Question de M. BENARROCHE Guy (Bouches-du-Rhône - GEST) publiée le 12/06/2025

Question posée en séance publique le 11/06/2025

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour le groupe Écologiste - Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Guy Benarroche. Ma question s'adresse à M. le ministre des armées. Elle porte sur Israël et sur les ventes d'armes.

Le salon de l'armement du Bourget doit s'ouvrir la semaine prochaine. Il accueillera des membres du Gouvernement ainsi que des sociétés d'armement israéliennes : leur participation a été confirmée dès janvier dernier par M. Netanyahou, qui dit avoir reçu l'assurance du président Macron.

De nombreuses associations ont porté devant les tribunaux des griefs légitimes liés à cette venue : elles et nous ne pouvons accepter que notre pays serve de terrain d'opérations commerciales, de promotion de transferts de matériels militaires ne respectant pas le traité sur le commerce des armes des Nations unies.

J'ajoute que ces matériels militaires sont directement ou indirectement impliqués dans les atrocités commises à Gaza et dans les territoires occupés.

Hier, le tribunal de Bobigny a rejeté l'une de ces demandes - on enjoignait à l'organisateur privé du salon de ne pas autoriser ces exposants. Ce délibéré s'inscrit dans une jurisprudence constante selon laquelle le juge ne peut pas interférer dans « la conduite des affaires internationales de la France » - c'est la théorie de l'acte de gouvernement.

Monsieur le ministre, tel est précisément l'objet de ma question : quelles mesures le Gouvernement compte-t-il prendre afin de s'assurer que la France respecte ses engagements européens et internationaux relatifs au commerce d'armes avec des États en guerre ?

Votre ministère ira-t-il à l'encontre de ses obligations en autorisant l'importation de matériels militaires mis au service de la guerre et des crimes en cours dans la bande de Gaza ?

Au-delà de la promotion de ces ventes d'armes par Israël en France, la question est celle de nos ventes d'armes à Israël, armes utilisées dans ces crimes de guerre.

À vous entendre, « il n'y a pas d'armes vendues à Israël » ; mais vos dénégations se heurtent de manière brutale aux faits.

La situation à Fos-sur-Mer met au jour la poursuite des exportations d'armes vers Israël. Vous ne pouvez pas affirmer qu'elles ne participent pas aux massacres en cours.

Comptez-vous, une fois pour toutes, respecter le droit international et les engagements de notre pays en arrêtant les exportations d'armes vers Israël ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées des groupes SER et CRCE-K.)

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Réponse du Ministère des armées publiée le 12/06/2025

Réponse apportée en séance publique le 11/06/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre des armées.

M. Sébastien Lecornu, ministre des armées. Monsieur le sénateur, vous l'avez rappelé, les décisions relatives à l'organisation du salon du Bourget sont des actes de gouvernement. Le secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale (SGDSN), sous l'autorité du Premier ministre, y travaille avec les services du ministère des affaires étrangères et les miens. Nous poursuivons nos discussions dans la droite ligne de ce que nous avons fait jusqu'à présent.

J'en viens à une affaire plus grave : la désinformation entretenue perpétuellement quant aux ventes d'armes présumées de la France à Israël.

Je le dis et je le répète, il n'y a aucune vente d'armes françaises à Israël.

M. Fabien Gay. C'est faux !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Il faut que cesse cette désinformation.

Premièrement - je le rappelle, même si c'est une évidence -, Israël est l'un des grands concurrents de nos industries de défense françaises et, par définition, Israël n'attend pas les armes françaises.

Deuxièmement, des composants français sont bien utilisés dans le cadre du dôme de fer, à savoir la défense sol-air d'Israël, et nous l'assumons. Ces composants sont destinés à des armes strictement défensives (Exclamations sur les travées du groupe GEST.), protégeant les populations civiles israéliennes...

Mme Dominique Estrosi Sassone. Très bien !

M. Stéphane Ravier. Bravo !

M. Sébastien Lecornu, ministre. Ces populations doivent être protégées. Il s'agit là d'un élément de consensus entre toutes les formations politiques représentées au Sénat, du moins je l'espère.

Troisièmement, s'y ajoutent des pièces détachées, à des fins de réexportation,...

Mme Mathilde Ollivier. Avec quelles garanties ?

M. Sébastien Lecornu, ministre. ... dont la France est souvent le destinataire final.

Monsieur le sénateur, votre question me donne l'occasion de le dire une fois de plus dans l'enceinte d'une des deux assemblées, dans le cadre du contrôle parlementaire, et je vous en remercie.

Le document détaillant ces informations est classé « diffusion restreinte ». Je vais le remettre aux présidents des commissions chargées de la défense, au Sénat comme à l'Assemblée nationale. Ils y trouveront la liste exacte des livraisons de ces composants pour 2024.

Nous aurions dû remettre ce document au Parlement au mois de septembre prochain. Mais, sous l'autorité de François Bayrou, j'ai décidé de le communiquer dès maintenant. J'espère ainsi faire cesser cette désinformation qui nuit à l'intérêt général et à l'intérêt du pays. (Vifs applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, UC et Les Républicains.)

M. Bruno Sido. Bravo !

M. le président. La parole est à M. Guy Benarroche, pour la réplique.

M. Guy Benarroche. Monsieur le ministre, la mise en danger de notre pays dans une possible complicité est une faute historique. (Exclamations sur les travées des groupes Les Républicains et UC.)

M. François Patriat. C'est faux !

M. Guy Benarroche. Le Président de la République réussit un exploit dramatique : il recule face à la nécessité impérieuse de reconnaître maintenant un État palestinien et, en même temps, il ignore le droit international applicable aux ventes d'armes utilisées dans des crimes de guerre.

M. le président. Il faut conclure.

M. Guy Benarroche. Des mandats ont été lancés par la justice internationale. Ces crimes de guerre - je pense à la famine qui sévit à Gaza - et ces crimes contre l'humanité, qu'il s'agisse de meurtres, de persécutions ou d'autres actes inhumains, sont établis, même si les responsabilités des membres du gouvernement israélien ne sont pas encore jugées. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST et sur des travées du groupe CRCE-K. - Protestations sur des travées du groupe Les Républicains.)

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