Question de Mme BRIQUET Isabelle (Haute-Vienne - SER) publiée le 01/05/2025

Question posée en séance publique le 30/04/2025

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Isabelle Briquet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.

Monsieur le ministre, il y a huit ans, la majorité promettait monts et merveilles avec la suppression de la taxe d'habitation : plus de pouvoir d'achat pour les Français, pas de pertes pour les collectivités, et des finances publiques sous contrôle.

Mais, aujourd'hui, les faits sont têtus : le déficit public atteint 5,8 % du PIB ; la dette publique dépasse 113 % du PIB ; les collectivités locales sont privées de leviers fiscaux et dépendent des dotations de l'État ; le financement des services publics locaux est déséquilibré. Le constat est sans appel.

Les collectivités locales, injustement accusées de dégrader les comptes publics, ne sauraient être des variables d'ajustement budgétaire ni être cantonnées à un simple rôle de guichet de l'État.

Et pourtant, le Président de la République continue d'exclure toute remise en cause d'une décision déjà injustifiée en 2017, devenue totalement irresponsable en 2025.

Monsieur le ministre, vous avez récemment évoqué l'idée d'une contribution des citoyens au financement des services publics locaux. Cette proposition a le mérite d'ouvrir le débat sur la fiscalité locale et, plus largement, sur les ressources des collectivités. Vous êtes donc assez lucide pour mesurer l'impasse dans laquelle nous sommes.

Allez-vous continuer de défendre la suppression de la taxe d'habitation, réforme qu'au fond vous savez mauvaise, ou choisirez-vous de redonner aux élus locaux l'autonomie financière dont ils ont besoin ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation publiée le 01/05/2025

Réponse apportée en séance publique le 30/04/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.

M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Madame la sénatrice Isabelle Briquet, votre question me permet de faire le point sur trois questions essentielles.

Premièrement, la taxe d'habitation a été supprimée, conformément à l'annonce faite par le Président de la République pendant sa campagne électorale. Celui-ci a tenu ses engagements : dont acte. (Murmures désapprobateurs sur des travées du groupe Les Républicains.)

M. François Patriat. Très bien !

M. François Rebsamen, ministre. Aujourd'hui, beaucoup de parlementaires envisagent de la rétablir, mais je n'ai vu aucune proposition de loi déposée sur le sujet...

Deuxièmement, je veux aborder la question de nos finances publiques. Actuellement, nous sommes en train, sous l'autorité du Premier ministre, de faire la pédagogie de l'état de ces finances publiques, c'est-à-dire du grave déficit que connaît notre pays. Je voudrais dire à cet égard que rien n'est arbitré, mais que le travail de pédagogie continue.

Ainsi, je recevrai mardi prochain l'ensemble des associations d'élus connues et reconnues, lesquelles sont au nombre de sept. Nous débattrons ensemble d'un certain nombre de réflexions et des propositions qui pourraient en résulter. Mais j'y insiste, rien n'est arbitré en matière budgétaire.

Troisièmement, je le dis depuis longtemps - et je vais continuer à le dire, comme je l'ai encore fait récemment devant la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat que préside le sénateur Bernard Delcros -, cette situation, qui veut que seul un certain nombre de personnes, en l'occurrence les propriétaires, financent les communes, ne pourra pas durer longtemps. Sachez que, dans certaines communes, il n'y a que 30 % de propriétaires ; il y a donc 70 % de personnes qui ne paient pas l'impôt local...

Mon idée - mais ce n'est pas la seule ! -, qui est bien souvent reprise par la collectivité, consiste à créer à terme une contribution, afin que chacun mesure les efforts réalisés par les communes en matière de services publics ; cette contribution permettrait de recréer un lien citoyen entre le consommateur-habitant et la municipalité, laquelle est responsable des services publics communaux. (Applaudissements sur des travées du groupe RDPI.)

M. Patrick Kanner. Ce n'est pas ce que dit Mme de Montchalin !

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Briquet, pour la réplique.

Mme Isabelle Briquet. Vous le voyez bien, monsieur le ministre, la suppression de la taxe d'habitation n'a pas été seulement une erreur budgétaire, elle est aussi une faute politique ! C'est une faute pour les collectivités privées d'une grande part de leur autonomie fiscale et financière, une faute pour l'État qui perd chaque année plus de 20 milliards d'euros de compensation - je pense que l'État n'a pas besoin de cela ! - et, enfin, comme vous venez de le préciser, une faute pour les contribuables locaux.

J'entends votre proposition, mais encore faudrait-il que cette contribution soit calculée en fonction des revenus, ce qui n'est absolument pas le cas. Aujourd'hui, cette situation nourrit, vous le savez, le ressentiment.

M. le président. Il faut conclure !

Mme Isabelle Briquet. Refuser de reconnaître cet échec, c'est condamner un peu plus nos collectivités. Il faut donc agir ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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