Question de Mme JOURDA Gisèle (Aude - SER) publiée le 12/06/2025
Question posée en séance publique le 11/06/2025
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)
Mme Gisèle Jourda. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Monsieur le ministre, la France coorganisera, avec l'Arabie saoudite, la conférence qui se tiendra aux Nations unies du 17 au 20 juin prochain. Or, selon des sources diplomatiques, le Royaume-Uni et la France insisteront non plus sur la reconnaissance d'un État palestinien, mais plutôt sur la définition des étapes vers la reconnaissance de l'État de Palestine. Celle-ci dépendra d'une série de mesures et de concessions de la part des Palestiniens.
Je rappelle que 149 États ont reconnu, sans condition, l'État palestinien. Ma question est donc simple, monsieur le ministre : quelle position la France entend-elle finalement défendre lors de ce sommet ? Pourquoi tergiverser ? Pourquoi refuser de débattre de vos intentions avec la représentation parlementaire à l'occasion d'une déclaration du Gouvernement suivie d'un débat, en application de l'article 50-1 de la Constitution, qui vous a été maintes fois demandée à l'Assemblée nationale comme au Sénat ?
Monsieur le ministre, vous avez déclaré, la semaine dernière, qu'il « existe un autre chemin ». À une semaine de ce sommet, ne s'agirait-il pas plutôt d'une impasse ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER et sur des travées des groupes CRCE-K et GEST.)
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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 12/06/2025
Réponse apportée en séance publique le 11/06/2025
M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
M. Jean-Noël Barrot, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Madame la sénatrice, en effet, il n'y a que deux chemins possibles : l'état de guerre permanent, d'un côté, et la solution politique, plus exigeante, plus difficile, de l'autre.
C'est cette dernière que la France défend depuis toujours. Comme je l'ai dit précédemment, elle était en passe d'aboutir il y a un peu moins de deux ans, avant que le Hamas ne se rende coupable du plus grand massacre antisémite de notre histoire depuis la Shoah.
Face à cette situation, se présentent donc deux chemins. L'un d'entre eux consisterait à nous résigner. J'ai ainsi cru comprendre que Roger Karoutchi semblait prescrire, lors de son intervention, l'inaction, mais peut-être ai-je mal compris... (M. Roger Karoutchi proteste.) Cette option-là est cependant porteuse de grands risques : en effet, si nous ne faisons rien, la solution politique pourrait être définitivement écartée, alors qu'elle est déjà plus lointaine et fragilisée que jamais depuis les accords d'Oslo, en 1993. (M. Fabien Gay s'exclame.)
L'autre chemin est la solution politique. À un moment où Gaza est quasiment détruite, où la colonisation s'accélère en Cisjordanie, où les États-Unis semblent se désintéresser de la question et où l'on ressent une forme de résignation dans un grand nombre de pays arabes, nous jouons notre rôle, nous sommes à notre place en reprenant l'initiative.
C'est tout l'objectif de cette conférence, que nous avons préparée en affirmant notre détermination à reconnaître l'État de Palestine. Il s'agit ainsi d'enclencher un mouvement qui implique et qui engage la Palestine, du moins l'Autorité palestinienne, ainsi que les pays arabes. Ces derniers doivent, eux aussi, prendre des engagements.
Mme Raymonde Poncet Monge. Et Israël ?
M. Jean-Noël Barrot, ministre. Ils doivent formuler des déclarations dénonçant les actes du 7 octobre et désignant le Hamas pour ce qu'il est : un mouvement terroriste. Ils doivent s'engager à contribuer et à concourir à la sécurité d'Israël, au redressement de Gaza et de l'État de Palestine à venir. Sans cela, la reconnaissance de la part d'un pays comme la France sonnerait creux. C'est cette dynamique collective que nous voulons susciter à New York et c'est dans cet esprit que nous travaillons. (MM. François Patriat et Bernard Fialaire applaudissent.)
M. le président. La parole est à Mme Gisèle Jourda, pour la réplique.
Mme Gisèle Jourda. Monsieur le ministre, non, la reconnaissance de la Palestine par France ne sonnerait pas creux. Nous sommes dans un pays où sont nés les droits de l'homme. Alors que, l'année dernière, des États comme l'Espagne ont reconnu la Palestine sans condition, je ne comprends pas votre position. Certes, vous vous référez au 7 octobre, mais les problèmes ne remontent pas à cette date, monsieur le ministre ! (Protestations sur des travées des groupes Les Républicains et UC.)
Mme Raymonde Poncet Monge. Eh oui !
Mme Gisèle Jourda. Les Palestiniens meurent depuis longtemps et leur situation est devenue intenable. Le temps de vous retourner, il n'y aura plus aucun Palestinien dans la bande de Gaza. Est-ce là ce que vous voulez ? Moi, non ! (Vifs applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE-K et GEST.)
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