Question de Mme GARNIER Laurence (Loire-Atlantique - Les Républicains) publiée le 19/01/2023

Mme Laurence Garnier attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement sur les difficultés techniques et administratives de rénovation énergétique des logements.

Si les propriétaires immobiliers sont convaincus de la nécessité de l'amélioration de la performance énergétique de leurs biens, ils ne peuvent que manifester leur inquiétude devant les obstacles techniques et juridiques qu'impose une réglementation complexe. Plusieurs facteurs rendent intenables les délais de 2025 et 2034 en termes de rénovation énergétique.

Les résultats de certains diagnostics de performance énergétique (DPE) ne sont pas compréhensibles et dans de nombreux cas il est impossible, malgré les recommandations, d'atteindre les notations exigées. Par ailleurs, le temps des décisions de copropriété et des projets de travaux ne correspond pas à celui imposé par la loi. De plus, le volume des appartements classés F et G à mettre à niveau avant 2028 et E avant 2034 est colossal : entre 7 et 10 millions de logements au lieu des 4,8 millions initialement prévus.

Les propriétaires comme les locataires ont besoin de clarté sur les outils à utiliser (DPE, audit énergétique, DPE Immeuble, diagnostic technique global (DTG) ; sur le contenu des textes, car connaître les logements interdits à la location en 2023 nécessite un calcul à réaliser à partir des éléments du DPE (une partie des logements classés G) ; sur la notion même d'indécence car la performance énergétique comme critère de décence n'est pas comprise par les propriétaires et les locataires. Cela entraîne beaucoup de confusion pour le grand public.

L'outil DPE dont le résultat dépend de la qualité des informations fournies par le propriétaire ou le syndic de copropriété au diagnostiqueur, du fait de l'opposabilité du DPE, conduit les diagnostiqueurs à se protéger en portant des notes par défaut. Cela diminue mécaniquement l'évaluation finale.

La complexité des aides juridiques et fiscales et leurs origines diverses (agence nationale de l'habitat -Anah-, Action logement, aides locales) les rendent souvent incompréhensibles.

La situation s'aggrave avec les contraintes d'approvisionnement en matériaux et produits techniques du fait de la pénurie mondiale. Ainsi, les propriétaires ont de plus en plus de difficultés à réaliser les travaux dans des délais raisonnables, les obligeant parfois à vendre leurs biens qui vont devenir interdits à la location. Et donc plus difficilement cessibles. Dans ce contexte, une réelle baisse de l'offre locative est à craindre, aussi bien dans le parc public que privé.

Considérant ces très nombreuses difficultés mettant en péril l'offre locative, elle lui demande dans quelle mesure les représentants des propriétaires immobiliers seront entendus et leurs propositions étudiées.

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Transmise au Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement


Réponse du Ministère auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement publiée le 11/01/2024

La rénovation énergétique des logements est une priorité du Gouvernement : elle répond à un double objectif écologique, pour réduire la consommation énergétique et les émissions de gaz à effet de serre du secteur des bâtiments (qui représente de l'ordre de 45 % de la consommation énergétique et 20 % des émissions nationales), et social, pour réduire les factures et améliorer le confort d'habitat des Français, en particulier de ceux en situation de précarité énergétique. Pour y répondre et accélérer en particulier la rénovation du parc locatif, la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi « climat et résilience », a effectivement prévu de nouvelles mesures concernant la décence des logements. Ainsi, un logement nouvellement mis en location ou dont le bail de location fait l'objet d'une mesure de reconduction, expresse ou tacite, doit désormais respecter un niveau de performance énergétique minimal. Ce critère d'indécence concerne depuis le 1er janvier 2023 les logements les plus énergivores de la classe G (parfois dits « G+ ») ; il s'appliquera à tous les logements classés G au sens du diagnostic de performance énergétique (DPE) à compter du 1er janvier 2025, classés F à compter du 1er janvier 2028 et classés E à compter du 1er janvier 2034. A compter du 1er janvier 2025, ce sont donc 646 000 logements G du parc locatif privé (évaluation au 1er janvier 2023) qui seraient (en l'absence de travaux réalisés) concernés progressivement par cette disposition relative à l'indécence énergétique, dont moins de 270 000 sont situés en copropriétés. Ces chiffres sont à remettre en perspective des plus de 8 millions de logements au sein du parc locatif privé et 30 millions de résidences principales. S'agissant du diagnostic de performance énergétique, sa réforme en 2021 a permis de le fiabiliser : sa méthode de calcul (dont découle la classe DPE) a été revue et consolidée et s'applique de façon homogène à tous les logements. Désormais, le DPE s'appuie uniquement sur les caractéristiques physiques du logement comme le bâti, la qualité de l'isolation, le type de fenêtres ou le système de chauffage, et utilise des données d'entrée plus fiables. S'il a pu être constaté une certaine hétérogénéité dans la qualité de réalisation des diagnostics, une feuille de route a été élaborée à l'été 2022 en concertation avec les professionnels de la filière pour répondre à cet enjeu. Dans ce cadre, la certification qui encadre les diagnostiqueurs a notamment été révisée par arrêté à l'été 2023, afin de renforcer la formation initiale et continue ainsi que les contrôles. Les résultats de la politique publique de rénovation énergétique menée par le Gouvernement sont tangibles : le nombre de passoires parmi les résidences principales est en baisse de 7 % entre le 1er janvier 2022 et 2023, et l'impact de la classe DPE sur les prix des logements (la « valeur verte ») est croissant. L'objectif est de continuer d'accélérer, en particulier en mettant à disposition de chaque propriétaire bailleur les outils pour pouvoir respecter le calendrier de la loi « climat et résilience ». Les aides directes contribuent à lever une grande partie des freins financiers. En particulier, le budget de l'Anah est en très forte hausse en 2024, avec un niveau inédit de plus de 5 milliards d'euros de crédits consacrés à la rénovation énergétique, et la refonte des parcours d'aides vise à soutenir davantage les rénovations d'ampleur engagées par tous les ménages, en maisons individuelles comme en copropriétés. Le Gouvernement est également attentif à faciliter le financement du reste à charge, en dialogue étroit avec les banques : la loi de finances pour 2024 prolonge notamment l'éco-prêt à taux zéro (éco-PTZ), accessible à tous les bailleurs sans condition de ressources pour financer jusqu'à 50 000 euros sur 20 ans, et qui a fait l'objet de mesures de simplification pour massifier sa distribution. Sur le plan fiscal, la déduction du déficit foncier du revenu imposable est un outil de soutien complémentaire puissant, avec un plafond d'imputation doublé pour tous les travaux de rénovation permettant de sortir des classes E, F ou G du DPE et réalisés d'ici fin 2025. Si la levée des contraintes financières est indispensable, l'information, le conseil et l'accompagnement des bailleurs sont décisifs pour la prise de décision d'engager des travaux et donc accélérer la rénovation du parc locatif privé. C'est l'objectif du renforcement de la couverture territoriale par le réseau France Rénov', avec fin 2023 plus de 570 espaces conseil et 2 500 conseillers répartis sur l'ensemble du territoire, de son articulation renforcée avec France Services depuis le 1er janvier 2024, ou encore du déploiement de Mon Accompagnateur Rénov', tiers de confiance agréé par l'Anah pour guider les ménages tout au long de leur parcours. Les travaux se poursuivent également pour aller davantage vers les propriétaires bailleurs concernés par les échéances à venir, avec les acteurs les mieux placés au plus près du terrain, notamment les collectivités qui portent localement les guichets France Rénov'et les acteurs de la gestion immobilière (agences, syndics, etc.). Enfin, s'agissant du parc social dont la performance énergétique est globalement meilleure que l'ensemble des résidences principales (8 % de passoires thermiques contre 16 %), les bailleurs sont activement mobilisés pour amplifier leurs efforts de réhabilitation et en particulier éradiquer au plus vite les 380 000 logements classés F et G (évaluation au 1er janvier 2023). L'Etat est pleinement mobilisé à leurs côtés : c'est tout le sens du pacte d'engagements signé avec le secteur lors du congrès HLM à Nantes début octobre 2023, qui s'est notamment concrétisé dans la loi de finances pour 2024 par la création d'un fonds de rénovation à hauteur de 400 millions d'euros par an sur trois ans et la pérennisation du dispositif d'exonération fiscale dit de « seconde vie ».

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