Question de Mme MERCIER Marie (Saône-et-Loire - Les Républicains) publiée le 26/01/2023

Mme Marie Mercier attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur le harcèlement scolaire. En France, les chiffres révèlent que 800 000 à un million d'élèves seraient victimes de harcèlement, soit entre 6 à 10 % d'entre eux. Ces violences perdurent bien souvent en dehors du cadre éducatif avec le développement des nouvelles technologies et des réseaux sociaux. S'agissant plus particulièrement des violences sexuelles, son amendement, voté dans la loi n° 2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales, qui impose aux sites pornographiques gratuits le contrôle de l'âge de leurs visiteurs, s'inscrit parfaitement dans ce contexte d'actualité que nous devons déplorer. L'accès à la pornographie pour les enfants et les adolescents doit en effet être prohibé et condamné tant les conséquences pour ces derniers sont nombreuses et dramatiques. Terrible constat, la tranche d'âge la plus touchée par ce fléau est celle des enfants de 3 à 6 ans - agresseurs et agressés. Pour la quasi-totalité des affaires impliquant des mineurs auteurs, il n'existe aucune mention explicite des éléments de non consentement, pourtant constitutifs de l'agression sexuelle. La situation est donc critique : les incidents graves rapportés à hauteur de 2,1 pour 1 000 élèves en classe de maternelle en 2021 sont classés comme atteintes aux personnes, aux biens et à la sécurité sans catégorie spécifique aux atteintes sexuelles. On compte autant de filles que de garçons victimes concernant les atteintes sexuelles entre mineurs, contre un quart de garçons à l'échelle d'un corpus global. Les signalements sont à la hausse et l'accès à la pornographie incite très clairement les enfants à adopter des comportements déplacés. Le très jeune âge des agresseurs et leur irresponsabilité pénale qui en découle complexifie une évaluation concrète du phénomène : à l'heure actuelle, les chiffres officiels demeurent flous, bien que l'éducation nationale mène plusieurs enquêtes récurrentes sur les violences en milieu scolaire secondaire. Tout doit être mis en œuvre pour remédier à cette situation. Le sujet de ces violences pourrait ainsi s'inscrire dans un grand plan d'éducation où les thèmes de la prévention et l'éducation seraient abordés dès le plus jeune âge. Aussi, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement entend mettre en place à l'heure où l'on discute de la réforme de notre système scolaire pour lutter contre toutes formes de harcèlement. Il en va de l'avenir de notre société.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre des armées et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargé de la jeunesse et du service national universel publiée le 15/02/2023

Réponse apportée en séance publique le 14/02/2023

Mme le président. La parole est à Mme Marie Mercier, auteur de la question n° 373, adressée à M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Mme Marie Mercier. Ma question porte sur le harcèlement scolaire.

Près d'un million de jeunes seraient victimes de ce cauchemar, à l'école bien sûr, mais aussi en dehors, à cause des réseaux sociaux et des nouvelles technologies. Ces enfants vivent un véritable calvaire, où se mêlent à la fois la violence, la répétitivité, mais surtout l'isolement.

Que disent ces enfants ? Que personne ne les écoute, que personne ne les croit !

Permettez-moi d'évoquer le cas d'un jeune de mon département, que j'appellerai Maël. Cet enfant et ses parents ont eu beaucoup de mal à faire admettre qu'il était victime de harcèlement scolaire. À présent, il faut qu'ils se battent contre les institutions. Pourquoi ? Parce que c'est le jeune harceleur, qui a probablement lui aussi besoin d'aide, qui restera dans l'école, quand Maël est contraint de la quitter !

Madame la secrétaire d'État, que comptez-vous faire pour lutter contre le harcèlement, qui gâche la vie de tant de nos enfants et leur fait vivre un véritable enfer ? Ne me parlez pas du programme de lutte contre le harcèlement à l'école (pHARe), des mesures, des axes, des piliers. On connaît tout cela ! Que comptez-vous réellement faire pour aider et sauver nos enfants ?

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre des armées et du ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse, chargée de la jeunesse et du service national universel. Madame la sénatrice, je ne vous parlerai ni des programmes de lutte contre le harcèlement, en particulier du programme pHARe, ni de la loi visant à combattre le harcèlement scolaire, dite Balanant.

Si ces programmes sont nécessaires et constituent une première réponse afin que Maël et ses parents puissent bénéficier d'une écoute et être accompagnés, il faut aussi évidemment former les encadrants et mobiliser l'ensemble des maillons de la chaîne éducative, les enseignants, les conseillers principaux d'éducation, les infirmiers scolaires, tous ceux qui encadrent au quotidien nos enfants.

Madame la sénatrice, le harcèlement est un fléau. Il tue et brise des familles. Il ne s'arrête jamais. Il vous prend aux tripes, il entre dans votre tête et, pour finir, il vous brise. Il est difficile pour un jeune adolescent de se rendre compte que la honte doit s'inverser, qu'il n'y est pour rien.

Le jeune Maël n'a pas à partir de son établissement. C'est mon intime conviction. Un jeune victime de harcèlement doit être accompagné. La victime n'a pas à quitter son établissement et à être ainsi doublement pénalisée.

Le harcèlement est un fléau de notre temps. Il s'aggrave dans notre société, qui est parfois plus violente. Avec les réseaux sociaux, il n'y a plus de frontières. Ce qui se passe dans les cours d'école se retrouve en ligne, puis dans la chambre de l'enfant, le soir, tard, sans les parents. Ces derniers sont démunis et ils n'ont parfois même pas conscience de ce que vit leur fils ou leur fille.

Si j'avais un message à faire passer, ce serait le suivant : il ne faut jamais avoir peur, jamais avoir honte, il faut parler. Ce message est valable également pour les camarades et les adultes encadrants. Mieux vaut mobiliser plus de monde que pas assez, chaque fois que cela est nécessaire.

Enfin, une prise de conscience de la société est nécessaire, puisque ce fléau tue nos enfants aujourd'hui.

Mme le président. La parole est à Mme Marie Mercier, pour la réplique.

Mme Marie Mercier. C'est parce que le harcèlement tue, madame la secrétaire d'État, que je me suis permis d'évoquer le cas de cet enfant, qui a dit : « Il faudra peut-être que je meure pour que cela s'arrête. » Je relayerai vos propos sur le fait que Maël n'a pas à changer d'école et doit rester dans son établissement.

Vous avez évoqué l'ensemble des maillons de la chaîne. À cet égard, permettez-moi de vous faire une suggestion. Il y a des comités d'éducation à la santé et à la citoyenneté dans les écoles, dans les collèges, mais le maire n'y est pas souvent associé. Les maires doivent y participer, car ils sont les employeurs des Atsem, les agents territoriaux spécialisés des écoles maternelles. Par ailleurs, ils assurent la cantine, s'occupent des transports scolaires ; or l'enfant souffre aussi pendant les temps périscolaires.

Je compte sur vous, madame la secrétaire d'État, pour que les écoles s'ouvrent et que le maire soit invité, en présence de la psychologue, à leur réunion.

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