Question de M. BAZIN Arnaud (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 29/05/2025
M. Arnaud Bazin attire l'attention de Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche sur les statistiques d'animaux utilisés à des fins scientifiques et notamment les PNH (primates non humains) et sur le projet de construction d'un centre national de primatologie. Selon les données de l'enquête statistique publiée en avril 2025 sur l'utilisation des animaux à des fins scientifiques, 2 046 754 animaux ont été utilisés en 2023 dans les laboratoires français. Malgré une légère baisse par rapport à l'année précédente, ce chiffre reste stable autour de 2 millions depuis plus d'une décennie nonobstant les engagements européens en faveur d'une transition vers des méthodes alternatives. Depuis novembre 2022, conformément à l'article 10 de la directive 2010/63 UE, les PNH utilisés dans des procédures doivent obligatoirement être issus de PNH élevés en captivité ou bien issus de colonies autonomes. D'après cette enquête, en 2023, la France respecte cette obligation pour 72 % seulement des PNH utilisés en première intention. Le pourcentage global (PNH utilisés + PNH réutilisés) est vraisemblablement bien inférieur (plus proche de 50 à 60 %) étant donné que pour ce qui concerne les PNH réutilisés (1 087 animaux soit près d'un tiers des primates), on ne connaît ni l'origine géographique, ni la génération filiale - F0/F1/F2...).
Il aimerait donc comprendre ce qui fait obstacle au respect intégral de cette obligation. La réutilisation des PNH est un sujet particulièrement préoccupant qui manque de transparence. Il souhaiterait connaître les dispositifs mis en place pour assurer le suivi des PNH faisant l'objet de réutilisations : leur traçabilité d'une part ; l'intégration de leur anamnèse dans l'évaluation des demandes d'autorisation de projet les concernant (leur passé expérimental impactant indubitablement leur futur expérimental) d'autre part ; et bien-sûr la prise en compte du cumul des souffrances endurées (en sus de la douleur, les PNH, possédant un néocortex préfrontal, sont capables de conceptualisation - la souffrance - faisant appel à des capacités de conscience réflexive, d'imagination, d'abstraction et de projection dans le temps).
Par ailleurs, en juin 2024 le Centre national de la recherche scientifique (CNRS) a fait paraître un appel d'offre pour la construction d'un centre de primatologie dans les Bouches-du-Rhône afin de « satisfaire aux besoins de la recherche académique nationale » (laquelle mobilise environ 1/3 des PNH utilisés). Aux 30 millions d'euros hors TVA de la construction s'ajouteront des frais de fonctionnement faramineux (plus de 1700 PNH y sont prévus). Ce budget est sans commune mesure avec celui du FC3R (centre des méthodes alternatives à l'expérimentation animale) doté d'un seul million d'euros annuel. Il aimerait comprendre comment une telle disproportion se justifie, en totale opposition avec la directive européenne 2010/63/UE, qui impose de limiter le recours aux animaux, de favoriser les méthodes alternatives et de garantir la transparence sur ces pratiques.
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Transmise au Ministère auprès de la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche
Réponse du Ministère auprès de la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 07/08/2025
Depuis 2022, le ministère chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche met en oeuvre les recommandations de la Commission européenne publiées la même année dans son guide sur les animaux génétiquement altérés. Cette mise en oeuvre conduit à élargir le champ des animaux comptabilisés en incluant de façon plus large les élevages. En 2022, le nombre d'animaux comptabilisés était de 2 128 058 dont 1 849 859 utilisations directes pour les projets de recherche. En 2023, les chiffres sont respectivement de 2 046 754 et de 1 507 403. La stabilité relative des données statistiques (- 4 %) est la conséquence de l'élargissement du périmètre des animaux comptabilisés. À périmètre équivalent, le nombre d'animaux directement utilisés dans les projets de recherche a en réalité diminué de 19 %. La France respecte intégralement les règles applicables aux données statistiques définies par la Commission européenne dans la décision d'exécution 2020/569 du 16 avril 2020 établissant un format commun et un contenu d'information pour la transmission des informations à déclarer par les États membres en vertu de la directive 2010/63/UE relative à la protection des animaux utilisés à des fins scientifiques. L'alinéa 2.1.2 du B de l'annexe III B précise notamment que les informations relatives au lieu de naissance et à la génération pour les primates réutilisés ne doivent pas être mentionnées. Par ailleurs, l'extension du centre de primatologie du Centre national de la recherche scientifique dans les Bouches-du-Rhône permettra de sécuriser l'accès aux primates qui, bien que ne représentant que 0,1 % du nombre total d'animaux utilisés en recherche, sont critiques pour certains programmes de recherche comme ceux liés aux maladies émergentes ou aux nouvelles approches thérapeutiques. Cela permettra également de limiter la dépendance de la France vis-à-vis de pays tiers, et d'éviter des transports aériens pour les importations d'animaux. Enfin, des projets de développement de méthodes alternatives sont également déployés. Outre le centre français pour les 3R (remplacer, réduire, raffiner), différents projets sont soutenus par le programme France 2030, à travers le programme et équipement prioritaire de recherche « organes et organoïdes sur puce » (financé à hauteur de 48 millions d'euros sur six années) ou le soutien apporté à la société Neuro Engineering Technologies Research Institut, start-up industrielle spécialisée dans le développement d'organes sur puces.
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