Question de M. ROS David (Essonne - SER) publiée le 28/11/2024
M. David Ros attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice sur l'urgence à repenser en profondeur notre approche de la réinsertion des personnes ayant purgé leur peine.
Dans une société où la justice vise à équilibrer sanction et réhabilitation, la peine effectuée devrait marquer l'effacement de la dette du détenu envers la collectivité, permettant ainsi sa réintégration pleine et entière dans la société. Pourtant, cette promesse fondamentale reste trop souvent un idéal non atteint. Les dispositifs actuels de réinsertion peinent à surmonter les multiples obstacles liés à la précarité économique et sociale auxquels sont confrontées les personnes sortant de prison.
Des exemples internationaux apportent des solutions inspirantes : certains programmes axés sur l'éducation ou l'accès au sport démontrent une efficacité remarquable, avec des taux de récidive parfois inférieurs à 10 % pour leurs bénéficiaires. À titre de comparaison, en France, près de 40 % des personnes condamnées récidivent, soulignant l'urgence d'une réforme en profondeur de nos politiques de réinsertion.
Les bénéfices de ces approches sont manifestes. Les initiatives éducatives offrent aux détenus des compétences concrètes et une perspective, favorisant ainsi la construction d'un projet de vie durable après leur libération. Les activités sportives, telles que le rugby, inculquent des valeurs essentielles comme la cohésion de groupe et le respect des règles collectives, indispensables à une réintégration réussie. Par ailleurs, le travail en détention contribue à apaiser les tensions internes, en limitant les hiérarchies informelles et la violence, tout en préparant les détenus à leur réinsertion professionnelle.
En France, où le taux d'occupation carcérale atteint 124,3 % en 2024, et où le taux de criminalité demeure élevé, ces constats appellent à un changement de paradigme. La seule approche répressive a montré ses limites. Il est impératif de renforcer les politiques publiques de réinsertion en s'inspirant des pratiques internationales ayant démontré leur efficacité.
Dans ce contexte, il l'interroge sur les mesures envisagées pour promouvoir une baisse durable de la récidive en France. Comment le Gouvernement entend-il s'engager dans une transformation ambitieuse de nos dispositifs, afin de réduire la population carcérale et répondre aux enjeux sociaux posés par la réinsertion.
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Transmise au Ministère de la justice
Réponse du Ministère de la justice publiée le 21/08/2025
La direction de l'administration pénitentiaire (DAP) est pleinement mobilisée, en collaboration avec ses partenaires, pour oeuvrer à la réinsertion des personnes placées sous main de justice (PPSMJ). Afin de promouvoir une baisse durable de la récidive en France, l'offre d'activités proposée aux PPSMJ s'accroit et se diversifie. Les activités concernées couvrent des domaines variés, tels que le travail, la formation professionnelle, l'insertion par l'activité économique, l'enseignement, les activités éducatives, culturelles, socioculturelles comme sportives et physiques à visée pédagogique. Le festival Vis-à-vis, par exemple, est dédié à la création de spectacle vivant en milieu carcéral. L'édition 2025 s'est tenue au théâtre Paris-Villette du 2 au 5 mai 2025 et a accueilli 8 pièces créées avec des personnes détenues de différents établissements de région parisienne. Cette dynamisation des actions proposées repose également sur des appels à projets nationaux dont les budgets sont régulièrement augmentés. Ainsi, en 2025, 533 projets d'accompagnement des PPSMJ ont été retenus et cofinancés par la DAP, contre 393 en 2024. Cette politique volontariste se construit pleinement en lien avec la société civile et un réseau de plusieurs dizaines de partenaires nationaux, comme le musée du Louvre, le Secours Catholique ou des fédérations sportives. Chaque année la réalisation de nouvelles conventions étoffe le réseau partenarial de la DAP, composée aujourd'hui de plus de 70 associations ou fédérations nationales. En parallèle, la DAP est pleinement mobilisée pour permettre l'accès des sortants de détention à des structures de prise en charge adaptées à leurs profils et besoins. Ainsi un travail est engagé avec la direction générale de la cohésion sociale, les fédérations d'établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) et les établissements de prise en charge comme les services pénitentiaires, pour faciliter l'accueil des personnes en situation de dépendance à leur sortie de prison. La DAP s'emploie plus largement à mettre en oeuvre des politiques dédiées à destination des personnes incarcérées à besoins spécifiques du fait de leur faible représentativité numérique en détention (femmes, mineurs, personnes LGBT+, personnes en situation de dépendance ou de handicap). Enfin, s'agissant du développement du travail en détention, on dénombre 12 479 stagiaires de la formation professionnelle en détention et 57 020 contrats d'emplois pénitentiaires ont été réalisés pour l'année 2024. La loi pour la confiance dans l'institution judiciaire de 2021 a profondément réformé le cadre juridique du travail pénitentiaire. Un effort conséquent d'augmentation et de diversification du travail en détention a été entrepris dans le but de s'adapter à tous les publics. L'objectif est de développer la part des entreprises privées qui implantent tout ou partie de leur activité économique en détention. Cette mission est notamment confiée à un réseau de 9 responsables des relations aux entreprises (RRE), placés au sein des directions interrégionales des services pénitentiaires (DISP), qui prospectent de nouvelles entreprises. Les décrets d'application de cette même réforme ont par ailleurs permis de rapprocher les modalités du travail en détention de celles que les personnes un temps détenues connaîtront une fois libérées. Le contrat d'emploi pénitentiaire, effectif depuis mai 2022, crée une situation de travail proche de ce qui existe en milieu libre, avec un acte volontaire de candidature des personnes détenues (CV et lettre de motivation), des entretiens d'embauche et une vie de la relation de travail correspondant à ce qui existe en droit commun. Les droits sociaux des personnes détenues travaillant ont également été renforcés, facilitant la constitution de trimestres, créant la couverture des accidents de travail, maladies professionnelles et mettant en place, entre autres mesures, une médecine du travail.
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