Question de M. FARGEOT Daniel (Val-d'Oise - UC) publiée le 19/06/2025

Question posée en séance publique le 18/06/2025

M. le président. La parole est à M. Daniel Fargeot, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

M. Daniel Fargeot. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Monsieur le ministre, les allées du Salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget bruissent des rumeurs de belles commandes d'Airbus à venir par les pays du Golfe. Et nous pouvons nous en réjouir : elles confirment l'excellence et le rayonnement international de notre industrie.

Cependant, la réindustrialisation de la France exige une vision globale, à 360 degrés, qui prenne en compte toute la chaîne de valeur. C'est particulièrement vrai pour le secteur aérien, filière stratégique de notre souveraineté, dont on ne mesure d'ailleurs pas tout à fait l'importance. Il faut savoir que ces ventes d'avions pourraient s'accompagner, en contrepartie, de nouvelles autorisations de vols pour les compagnies du Golfe vers la France.

Afin que chacun mesure bien l'enjeu, je précise qu'une nouvelle ligne exploitée par ces compagnies, qui sont largement dopées aux subventions de leurs gouvernements respectifs, crée 200 emplois en France, tandis qu'une ligne Air France en mobilise 800, soit quatre fois plus. Faites le calcul : une ligne saturée, ce sont jusqu'à 600 emplois français qui disparaissent. Pilotes, techniciens, maintenance, formation : c'est tout un écosystème national qui est fragilisé.

Je rappelle que le pavillon français supporte déjà une fiscalité « franco-française » disproportionnée et des contraintes environnementales nécessaires, mais unilatérales, ce qui crée une distorsion massive de concurrence.

Comprenez que chaque ligne aérienne cédée, c'est un affaiblissement du pavillon français et de notre hub de Roissy-Charles-de-Gaulle, et donc un renforcement direct des hubs du Moyen-Orient. C'est bien là leur stratégie : modifier la polarité des échanges internationaux.

Air France et Airbus sont deux piliers d'un même modèle industriel français, deux contributeurs de poids à notre balance commerciale. Les droits de trafic dans le cadre d'accords bilatéraux ne peuvent devenir une variable d'ajustement diplomatique. D'autres leviers de coopération pourraient être activés avec les pays du Golfe : technologiques, académiques, énergétiques.

Ma question est donc la suivante : le Gouvernement peut-il garantir que les discussions engagées avec les pays du Moyen-Orient ne se feront au détriment ni de l'emploi aérien français ni de notre souveraineté industrielle ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

- page 6720


Réponse du Ministère de l'aménagement du territoire et de la décentralisation publiée le 19/06/2025

Réponse apportée en séance publique le 18/06/2025

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation.

M. François Rebsamen, ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Fargeot, je vous prie de bien vouloir excuser Philippe Tabarot, qui est en ce moment même à la 55e édition du Salon international de l'aéronautique et de l'espace. Ce salon est une fierté française quand il se déroule au Bourget.

La filière aéronautique est en effet un pilier stratégique de notre économie et l'État est au rendez-vous pour la soutenir. Je veux le dire ici haut et fort. Par ailleurs, notre pavillon aérien, nos compagnies, Air France en tête, sont indissociables de cet écosystème. Défendre le pavillon aérien, c'est donc défendre notre souveraineté industrielle.

La filière aéronautique représente plus de 1 000 entreprises, dont des champions mondiaux - on pense spontanément à Airbus, mais aussi à Safran, à Thales -, mais aussi des PME-PMI, qui réalisent au total près de 80 milliards d'euros de chiffre d'affaires et emploient près de 100 000 salariés dans toutes les régions de France, mais essentiellement en Occitanie, en Nouvelle-Aquitaine et dans les Pays de la Loire.

Chaque avion construit en France mobilise une chaîne complète de valeur industrielle : conception, usinage, motorisation, assemblage, système embarqué.

Je le répète, l'État est au rendez-vous. Nous avons la chance de compter une grande compagnie aérienne, dont l'État est actionnaire, et nous la défendons.

Pour répondre plus précisément à votre question, je vous informe que Philippe Tabarot et moi-même serons extrêmement attentifs à ce que toute réouverture de négociations avec les Émirats arabes unis ne fragilise pas nos compagnies aériennes. Nous veillerons à préserver les équilibres de marché, les conditions équitables de concurrence et rappellerons sans cesse la nécessité d'adopter des clauses environnementales équivalentes pour les compagnies aériennes françaises et les compagnies étrangères. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

- page 6720

Page mise à jour le