Question de Mme DUMONT Françoise (Var - Les Républicains) publiée le 07/11/2024
Mme Françoise Dumont attire l'attention de Mme la ministre du logement et de la rénovation urbaine sur la question des recours des tiers dans le cadre de la contestation d'une autorisation d'urbanisme.
L'article R. 600-2 du code de l'urbanisme prévoit que lorsqu'un projet d'urbanisme est dûment autorisé, des tiers peuvent encore effectuer un recours dans un délai de 2 mois à partir du 1er jour de l'affichage de l'autorisation du permis de construire, d'aménager ou de démolir sur le terrain.
À compter de l'autorisation du permis, l'architecte peut commencer les travaux, mais ce délai de 2 mois fait peser une incertitude au regard du projet, aussi beaucoup décident de décaler son lancement, pour ne pas courir de risque.
Cette situation ralentit l'ensemble des projets en prolongeant des délais, déjà très longs, d'autorisation de construire. Cela pénalise un secteur entier, en pleine période de pénurie de logements, en France.
Aussi, elle lui demande si le Gouvernement serait ouvert à une évolution du code réglementaire de l'urbanisme (et notamment de l'article R. 600-2) pour prévoir une concomitance, entre le délais de recours des tiers et la période de demande d'obtention du permis de construire, afin d'accélérer les délais de réalisation des ouvrages, sans contrevenir aux droits des tiers.
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Transmise au Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé du logement publiée le 17/07/2025
Le droit de recours contre des décisions est un principe essentiel de notre système juridique, qui s'exerce conformément à l'article R. 421-1 du code de justice administrative. Concernant les autorisations d'urbanisme, l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme précise que le délai de recours contentieux court à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15. Prévoir une concomitance entre le délai de recours des tiers et la période d'instruction de la demande d'autorisation reviendrait à faire courir le délai de recours avant l'existence de l'acte. Or, à ce stade, seule une demande a été présentée et la décision n'existe pas encore : il n'est donc pas possible d'engager un recours contre celle-ci. Par ailleurs, le contenu du dossier de demande d'autorisation d'urbanisme n'est pas connu des tiers, qui ne seraient donc pas suffisamment informés du projet contre lequel pourrait s'engager un contentieux. L'article L. 311-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que le droit à communication ne concerne pas les documents préparatoires à une décision administrative tant qu'elle est en cours d'élaboration. Telle est également la position du Conseil d'État qui a décidé, s'agissant de l'instruction d'un dossier, que le droit à communication des documents administratifs non nominatifs reconnu par l'article 2 de la loi du 17 juillet 1978 ne s'applique pas aux documents qui constituent des éléments d'un dossier devant servir à la prise d'une décision administrative en cours d'élaboration (Conseil d'État - 9 et 8 sous-sections réunies, 30 décembre 1998, n° 172761). L'exception précisée par l'ordonnance n° 2014-1328 du 6 novembre 2014 relative à la communication des avis préalables, qui permet de se voir communiquer un avis de manière anticipée, ne concerne que les usagers tendant à bénéficier d'une décision individuelle créatrice de droit, et ne concerne donc pas les tiers. La Commission d'accès aux documents administratifs a également expliqué dans un avis en date de 2023 (Avis 20232169 - Séance du 20/07/2023) que les documents produits et reçus par l'administration en matière d'autorisations individuelles d'urbanisme ne sont communicables qu'à partir du moment où ils ne revêtent plus un caractère préparatoire : c'est-à-dire soit que la décision (expresse ou tacite) soit effectivement intervenue, soit que le pétitionnaire ait expressément renoncé à son projet. Enfin, le service instructeur peut demander des pièces complémentaires durant le premier mois de l'instruction, qui sont susceptibles de modifier, bien que non substantiellement, le projet faisait l'objet de la demande d'autorisation. Les pièces du dossier de demande d'autorisation d'urbanisme ne pouvant pas être communiquées avant la délivrance de l'acte, et ces documents n'étant en tout état de cause pas susceptible de recours en ce qu'ils sont des actes préparatoires et ne font donc pas grief, il apparaît donc impossible d'assurer un droit de recours effectif avant la délivrance de la décision se prononçant sur la demande d'autorisation d'urbanisme. Pour ces raisons, le Gouvernement n'est pas favorable à ouvrir un droit de recours des tiers avant la délivrance de l'autorisation d'urbanisme.
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