Question de M. HENNO Olivier (Nord - UC) publiée le 15/12/2022

Question posée en séance publique le 14/12/2022

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Olivier Henno. Les zones à faibles émissions (ZFE) sont une idée européenne séduisante, mais dont l'application est particulièrement complexe. J'y vois une incohérence environnementale, une injustice sociale, une fracture territoriale, voire générationnelle, et un choix industriel incertain.

J'y vois une incohérence environnementale tout d'abord, car il me paraît excessif de faire peser sur le seul citoyen automobiliste la responsabilité du réchauffement climatique ou des émissions de particules dans les villes. Il ne faudra pas longtemps avant que l'on ne dise que le responsable du réchauffement climatique, c'est la mobylette de l'ouvrier !

J'y vois ensuite une injustice sociale, car ce sont les plus modestes qui sont impactés. Il suffit d'aller dans les quartiers pour constater que les véhicules ont des vignettes 4 et 5 !

J'y vois également une fracture territoriale, voire générationnelle, car ce sont les habitants des campagnes, ceux de la ruralité et du périurbain, qui sont concernés. Ainsi, un couple de retraités qui a depuis plusieurs années une Clio diesel ne peut plus aller voir ses enfants en ville.

J'y vois enfin un choix industriel incertain, car l'industrie automobile européenne n'est pas prête à une mutation aussi rapide vers les véhicules électriques : 30 % de cette industrie est en danger.

Quelle est votre vision des ZFE, de leur application et de leurs conséquences ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC. – M. Sébastien Meurant applaudit également.)


Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports publiée le 15/12/2022

Réponse apportée en séance publique le 14/12/2022

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. Clément Beaune, ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports. Monsieur le sénateur Henno, permettez-moi de revenir d'un mot sur l'objectif des zones à faibles émissions.

Elles ne sont pas en soi une volonté d'empêcher toute une partie de notre population d'accéder aux centres urbains. Ces zones sont nées d'une nécessité constatée et votée par le Parlement il y a quelques années dans deux textes législatifs : la loi d'orientation des mobilités et la loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

Ces deux textes visent à mettre en place progressivement – j'insiste sur ce point – dans quarante-trois métropoles françaises de plus de 150 000 habitants des zones en laissant aux collectivités locales concernées une très grande flexibilité. C'est un outil entre les mains des collectivités locales, qui doit être adapté à la réalité de chacune des métropoles et des agglomérations.

Le calendrier de mise en place de ces zones n'est pas prédéfini, sauf pour les métropoles dépassant les normes de qualité de l'air. Il s'agit précisément de réduire les effets de ces émissions sur la qualité de l'air afin d'éviter les plus de 45 000 morts dus chaque année à cette pollution.

La flexibilité s'étend aussi aux modalités de circulation décidées par chacune des collectivités, avec une différenciation importante qui sera précisée et définie par les métropoles.

L'État jouera un rôle d'accompagnement pour parer aux risques que vous identifiez à juste titre, monsieur le sénateur, qu'ils soient sociaux, générationnels ou territoriaux. C'est la raison pour laquelle nous avons déployé progressivement en lien avec les métropoles des aides pour que la mise en place des ZFE s'opère le mieux possible : aides à l'acquisition de véhicules, bonus écologique, prime à la conversion.

Nous avons décidé dans le projet de loi de finances pour 2023 soumis au Sénat et à l'Assemblée nationale de porter à 7 000 euros le bonus pour les ménages les plus modestes. Nous avons aussi décidé – c'était une idée de plusieurs sénatrices et sénateurs – d'expérimenter un prêt à taux zéro dans les zones à faibles émissions de deux métropoles. Nous sommes prêts à étendre cette mesure dans les prochains mois, selon des modalités que nous examinerons ensemble.

Nous devrons bien évidemment renforcer nos accompagnements et travailler avec les métropoles, mais le dispositif est flexible et il est entre les mains de ces collectivités. C'est à elles qu'il revient de décider du calendrier le plus adapté possible. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à M. Olivier Henno, pour la réplique.

M. Olivier Henno. Monsieur le ministre, je ne doute pas de votre bonne foi ni de votre bonne volonté. Permettez-moi néanmoins quelques observations. Il ne faudra pas longtemps avant que les ZFE ne deviennent des « zones à forte exclusion ». (Exclamations sur les travées du groupe RDPI.) Il y a dans cette écologie culpabilisante une obsession de la communication et un mépris social plutôt qu'un souci du bien public. C'est quand même la France des « clopes » et du diesel que l'on regarde encore de haut. (Mêmes mouvements. – M. Frédéric Marchand s'agace.) Il y a dans tout cela un germe de « gilets jaunes » ! (Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.)

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