Question de Mme GRUNY Pascale (Aisne - Les Républicains) publiée le 17/04/2025
Mme Pascale Gruny attire l'attention de Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi sur le bilan de la réforme des accords agréés 5 ans après leur entrée en vigueur.
La loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées prévoit que les employeurs qui n'atteignent pas 6 % de taux d'emploi de personnes handicapées peuvent s'exonérer du versement de la contribution financière à l'association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (Agefiph) en signant un accord - de branche, d'entreprise, de groupe ou d'établissement - avec les partenaires sociaux (article L. 5212-8 du code du travail). Cet accord, pour être agréé, doit comporter un programme pluriannuel en faveur du maintien en emploi ou du recrutement des travailleurs handicapés, pour un montant au moins égal à celui de la contribution due.
L'objectif de ces accords agréés est de « responsabiliser » les entreprises par le biais du dialogue social, en leur permettant de s'approprier l'objectif d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) et en mobilisant les missions handicap au sein des établissements. En 2015, le budget total des accords agréés arrivant à leur terme était évalué à 350 millions d'euros par le ministère du travail.
La loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel (2018) a réformé les accords agréés en les limitant à partir du 1er janvier 2020 à une durée de trois ans, renouvelable une fois. Les derniers accords agréés ont été signés le 31 décembre 2023 et prendront ainsi fin au plus tard le 31 décembre 2026. Seules les entreprises qui n'ont jamais conclu un tel accord pourront donc, après cette date, avoir recours à ce dispositif mais toujours pour une durée maximale de six ans.
Le Gouvernement, à l'initiative de cette réforme, l'avait motivée par le souci de privilégier l'emploi direct des personnes handicapées dans les entreprises qui ne satisfont pas au taux minimal de 6 % - il avait en effet dénoncé la faible efficacité de ces accords et souligné la perte de recettes qui en découle pour l'Agefiph ; en effet, la logique de ce système est que l'établissement arrive au bout de quelques années, grâce à la mise en oeuvre de son programme, au taux d'emploi de 6 % ; enfin, le versement des contributions à l'Agefiph permet une « centralisation » des moyens, redirigés ensuite vers les entreprises qui ont le plus besoin d'aides pour procéder à des aménagements de poste ou à des formations.
En première lecture du projet de loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, le Sénat avait adopté un amendement pour supprimer cette réforme des accords agréés. La commission des affaires sociales s'était en effet positionnée contre cette réforme, car une étude de la Direction de l'animation de la recherche, des études et des Statistiques (Dares) de 2016 montrait que les accords agréés étaient à l'origine d'actions de recrutement et de maintien dans l'emploi plus dynamiques, et coïncidaient avec un taux d'emploi direct supérieur pour les établissements de moins de 500 salariés. Avec la fin des accords agréés, les missions handicap présentes au sein des entreprises, administrations, etc. perdraient des moyens financiers et donc d'action ; la commission avait ainsi qualifié la réforme proposée par le Gouvernement de « maximaliste » au regard des effets bénéfiques des accords agréés.
Compte tenu de ces éléments et de l'entrée en vigueur de cette réforme il y a 5 ans, elle souhaiterait en connaître les premiers effets et le suivi.
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Transmise au Ministère délégué auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de l'autonomie et du handicap
Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de l'autonomie et du handicap publiée le 26/06/2025
La loi n° 2018-771 du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, entrée en vigueur au 1er janvier 2020, rénove profondément l'Obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH). La participation des personnes en situation de handicap au marché du travail a évolué de manière favorable : leur taux de chômage a baissé de 18 % en 2018 à 12 % en 2023, et leur taux d'emploi est passé de 36,1 % à 39 %. Les progrès sont significatifs mais des marges de progrès demeurent. A ce titre, la loi de 2018 vise le renforcement de l'emploi direct, et en conséquence a fait évoluer le dispositif des accords handicap agréés : depuis le 1er janvier 2020, la durée des accords agréés, d'entreprise, de groupe ou de branche, est limitée pour chaque employeur à une durée de trois ans, renouvelable une fois (soit une durée totale de six ans). Ces dispositions résultent d'une concertation large, y compris avec les partenaires sociaux. L'encadrement dans le temps de la durée des accords agréés n'est pas une suppression du dispositif des accords agréés, mais le choix de leur recentrage comme outil d'amorçage de l'engagement des employeurs pour le développement de l'emploi direct des travailleurs handicapés. La durée de six ans a été admise comme un temps d'apprentissage nécessaire à l'élaboration d'une politique pour l'emploi des travailleurs handicapés au sein de l'entreprise ou du groupe à travers le dialogue social, et permettant ensuite d'instaurer durablement, au sein des entreprises, une politique d'emploi en direction des travailleurs en situation de handicap ne dépendant pas exclusivement d'un dispositif d'exonération fiscale mais d'une réelle modification des pratiques organisationnelles à l'échelle de l'employeur, à travers notamment une meilleure appréhension des environnements de travail. Ainsi, s'il a été mis fin à la possibilité de reconduire sans limitation de durée des accords agréés, l'agrément n'a pas été supprimé. En outre, les accords collectifs de droit commun portant sur l'emploi des travailleurs handicapés peuvent à l'inverse être conclus pour une durée indéterminée. La loi du 5 septembre 2018 fait ainsi confiance à l'ensemble des acteurs de l'entreprise pour inscrire de façon pérenne, le handicap, comme un axe prioritaire du dialogue social. Depuis la loi du 11 février 2005, les branches professionnelles doivent engager tous les trois ans des négociations sur les mesures favorisant l'insertion et le maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés. Pour les entreprises, cette obligation est annuelle. Les employeurs qui sortent d'une période d'accord agréé sont accompagnés par l'Association de gestion du fonds pour l'insertion des personnes handicapées (AGEFIPH) et peuvent bénéficier pour poursuivre leurs engagements : - d'un accompagnement de proximité par un interlocuteur dédié au sein de l'AGEFIPH ; - de la possibilité de mobiliser directement les aides et les prestations à destination des entreprises (sans prescription préalable par un acteur du service public de l'emploi notamment) ; - d'une instruction simplifiée des demandes d'aides financières dans le cadre d'une « démarche confiance », permettant d'engager les actions sans attendre l'accord de l'AGEFIPH ; - d'une enveloppe financière annuelle constituant une avance d'aides, pour engager les dépenses nécessaires à l'aménagement des situations de travail (dans la limite d'un montant de 5 000 euros par aménagement et dans le respect des principes d'intervention définis par l'AGEFIPH). Des conventions de politique d'emploi avec, le cas échéant, un financement associé, peuvent également être mises en place au bénéfice des entreprises sortant d'un accord agréé par l'Etat. Selon le rapport IGAS (Inspection générale des affaires sociales) 2024-53 : « Toutes les entreprises concernées ont été contactées par une task force nationale créée à cet effet par l'AGEFIPH, une offre de services ad hoc leur a été proposée, la convention de services, qui permet notamment un accès simplifié aux aides de l'association, 50 % des sortants (d'accords agréés en) 2023 ont ainsi conclu une convention de services. » Les employeurs sont donc invités à se saisir de cette offre spécifique ouverte par l'AGEFIPH pour consolider les acquis (expertise, plan d'actions) issus de la période sous accord agréé et ainsi maintenir la dynamique des recrutements directs et du maintien dans l'emploi. Enfin ,dans ce même rapport, l'IGAS souligne que : « si les accords agréés ont un effet positif en termes de prise en compte du handicap dans la négociation sociale et de développement de plans d'action, leur effet levier sur le taux d'emploi semble inégal. Cela interroge au regard des montants importants d'exonération de la contribution OETH qu'ils ont pu induire ». Au cours des dernières années, d'après les informations déclarées en déclaration sociale nominative par les employeurs couverts par un accord agréé, le montant global des budgets annuels des accords agréés s'élève en moyenne à environ160 Meuros. Parallèlement, en 2023 et 2024, il a été demandé aux entreprises couvertes par des accords agréés prenant fin en 2022 pour les uns et en 2023 pour les autres, de reverser aux organismes de sécurité sociale, respectivement 38 Meuros et 35 Meuros après analyse de leurs bilans finaux, au motif de non-réalisation de leurs engagements et budgets à consacrer à l'accompagnement de l'emploi et au maintien dans l'emploi des travailleurs handicapés. Enfin, les nouveaux accords entrés en vigueur en 2020 dont l'agrément a pu être renouvelé en 2023, arrivent à échéance seulement au 31 décembre 2025. Une évaluation du nouveau dispositif des accords agréés sera alors à conduire dans les années suivantes. Une évaluation de l'impact des conventions de services accompagnant la sortie des accords sera parallèlement demandée à l'AGEFIPH.
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