Question de Mme PAOLI-GAGIN Vanina (Aube - Les Indépendants) publiée le 08/05/2025

Question posée en séance publique le 07/05/2025

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants  République et Territoires. (Applaudissements sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)

Mme Vanina Paoli-Gagin. Monsieur le ministre, l'École polytechnique, le Conservatoire national des arts et métiers (Cnam), l'éducation nationale, les ministères régaliens, voire des opérateurs d'importance vitale, ont récemment choisi des solutions numériques américaines portant sur de gros volumes de données sensibles, y compris de santé, pour des centaines de millions d'euros. Ainsi se multiplient nos dépendances à des prestataires technologiques extraeuropéens.

Lundi dernier, j'ai assisté à la conférence Choose Europe for science. Le Président de la République y a rappelé que l'absence de cloud souverain européen a été une erreur stratégique majeure participant de notre vassalité.

À la mi-mars, j'ai alerté les ministres Amélie de Montchalin et Clara Chappaz. Votre courrier conjoint à toutes les tutelles, monsieur le ministre, ainsi que le contrat stratégique de filière Logiciels et solutions numériques de confiance vont dans le bon sens. Mais, de grâce, passons du mode observatoire au mode exécutoire !

Monsieur le ministre, le décalage entre les paroles et les actes vous a précédé, mais des chiffres fiables et consolidés de l'achat public numérique via l'Union des groupements d'achats publics (Ugap) ou autres font toujours défaut. Cela suscite des interrogations sur l'appropriation de l'article 31 de la loi visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique, dite loi Sren. J'avais entrevu ce problème lors d'un récent contrôle sur la commande publique des universités.

Cela interroge d'autant plus que la donnée est duale par nature. En outre, le contexte géopolitique rend vitale notre protection, car les solutions américaines embarquent l'extraterritorialité de la législation FISA (Foreign Intelligence Surveillance Act), y compris en Europe. Or 82 % des requêtes sont exploitées à des fins d'intelligence économique. Cessons d'être naïfs !

Dans le triple objectif d'assurer la bonne gestion de nos données publiques, de gagner la confiance de nos concitoyens et de protéger nos données, quand allez-vous procéder, monsieur le ministre, à un audit de la chaîne de la commande publique numérique ? À quand une obligation de justifier objectivement du choix de toute solution non européenne ? (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.  Mme Marie-Claire Carrère-Gée applaudit également.)

M. Mickaël Vallet. Bravo !


Réponse du Ministère de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification publiée le 08/05/2025

Réponse apportée en séance publique le 07/05/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification.

M. Laurent Marcangeli, ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification. Madame la sénatrice Paoli-Gagin, vous avez raison : la commande publique n'est pas seulement un sujet technique ; c'est avant tout un levier stratégique de souveraineté et de résilience.

La commande publique est stratégique, parce qu'elle représente 170 milliards d'euros de dépenses publiques par an et cache des enjeux majeurs de souveraineté et d'indépendance, notamment en matière de défense et de numérique.

Le Gouvernement suit avec un grand intérêt les travaux de la commission d'enquête du Sénat sur les coûts et les modalités effectifs de la commande publique et la mesure de leur effet d'entraînement sur l'économie française. Une mission de l'inspection générale des finances a également été lancée en novembre dernier sur les pratiques des centrales d'achat public ; elle devrait venir nourrir notre réflexion d'ici au mois de juin.

Comme vous, je suis convaincu que nous devons cesser d'être les grands naïfs de la mondialisation. L'argent public doit être mis en priorité au service de notre souveraineté économique. Avec les ministres Amélie de Montchalin et Clara Chappaz, j'assume un pilotage plus exigeant de notre doctrine d'achat public, pour en faire un véritable levier de transformation stratégique.

Près de 145 millions d'euros ont déjà été engagés par les administrations dans les solutions cloud, sur les recommandations de l'Agence nationale de la sécurité des systèmes d'information (Anssi) et conformément à la doctrine cloud de l'État et à son label « cloud de confiance ». Les acteurs français ont réussi à capter près de 65 % de ces marchés pour un montant d'environ 90 millions d'euros. Pour l'État central, cette part atteint même 95 %, preuve que nous pouvons y arriver.

Pour renforcer notre résilience et notre indépendance, la loi Sren impose désormais le recours au label SecNumCloud ou à un équivalent européen pour toute utilisation de données sensibles dans l'administration. Ces résultats sont le fruit d'un engagement clair en faveur de notre souveraineté.

Enfin, nous devons simplifier l'accès à notre commande publique grâce au projet de loi de simplification de la vie économique. Les seuils de marché public seront modifiés, vous le savez. Ils seront également relevés pour les entreprises du secteur de la défense.

Vous pouvez en tout cas compter sur mon action, madame la sénatrice, ainsi que sur celle du Gouvernement. (Applaudissements sur des travées du groupe INDEP.  M. François Patriat applaudit également.)

M. le président. La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour la réplique.

Mme Vanina Paoli-Gagin. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. Nous comptons sur votre action dans le réel. Nos données et nos euros doivent autant que possible rester à la maison ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Emmanuel Capus. Bravo !

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