Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 20/04/2023

M. Hervé Maurey attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement, sur les importantes difficultés liées à la réalisation des nouveaux diagnostics de performance énergétique (DPE) et des obligations en matière de performance énergétique des logements.

La mise en oeuvre des nouveaux diagnostics de performance énergétique fait apparaître les incohérences dans les méthodes de calcul retenues et d'importantes difficultés pour l'atteinte des objectifs fixés par la loi basés sur ces diagnostics.

Les méthodes de calcul prévoient notamment de ne plus prendre en compte les consommations réelles, mais des consommations et des données d'émission de CO2 théoriques sur la base des informations techniques du logement et de ses équipements, le classement retenu étant le moins bon des deux résultats.

À plusieurs égards ces méthodes de calcul sont défavorables notamment aux petites surfaces celles-ci ayant quasi-mécaniquement un ratio surfaces « déperditives » par rapport à la surface habitable plus élevé qu'un grand logement.

Ainsi, à la suite du durcissement du DPE, 10 % de logements supplémentaires seraient classés F et G. Au total, 43 % des logements français seraient classés de E à G.

Les recommandations pour améliorer la performance énergétique du logement accompagnant ces diagnostics sont parfois irréalisables techniquement ou bien prévoient des travaux disproportionnés par rapport à la valeur du bien. Dans certains cas, aucune préconisation pour aller en-deçà d'un certain seuil (notamment pour passer à D ou en-deçà).

Les propriétaires de certains biens aux caractéristiques spécifiques (corps de ferme en milieu rural, bâtiments remarquables, architectures propres à certaines régions) font face aux mêmes difficultés.

Ces propriétaires se trouvent dans l'impossibilité d'atteindre les seuils de performance énergétique notamment fixés par la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 « portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets » et se verront imposer un gel de loyer voire de retirer le logement de la location.

Les conséquences sur le marché immobilier sont déjà tangibles puisqu'entre 2022 et 2023, la vente de logements dits « énergivores » a doublé, ce qui aurait entraîné le retrait de nombreux logements du marché locatif (- 40 % pour les logements F et G, - 26 % pour les logements moins énergivores).

Cette situation est particulièrement préjudiciable alors qu'il existe un important besoin de logements, entre 400 000 et 500 000 par an selon les estimations.

Il conviendrait en conséquence de revoir les méthodes de calcul du DPE et d'adapter les obligations en matière de performance énergétique, et en particulier ne pas exiger un seuil s'il n'existe pas de possibilité technique pour l'atteindre ou alors que celle-ci est disproportionnée.

Aussi, il souhaiterait connaître les évolutions qu'il compte apporter en la matière.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de l'écologie publiée le 07/06/2023

Réponse apportée en séance publique le 06/06/2023

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 623, adressée à M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement.

M. Hervé Maurey. Madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, si nous comprenons et partageons l'objectif tendant à mettre fin aux passoires thermiques, de toute évidence, le diagnostic de performance énergétique (DPE), dans sa nouvelle version, pose problème.

Par manque de temps, je n'évoquerai pas le fait que les résultats des diagnostics peuvent différer d'un professionnel à l'autre, ni le coût des travaux ou les difficultés pour obtenir, dans certains cas, l'accord des copropriétés. Je me contenterai ce matin d'évoquer la question des petites surfaces.

Il n'est pas admissible, madame la secrétaire d'État, qu'à isolation égale, la classification d'un bien diffère sensiblement selon sa taille.

C'est pourtant le cas puisque les petits logements ont des surfaces dites « déperditives » - essentiellement les murs - importantes par rapport à la surface habitable.

Ainsi, selon l'Observatoire national de la rénovation énergétique, 63 % des petites surfaces seraient classées E, F ou G, contre 39 % pour l'ensemble du parc.

Dans certains cas, les travaux préconisés sont non seulement onéreux, mais aussi et surtout techniquement irréalisables.

Que faire quand la seule proposition d'un diagnostiqueur est la pose d'une pompe à chaleur au troisième étage d'un studio en centre-ville ? C'est tout simplement impossible pour des questions d'urbanisme, d'esthétique et de nuisances notamment sonores...

Ma question est très simple : que comptez-vous faire pour remédier à cette situation qui aggrave une crise du logement déjà problématique ? Ne faudrait-il pas donner suite à la proposition de la fédération des diagnostiqueurs, qui préconise la mise en place de coefficients de pondération ?

Mme le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Bérangère Couillard, secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie. Monsieur le sénateur Maurey, le DPE est un outil majeur de la politique de rénovation énergétique des bâtiments, et plusieurs mesures importantes lui sont adossées visant, notamment, les passoires énergétiques : gel des loyers, interdiction de mise en location selon un calendrier progressif, obligation d'audit énergétique lors de la vente.

À partir de 2024, certaines aides à la rénovation énergétique seront de manière plus systématique associées à une mesure initiale de la performance du logement par un DPE.

La réforme du DPE de 2021 a permis de le fiabiliser. Désormais, le DPE s'appuie uniquement sur les caractéristiques physiques du logement. Il ne recourt qu'à des données d'entrée disposant de justificatifs. Cette refonte apportant plus de fiabilité méthodologique a été accompagnée dès l'été 2022 par une feuille de route ministérielle visant, notamment, à améliorer la qualité de réalisation des DPE.

Un arrêté sera publié l'été prochain pour renforcer les obligations de formation des diagnostiqueurs à partir de 2024, ainsi que les contrôles qui s'exercent sur eux.

Les recommandations de travaux incluses dans le DPE peuvent être complétées par la réalisation d'un audit énergétique, obligatoire depuis le 1er avril dernier pour la vente de logements classés F ou G en monopropriété, dont les scénarios de travaux sont détaillés et tiennent compte des spécificités du bâti afin d'atteindre la classe B.

S'agissant des logements soumis à des contraintes architecturales et patrimoniales, leur spécificité est reconnue. Bien évidemment, certains travaux ne pourront être réalisés. Leur performance énergétique peut néanmoins, dans la plupart des cas, être fortement améliorée.

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Madame la secrétaire d'État, je vous demandais s'il était normal que, à isolation égale, les diagnostics soient différents selon la taille du bien. Ma deuxième interrogation, qui découlait de la première, était : que comptez-vous faire pour remédier à cette situation ? La petite fiche que vous nous avez lue ne contenait aucune réponse. J'espère donc une réponse écrite par courrier.

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