Question de Mme PUISSAT Frédérique (Isère - Les Républicains) publiée le 19/06/2025

Mme Frédérique Puissat attire l'attention de M. le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification sur les difficultés rencontrées par la fonction publique territoriale pour rendre la filière de la médecine du travail davantage attrayante.

Au même titre que la médecine générale en France, la fonction publique territoriale connait une pénurie croissante de médecins du travail. Elle n'attire plus, générant de fortes difficultés pour les centres de gestion de la fonction publique territoriale, entravant leur fonctionnement normal. Plusieurs causes sont à l'origine de cette crise d'attractivité.

La première concerne la formation trop longue des médecins collaborateurs. Tel que le précise la loi n° 2011-867 du 20 juillet 2011 relative à l'organisation de la médecine du travail, qui a réorganisé les services de santé au travail (SST), la formation nécessaire à l'obtention du titre de médecin collaborateur demeure très dense. En effet, l'enseignement du cycle 1 comprend 300 heures de cours théoriques et stages pratiques réalisés sur deux années. Le cycle 2, réparti sur deux années, comprend quant à lui deux ans d'exercices encadrés de médecins collaborateurs, huit journées de regroupements pédagogiques et la réalisation d'un mémoire ainsi qu'une soutenance auprès d'un jury.

Ensuite, une fois la formation achevée, il est nécessaire d'effectuer deux contrats à durée déterminée (CDD) d'une durée de trois ans chacun afin de pouvoir être embauché à durée indéterminée - soit dix années de pratiques et d'études avant de devenir médecin du travail titulaire. Cette temporalité ne convient pas à des praticiens déjà expérimentés qui ont besoin de stabilité dans leur carrière et leur vie personnelle.

Ce volume de formation est particulièrement exigeant en comparaison aux seules deux années de formation requises pour la médecine du travail en agriculture.

S'ajoute à cette lourdeur la rémunération des médecins du travail, qui semble ne plus être à la hauteur des attentes des praticiens. Il est par conséquent nécessaire de revoir l'indice terminal, actuellement hors échelle B (HEB), à hors échelle C (HEC), voire hors échelle D (HED) lorsque le médecin assure la responsabilité d'un service de médecine comptant plusieurs médecins (ce qui représente une augmentation respective de 10 % ou de 20 %).

Enfin, une autre raison sous-tendant les difficultés de fonctionnement des centres de gestion a trait à la périodicité de la visite d'information et de prévention (VIP). Celle-ci a lieu tous les deux ans pour les fonctionnaires territoriaux, soit une périodicité trop courte tant la pénurie de médecins du travail pour en assurer la mise en oeuvre est grande. Elle devrait être alignée sur celle de la fonction publique d'État, soit cinq ans.

Ainsi, elle lui demande si le Gouvernement compte réduire la durée de formation qui constitue un frein à la vocation de médecin collaborateur, revoir la grille indiciaire des médecins du travail qui ne suffit plus à attirer de nouveaux personnels et aligner la périodicité des VIP de la fonction publique territoriale sur celle de la fonction publique d'État.

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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire publiée le 09/07/2025

Réponse apportée en séance publique le 08/07/2025

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, auteur de la question n° 615, adressée à M. le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification.

Mme Frédérique Puissat. Ma question concerne les difficultés visant à rendre la filière de la médecine du travail plus attrayante dans la fonction publique territoriale. Au même titre que la médecine générale, la fonction publique territoriale connaît une pénurie croissante de médecins du travail.

Plusieurs causes principales sont à l'origine de cette crise d'attractivité. La première concerne la formation - trop longue - des médecins collaborateurs. Aux termes de la loi du 20 juillet 2011, la formation nécessaire à l'obtention du titre de médecin collaborateur demeure très dense. Il y a d'abord l'enseignement du cycle 1, qui comprend 300 heures de cours théoriques et de stages pratiques réalisés sur deux années. Ensuite, le cycle 2, lui aussi étalé sur deux ans, comprend des exercices encadrés par des médecins collaborateurs, huit journées de regroupement pédagogique et la rédaction d'un mémoire faisant l'objet d'une soutenance devant un jury.

Une fois leur formation achevée, les médecins doivent effectuer deux CDD d'une durée de trois ans chacun, afin de pouvoir être embauchés à durée indéterminée.

Une autre cause de la crise d'attractivité, liée aux difficultés de fonctionnement des centres de gestion, est la périodicité de la visite d'information et de prévention (VIP). Celle-ci a lieu tous les deux ans pour les fonctionnaires territoriaux, soit une périodicité très courte, alors qu'elle a lieu tous les cinq ans pour les agents de la fonction publique d'État.

Dans ces conditions, le Gouvernement entend-il réduire la durée de la formation, qui constitue un frein à la vocation du médecin collaborateur ? Par ailleurs, prévoit-il d'assouplir les règles présidant à l'embauche des médecins de façon indéterminée ? Enfin, envisage-t-il d'aligner la périodicité des visites d'information et de prévention de la fonction publique territoriale sur celle des visites assurées dans la fonction publique d'État ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Madame la sénatrice Frédérique Puissat, je vous prie d'excuser l'absence de Laurent Marcangeli, qui est en déplacement à Chartres aux côtés du Premier ministre.

Le Gouvernement partage vos préoccupations. En effet, la médecine du travail connaît un certain nombre de difficultés, tant en matière de démographie médicale que d'attractivité de la spécialité.

Le ministère de la fonction publique est favorable à une réduction de la durée de la formation des médecins collaborateurs, dans le cadre d'une révision ciblée du dispositif de reconversion de ceux qui souhaitent exercer comme médecins du travail. Aujourd'hui, cette durée peut parfois sembler longue et même injustifiée, surtout pour les médecins déjà formés et expérimentés.

Certains professionnels peuvent ainsi renoncer à se reconvertir dans la médecine du travail, dans un contexte où la fonction publique territoriale peine à recruter.

En outre, il s'agit de capitaliser sur les compétences déjà acquises au cours du parcours professionnel, tout en veillant à ce que la formation continue de garantir un haut niveau de qualité dans l'accompagnement des agents à la prise de décision médicale.

Cette orientation s'inscrit dans le respect des exigences posées par l'article R. 4623-25 du code du travail, qui encadre les conditions de formation des médecins du travail.

Par ailleurs, le Gouvernement est bien conscient des enjeux liés à l'attractivité et à la rémunération des médecins du travail. Ses efforts se concentrent prioritairement sur la structuration de parcours professionnels plus fluides, notamment via la facilitation de passerelles de reconversion et l'amélioration des conditions d'exercice. Toutefois, compte tenu du contexte budgétaire actuel, une revalorisation ne peut être envisagée.

Enfin, concernant la fréquence des visites d'information et de prévention, une évolution est bien à l'étude, afin de mieux articuler les obligations réglementaires avec la réalité du terrain.

Le Gouvernement est favorable à l'alignement de la fonction publique territoriale sur la fonction publique d'État, en faisant passer la périodicité de visites d'information et de prévention de deux à cinq ans pour les agents non exposés à des risques particuliers. La fréquence biennale sera toutefois maintenue pour les agents soumis à des expositions spécifiques, dans un souci constant de prévention et de protection de leur santé.

M. le président. La parole est à Mme Frédérique Puissat, pour la réplique.

Mme Frédérique Puissat. Je vous prie, madame la ministre, de vous faire la porte-parole des avancées attendues en ce domaine, que nous suivrons avec attention.

Par ailleurs, je veux saluer tous les présidents des centres de gestion, singulièrement celui de l'Isère, ainsi que leurs conseils d'administration et leurs personnels. Tout ce que nous ferons pour leur faciliter la tâche au quotidien sera le bienvenu.

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