professionnelle des avocats (CRFPA), l'école nationale de la magistrature, le concours de commissaire contrôleur des assurances, celui d'ingénieur des ponts, des eaux et des forêts, etc. Ainsi, il souhaite savoir ce que compte faire le Gouvernement pour remédier aux conséquences de la réforme de la sélection en master 1.

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Réponse du Ministère auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargé de l'organisation territoriale et des professions de santé publiée le 14/12/2022

Réponse apportée en séance publique le 13/12/2022

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, auteur de la question n° 264, adressée à Mme la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.

M. Pierre-Antoine Levi. Ma question porte sur les conséquences de la réforme du master sur les concours de niveau bac+4.

Madame la ministre, comme vous le savez, dans les facultés de droit et de sciences politiques, la sélection de nos étudiants en master intervient, depuis la rentrée de septembre 2020, dès le master 1.

Cette réforme est bénéfique pour les étudiants qui, dans l'ancien système, seraient passés en master 1 sans obtenir un master 2. En effet, si le passage en master 1 était automatique dès lors que vous validiez votre licence, le passage en master 2 se révélait compliqué, car c'était le moment où survenait la sélection. L'étudiant qui n'avait pas été retenu, malgré l'obtention de son master 1, devait trouver un master 2 loin de chez lui, accepter un master dans une spécialité qui n'était pas la sienne ou tout simplement abandonner l'université.

Certes, avec la sélection, nous pouvons nous réjouir que les étudiants admis en master 1 aillent automatiquement en master 2 après validation de leur quatrième année. Mais ce système a aussi ses travers.

C'est une réforme qui touche principalement les facultés de droit. Il faut bien avoir à l'esprit que, dans cette discipline, les étudiants choisissent aussi la voie des concours. Or, en resserrant l'accès au master 1, cette réforme pénalise de nombreux étudiants qui souhaiteraient passer un concours ou un examen de niveau bac+4.

Je pense tout d'abord au célèbre certificat d'aptitude à la profession d'avocat (Capa) : un étudiant qui n'a pas de bac+4 ne pourra pas passer cet examen et ne deviendra donc jamais avocat. Dès lors, il subira la double peine : pas de master 1 en raison de la sélection et pas de concours qui nécessite une qualification à bac+4. Et, dans le domaine du droit, il y en a beaucoup.

Voici quelques exemples de professions : commissaire contrôleur des assurances, ingénieur des ponts, des eaux et des forêts, inspecteur de la jeunesse et des sports ou encore puéricultrice de catégorie A. Bien entendu, je n'oublie pas non plus le concours de l'École nationale de la magistrature (ENM).

Ainsi, ma question est la suivante : que compte faire le Gouvernement pour remédier à cette conséquence négative de la réforme des masters ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé. Monsieur le sénateur, je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser ma collègue Sylvie Retailleau, en déplacement en Guyane.

La réforme instituée par la loi du 23 décembre 2016 a adapté le deuxième cycle de l'enseignement supérieur français au système licence-master-doctorat (LMD), conformément au processus de Bologne. Il s'agissait d'harmoniser les systèmes nationaux européens d'enseignement pour permettre une reconnaissance des diplômes nationaux dans tout l'espace européen d'enseignement supérieur.

L'objectif était double : permettre à chaque étudiant inscrit en première année de master d'achever son cursus sans subir de sélection entre la première et la seconde année ; et offrir à chaque titulaire du diplôme national de licence une poursuite d'étude, via notamment le dispositif de saisine du recteur.

Vous appelez notre attention sur les conséquences de cette réforme sur les concours. À la demande des ministères employeurs ou des ordres professionnels concernés, nombre d'entre eux exigent déjà un niveau master : c'est le cas des concours de l'enseignement, des concours de commissaire de police et de commissaire de justice.

Pour l'examen d'accès aux centres régionaux de formation professionnelle d'avocats (CRFPA), la profession souhaite également que le master devienne le diplôme requis.

Par ailleurs, s'il est important de mettre en adéquation le niveau de formation requis avec la nouvelle architecture des diplômes, en réalité, la plupart des candidats aux concours ont déjà un master.

Enfin, un certain nombre de concours de catégorie A, voire A+, restent accessibles au niveau licence. C'est notamment le cas du concours d'entrée à l'Institut national du service public (INSP).

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi, pour la réplique.

M. Pierre-Antoine Levi. Madame la ministre, j'entends votre réponse. Il n'en est pas moins vrai que la réforme des masters provoque la détresse de milliers d'étudiants : les intéressés nous sollicitent sans cesse et j'espère également que vous les entendez.

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