Question de Mme NÉDÉLEC Anne-Marie (Haute-Marne - Les Républicains-A) publiée le 12/06/2025

Question posée en séance publique le 11/06/2025

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Nédélec, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Anne-Marie Nédélec. Madame la ministre d'État, hier, le 10 juin, vous étiez à Nogent.

En effet, ce même jour, à huit heures quinze, dans cette petite commune tranquille de Haute-Marne, dont j'ai été l'élue pendant près de trente-cinq ans, l'indicible s'est produit : un collégien de 14 ans a poignardé de sang-froid, à plusieurs reprises, une assistante d'éducation sous les yeux des gendarmes, lors d'un contrôle inopiné des cartables. Elle n'a pas survécu.

Mélanie était la maman d'un petit garçon de 4 ans, appréciée dans son travail, conseillère municipale de son village. Je vous remercie, mes chers collègues, de l'hommage qui vient de lui être rendu. Mes pensées vont à sa famille, à ses collègues, aux élèves, dont beaucoup ont vécu l'agression en direct, mais aussi aux parents de l'agresseur, les deux familles se connaissant.

Ce n'est pas qu'une question de moyens : les forces de l'ordre étaient sur place. Le collège Françoise-Dolto, qui ne compte que 320 élèves, est bien doté, avec une équipe pédagogique stable, soudée et très investie dans de nombreuses actions de prévention, au service des élèves. L'agresseur est décrit comme un élève brillant, bien intégré, ne présentant aucun des signaux faibles qui auraient pu susciter l'alerte.

Nogent a connu, hier, non pas un énième fait divers, mais bien un drame que rien, ni le cadre scolaire ni le cadre familial, ne laissait prévoir.

Comme vous l'avez dit, madame la ministre d'État, « on ne doit légiférer ni à chaud ni dans l'émotion ». Pourtant, lorsque l'on ne nomme pas clairement un problème, on ne peut pas y apporter de solution. Madame la ministre d'État, comment protéger concrètement et rapidement nos enfants de cette violence, de ce poison qui les nourrit quotidiennement et leur fait perdre le sens du réel ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains et sur des travées des groupes UC et RDSE. - Mme Corinne Bourcier et M. Rémi Féraud applaudissent également.)

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Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche publiée le 12/06/2025

Réponse apportée en séance publique le 11/06/2025

M. le président. La parole est à Mme la ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Mme Élisabeth Borne, ministre d'État, ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche. Avant de vous répondre, madame la sénatrice Anne-Marie Nédélec, je voudrais de nouveau adresser toutes mes condoléances à la famille de la jeune femme assistante d'éducation qui a perdu la vie hier au collège Françoise-Dolto, à Nogent.

J'ai tenu à me rendre sur place, où nous avons pu, madame la sénatrice, exprimer tout notre soutien aux élèves, aux professeurs, aux personnels, aux parents, bouleversés par ce drame.

Cet acte effroyable nous invite à nous interroger sur les moyens d'endiguer la violence chez les jeunes. Cela passe, en premier lieu par une action résolue, comme l'a évoqué M. le Premier ministre, pour interdire l'acquisition d'armes blanches par les mineurs et pour empêcher toute introduction de celles-ci dans les établissements scolaires. Tel est le sens de l'instruction que j'ai signée, avec Bruno Retailleau, au début du mois de mars, tendant à demander aux préfets et aux recteurs d'organiser des fouilles aux abords des établissements scolaires. Ainsi, plus de 6 000 opérations ont été réalisées depuis. Chaque fois qu'une arme est saisie, un conseil de discipline est réuni et un signalement est transmis au procureur.

Ces opérations sont complémentaires de la sensibilisation qui doit être menée, en lien avec les référents police et gendarmerie, sur la dangerosité des armes. Cette démarche s'inscrit, plus globalement, dans l'ensemble des actions d'éducation et de prévention que nous menons, notamment dans le cadre de l'enseignement moral et civique.

Nous agissons aussi sur le plan de la santé mentale, avec le ministre Yannick Neuder, notamment grâce au déploiement de plans de repérage et de prise en charge des élèves en souffrance psychique.

Mme Jocelyne Guidez. Bravo !

Mme Élisabeth Borne, ministre d'État. Enfin, nous connaissons l'effet néfaste des écrans et des réseaux sociaux. C'est pourquoi j'ai décidé de généraliser la pause numérique dans tous les collèges dès la prochaine rentrée. En outre, comme le Président de la République l'a évoqué, nous devons agir pour interdire l'accès des jeunes de moins de 15 ans aux réseaux sociaux.

M. le président. Il faut conclure.

Mme Élisabeth Borne, ministre d'État. Naturellement, sur tous ces sujets, nous avons besoin des familles et de tous les partenaires de l'école. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI et sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Anne-Marie Nédélec, pour la réplique.

Mme Anne-Marie Nédélec. Ne confondons pas causes et conséquences. Pourquoi la santé mentale des jeunes s'est-elle autant dégradée ? Les mesures ponctuelles ne suffiront pas.

Je suis du pays du couteau. Des couteaux, il y en a partout, dans toutes les cuisines, dans tous les ateliers. Mais on ne les utilisait pas comme cela. Le problème de fond, ce n'est pas le couteau !

Bien sûr, il faut renforcer les contrôles et la sévérité des peines. Mais pouvons-nous livrer quotidiennement nos jeunes à des réseaux, à des sites qui diffusent en toute liberté - pis, parfois au nom de la liberté -, des contenus d'une violence inouïe, poussant au meurtre ou au suicide ?

Nous n'avons plus le temps d'attendre un éventuel accord européen. Il s'agit d'un grave problème de société qu'il nous faut traiter comme un tout. Chacun doit prendre sa responsabilité, que ce soit l'État, l'éducation et les familles. (Applaudissements prolongés sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP. - Mmes Mireille Jouve, Laurence Rossignol et M. Éric Jeansannetas applaudissent également.)

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