Question de M. FAGNEN Sébastien (Manche - SER) publiée le 03/07/2025

M. Sébastien Fagnen attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargée de la ruralité sur des inquiétudes liées au classement des zones France ruralités revitalisation (FRR) et l'iniquité des règles d'éligibilité aux fonds FRR.

La réforme des zones de revitalisation rurale (ZRR) adoptée lors de l'examen de la loi de finances pour 2024 et entrée en vigueur le 1er juillet 2024 fixe un nouveau zonage FRR pour soutenir les territoires ruraux fragiles, à l'aide d'exonérations fiscales et sociales plus importantes. Un second niveau de zonage FRR+ sera défini en 2025 avec des aides spécifiques pour les communes les plus en difficulté. Si le gouvernement se targue de ce 4ème volet du plan France ruralités et des évolutions permises par la loi n° 2025-127 du 14 février 2025 de finances pour 2025, il n'en demeure pas moins que des disparités entre des territoires confrontés aux mêmes réalités économiques risquent d'assombrir l'évaluation de cette politique publique.

La communauté d'agglomération Saint-Lô Agglo en paye tout particulièrement les frais. Dans le département de la Manche, 239 communes sont classées en zone FFR tandis que 13 communes de la communauté d'agglomération sont concernées : 11 communes situées dans le bassin de vie de Torigny-les-Villes, 1 dans le bassin de vie de Carentan-les-Marais, 1 dans le bassin de vie de Villedieu-les-Poêles-Rouffigny. A l'échelle du territoire de la communauté d'agglomération, seul le bassin de vie de Torigny-les-Villes remplit les conditions d'éligibilité, tous les autres sont rattachés au bassin de vie de Saint-Lô. Saint-Lô Agglo ne répond malheureusement pas aujourd'hui aux conditions d'éligibilité pour que l'ensemble de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI) puisse être classé en FFR.

Tandis que les collectivités situées au sein de ce nouveau zonage bénéficient d'avantages favorisant particulièrement l'installation des professionnels de santé, son application, dans le cas de Saint-Lô-Agglo creuse des déséquilibres existants entre les communes de la communauté d'agglomération mais aussi avec les territoires aux abords, créant un appel d'air des professionnels de santé.

C'est ainsi qu'il demande si le Gouvernement a l'intention, face à ce constat, de réviser les critères d'attribution afin de garantir une répartition plus équitable des fonds dans le respect des spécificités locales. Il souhaite également savoir si le Gouvernement envisage une concertation avec les collectivités territoriales afin d'adapter au mieux ces dispositifs aux besoins des territoires.

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Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'aménagement du territoire et de la décentralisation, chargé de la ruralité publiée le 04/09/2025

Issue d'une concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, au premier rang desquels les élus locaux et leurs représentants, la refonte des zones de revitalisation rurale (ZRR) constitue le quatrième axe du plan France ruralités présenté en juin 2023 par le Gouvernement. La réforme des zonages en faveur des territoires ruraux a été adoptée via l'article 73 de la loi du 29 décembre 2023 de finances pour 2024 et ajustée en loi de finances pour 2025. Poursuivant des objectifs de simplification, d'efficacité et d'équité territoriale, le nouveau zonage « France ruralités revitalisation » (FRR), entré en vigueur le 1er juillet 2024, remplace ainsi les ZRR et les zones de revitalisation des commerces en milieu rural (ZoRCoMiR). Selon les critères cumulatifs définis à l'article 44 quindecies A du code général des impôts, le nouveau zonage FRR concerne les communes dont la population est inférieure à 30 000 habitants et qui sont membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre (EPCI-FP) dont la densité de population et le revenu médian disponible sont inférieurs ou égaux, respectivement, à la densité médiane nationale (63,57 hab/km2) et à la médiane des revenus médians des EPCI-FP (21 570 euros). Les communes ont également été incluses dans le zonage, à titre complémentaire, sur proposition du préfet de région, lorsqu'elles répondaient aux mêmes critères cumulatifs de densité médiane de population et de médiane des revenus médians, appréciés à l'échelle des bassins de vie (70,84 hab/km2 et 21 600 euros). S'agissant de la communauté d'agglomération (CA) Saint-Lô Agglo, regroupant 61 communes, celle-ci ne remplit pas les critères de densité de population (93,30 hab/km2 contre un seuil maximal de 63,57 hab/km2) et de revenu médian disponible (21 650 euros contre un seuil maximal de 21 570 euros). Les 61 communes membres de la CA Saint-Lô Agglo sont par ailleurs rattachées à différents bassins de vie : Carentan-les-Marais (1 commune) ; Saint-Lô (47 communes) ; Torigny-les-Villes (11 communes) ; Villedieu-les-Poêles-Rouffigny (1 commune) et Villers-Bocage (1 commune). Les communes rattachées aux bassins de vie de Carentan-les-Marais (Graignes-Mesnil-Angot), de Torigny-les-Villes (Beuvrigny ; Domjean ; Fourneaux ; Gouvets ; Lamberville ; Le Perron ; Saint-Amand-Villages ; Saint-Louet-sur-Vire ; Saint-Vigor-des-Monts ; Tessy-Bocage ; Torigny-les-Villes) et de Villedieu-les-Poêles-Rouffigny (Beaucoudray) sont toutes classées en zone FRR, chacun des trois bassins de vie précités respectant les critères cumulatifs de densité de population et de revenu médian disponible fixés à cette échelle. En revanche, les communes rattachées aux bassins de vie de Saint-Lô et de Villers-Bocage ne sont pas classées en zone FRR dès lors que leur bassin de vie respectif ne remplit pas les critères cumulatifs de densité de population et de revenu médian disponible : le bassin de vie de Saint-Lô ne satisfait aucun des deux critères (97,61 hab/km2 contre un seuil maximal de 70,84 hab/km2 et 21 700 euros contre un seuil maximal de 21 600 euros) et le bassin de vie de Villers-Bocage ne remplit pas le critère de revenu (21 840 euros). Ainsi, sur les 61 communes de la CA Saint-Lô Agglo, 13 communes sont classées en zone FRR par application de la loi, à l'échelle de leur bassin de vie, et peuvent ainsi bénéficier des mesures fiscales et sociales adossées à ce zonage. Si la refonte du zonage des territoires ruraux constitue l'un des quatre axes du plan France ruralités, les autres mesures du plan permettent également à l'ensemble des territoires ruraux, y compris ceux qui ne sont pas éligibles au zonage FRR, de bénéficier de dispositifs de soutien en matière de mobilités, de santé, de logement etc. A l'occasion du comité interministériel aux ruralités du 20 juin 2025, le Premier ministre a ainsi réaffirmé l'engagement du Gouvernement en faveur des territoires ruraux à travers la poursuite du plan France ruralités, qui s'applique sans critère de zonage. Par ailleurs, les communes de la CA Saint-Lô Agglo non classées en FRR sont éligibles à d'autres zonages. A ce titre, 18 communes de la communauté d'agglomération sont situées dans des zones d'aide à finalité régionale (AFR) dont 11 ne sont pas classées en FRR : La Barre-de-Semilly ; Baudre ; Condé-sur-Vire ; Le Dézert ; Le Mesnil-Véneron ; Moyon Villages ; Saint-André-de-l'Épine ; Saint-Fromond ; Saint-Jean-de-Daye ; Saint-Lô et Sainte-Suzanne-sur-Vire. La loi de finances pour 2024 a prorogé les dispositifs d'exonérations fiscales attachées à ce zonage AFR jusqu'en 2027, en matière d'impôts sur les bénéfices (impôt sur le revenu / impôts sur les sociétés) et d'impôts locaux (TFPB et CFE) pour les entreprises éligibles. En outre, le zonage AFR donne la possibilité aux autorités publiques, parmi lesquelles les collectivités et leurs groupements, d'octroyer dans des conditions plus favorables des aides aux entreprises dans le but de favoriser le développement de l'activité économique des territoires concernés. En outre, une démarche d'évaluation de la mise en oeuvre du nouveau zonage France ruralités revitalisation va être menée afin d'en tirer un premier bilan. Enfin, la commune de Saint-Lô compte deux quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Dans le cadre du prochain Projet de Loi de Finances 2026, le Gouvernement a acté le principe d'introduire des exonérations d'impôts sur les bénéfices (IR/IS) dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, en sus des exonérations d'impôts locaux, notamment pour les commerces, l'artisanat, et les professions médicales. Ainsi, si la réforme était votée par le Parlement, les deux QPV de Saint-Lô pourraient bénéficier d'un ensemble d'exonérations fiscales, y compris pour les professions médicales.

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