Question de M. SAUTAREL Stéphane (Cantal - Les Républicains-A) publiée le 03/10/2024

M. Stéphane Sautarel attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur la recrudescence des agressions envers les élus.
Alors que « s'en prendre aux élus, c'est s'en prendre à la République » selon les termes de notre ancien garde des sceaux, ces dernières années le nombre d'agressions envers les élus n'a fait qu'augmenter. À l'initiative du Sénat une proposition de loi a été adoptée. En effet, la loi n° 2024-247 du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux vise, d'une part à renforcer les sanctions des auteurs de violences et d'injures envers les élus, d'autre part à faciliter l'accès aux dispositifs de protection fonctionnelle et d'assurance pour les élus et les candidats. Enfin, la loi vise à renforcer la prise en compte des réalités du terrain par les acteurs judiciaires et étatiques.
Dans la pratique, les élus victimes souhaitent rester discrets et ne pas ébruiter les agressions dont ils ont été victimes. Or, l'élu est élu 365 jours par an et 24 heures sur 24. Ils sont en contact permanent avec les Français et sont le relai indispensable entre l'État et le peuple. Leur rôle doit être salué et ils doivent être protégés.
Dans le département du Cantal, plusieurs élus se sont fait agresser ou ont été menacés ces derniers jours. Le maire de Parlan a été menacé en raison du développement d'un projet éolien sur un terrain privé sur le territoire de sa commune. En outre, fait d'une violence assez rare, le Maire de Saint-Etienne-de-Maurs a, dans la nuit du 15 au 16 mai 2024, reçu un cocktail molotov sur la fenêtre de sa maison. Ses réflexes ont permis d'éviter le pire. D'autres élus sont ou ont été menacés.
Face à ces cas d'agressions, de plus en plus fréquents et de plus en plus violents, la loi du 21 mars 2024 doit être pleinement appliquée. Par ailleurs, il est nécessaire de systématiquement prendre en compte les dépôts de plainte des élus afin que la justice puisse se saisir rapidement des faits et faire le nécessaire pour protéger les élus.
Alors que ces agressions se produisent dans un contexte sociétal de plus en plus tendu, il lui demande ce qu'il envisage de faire pour protéger les élus victimes de ces agressions et en particulier, la diligence avec laquelle les forces de sécurité, police et gendarmerie, prennent en comptent les plaintes, engagent les enquêtes. Il lui demande également d'envisager une meilleure articulation des dispositifs de sécurité avec la justice pour que les élus puissent exercer de manière sereine leur mandat.

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Transmise au Ministère de l'intérieur


Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 22/05/2025

La préservation de la sécurité des élus et de leur famille revêt un caractère fondamental au sein de notre régime républicain. Elle permet le plein exercice, en sérénité, du mandat électif et donc la reconnaissance du pluralisme démocratique, qui constitue la garantie du bon fonctionnement des institutions. Sur le plan légal, l'arsenal juridique a bénéficié des avancées introduites par la loi du 21 mars 2024 renforçant la sécurité et la protection des maires et des élus locaux - issue d'une proposition sénatoriale. La gendarmerie nationale et la police nationale (préfecture de police et direction générale de la police nationale) ont développé une approche globale répondant à la triple ambition de prévenir les atteintes, de les réprimer plus efficacement et d'accompagner les élus pour qu'ils soient en capacité de mieux appréhender les situations à risques. Sur ce point, des formations à la gestion des incivilités à destination des élus ont été mises en oeuvre, pour les sensibiliser aux menaces potentielles lors d'interventions du quotidien. Créée par la cellule nationale de négociation (CNN) du GIGN - pour ce qui concerne la gendarmerie nationale - et dispensée par les négociateurs régionaux de la gendarmerie, la formation à la gestion des incivilités a été proposée à l'ensemble des élus du territoire métropolitain et ultra-marin, dès le début d'année 2021. Ce module a rencontré un succès certain puisque que 27 000 élus ont été formés depuis le 1er janvier 2021. La police nationale (préfecture de police et direction générale de la police nationale) est également engagée dans la prévention et dans l'accompagnement des élus. La direction générale de la police nationale propose, depuis mai 2021, une formation à la gestion des comportements agressifs et violents, des incivilités et à la désescalade des conflits. La formation a été conçue avec le concours de la direction nationale de la sécurité publique (DNSP), du RAID et de l'École nationale supérieure de la police (ENSP). A ce jour, plus de 2 400 élus ont bénéficié de cette formation. Par ailleurs, une formation plus approfondie est proposée aux élus des métropoles et aux parlementaires par les négociateurs du RAID ou des chargés de formation de l'ENSP : plus de 260 élus ont bénéficié de ce format. En complément, la gendarmerie nationale a construit, en lien avec l'Association des Maires de France (AMF), une méthode d'analyse des risques synthétisée par l'acronyme « M. A.I.R.E.S », aidant à déterminer, selon les critères retenus, l'opportunité pour l'élu de s'engager personnellement ou de solliciter les forces de sécurité intérieure. Cet outil disponible sur l'application mobile « Gend'Elus » a été développé pour répondre aux besoins des élus en recensant des fiches pratiques et des conseils pour la gestion des situations du quotidien. Cette application a fait l'objet de près de 48 000 téléchargements depuis son lancement en 2021. Par ailleurs, la police nationale a mis en place des partenariats avec les principales associations nationales d'élus locaux, participant activement, par exemple, à des groupes de travail qui touchent à la sécurité ou en communiquant régulièrement des informations utiles. En zone de police comme en zone de gendarmerie, l'accompagnement individualisé s'appuie également sur la mobilisation de la chaîne de prévention situationnelle (référents et correspondants sûreté de la police et de la gendarmerie) qui, par son expertise, peut identifier les principales vulnérabilités des mairies, locaux communaux, permanences ou domicile personnel des élus afin d'établir des préconisations de sécurisation. Cette démarche peut se doubler d'une inscription dans le module « SIP » de la base de données sécurité publique de la gendarmerie, ou dans le logiciel « PEGASE » de traitement des appels au « 17 » pour les élus en zone de compétence de la police nationale (dispositif « alarme élus »), facilitant l'identification des situations individuelles les plus sensibles et un engagement adapté des moyens opérationnels, en cas de besoin. De plus, une surveillance accrue des abords des permanences des parlementaires ainsi que de leur domicile est assurée, tandis que dans le cyberespace, une veille des réseaux sociaux est menée pour détecter les discours de haine ou les menaces. La plateforme PHAROS de l'office anti-cybercrimianlité (OFAC) de la direction nationale de la police judiciaire (DNPJ) est en particulier mobilisée pour analyser et recouper les signalements et le cas échéant judiciariser les menaces et autres atteintes commises dans l'espace numérique. Sur le plan judiciaire, des enquêtes sont systématiquement diligentées avec tous les moyens d'investigation nécessaires. Des contacts sont pris avec les parlementaires et les élus locaux pour les sensibiliser et rappeler les démarches à accomplir en cas de menace ou d'incident. Des instructions ont été données pour accompagner avec soin les élus au moment du dépôt de plainte, en proposant des plaintes sur rendez-vous ou sur site (par exemple en mairie). Chaque fait est systématiquement signalé au procureur de la République. Un centre d'analyse sur les atteintes aux élus (CALAÉ) a été créé officiellement le 17 mai 2023 sous l'impulsion du ministre délégué chargé des collectivités territoriales et de la ruralité. Ce centre collecte et analyse les menaces et violences faites aux élus, afin d'adapter le dispositif de réponse en temps réel et mieux comprendre le phénomène. Son premier rapport annuel a été publié à la fin de l'année 2024. Localement, un « pack sécurité » est mis en oeuvre par le préfet de chaque département au bénéfice des élus. Ce dernier vise notamment à renforcer l'engagement des référents et correspondants sûreté police et gendarmerie à leur profit, à déployer le dispositif « alarme élu », à développer la prise de plainte des élus à leur domicile, à leur permanence ou en mairie, ou encore à proposer la réalisation de diagnostics sûreté. Un réseau de 3 400 référents élus est par ailleurs pleinement opérationnel. Présents dans chaque brigade et commissariat, les référents élus sont les interlocuteurs privilégiés des élus. Leur connaissance du territoire (délinquance, population, etc.) leur permet de les conseiller utilement et d'apporter des réponses à leurs attentes sur les enjeux de sécurité. Le préfet du département applique la doctrine nationale « une menace = une évaluation » qui vise à apporter des réponses aux atteintes recensées sur son territoire. Des instructions ont ainsi été relayées par les préfectures aux unités de gendarmerie et de police afin de présenter ce centre d'analyse et de détailler les mesures du pack sécurité. En complément de la création de la cellule CALAE, le gouvernement s'est pleinement engagé dans la protection des élus en lançant en 2023 un plan national de prévention contre les violences aux élus. Doté de 4 axes, 12 mesures, et 5Meuros, ce plan décline plusieurs actions concrètes au profit des élus. Ainsi, une cellule d'appui psychologique a été officiellement mise en place en décembre 2023. Créée en partenariat avec la fédération France Victimes, elle est accessible par téléphone, 24h/24h et 7j/7j, et permet un suivi psychologique des élus et de leurs proches menacés ou agressés. Depuis sa création, plus de 70 élus ont fait la démarche (source CALAÉ). Dans la continuité de ces dispositifs, le CALAÉ a également supervisé la distribution de boutons d'appel d'urgence auprès d'élus faisant l'objet de menaces particulières. Ces boutons sont attribués par les préfectures après évaluation de la situation de l'élu concerné. Ils sont remis par les référents élus en brigade ou en commissariat. Ils permettent aux élus qui en bénéficient d'alerter un contact de confiance chargé de la levée de doute en cas de risque pour leur sécurité. Après une phase d'expérimentation concluante au premier semestre 2024 dans huit départements pilotes, ces boutons d'appels vont être généralisés sur l'ensemble du territoire d'ici la fin 2025. Ainsi, les forces de sécurité intérieure de l'Etat, interlocutrices de premier plan des élus, mais également les préfets, et les parquets, sont pleinement mobilisés localement pour assurer leur protection et les soutenir dans l'exercice de leurs fonctions. Le ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, est particulièrement attentif à la sécurité des élus, fondement de notre démocratie.

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