Question de M. BILHAC Christian (Hérault - RDSE) publiée le 29/05/2025

M. Christian Bilhac attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins sur la contamination généralisée de l'eau potable en France par les métabolites du chlorothalonil. L'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a récemment révélé, dans le cadre d'une campagne exploratoire, une contamination préoccupante de l'eau potable par les métabolites du chlorothalonil, un pesticide interdit depuis 2019 en raison de ses propriétés suspectées cancérogènes. Ces métabolites ont été détectés dans près d'un tiers des départements français, avec des concentrations dépassant la norme réglementaire de 0,1 microgramme par litre. Cette situation affecte aussi bien des zones rurales que densément peuplées et dans certains départements 90 % des abonnés au réseau public reçoivent une eau non conforme. Ces molécules, difficilement éliminables par les systèmes de traitement actuels, posent un défi majeur pour la qualité sanitaire de l'eau et suscitent une inquiétude légitime des citoyens. En l'absence de valeurs toxicologiques de référence précises, l'évaluation des risques reste incertaine. Le coût de la mise aux normes des installations pourrait se chiffrer en milliards d'euros et certains territoires, faute de solutions techniques ou financières, risquent de voir perdurer cette non-conformité. Dans un contexte de défiance croissante vis-à-vis de la qualité de l'eau, de raréfaction de la ressource et d'objectifs affichés de transition écologique, il est impératif de garantir à tous un accès à une eau potable saine. Aussi, il lui demande quelles mesures le Gouvernement compte prendre, à court terme pour renforcer le contrôle et le suivi des métabolites de pesticides dans les réseaux d'eau potable, les éliminer et accompagner financièrement les collectivités dans la mise à niveau de leurs stations de traitement, ainsi que pour garantir une transparence totale à la population sur la qualité de l'eau distribuée.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins publiée le 04/09/2025

La fourniture à la population française d'une eau du robinet de bonne qualité est un enjeu de santé publique et une préoccupation importante des pouvoirs publics. En France, la production et la distribution de l'Eau destinée à la consommation humaine (EDCH), dite « eau du robinet », reposent sur l'exploitation de plus de 32 800 captages, 17 000 stations de production d'eau potable et 24 100 réseaux de distribution. L'eau du robinet fait l'objet d'un suivi sanitaire régulier, de façon à en garantir sa qualité pour la population. Les consignes de gestion sont élaborées et mises à jour sur la base d'expertises sanitaires reposant sur la littérature scientifique en constante évolution. S'agissant des pesticides, la réglementation européenne transposée dans notre droit fixe une limite de qualité à ne pas dépasser dans l'eau potable pour chaque substance de pesticide et de métabolite pertinent à 0,1 µg/L et à 0,5 µg/L pour le total des pesticides et métabolites pertinents. Il ne s'agit pas d'une valeur fondée sur une approche toxicologique mais d'un seuil de détection témoignant de la dégradation de la ressource. Elle n'a donc pas de signification sanitaire. En cas de dépassement de cette limite de qualité, des mesures strictes pouvant aller jusqu'à la restriction de la consommation, doivent être mises en oeuvre par la personne responsable de la production et de la distribution de l'eau pour permettre un retour à la conformité. Depuis 2021, le contrôle sanitaire de l'EDCH met en évidence la présence de métabolites de pesticides à des concentrations supérieures à la limite de qualité réglementaire de 0,1 µg/L sur l'ensemble du territoire. En 2023, 74,7 % de la population a été alimentée en permanence par de l'eau respectant les limites de qualité réglementaires pour les pesticides et métabolites (84,6 % en 2022 et 82,6 % en 2021). Toutefois, pour la quasi-totalité de la population alimentée par une eau non conforme, les dépassements des limites de qualité ont été limités en concentration ou dans le temps, ne nécessitant pas une restriction de l'usage de l'eau du robinet pour la boisson (7 situations de restriction d'usage en 2023). Si cette situation résulte notamment d'une accentuation du suivi de la qualité des EDCH, elle pointe l'accumulation de la pollution par les pesticides dans les ressources en eau et rend impérative une action vigoureuse de préservation de la qualité des eaux utilisées pour la production d'EDCH et de protection de la santé des populations. Ainsi, conscients qu'il est indispensable d'avoir une politique plus ambitieuse pour la protection de la ressource en amont des captages afin de ne pas faire porter les efforts uniquement sur la gestion de l'eau en aval par les collectivités, les ministères de l'environnement, de la santé et de l'agriculture ont publié le 3 avril 2025 leur feuille de route pour améliorer la qualité de l'eau par la protection de nos captages et dont les travaux sont en cours. Ils permettront de guider de manière plus ciblée les préfets en lien avec les acteurs territoriaux dans la mise en oeuvre concrète des mesures réglementaires à leur disposition, en particulier les zones soumises à contraintes environnementales (ZSCE) pour protéger les aires d'alimentation de captages sensibles aux pollutions par les pesticides, en complément des mesures volontaires si elles sont possibles et suffisamment efficaces. En effet, si la plupart des pesticides et de leurs métabolites présents dans l'eau peuvent être éliminés par un traitement par filtration sur charbon actif relativement classique, l'augmentation du nombre de molécules, d'origine anthropique, au sein d'un même captage peut entraîner, outre les coûts d'investissement, des coûts d'exploitation très élevés à la charge des collectivités et donc des consommateurs. Par ailleurs, certaines molécules particulièrement mobiles nécessitent la mise en oeuvre d'un traitement par osmose inverse qu'il n'est pas possible d'installer partout en particulier en milieu rural, avec des petites structures et un nombre relativement restreint d'abonnés (et des recettes insuffisantes). Force est donc de constater que les collectivités se retrouvent face à un mur d'investissement pour répondre à leurs obligations réglementaires. Le Gouvernement envisage donc de lancer rapidement une mission des inspections générales pour expertiser les leviers de financement de la dépollution de l'eau.

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