Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - Les Républicains-R) publiée le 22/05/2025

Mme Agnès Canayer souligne à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche les difficultés liées à la mise en oeuvre de la filière à responsabilité élargie des producteurs (REP) pour les produits et matériaux de construction du bâtiment (PMCB), instaurée par la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 relative à la lutte contre le gaspillage et à l'économie circulaire, dite loi AGEC.

Cette filière, entrée en vigueur en 2023 après plusieurs reports, constitue un pilier essentiel de la stratégie de transition vers une économie circulaire, en s'appuyant sur le principe du « pollueur-payeur ». Elle vise à réduire les dépôts sauvages, améliorer la collecte par la reprise sans frais des déchets, densifier le maillage territorial des points de collecte, renforcer la traçabilité, favoriser le recyclage, le réemploi et la réutilisation, tout en évitant la saturation des installations de traitement.

Cependant, cinq ans après l'adoption de la loi, force est de constater que les objectifs fixés ne sont pas atteints. En 2024, les éco-organismes agréés n'auraient collecté qu'environ 6 % des déchets du second oeuvre, bien en-deçà des 53 % prévus. Le maillage territorial - un point de collecte tous les 10 à 20 kilomètres - reste largement incomplet, certaines régions étant particulièrement sous-dotées. Par ailleurs, plusieurs points de distribution de matériaux de plus de 4 000 m² ne respecteraient pas leur obligation de proposer un point de reprise gratuit, et certains sites continuent de facturer les apports, en contradiction avec les exigences du cadre européen. La filière repose encore essentiellement sur les déchèteries publiques, alors même que la majorité des déchets proviennent d'entreprises du bâtiment et ne relèvent pas des compétences des collectivités locales.

Alors qu'une refondation de la filière REP PMCB et un moratoire sur certaines dispositions à venir en 2025 viennent d'être annoncés, elle souhaite savoir si une évaluation officielle de l'efficacité de la filière a été menée, et quelles en sont les conclusions. Elles seront essentielles pour que les entreprises puissent bénéficier du service prévu, pour soulager les collectivités territoriales, et pour protéger l'environnement, la biodiversité et la santé publique.

Elle demande ainsi quelles mesures concrètes le ministère entend prendre pour renforcer la coordination et les moyens des éco-organismes, compléter le maillage territorial sur l'ensemble du pays, accélérer la création de déchèteries privées, et garantir l'effectivité du principe de reprise gratuite.

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Réponse du Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche publiée le 10/07/2025

La filière à responsabilité élargie des producteurs a été créée dans la loi AGEC de février 2020 pour répondre à trois objectifs. Le premier objectif consiste à développer le recyclage des déchets de bâtiment, le secteur du bâtiment et des travaux publics étant la première filière économique productrice de déchets en France. Le deuxième objectif consiste à lutter contre les dépôts sauvages, notamment en créant un réseau de points de collecte afin que les artisans du bâtiment puissent déposer les déchets triés au plus près de leurs chantiers. Le troisième objectif portait sur le développement de l'écoconception des produits et matériaux de construction, afin d'en faciliter leur réemploi ou leur recyclage. Cette filière était très attendue par de nombreuses parties prenantes, notamment les collectivités territoriales qui supportent aujourd'hui une partie des coûts de gestion des déchets du bâtiment, y compris, pour nombre d'entre elles, des déchets amenés par des professionnels. En outre, elles doivent faire face au phénomène des dépôts sauvages qui leur coûte environ 400 millions d'euros par an. Le déploiement de cette filière repose sur un principe de reprise gratuite des déchets lorsqu'ils sont triés, et le développement d'un maillage resserré de points de collecte de proximité accessibles à tout détenteur, qu'il soit un particulier ou un professionnel du bâtiment. Pour assurer cette reprise sans frais, les éco-organismes ont l'obligation de soutenir financièrement les opérateurs qui assurent d'ores et déjà la collecte de ces déchets, afin de couvrir les coûts qu'ils supportent pour ces opérations. Ces soutiens financiers sont apportés à toute personne qui en fait la demande, sans discrimination, dès lors que cette personne accepte les clauses des contrats-types qui ont été élaborés par les éco-organismes. Les objectifs de déploiement de la filière à responsabilité élargie du bâtiment étaient particulièrement ambitieux à sa création. Toutefois, sa mise en oeuvre a rencontré un certain nombre de difficultés qui ont ralenti le processus de déploiement des points de collecte, ce qui a pu générer une certaine forme de frustration pour les artisans du bâtiment. Dans le même temps, les fournisseurs de produits de construction ont répercuté sur leurs clients le montant des éco-contributions versées par les metteurs en marché initiaux de ces produits. Face aux préoccupations exprimées sur le sujet, la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche a annoncé un moratoire sur les mesures qui devaient entrer en vigueur en 2025 et lancé une grande consultation de l'ensemble des acteurs de la filière. La question du recyclage et de la valorisation de la reprise des déchets de bois est une question particulièrement prégnante. Des entretiens ont eu lieu au mois de mai pour discuter des propositions exprimées par les différents acteurs. La ministre annoncera le périmètre exact du moratoire et les orientations ayant vocation à structurer la refonte du cahier des charges d'ici à l'été. L'objectif est de mettre en place le nouveau cahier des charges avant la fin de l'année.

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