Question de M. DUMOULIN Éric (Yvelines - Les Républicains-A) publiée le 01/05/2025
Question posée en séance publique le 30/04/2025
M. le président. La parole est à M. Éric Dumoulin, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)
M. Éric Dumoulin. Madame la ministre de Montchalin, on vient de l'évoquer, le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation vient de lancer ce que l'on pourrait appeler un ballon d'essai sur la création d'une sorte de nouvel impôt local, une contribution modeste demandée à tous les ménages pour le financement des services publics des communes.
Au-delà du buzz médiatique, cette annonce s'apparente en réalité au rattrapage d'un péché originel, celui de la suppression de la taxe d'habitation. (C'est vrai ! sur les travées du groupe Les Républicains.) Mal réfléchie, mal financée, cette réforme a profondément déstabilisé tout l'édifice déjà fragile des finances locales.
Par ce jeu de bonneteau fiscal, les communes et, par ricochet, les départements ont perdu tout ou partie de leur autonomie. Profondément déstabilisées et pourtant incomparablement plus vertueuses que l'État, elles souffrent !
Accessoirement, on l'a vu, cette réforme aura coûté environ 20 milliards d'euros au budget de l'État, ce qui n'aide pas celui-ci à combler son déficit abyssal.
La fiscalité locale repose donc désormais sur les seuls propriétaires. Les locataires ne financent plus les services publics de proximité, dont ils sont pourtant bénéficiaires au quotidien. Cette distorsion contribue à créer un fossé entre les citoyens d'une même ville.
Faut-il également rappeler que les collectivités locales représentent 70 % de l'investissement public et que, dans un contexte de crise et de très faible croissance, elles constituent pour le tissu économique et les entreprises une ressource absolument vitale ?
Il convient donc de les protéger, de les accompagner, plutôt que de les ponctionner à l'aveugle. S'il est compréhensible qu'elles participent à l'effort national de redressement des comptes publics, elles ne peuvent devenir la variable d'ajustement trop facile des comptes ou, plutôt, des mécomptes de l'État.
Les collectivités sont à ce jour profondément inquiètes de ce que l'État leur concocte pour le budget 2026. Les chiffres d'un doublement, voire d'un triplement de l'effort demandé en 2025, hantent les couloirs.
Madame la ministre, dans l'attente d'une grande réforme et d'une indispensable remise à plat de tout le système de financement des collectivités locales, je n'aurai qu'une seule question : que pouvez-vous leur dire pour les rassurer et nous rassurer ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées du groupe INDEP.)
M. Jean-François Husson. Bravo !
- page 5141
Réponse du Ministère auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé des comptes publics publiée le 01/05/2025
Réponse apportée en séance publique le 30/04/2025
M. le président. La parole est à Mme la ministre chargée des comptes publics.
Mme Amélie de Montchalin, ministre auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée des comptes publics. Monsieur le sénateur, pour vous rassurer, d'abord, je serai très claire : ce gouvernement ne souhaite pas instituer de nouveaux impôts dans le prochain budget.
M. Patrick Kanner. Ce n'est pas ce que dit M. Rebsamen !
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Nous sommes déjà le pays recordman du monde des impôts, et ce gouvernement est, je crois, très fier d'avoir pu rendre 700 euros en moyenne aux Français grâce à la suppression de la taxe d'habitation.
M. Olivier Paccaud. Et la dette ?
Mme Amélie de Montchalin, ministre. Je tiens également à vous dire que, à moyen terme, comme le ministre Rebsamen vient de l'indiquer, nous voulons donner davantage de visibilité et clarifier le lien entre les contribuables et leurs services publics, ainsi que celui entre le citoyen et son maire, dans l'ensemble du pays. C'est d'ailleurs dans ce sens que je travaille au niveau national : je veux que les Français comprennent mieux, voient mieux où vont leurs impôts.
Que prévoyons-nous pour les collectivités dans la perspective du projet de loi de finances pour 2026 ? Mardi prochain, le Premier ministre, Éric Lombard, François Rebsamen et moi-même allons lancer la conférence de financement des territoires qui a pour objectif de redonner de la prévisibilité aux collectivités.
Certes, les collectivités ne sont pas les filiales de l'État, mais il existe aujourd'hui un grand malentendu qui s'est installé à la faveur de la dichotomie ou de la désynchronisation entre les agendas des maires, qui sont élus pour six ans, et des ministres des comptes publics successifs, dont l'objectif est de bâtir un budget sur l'année.
En réalité, les maires veulent savoir où ils vont quand l'État est, lui, le garant d'un retour à 3 % de déficit d'ici 2029. Nous y parviendrons par le dialogue, par la remise en cause des normes trop nombreuses qui créent des dépenses inutiles, par une réflexion sur nos ressources humaines, la fonction publique territoriale, et le pilotage par les maires eux-mêmes et les collectivités de leurs dépenses.
Il nous faut coconstruire une trajectoire pluriannuelle de nos comptes et un cadre de prévisibilité. Cette réponse, qui passe par le dialogue, me semble mature : il s'agit de réfléchir collectivement à la meilleure manière de revenir, tout en étant solidaires des finances de la Nation, à une situation qui ne laissera pas de dettes supplémentaires à nos enfants.
M. François Bayrou, Premier ministre. Très bien !
- page 5141
Page mise à jour le