Question de M. BELIN Bruno (Vienne - Les Républicains-R) publiée le 05/06/2025

M. Bruno Belin attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du Premier ministre, chargée de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations sur le nombre de féminicides, qui reste tragiquement élevé ces dernières années.

Les féminicides désignent le meurtre de femmes ou de filles pour la raison qu'elles sont des femmes. En 2024, ils ont été recensés au nombre de 137 dont 10 dans la région de la Nouvelle-Aquitaine. À la date du 20 mai 2025, on dénombre déjà 55 féminicides, soit un niveau équivalent à celui enregistré l'année précédente à la même période, témoignant de l'absence d'amélioration significative.

Le samedi 17 mai 2025, dans la commune de Chasseneuil-du-Poitou, c'est Véronique qui a été victime de ce 55e drame. Âgée de 55 ans, son corps a été retrouvé sur le palier de l'étage de son immeuble. À la suite de cette découverte, son ex-conjoint, dont elle s'était séparée récemment, a été arrêté.

Les avancées réalisées ces dernières années sont reconnues. Un numéro d'urgence est désormais accessible 24h/24 et 7j/7, le dépôt de plainte est possible dans 542 établissements de santé, et plusieurs dispositifs de protection ont été déployés : plus de 3 000 ordonnances de protection, 6 261 téléphones « Grave Danger », 817 bracelets anti-rapprochement, ainsi que plus de 11 000 places d'hébergement.

Ces mesures sont le résultat de plusieurs lois visant la protection des victimes telles que l'aide universelle d'urgence et les ordonnances de protection immédiate. À l'échelle locale, des structures d'accueil, d'écoute et d'accompagnement ont été mises en place, avec un renforcement de la réponse sanitaire, judiciaire et sociale.

Toutefois, malgré cet arsenal, les chiffres ne diminuent pas. Ces nombreux dispositifs semblent insuffisants pour prévenir les féminicides, en particulier dans le contexte des séparations et divorces, qui constituent un facteur déclencheur majeur de ces drames.

Dans ce registre, il demande au Gouvernement s'il envisage la mise en place de nouvelles mesures afin d'intensifier la prévention spécifique des féminicides et de renforcer les actions ciblées sur les périodes de séparation, afin de mieux protéger les femmes et faire reculer durablement ce fléau.

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Réponse du Ministère délégué auprès du Premier ministre, chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes et de la lutte contre les discriminations publiée le 11/09/2025

La prévention et la lutte contre les violences faites aux femmes constituent une priorité constante du Gouvernement. Ainsi, depuis 2022, le chantier interministériel de la politique prioritaire du Gouvernement « Mieux protéger et accompagner les femmes victimes de violences » prolonge la dynamique initiée en 2019 par le Grenelle de lutte contre les violences conjugales, amplifiée par le plan interministériel pour l'égalité entre les femmes et les hommes « Toutes et tous égaux ». (2023-2027), qui intègre un nouvel axe d'actions visant à mieux prévenir et combattre les violences sexistes et sexuelles. Cette politique publique interministérielle et partenariale a permis d'enregistrer des avancées majeures en matière de prévention et de lutte contre les violences au sein couple. Elle repose sur une approche globale, conjuguant prévention, accompagnement, protection et réponse judiciaire. Le Gouvernement a ainsi renforcé l'information des victimes, notamment grâce à des dispositifs d'écoute et d'orientation tels que le 3919. Depuis 2021, cette ligne d'écoute fonctionne 24h/24 et 7j/7, elle est accessible aux personnes en situation de handicap ainsi qu'aux appelantes allophones. Le financement de ce dispositif par l'État a été considérablement renforcé, passant de 2,3 millions d'euros en 2021 à 4,15 millions en 2024. Ce renforcement a permis une amélioration significative du service : en 2024, le 3919 atteint un taux de réponse de 88 %, contre 61,9 % en 2021. La formation des professionnels constitue un autre pilier essentiel. Depuis 2020, 119 000 policiers et plus de 61 000 gendarmes ont été formés aux violences intrafamiliales. Tous les auditeurs de justice abordent cette thématique dans leur formation initiale, et des modules dédiés aux violences intrafamiliales sont proposés aux magistrats lors de changements de fonctions. L'accompagnement global et de proximité des victimes a connu un développement important. En complément des lieux d'écoute, d'accueil et d'orientation (LEAO) et des accueils de jour (ADJ), la réponse sanitaire a été renforcée par la création de 107 structures médico-sociales hospitalières dans 86 départements, destinées à garantir une prise en charge complète des femmes victimes de violences. Des dispositifs ont également été mis en place pour sécuriser les périodes de séparation, identifiées comme particulièrement à risque. À titre d'exemple, l'aide universelle d'urgence créée par la loi du 28 février 2023, versée en 3 à 5 jours, permet aux victimes de violences conjugales de faire face aux dépenses immédiates liées à leur départ du domicile. En complément, le « Pack nouveau départ », expérimenté dans 5 départements depuis 2023 et prochainement étendu à d'autres territoires, propose un accompagnement personnalisé, mieux coordonné et plus rapide pour faciliter la séparation. Par ailleurs, des outils et dispositifs, tels que l'application Tiers ou les espaces de rencontre, ont été développés pour limiter les contacts entre l'auteur et la victime après la séparation. La réponse judiciaire a elle aussi été fortement renforcée. La création des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intrafamiliales vient compléter les dispositifs de protection existants (ordonnances de protection, téléphones grave danger et bracelets anti-rapprochement), afin d'assurer une réponse plus efficace et cohérente. L'ensemble de ces actions a contribué à faire reculer les féminicides au cours des dernières années. D'après les données du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMI), 146 féminicides ont été enregistrés en 2019, 122 en 2021, 118 en 2022 et 96 en 2023, soit une baisse de plus de 30 % en quatre ans. Les données du SSMI pour 2024 seront publiées à l'automne 2025 et permettront d'évaluer si cette tendance encourageante se poursuit. Cette évolution témoigne de l'impact réel des mesures mises en place, même si chaque féminicide rappelle l'impératif de poursuivre et d'amplifier l'action publique. C'est pourquoi, avec l'appui d'un groupe transpartisan de parlementaires, le ministère chargé de l'Egalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations travaille à l'élaboration d'un projet de loi cadre, visant à renforcer encore l'arsenal juridique global pour mieux protéger et accompagner les femmes victimes de violences, qu'elles soient physiques, psychologiques, sexuelles, numériques ou économiques.

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