Question de M. LE RUDULIER Stéphane (Bouches-du-Rhône - Les Républicains) publiée le 26/06/2025

M. Stéphane Le Rudulier attire l'attention de M. le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification sur les effets potentiellement abusifs de certains préavis de grève à durée étendue dans la fonction publique territoriale.
En effet, plusieurs collectivités, dont la commune de La Destrousse, ont été confrontées récemment à des préavis de grève reconductibles couvrant plusieurs mois, voire plusieurs années, déposés par des organisations syndicales représentatives. Ces préavis, bien que légaux en apparence, créent une incertitude constante sur la continuité du service public, désorganisent les services et complexifient considérablement la gestion des ressources humaines. En exemple, les préavis de grève lancés par la Coordination Syndicale Départementale CGT des Bouches-du-Rhône, couvrant une période du 1er mars 2025 au 17 mai 2027, soit plus de deux ans de grèves potentielles et qui concernent l'ensemble des fonctionnaires, salariés et agents des collectivités du département des Bouches du Rhône. Or, si le droit de grève est un principe constitutionnellement garanti, il n'en demeure pas moins que la continuité du service public, notamment dans les domaines essentiels tels que la salubrité, l'éducation et les services sociaux constitue également un principe à valeur constitutionnelle. Ainsi, se pose la question de la proportionnalité entre la durée du préavis (ici plus de 2 ans) et les revendications syndicales exprimées, ainsi que du contrôle juridictionnel possible sur le caractère abusif d'un tel usage.
Il lui demande donc, d'une part, s'il entend clarifier les conditions juridiques dans lesquelles un préavis de grève peut être considéré comme abusif en raison de sa durée excessive, s'il entend prendre en conséquence une initiative de nature législative ou réglementaire pour encadrer la durée maximale des préavis reconductibles, en conciliation avec le respect du droit de grève, et, d'autre part, s'il compte mettre en place un accompagnement juridique renforcé pour les collectivités territoriales face à ce type de situation.

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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire publiée le 09/07/2025

Réponse apportée en séance publique le 08/07/2025

M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, auteur de la question n° 632, adressée à M. le ministre de l'action publique, de la fonction publique et de la simplification.

M. Stéphane Le Rudulier. Madame la ministre, j'appelle votre attention sur les effets potentiellement abusifs de certains préavis de grève dans la fonction publique territoriale. En effet, plusieurs communes des Bouches-du-Rhône ont été confrontées récemment à des préavis de grève reconductibles déposés par des organisations syndicales qui s'étalent sur plusieurs mois, voire plusieurs années.

Bien que légaux en apparence, ces préavis créent une incertitude constante pour la continuité du service public. Ils désorganisent les services et complexifient considérablement la gestion des ressources humaines.

Je prendrai un exemple. Le maire de La Destrousse m'a transmis le préavis de grève déposé par la CGT des Bouches-du-Rhône, qui, tenez-vous bien, s'étale du 1er mars 2025 au 17 mai 2027, soit plus de deux ans de grève potentielle impliquant l'ensemble des fonctionnaires, salariés et agents des collectivités territoriales du département !

Le droit de grève est un principe constitutionnel et mon propos ne tend nullement à le remettre en cause. Il n'en demeure pas moins que la continuité des services publics constitue également un principe à valeur constitutionnelle, notamment dans des domaines essentiels, tels que la salubrité, l'éducation et les services sociaux.

Aussi, je vous pose inévitablement la question de la proportionnalité entre la durée d'un préavis et les revendications syndicales exprimées. Entendez-vous clarifier les conditions juridiques dans lesquelles un préavis de grève peut être considéré comme abusif, en raison de sa durée excessive ?

Par ailleurs, pensez-vous, devant ce type de situation, mettre en place un accompagnement juridique renforcé, qui serait précieux pour les communes ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargée du commerce, de l'artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l'économie sociale et solidaire. Monsieur le sénateur Stéphane Le Rudulier, votre question soulève un enjeu fondamental, celui de la recherche du juste équilibre entre l'exercice du droit de grève et l'impératif de continuité du service public.

Les préavis de grève reconductibles de longue durée dans la fonction publique territoriale font malheureusement trop souvent l'actualité et suscitent l'incompréhension de nos concitoyens. Vous avez à cet égard cité l'exemple des Bouches-du-Rhône.

Certes, le droit de grève, consacré par le préambule de la Constitution de 1946, a valeur constitutionnelle et s'applique à l'ensemble des agents publics. Néanmoins, il ne s'agit pas d'un droit absolu. Il doit donc s'exercer dans le respect de règles spécifiques, comme le précisent les articles L. 114-1 et L. 114-2 du code général de la fonction publique.

Ces dispositions exigent : le dépôt d'un préavis par une ou plusieurs organisations syndicales représentatives au moins cinq jours francs avant le déclenchement de la grève ; la précision des motifs de la grève, ainsi que son lieu, sa date et heure de début et sa durée, qu'elle soit limitée ou non ; une négociation pendant la durée de préavis, qui pèse sur les deux parties, à savoir l'administration employeuse et l'organisation syndicale ; l'interdiction des grèves perlées ou tournantes.

La réglementation en vigueur n'interdit pas le dépôt d'un préavis de grève de longue durée, dès lors que les conditions précitées sont bien satisfaites. Néanmoins, de tels préavis peuvent engendrer une instabilité chronique dans l'organisation des services publics et affecter durablement la vie de nos concitoyens, en particulier dans les communes de moins de 10 000 habitants.

Ces préavis répétitifs peuvent mettre nos collectivités territoriales à rude épreuve, notamment dans des domaines sensibles comme la salubrité, l'éducation, l'action sociale et bien d'autres encore. De la même manière, ils nuisent à l'image des services publics et de nos agents publics.

C'est pourquoi, tout en réaffirmant son profond attachement au dialogue social et au droit de grève, le Gouvernement reste à l'écoute des propositions, dont celles que vous avez formulées, qui permettraient d'améliorer l'équilibre existant en vue d'assurer la continuité du service public sur l'ensemble du territoire.

M. le président. La parole est à M. Stéphane Le Rudulier, pour la réplique.

M. Stéphane Le Rudulier. Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre. Les maires sont totalement désabusés face à ce type de procédés. Cela doit nous conduire à nous interroger sur la nature de cette forme de syndicalisme, qui vise davantage à paralyser les institutions et services publics locaux qu'à exprimer de réelles revendications.

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