Question de M. WATTEBLED Dany (Nord - Les Indépendants) publiée le 10/10/2024
M. Dany Wattebled attire l'attention de Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, chargée de la consommation sur l'augmentation dans des proportions spectaculaires, de la fraude commerciale sur internet.
En 2020, la fraude commerciale sur internet en France a fait 26 millions de victimes sur les 40 millions d'e-acheteurs, soit bien plus que la moitié des personnes ayant eu recours à internet pour acheter des biens ou services. Et selon les spécialistes, pour cette année 2021, ces fraudes sont en très forte progression avec une augmentation à 3 chiffres.
Ces chiffres recouvrent toutes sortes de fraudes des plus courantes (livraison incorrecte, carte bancaire ou identité usurpée etc.) à d'autres beaucoup plus sophistiquées et indétectables comme celles commises par des « sites clones ». À cet égard, le cofondateur de l'application « France verif », spécialiste de la lutte contre ces sites clones, estime qu'il y a en France des centaines de milliers de sites frauduleux, indécelables à l'oeil nu y compris pour des spécialistes. Le 24 novembre 2021, le ministère de l'économie et des finances a ordonné le déréférencement de la plateforme numérique WISH, jugée frauduleuse. Si cette sanction inédite est un premier pas à saluer, la prise en compte et lutte contre ces fraudes paraît extrêmement faible au regard de l'ampleur des dommages précédemment mentionnés.
C'est pourquoi, il la remercie de lui indiquer quels sont les moyens mis en oeuvre pour lutter contre cette fraude internet et les objectifs fixés en la matière.
- page 3787
Transmise au Ministère délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire
Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire publiée le 01/05/2025
Pour faire face à l'augmentation des fraudes commerciales sur internet, les moyens mis en oeuvre pour lutter contre celles-ci sont à la fois juridiques et opérationnels. Sur le plan juridique, comme indiqué par le sénateur, certaines de ces fraudes relèvent du droit commun et constituent des infractions au code pénal : escroqueries, usurpations d'identité Néanmoins, plus généralement les pratiques commerciales illicites sur internet relèvent du droit spécifique de la consommation, lequel est largement déterminé par le droit de l'Union européenne. Le code de la consommation comporte ainsi de nombreuses mesures de transposition du droit européen relatives à l'information du consommateur préalablement à la vente, à la formation du contrat en ligne, à l'exercice du droit de rétractation, à la livraison. En outre, s'appliquent aux ventes en ligne toutes les dispositions légales relatives aux pratiques commerciales trompeuses et agressives ainsi qu'aux clauses abusives. Les sanctions applicables aux infractions et manquements portant atteinte aux droits des consommateurs ont été réévaluées et harmonisées par la directive dite « Omnibus » (UE) 2019/2161 du 27 novembre 2019 afin de les rendre plus effectives et dissuasives. Ces mesures, qui ont été transposées dans notre droit national par l'ordonnance n° 2021-1734 du 22 décembre 2021, procèdent à : - la majoration du quantum d'un grand nombre d'amendes administratives prononcées en cas de manquements aux règles relatives à l'information du consommateur et à la formation des contrats de consommation, qui passent de 3 000 euros à 15 000 euros pour une personne physique et de 15 000 euros à 75 000 euros pour une personne morale ; - la création dans tous les États membres d'une sanction minimale de 4 % du chiffre d'affaire annuel en cas d'infractions transfrontières au droit de la consommation de grande ampleur. Par ailleurs, plusieurs lois sont venues renforcer les pouvoirs des agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) : - la loi n° 2020-1508 du 3 décembre 2020 a doté la DGCCRF de nouveaux pouvoirs destinés à lutter plus efficacement contre les auteurs de contenus illicites en ligne qui, soit ne répondent pas aux injonctions de l'administration, soit sont non identifiables. Ces mesures consistent à exiger des différents prestataires techniques (fournisseurs d'accès à internet, réseaux sociaux, places de marchés, gestionnaires de noms de domaine, moteurs de recherche) - y compris les « GAFAM »- la mise en oeuvre de mesures d'avertissement des consommateurs concernant les contenus manifestement illicites de certains sites et, lorsqu'il y un risque de préjudice grave pour les consommateurs, de restriction d'accès ou de déréférencement d'interfaces en ligne ou encore de suppression de noms de domaine. C'est sur la base de ce texte que la DGCCRF a ordonné le déréférencement de la plateforme WHICH ; - la loi n° 2023-451 du 9 juin 2023 modifiée par l'ordonnance n° 2024-978 du 6 novembre 2024 est venue définir et encadrer l'activité des influenceurs sur les réseaux sociaux, dont le public est souvent jeune. L'objectif est de mieux lutter contre certaines dérives et arnaques constatées (incitation à faire des régimes alimentaires dangereux, de la chirurgie esthétique, des paris excessifs, promotion de contrefaçons ). Cette loi a notamment conféré aux agents de la DGCCRF un pouvoir d'injonction sous astreinte ayant pour objectif de contraindre un professionnel à se mettre en conformité dans le délai fixé par l'injonction, sous la menace d'une astreinte financière en cas de non-exécution ou d'exécution tardive ou partielle ; - la loi n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique (SREN) a adapté le droit national afin de permettre la mise en oeuvre des nouvelles compétences reconnues aux autorités de régulation nationales par le règlement européen (UE) 2022/2065 sur les services numériques (« DSA »). Ainsi, la DGCCRF, au titre du « DSA » est chargée de contrôler le respect des obligations des fournisseurs de places de marché (market place). Cette loi instaure également un filtre de cybersécurité « anti-arnaque ». Avec ce dispositif, les consommateurs français recevront un message d'alerte lorsqu'ils s'apprêteront à se diriger vers un site malveillant après avoir reçu un SMS ou un courriel frauduleux. Ces nouveaux pouvoirs constituent une avancée certaine dans la lutte contre les fraudes commerciales sur internet. Par ailleurs, sur le plan des contrôles, les services de la DGCCRF ont réalisé et continuent de réaliser des enquêtes sur les sites de vente en ligne. Ainsi en 2023, 2 017 établissements et sites internet ont été contrôlés dans le secteur du numérique, lesquels ont donné lieu à la rédaction de 343 avertissements, 306 injonctions administratives, 153 réquisitions numériques pour limiter l'accès à un contenu numérique illicite et 23 contentieux pénaux transmis au Parquet. En 2025, des enquêtes nationales spécifiques sont programmées sur la pratique du « dropshipping », forme de vente sur internet qui génère de nombreux abus, sur le respect du DSA auprès des fournisseurs de place de marché en ligne et sur les influenceurs. Une enquête nationale sur les trente plus grands acteurs du commerce électronique est également programmée cette année. Des campagnes de sensibilisation aux pratiques abusives (drop shipping, black friday) et des fiches pratiques (dark pattern, comment réaliser des achats sur internet de façon sécurisée ? ) sont régulièrement élaborées par la DGCCRF, afin d'informer les consommateurs sur les pratiques à risque liées à l'achat en ligne. Enfin, le site internet SignalConso est à la disposition des personnes achetant en ligne pour signaler les problèmes rencontrés lors de leurs achats. En particulier, s'agissant des « livraisons incorrectes » évoquées par le sénateur et qui ne relèvent pas toujours de la catégorie des fraudes, SignalConso permet de signaler le caractère incorrect de la livraison, afin d'en informer l'administration tout en offrant la possibilité au professionnel de répondre. Ils ont également la possibilité de prendre contact avec la direction départementale de la protection des populations (DDPP) ou la direction départementale de l'emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations (DDETSPP) présente dans leur département.
- page 2150
Page mise à jour le