Question de Mme OLLIVIER Mathilde (Français établis hors de France - GEST) publiée le 15/05/2025
Mme Mathilde Ollivier attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche sur l'avenir des cétacés toujours détenus au Marineland d'Antibes.
Depuis plusieurs années, les conditions de détention des cétacés, notamment des orques et des dauphins, font l'objet de vives critiques de la part de la communauté scientifique, des organisations non gouvernementales (ONG) de protection animale et d'une part croissante de l'opinion publique. Les recherches récentes ont largement documenté les besoins biologiques, sociaux et cognitifs complexes de ces espèces, qui rendent leur maintien en bassin particulièrement problématique au regard de leur bien-être.
Consciente de ces enjeux, la législation française a évolué. La loi n°2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et à conforter le lien entre les animaux et les hommes a acté l'interdiction progressive des spectacles de cétacés et interdit leur reproduction et leur acquisition sur le territoire national. Cette avancée majeure marque un tournant en matière de considération éthique pour les animaux sauvages détenus en captivité à des fins de divertissement.
Cependant, ce texte ne prévoit aucun dispositif concernant le devenir des animaux déjà présents dans les installations concernées. Le parc Marineland, situé à Antibes, est aujourd'hui le principal établissement de ce type en France. Il abrite encore actuellement deux orques et douze dauphins. Or, au-delà de la fin programmée des spectacles, aucune solution de réaffectation pérenne ou même de transition vers des structures adaptées ne semble concrètement envisagée à ce jour.
Plusieurs associations de protection animale appellent depuis plusieurs années à la création ou au recours à des sanctuaires marins, c'est-à-dire des zones côtières fermées et protégées, permettant aux cétacés captifs de bénéficier d'un environnement semi-naturel, tout en restant sous supervision humaine. Des projets pilotes existent d'ores et déjà à l'étranger, notamment en Amérique du Nord et en Europe, et étaient pressentis pour constituer des modèles pour l'accueil des cétacés concernés.
Toutefois, alors même que la santé des cétacés risque de péricliter, les pistes qui existaient jusqu'alors, notamment en Grèce, demeurent floues ou bloquées par des intérêts économiques contraires.
Dans ce contexte, elle lui demande de préciser sa stratégie concernant l'avenir des cétacés du parc Marineland d'Antibes.
Elle souhaite notamment savoir si des discussions ont été engagées ou reprises avec les gestionnaires du parc, les ONG spécialisées et les partenaires internationaux en vue du transfert progressif de ces animaux vers des structures adaptées.
En outre, elle demande à Mme la ministre de faire état des avancées du projet de sanctuaire marin européen annoncé le 14 février 2025.
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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé du travail et de l'emploi publiée le 21/05/2025
Réponse apportée en séance publique le 20/05/2025
M. le président. La parole est à Mme Mathilde Ollivier, auteure de la question n° 536, adressée à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Mme Mathilde Ollivier. Madame la ministre, voilà quelques jours, l'ONG de défense animale TideBreakers a diffusé des images saisissantes : on y voit deux orques, Wikie et son fils Keijo, tourner en rond dans un bassin plein d'algues.
Les images sont nouvelles, mais la situation ne l'est pas. L'urgence pour ces cétacés détenus au parc Marineland d'Antibes est connue de toutes et tous. Depuis des années, les scientifiques, les ONG et une majorité croissante de Français dénoncent ces conditions de captivité indignes pour les orques et les dauphins. Les travaux scientifiques ont largement documenté les besoins complexes de ces espèces, qui rendent leur maintien en bassin particulièrement problématique au regard de leur bien-être.
Oui, la loi du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes a représenté un point de bascule. Elle a acté la fin des spectacles et l'interdiction de la reproduction et de l'acquisition de nouveaux cétacés. Cette avancée majeure marque un tournant en matière de considération éthique pour les animaux sauvages détenus en captivité à des fins de divertissement. C'était un signal fort, attendu.
Toutefois, cette loi conserve un angle mort inquiétant : que deviennent les animaux encore captifs ? À Marineland, nous laissons quasiment à l'abandon deux orques et douze dauphins. Récemment, l'Espagne a refusé leur transfert. Pour ces animaux, rien n'est clair : pas de solution concrète, pas de sanctuaire, pas même un plan de transition.
Une solution pourrait se trouver dans la création ou dans le recours à des sanctuaires marins, c'est-à-dire des zones côtières fermées et protégées dans un environnement semi-naturel tout en restant sous supervision humaine. Des projets existent, surtout en Europe, notamment en Grèce, où j'ai pu aborder le sujet lors d'un déplacement.
Où en sommes-nous à ce sujet, madame la ministre ? La situation avance-t-elle ou enterre-t-on le dossier en silence ? On ne peut laisser ces animaux finir leur vie dans l'oubli parce que cela dérange ou coûte trop cher de s'en occuper. Je vous demande aujourd'hui un engagement clair. Allons-nous, oui ou non, offrir à ces cétacés une fin de vie digne, dans un environnement adapté ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l'emploi. Madame la sénatrice Mathilde Ollivier, je vous réponds au lieu et place de Mme Pannier-Runacher.
En vertu de la loi de 2021, Marineland a annoncé l'arrêt de ses activités de présentation de cétacés au public à compter du 5 janvier 2025. Pour accompagner cette démarche, le ministère a exploré les possibilités de relocalisation des orques dans des enclos marins. Un appel à manifestation d'intérêt a été lancé au printemps 2024. Les projets reçus ont été analysés par l'inspection générale de l'environnement et du développement durable, mais aucun ne présentait de garanties suffisantes à court terme en matière de bien-être animal.
En ce qui concerne les dauphins, le ministère a réuni l'ensemble des parties prenantes au premier trimestre 2025. Leurs travaux ont conclu que, bien qu'étant prometteurs, les projets d'enclos marins prévus en Italie et en Grèce n'étaient pas encore opérationnels et ne pouvaient donc accueillir les animaux de Marineland. Néanmoins, des échanges interministériels sont en cours pour les faire aboutir.
C'est l'objet du groupe de travail que ma collègue Agnès Pannier-Runacher souhaite réunir au cours des prochains jours avec ses homologues italiens, grecs et espagnols, qui sont favorables à un partage d'informations et de connaissances sur le sujet, afin de favoriser la faisabilité technique et administrative de ces enclos marins.
En l'absence de solution à ce jour, Marineland a sollicité le transfert des cétacés à l'étranger, vers d'autres delphinariums, notamment au Japon, ce que la ministre de la transition écologique a refusé, en raison du risque associé à un transport de longue durée des orques. Une seconde demande, visant à un transfert des orques et des dauphins vers l'Espagne, a été rejetée par les autorités de ce pays, qui ont estimé que leurs infrastructures ne répondaient pas aux besoins des animaux.
Ces derniers restent donc aujourd'hui sous la responsabilité de Marineland, qui veille à les maintenir en bonne santé, dans l'attente d'une nouvelle solution. Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour faire émerger une solution conforme à l'esprit de la loi et fondée sur le respect du bien-être animal.
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