Question de Mme CANAYER Agnès (Seine-Maritime - Les Républicains-R) publiée le 05/06/2025
Mme Agnès Canayer souligne auprès de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles les difficultés rencontrées par les établissements accueillant des enfants placés sous la protection de l'aide sociale à l'enfance (ASE) concernant la prise en charge financière des molécules médicamenteuses onéreuses. Ces médicaments coûteux, souvent innovants, non substituables, ne sont pas pris en charge à 100 % par l'assurance maladie. Les associations qui accompagnent les enfants en polyhandicap se retrouvent régulièrement en difficultés budgétaires puisque l'achat des molécules onéreuses représente la moitié des coûts de leur fonctionnement. Il apparaît que les agences régionales de santé (ARS) rencontrent des limitations dans la prise en charge de ces traitements coûteux, ce qui peut entraîner des inégalités d'accès aux soins pour ces enfants particulièrement vulnérables. Cette situation soulève des préoccupations quant à l'équité et à la continuité des soins pour ces jeunes, dont la santé et le bien-être doivent être une priorité absolue. Aussi, elle lui demande quelles mesures le Gouvernement envisage de prendre pour garantir un accès équitable et sans entrave aux traitements nécessaires pour les enfants de l'ASE, et comment il compte soutenir les établissements et les ARS dans cette mission essentielle.
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Réponse du Ministère auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins publiée le 11/06/2025
Réponse apportée en séance publique le 10/06/2025
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, auteur de la question n° 586, adressée à Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles.
Mme Agnès Canayer. Monsieur le ministre, la santé mentale est la grande cause nationale de cette année 2025. Elle touche toutes les parties de la population, mais particulièrement les enfants qui sont confiés à l'aide sociale à l'enfance (ASE).
Ces enfants sont souvent sujets à de doubles vulnérabilités, parce qu'ils ont été maltraités ou abandonnés dans leur famille d'origine et parce qu'ils sont fréquemment victimes de troubles du comportement, des pathologies rares et des troubles psychiatriques nécessitant une prise en charge spécifique, souvent sur la base de molécules dites onéreuses, qui viennent grever largement les budgets des établissements prenant en charge ces enfants.
Je pense notamment au Bercail Saint-Denis, en Seine-Maritime, qui accueille plus de 80 % d'enfants en situation complexe : la prise en charge des molécules onéreuses représente une part approchant 60 % du budget global, au détriment de l'accompagnement des autres enfants et obligeant parfois à faire des choix qui conduisent à exclure certains enfants de ces traitements, faute de budget.
L'ARS de Normandie travaille à trouver des solutions, mais ne dispose malheureusement pas aujourd'hui de réponse définitive.
Monsieur le ministre, comment aider les établissements de l'ASE à accompagner et à prendre en charge de manière renforcée les enfants qui bénéficient de traitements à base de molécules onéreuses ?
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Yannick Neuder, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins. Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question extrêmement importante sur l'accès aux molécules onéreuses pour les enfants placés à l'ASE. C'est un sujet essentiel.
Vous le savez, les enfants protégés par l'aide sociale à l'enfance sont parmi les plus vulnérables de notre société. Beaucoup d'entre eux ont connu des parcours de vie marqués par l'instabilité, la maltraitance, parfois même la violence. Ces expositions précoces ont des effets profonds sur leur développement, leur santé physique et mentale et leur capacité à accéder à des soins de manière continue. Ainsi, nombre de ces enfants présentent des troubles chroniques ou des troubles du neurodéveloppement ou sont en situation de handicap, notamment de polyhandicap.
Dans ce contexte, il est de notre devoir collectif de garantir non seulement leur protection, mais aussi leur accès plein et entier à des soins de qualité, y compris aux traitements les plus innovants, souvent coûteux et non substituables.
Je veux redire ici l'engagement de mon ministère à bâtir une politique de santé plus juste pour ces enfants. Dès 2026, nous engagerons la généralisation des expérimentations Pégase et Santé protégée, avec le déploiement systématique des bilans de santé à l'entrée de l'ASE.
Cette dynamique s'appuiera notamment sur les centres d'appui à l'enfance, pour mieux structurer la coordination entre acteurs sociaux et professionnels de santé.
Je partage pleinement vos préoccupations sur le sujet de la charge financière des molécules onéreuses. Les établissements qui accueillent ces enfants ne peuvent porter seuls le poids budgétaire de traitements qui, pour certains, représentent jusqu'à la moitié de leurs charges. Cela n'est ni soutenable ni équitable.
Des solutions doivent être explorées avec pragmatisme. Parmi elles, le conventionnement entre établissements et caisses primaires d'assurance maladie, permettant un remboursement selon les mêmes modalités qu'en ville, constitue une première piste.
Nous travaillons également avec les agences régionales de santé et l'assurance maladie pour définir des modalités opérationnelles, dans le respect des exigences de sécurité et de pertinence des soins.
Enfin, au-delà de ces réponses techniques, c'est bien une vision que nous défendons, celle d'un État qui tient sa promesse de solidarité envers les enfants les plus fragiles en leur garantissant un égal accès à l'innovation thérapeutique et à la dignité des soins.
M. le président. La parole est à Mme Agnès Canayer, pour la réplique.
Mme Agnès Canayer. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre.
Vous avez raison, donner une deuxième chance à ces enfants particulièrement vulnérables et leur permettre d'accéder à ces traitements, au même titre que tous les enfants français, est un enjeu de justice et de solidarité.
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