Question de M. BAZIN Arnaud (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 15/12/2022

M. Arnaud Bazin attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le non-respect de l'article 521-1-2 du code pénal en ce qu'il concerne les atteintes sexuelles sur animaux détenus et de l'article 521-1-3 du même code. En effet, des images zoophiles sont toujours diffusées sur internet et des propositions d'actes constitutifs d'atteintes sexuelles sur un animal sont toujours accessibles en ligne.

Contactée par une association, la fédération française des télécommunications, qui regroupe trois des quatre principaux fournisseurs d'accès à internet (FAI), dit attendre une décision judiciaire pour retirer les sites avec des contenus zoopornographiques au motif qu'une absence de neutralité leur serait reprochée en l'absence d'une telle décision, conformément à la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique.
Aussi, il souhaiterait connaître la position du ministère sur ce point.
De surcroît, ces images étant susceptibles d'être vues par des mineurs, une quatrième infraction s'ajoute conformément à l'article 227-24 du code pénal, en sus des délits d'atteintes sexuelles sur animaux, d'enregistrement et de diffusion d'images de cette infraction.
Le 10 novembre 2022, le Président de la République a annoncé le lancement d'un « laboratoire pour la protection de l'enfance en ligne », réunissant une série d'acteurs internationaux, plateformes, organisations non gouvernementales et régulateurs, afin de répondre à l'exposition croissante des mineurs à la pornographie, au harcèlement et à la violence en ligne. Ce laboratoire doit identifier les « bonnes façons de réguler et de mieux protéger nos enfants en ligne », a souligné le chef de l'État, ce qui implique « d'être plus efficaces pour retirer les contenus ».
Il souhaiterait donc s'assurer que ce laboratoire œuvrera également afin de protéger les enfants des images pornographiques impliquant un ou plusieurs animaux.
Concernant la non-application de l'article 521-1-3, il s'avère que les petites annonces de personnes proposant ou cherchant des animaux pour des actes sexuels persistent.
Il semble effectivement difficile d'atteindre les personnes à l'origine de ces petites annonces lorsqu'elles les déposent par le biais de réseaux sociaux ou de boites mails.
Avisé de cette problématique, lors de l'examen en séance de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, il a déposé un amendement (amendement 124 rectifié bis) afin que soient « punis des mêmes peines les sites internet qui diffusent des propositions et des sollicitations d'actes à caractère sexuel sur des animaux, y compris si ces infractions n'ont pas donné lieu à la condamnation de leurs auteurs ».
Cet amendement, adopté alors puis retiré en commission mixte paritaire (CMP), avait reçu un avis défavorable du Gouvernement au motif que, « en l'état actuel du droit, il existe déjà une complicité à l'infraction de sévices sexuels aux termes de l'article 121-7 du code pénal ».
Il souhaiterait donc avoir confirmation que, conformément audit article, les sites diffusant des petites annonces zoophiles sont pénalisables au titre de la complicité.
Enfin, dans un souci d'efficacité maximale, il souhaiterait savoir si la plate-forme d'harmonisation, d'analyse, de recoupement et d'orientation des signalements (Pharos), visant à faciliter le signalement, par les internautes, de contenus illicites mis en ligne quel que soit le support est bien habilitée à recevoir les signalements de contenus d'atteintes sexuelles sur animaux, que ce soit des vidéos ou des petites annonces.

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Réponse du Ministère de la justice publiée le 09/03/2023

Le ministre de la Justice partage la légitime préoccupation de voir les procédures judiciaires engagées à l'encontre des actes de cruauté exercés envers les animaux. La loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes, est ainsi venue renforcer les mesures visant à lutter contre la maltraitance des animaux domestiques et des animaux sauvages et améliorer leurs conditions de détention. Le texte a permis également de renforcer les sanctions déjà prévues par le code pénal en cas de sévices graves ou d'actes de cruauté envers un animal domestique. Les sévices graves envers les animaux (prévus par l'article 521-1 du code pénal) constituent désormais un délit réprimé d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. De même, l'article 521-1-1 dans le code pénal, réprime d'une peine de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende les atteintes sexuelles sur un animal domestique, apprivoisé ou tenu en captivité. A titre de peine complémentaire, les personnes physiques coupables des infractions prévues au présent article encourent également les peines d'interdiction, à titre définitif, de détenir un animal et d'exercer une activité professionnelle ou sociale dès lors que les facilités que procure cette activité ont été sciemment utilisées pour préparer ou commettre l'infraction. La loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 est également venue renforcer la lutte contre la diffusion de contenus illicites en lien avec ce type d'atteintes commises sur des animaux. L'article 521-1-2 alinéa 2 du code pénal vient réprimer de deux ans d'emprisonnement et de 30 000 euros d'amende, le fait de diffuser sur internet l'enregistrement de telles images. La répression est également étendue au fait de solliciter ou de proposer la mise à disposition d'un animal dans un but zoophile, sur un site de rencontres par exemple (article 521-1-3 du code pénal). Dans ce cadre et conformément aux dispositions prévues par la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique (LCEN) les fournisseurs d'accès et les hébergements sont soumis à une triple obligation : de surveillance, de mise en place d'un dispositif de signalement, et de mise en place d'un dispositif de filtrage. Pour autant, la LCEN, conformément à la directive du 8 juin 2000 (art. 15, 1), précise qu'il n'existe pas, pour les fournisseurs d'accès et d'hébergement, d'obligation générale de surveillance des informations qu'ils transmettent ou stockent, ni d'obligation générale de rechercher des faits ou des circonstances révélant des activités illicites. La jurisprudence de la Cour de cassation est d'ailleurs venue rappeler ce principe (Civ. 1re, 12 juill. 2012, nos 11-13.666, 11-15.165, 11-15.188, 11-13.669). Cette absence d'obligation générale de surveillance ne fait cependant pas obstacle aux décisions des autorités publiques compétentes. La loi du 21 juin 2004 prévoit ainsi que l'autorité judiciaire peut prescrire en référé ou sur requête au fournisseur d'hébergement ou, à défaut au fournisseur d'accès, toutes mesures propres à faire cesser le dommage occasionné par le contenu d'un service de communication au public en ligne, notamment un contenu zoo-pornographique, considéré comme attentatoire à la dignité humaine. En cas de non-respect de cette obligation, des poursuites judiciaires pourraient être engagées sur le fondement de la complicité de la diffusion sur internet de telles images aux termes de l'article 121-7 du code pénal. Afin d'endiguer ces phénomènes, la plateforme de signalement PHAROS permet également de répertorier les contenus frauduleux mis en ligne, relatifs à des actes de cruauté envers les animaux. Ainsi, en 2022, 413 signalements se rapportant à des faits de sévices sur animaux ont été reçus par la plate-forme. Après analyse, sous l'autorité du parquet compétent, ces contenus zoophiles ou zoo-pornographiques font l'objet d'une transmission aux fins d'enquête à l'office central de lutte contre les atteintes à l'environnement et à la santé publique (OCLAESP), lequel dispose depuis 2022 d'une unité dédiée à la lutte contre les maltraitances faites aux animaux. Le Gouvernement demeure également particulièrement attentif à la protection des mineurs en ligne en matière d'accès à des contenus illicites. La loi du 30 novembre 2021 est ainsi venue compléter l'article 227-24 du code pénal qui réprime de trois ans d'emprisonnement et de 75000 euros d'amende le fait de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu'en soit le support, un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d'un tel message, lorsque ce message est susceptible d'être vu ou perçu par un mineur. Afin de préserver les mineurs de certains contenus diffusés en ligne, l'article 6 de la LCEN met également à la charge des personnes dont l'activité est d'offrir un accès à des services de communication au public en ligne, l'obligation d'informer leurs abonnés de l'existence de moyens techniques permettant de restreindre l'accès à certains services. Les opérateurs ont ainsi l'obligation de mettre en place des dispositifs de contrôle parental pour permettre aux parents de protéger leurs enfants face aux risques d'exposition à des images ou informations violentes ou pornographiques. De surcroît, la loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 fait obligations aux grandes plateformes de partage et sites de réseaux sociaux dotés d'une certaine affluence, d'obligations renforcées telles que l'obligation d'information et de coopération à l'égard des autorités judiciaires ou administratives, l'obligation de mise à disposition au public de leur politique et de leurs moyens mis en œuvres en matière de lutte contre les contenus illicites, l'obligation d'évaluation des risques systémiques liés au fonctionnement et à l'utilisation de leurs services ou encore l'obligation de mise en place de dispositifs de notification des contenus illicites facilement accessibles pour leurs utilisateurs. Enfin, le 10 novembre 2022, à l'initiative du président de la République, la Charte du Laboratoire pour la protection de l'enfance en ligne a été adoptée. Ce laboratoire doit permettre d'explorer, de promouvoir, de développer et d'évaluer des solutions qui visent à améliorer la sécurité des mineurs dans l'environnement digital. Le laboratoire a notamment pour objectif d'aborder des thèmes pertinents pour l'amélioration de l'environnement numérique des enfants, tels que l'âge approprié pour accéder aux contenus. Par ailleurs, il est prévu que le laboratoire soit rendu destinataire des propositions d'améliorations concrètes afin d'aider à élaborer les politiques publiques et pour développer de nouvelles fonctionnalités pour rendre les services numériques plus sûrs pour les utilisateurs les plus vulnérables.

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