Question de M. SALMON Daniel (Ille-et-Vilaine - GEST) publiée le 24/04/2025

M. Daniel Salmon interroge Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur les retards persistants dans la mise en oeuvre de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) pour les produits et matériaux de construction du secteur du bâtiment, instaurée par la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire (dite loi AGEC).
Cette filière, demandée de longue date par les collectivités territoriales et leurs représentants, vise à pallier l'insuffisance de points de collecte pour les déchets de matériaux du bâtiment, et à lutter contre la prolifération des dépôts sauvages, dont les conséquences sont parfois dramatiques, comme en témoigne le décès du maire de Signes en 2019.
La REP bâtiment devait également permettre de soulager les déchèteries publiques, de plus en plus sollicitées pour la prise en charge des déchets professionnels, tout en contribuant à l'atteinte des objectifs de recyclage et de réduction de moitié du stockage en France fixés par la loi AGEC.
Or, cinq ans après l'adoption de ce texte, la mise en oeuvre de la filière demeure incomplète et a été retardée en 2023 par décision ministérielle. En mars 2025, un moratoire a également été acté, visant l'application de certaines dispositions devant entrer en vigueur à partir de 2025. Un tel report est préjudiciable tant pour les collectivités et leurs contribuables que pour les entreprises du bâtiment, qui sont en droit d'attendre un service de collecte gratuit et opérationnel sur l'ensemble du territoire, comme le prévoit la loi AGEC.
En 2024, les éco-organismes agréés de la filière auront collecté environ 6 % des déchets du bâtiment du second oeuvre au lieu des 53 % qui leur étaient assignés. Le réseau des points de maillage tous les 10 ou 20 kilomètres pour collecter sélectivement 6 matériaux et les inertes n'est pas prêt dans de nombreuses régions et certains points de distribution de matériaux de plus de 4000 m² ne respectent pas leur obligation de proposer un point de reprise gratuit des déchets.
Les éco-organismes agréés prévoient une recette de 1,2 milliard d'euros pour l'année 2024, somme qui doit permettre d'assurer un maillage efficace des points de collecte, de financer leur gestion, de soutenir les filières de réemploi et de recyclage, et d'informer les professionnels. Or, ces derniers en viennent à contester cette filière qui ne rend pas le service attendu au regard des éco-contributions versées.
Aussi, il lui demande de préciser les mesures concrètes que le Gouvernement entend prendre pour garantir la pleine application de la REP bâtiment dans les délais les plus courts et assurer l'équité territoriale dans l'accès au service de collecte.

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Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 26/06/2025

La filière à responsabilité élargie des producteurs a été créée dans la loi AGEC de février 2020 pour répondre à trois objectifs. Le premier objectif consiste à lutter contre les dépôts sauvages, notamment en créant un réseau de points de collecte afin que les artisans du bâtiment puissent déposer les déchets triés au plus près de leurs chantiers. Le deuxième objectif consiste à développer le recyclage des déchets de bâtiment, le secteur du bâtiment et des travaux publics étant la première filière économique productrice de déchets en France. Le troisième objectif portait sur le développement de l'écoconception des produits et matériaux de construction, afin d'en faciliter leur réemploi ou leur recyclage. Cette filière était très attendue par de nombreuses parties prenantes, notamment les collectivités territoriales qui supportent aujourd'hui une partie des coûts de gestion des déchets du bâtiment, y compris, pour nombre d'entre elles, des déchets amenés par des professionnels. En outre, elles doivent faire face au phénomène des dépôts sauvages qui leur coûte environ 400 millions d'euros par an. Le déploiement de cette filière repose sur un principe de reprise gratuite des déchets lorsqu'ils sont triés, et le développement d'un maillage resserré de points de collecte de proximité accessibles à tout détenteur, qu'il soit un particulier ou un professionnel du bâtiment. Pour assurer cette reprise sans frais, les éco-organismes ont l'obligation de soutenir financièrement les opérateurs qui assurent d'ores et déjà la collecte de ces déchets, afin de couvrir les coûts qu'ils supportent pour ces opérations. Ces soutiens financiers sont apportés à toute personne qui en fait la demande, sans discrimination, dès lors que cette personne accepte les clauses des contrats-types qui ont été élaborés par les éco-organismes. Les objectifs de déploiement de la filière à responsabilité élargie du bâtiment étaient particulièrement ambitieux à sa création. Toutefois, sa mise en oeuvre a rencontré un certain nombre de difficultés qui ont ralenti le processus de déploiement des points de collecte, ce qui a pu générer une certaine forme de frustration pour les artisans du bâtiment. Dans le même temps, les fournisseurs de produits de construction ont répercuté sur leurs clients le montant des éco-contributions versées par les metteurs en marché initiaux de ces produits. Face aux préoccupations exprimées sur le sujet, la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche a annoncé un moratoire sur les mesures qui devaient entrer en vigueur en 2025 et lancé une grande consultation de l'ensemble des acteurs de la filière. La question du recyclage et de la valorisation de la reprise des déchets de bois est une question particulièrement prégnante. Des entretiens ont eu lieu au mois de mai pour discuter des propositions exprimées par les différents acteurs. La ministre annoncera le périmètre exact du moratoire et les orientations ayant vocation à structurer la refonte du cahier des charges d'ici à l'été. L'objectif est de mettre en place le nouveau cahier des charges avant la fin de l'année.

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