Question de M. ROIRON Pierre-Alain (Indre-et-Loire - SER) publiée le 15/05/2025
M. Pierre-Alain Roiron attire l'attention de Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi sur la nécessité de clarifier la réglementation applicable aux boulangeries-pâtisseries le 1er mai, jour de la fête du travail.
Conformément à l'article L. 3133-4 du code du travail, cette journée est la seule à être obligatoirement chômée pour l'ensemble des salariés, sauf dans les établissements qui, en raison de la nature de leur activité, ne peuvent interrompre le travail, conformément à l'article L. 3133-6 du même code. Or, le statut des boulangeries-pâtisseries demeure incertain à ce jour.
Jusqu'à récemment, une position ministérielle issue d'un courrier du 23 mai 1986 de Mme Martine Aubry, alors directrice des relations du travail, permettait aux boulangeries bénéficiant déjà d'une dérogation au repos dominical d'employer des salariés le 1er mai. Or, selon une circulaire de la confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie, cette doctrine est désormais considérée comme obsolète au regard de l'évolution du droit et de la jurisprudence, notamment de la décision de la Cour de cassation du 14 mars 2006 qui impose à l'employeur de démontrer que l'activité ne peut être interrompue ce jour-là.
Cette situation crée une incertitude majeure pour les professionnels, confrontés au risque de sanctions s'ils emploient leurs salariés ce jour-là sans pouvoir justifier du caractère « essentiel » ou « indispensable » de leur activité. À ce titre, la confédération leur recommande de ne pas ouvrir le 1er mai afin d'éviter toute mise en cause. Il convient de rappeler que le 1er mai constitue un acquis social majeur, né des combats ouvriers, consacré depuis plus de quatre-vingts ans comme jour férié et chômé pour l'ensemble des salariés, sans que son application ait, jusqu'à présent, suscité de contestations notables quant à son principe. Toutefois, les préoccupations des artisans boulangers semblent légitimes, en particulier dans les territoires ruraux, lorsqu'ils constatent que, dans un même temps, certaines supérettes sont autorisées à ouvrir leurs portes - dès lors que le patron assure seul le service - et que de grandes surfaces, dotées de dispositifs de caisse automatisée, sont en mesure d'accueillir leur clientèle, instaurant, de fait, une distorsion de concurrence directe et significative au détriment notamment des artisans boulangers.
Ainsi, il demande au Gouvernement s'il entend clarifier les critères permettant de considérer qu'une boulangerie-pâtisserie exerce une activité « ne pouvant être interrompue », au sens de l'article L. 3133-6, et s'il envisage de rétablir une équité de traitement entre les artisans boulangers et pâtissiers, d'une part, et les supérettes ou commerces à dominante alimentaire autorisés à ouvrir le 1er mai, d'autre part.
- page 2374
Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé du travail et de l'emploi publiée le 19/06/2025
Le 1er mai est en France un jour férié et obligatoirement chômé pour tous les salariés. Ce n'est que par exception qu'il est possible d'employer un salarié au cours de la journée du 1er mai. Cette exception concerne les établissements et les services qui ne peuvent interrompre leur activité. Ces règles sont d'ordre public mais elles ne portent que sur les salariés. Ainsi, les personnes qui ne sont pas salariées et qui travaillent dans les boulangeries peuvent naturellement le faire le 1er mai. Lorsqu'il souhaite employer des salariés ce jour-là, il appartient donc toujours à l'employeur concerné d'établir que, dans sa situation particulière, la nature de l'activité que ses salariés exercent ne permet pas d'interrompre leur travail le jour du 1er mai, ainsi qu'il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation et postérieure à la position ministérielle de 1986. La Cour de cassation (Cass. crim., 14 mars 2006, n° 05-83436) rappelle également qu'il n'existe pas de dérogation de principe au chômage du 1er mai en faveur des établissements bénéficiant d'une dérogation de droit au repos dominical en application de l'article R. 3132-5 du code du travail. Ainsi, il convient d'analyser au cas par cas chaque situation de fait afin de déterminer si, en raison de la nature de l'activité (au regard de circonstances ou de besoins particuliers avérés, des impératifs de sécurité ou de l'intérêt général), l'interruption du fonctionnement de l'entreprise le 1er mai est ou non possible. Certaines activités répondant à une mission de service public (par exemple celle des hôpitaux ou des transports publics) ou qui sont indispensables à la continuité de la vie sociale en ce qu'elles concourent à la satisfaction d'un besoin essentiel du public pourraient ainsi justifier le travail d'un salarié le 1er mai. Afin de pouvoir s'inscrire dans ce cadre, il convient ainsi que l'employeur puisse démontrer par exemple que son activité est indispensable à la continuité de la vie sociale en concourant à un besoin essentiel du public qui ne peut être satisfait autrement, notamment lorsque sur un territoire ou bassin de vie donné, le public ne peut satisfaire un besoin essentiel qu'auprès de cette entreprise. Il en résulte que si elle parvient à justifier de circonstances particulières liées à la nature de son activité, une boulangerie-pâtisserie peut employer des salariés le 1er mai, aucune stipulation conventionnelle n'imposant le repos ce jour-là (l'article 27 de la convention collective nationale de la boulangerie-pâtisserie renvoyant au régime légal s'agissant du 1er mai). Ces dispositions, précisées sur le site internet du ministère du travail, ont été rappelées à la confédération nationale de la boulangerie-pâtisserie française. Toutefois, face aux difficultés remontées sur cette règlementation, le Gouvernement est favorable à une évolution de la loi pour clarifier le cadre applicable et tenir compte à l'avenir, de manière pragmatique, des besoins sur certains secteurs spécifiques, dont fait partie le secteur de la boulangerie-pâtisserie.
- page 3517
Page mise à jour le