Question de Mme JOSENDE Lauriane (Pyrénées-Orientales - Les Républicains) publiée le 26/12/2024

Mme Lauriane Josende attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la portée effective du programme des « sites clés en main », initialement lancé en 2020 et enrichi d'une seconde vague en 2023 dans le cadre de la loi n° 2023-973 du 23 octobre 2023 relative à l'industrie verte.
Ce dispositif, visant à accélérer la réindustrialisation en offrant des terrains prêts à accueillir des activités économiques, rencontre des limites significatives. En dépit des objectifs annoncés, les résultats demeurent en-deçà des attentes, notamment en raison de l'orientation prioritaire vers de grands sites industriels destinés à des investisseurs étrangers. Par ailleurs, l'accompagnement des collectivités, en particulier celles disposant de ressources limitées pour mettre en valeur leurs sites, semble insuffisant. De nombreux sites labellisés ne répondent pas pleinement aux critères administratifs et réglementaires nécessaires à leur mobilisation rapide.
De plus, seuls 10 % des besoins estimés en foncier industriel d'ici 2030 seraient couverts par les 55 nouveaux sites clés en main annoncés, ce qui ne répond pas à l'ambition d'une réindustrialisation diversifiée. L'approche actuelle semble négliger les besoins des petites et moyennes entreprises (PME) et entreprises de taille intermédiaire (ETI) déjà implantées localement, qui jouent pourtant un rôle clé dans la revitalisation des territoires.
Face à ces constats, elle souhaiterait savoir quelles mesures concrètes le Gouvernement envisage de mettre en oeuvre pour élargir le programme des « sites clés en main » et répondre aux critiques formulées. Elle demande notamment si un volet territorialisé, piloté par les régions et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI), pourrait être mis en place afin de mieux accompagner les collectivités locales dans la préparation et la valorisation de leurs sites, et si des mécanismes de mutualisation ou de portage des coûts des études préalables sont envisagés pour faciliter l'anticipation des projets. Enfin, elle l'interroge sur les efforts envisagés pour améliorer la communication et l'accessibilité de ces sites auprès des entreprises françaises.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique publiée le 26/06/2025

Depuis plusieurs années, la facilitation des implantations industrielles constitue une priorité du Gouvernement. Cette ambition se traduit concrètement par la loi industrie verte, dont les décrets d'application sont entrés en vigueur en octobre 2024, ainsi que par le projet de loi actuellement en cours d'examen relatif à la simplification de la vie économique. À cet égard, les 55 sites industriels « clés en main » labellisés en avril dernier sont le fruit de critères de sélection exigeants en matière d'artificialisation des sols, de maîtrise foncière et de géolocalisation. Ces derniers, de maturité variable, font l'objet d'un suivi renforcé par les opérateurs et les services de l'État. Ils ont vocation à être valorisés auprès des porteurs de projet (s). Aussi et dans le cadre de la gouvernance locale, les services de l'Etat ont vocation à entamer le dialogue en amont des projets avec l'ensemble des parties prenantes - coordonnées sous l'égide d'un sous-préfet référent. Depuis le lancement de cette démarche, une feuille de route individualisée a été réalisée sur chacun des sites, et les opérateurs partenaires, notamment la banque des territoires et l'ANCT (agence nationale de la cohésion des territoires), réalisent plusieurs études complémentaires (en matière de modèle économique, de modalité de portage foncier ou encore de positionnement du site vis-à-vis d'un territoire) pour appuyer les porteurs de projet (s) vers le « clé en main ». Le Gouvernement partage votre ambition de massifier d'avantage le nombre de sites véritablement « clés en main » en France. C'est pourquoi des réflexions sont en cours, en lien avec le ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, pour permettre une sélection des sites « au fil de l'eau » et faciliter des implantations plus rapides. La loi industrie verte a permis de multiples avancées en matière d'accélération et de simplification des procédures d'autorisation, en particulier environnementales, en réduisant les délais d'instruction de 17 à 9 mois. À titre de comparaison, en Allemagne, la durée moyenne de ces procédures s'établit entre 9 et 12 mois. Cette loi instaure également un statut de projet d'intérêt national majeur (PINM), destiné aux projets stratégiques. Ce statut permet de bénéficier de procédures accélérées en matière d'urbanisme, de raccordement électrique, ainsi que d'une sécurisation renforcée des dérogations relatives aux espèces protégées, en fonction des besoins spécifiques de chaque projet. Afin de mieux anticiper et de sécuriser les obligations écologiques qui incombent aux porteurs de projets, la loi industrie verte a permis le lancement de sites naturels de compensation, de restauration et de renaturation (SNCRR), qui peuvent bénéficier à tout projet, y compris hors des sites dits « clés en main ». Au niveau local, l'article 3 de la loi renforce le rôle des établissements publics fonciers (EPF) dans le soutien au développement industriel des territoires. Par ailleurs, l'article 1er confie désormais aux régions la responsabilité de définir, dans leur schéma régional d'aménagement, de développement durable et d'égalité des territoires (SRADDET), des objectifs de développement industriel territorialisés, afin de mieux inscrire l'industrie dans la planification régionale. Ces dispositions seront prochainement complétées par celles prévues dans le projet de loi pour la simplification de la vie économique. Celui-ci prévoit notamment d'étendre le statut de PINM aux centres de données et d'introduire une plus grande souplesse, temporelle et géographique, dans la mise en oeuvre des mesures de compensation écologique. Ces évolutions s'inscrivent dans une logique d'alignement avec les meilleures pratiques européennes, et prennent en compte les conclusions de la mission de l'inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD) d'appui au préfet du Nord, portant sur les enjeux de compensation environnementale et de préservation du foncier agricole dans le Dunkerquois. En outre, le Gouvernement a pleinement conscience que l'accroissement du foncier industriel disponible constitue aussi un levier structurant de réindustrialisation. Les services de l'État déploient ainsi plusieurs outils pour identifier ces espaces sur l'ensemble du territoire national. La réhabilitation des friches constitue une action forte en faveur de la réindustrialisation de nos territoires. Le volet « friche » du fonds vert, doté de 2,5 milliards d'euros en 2024, a permis d'accompagner 164 projets et de les rendre opérationnels. De plus, le programme friche +, porté par la banque des territoires avec le soutien de la Commission européenne, vient renforcer cette stratégie de requalification en faveur des usages industriels. Conscient des contraintes induites par la trajectoire zéro artificialisation nette (ZAN) sur les projets industriels, le Gouvernement a prévu des mécanismes d'adaptation. La loi du 20 juillet 2023 relative à l'artificialisation des sols a instauré un forfait d'artificialisation de 12 500 hectares destiné aux « projets d'envergure nationale ou européenne » (PENE), dont un grand nombre relève du secteur industriel. En complément, une disposition du projet de loi portant simplification de la vie économique (SVE) prévoit une exemption temporaire du ZAN pour les projets industriels, sur une durée de cinq à dix ans, afin de garantir la soutenabilité du développement industriel dans les territoires. L'ensemble de ces actions témoigne de la détermination du Gouvernement à répondre aux enjeux fonciers et réglementaires de l'ensemble du tissu industriel, y compris les petites et moyennes entreprises (PME), dont les besoins en surface sont plus réduits. L'offre foncière est d'ailleurs consultable sur la plateforme France foncier, développée par la banque des territoires et le Cerema (centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement), où près de 730 sites représentant plus de 6 700 hectares sont actuellement disponibles. Au-delà des aspects fonciers, l'attention portée aux PME industrielles se manifeste également au coeur des politiques de financement, notamment à travers le plan en faveur des startups et PME industrielles innovantes, lancé en janvier 2022, ou encore le programme territoires d'industrie, qui accompagne activement 183 territoires labellisés à travers le pays, avec des moyens dédiés et une animation territoriale renforcée. Madame la députée peut être assurée de la pleine mobilisation du Gouvernement pour accompagner la réindustrialisation de notre pays, dans le respect des équilibres environnementaux et au service de nos territoires.

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