Question de Mme MORIN-DESAILLY Catherine (Seine-Maritime - UC) publiée le 03/07/2025
Mme Catherine Morin-Desailly attire l'attention de M. le ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargé de la santé et de l'accès aux soins sur le numerus clausus de l'offre de formation initiale à la profession d'orthophoniste visant à permettre de répondre aux besoins toujours croissants d'une prise en charge spécifique des enfants et des adolescents, mais aussi de certains patients adultes. Avec une moyenne de 30 professionnels pour 100 000 habitants, la pénurie d'orthophonistes est particulièrement grave et quasi généralisée en France. Les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous chez ces spécialistes atteignent souvent un voire deux ans. Alors que le ministère de la santé a fait de l'augmentation des places en formation initiale pour les orthophonistes une priorité en janvier 2023, le numerus clausus stagne depuis plusieurs années et est à un niveau très inférieur à celui nécessaire pour répondre aux besoins de notre territoire. Cette situation est renforcée par le manque de moyens alloués aux centres de formation. Certaines collectivités souhaitent pourtant mettre en place, par le biais de la formation et d'investissements dans les structures, une politique volontariste permettant d'augmenter le nombre de professionnels formés sur leur territoire. Ainsi, la région Normandie plaide depuis plusieurs années pour que le numérus clausus des étudiants admis en première année dans les centres de formation normands soit relevé de manière significative. Limité à 35 places à Rouen et à Caen depuis plusieurs années, il passe pour la rentrée scolaire 2025-2026 à 40 places pour chacun des deux centres. Bien qu'il s'agisse d'une évolution positive, elle est encore loin de permettre répondre aux besoins du territoire, d'autant que ses effets positifs ne se feront sentir qu'à l'issue des cinq années de formation. Le nombre maximal d'étudiants pouvant être admis en première année d'études préparatoires au certificat de capacité d'orthophoniste est fixé chaque année par le ministère de la santé et le ministère de l'enseignement supérieur. Ces quotas sont définis après consultation des agences régionales de santé sur le nombre d'orthophonistes à former au vu de la démographie des professions de santé et des priorités sanitaires régionales, en prenant également en compte les capacités de formation des universités. Puisqu'en Normandie l'ensemble des données semble permettre et justifier une augmentation significative du numerus clausus, elle souhaite connaître les raisons pour lesquelles une telle augmentation ne peut être mise en place.
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Transmise au Ministère de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées
Réponse du Ministère délégué auprès de la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargé de l'autonomie et des personnes handicapées publiée le 05/11/2025
Réponse apportée en séance publique le 04/11/2025
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, auteure de la question n° 656, adressée à Mme la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées.
Mme Catherine Morin-Desailly. Je souhaite interpeller Mme la ministre de la santé, chargée de l'accès aux soins, sur le numerus clausus de l'offre de formation initiale concernant la profession d'orthophoniste : il faut en effet répondre aux besoins spécifiques toujours croissants de nos enfants et de nos adolescents, mais aussi des adultes, en la matière.
Avec trente orthophonistes pour 100 000 habitants, la pénurie est particulièrement grave et quasi généralisée en France. De fait, les délais d'attente pour obtenir un rendez-vous auprès de ces spécialistes atteignent un, voire deux ans. Alors qu'en janvier 2023 le ministère de la santé a fait de l'augmentation du nombre de places en formation initiale une priorité, le numerus clausus stagne depuis plusieurs années : il se situe aujourd'hui à un niveau bien inférieur à celui qui conviendrait pour répondre aux besoins de notre territoire. Cette situation est aggravée par le manque de moyens alloués aux centres de formation.
Certaines collectivités, comme la région Normandie, dont je suis élue, mettent pourtant en oeuvre, par le biais d'investissements dans les structures, une politique très volontariste permettant d'augmenter le nombre de professionnels formés sur leur territoire.
Ainsi, nous plaidons depuis plusieurs années pour que le numerus clausus s'appliquant aux étudiants admis en première année dans les centres de formation normands soit relevé de manière significative. Limité à trente-cinq places à Rouen et à Caen depuis quelques années, il est passé lors de la dernière rentrée scolaire à quarante places pour chacun des deux centres.
Bien qu'elle aille dans le bon sens, cette évolution est encore loin de répondre aux besoins du territoire, d'autant que ses effets positifs ne se feront sentir qu'à l'issue des cinq années de formation.
Puisque le nombre maximal d'étudiants pouvant être admis en première année d'études préparatoires au certificat de capacité d'orthophoniste est fixé chaque année par le ministère de la santé et le ministère de l'enseignement supérieur, et qu'en Normandie l'ensemble des données semblent justifier une augmentation significative du numerus clausus, je souhaite connaître les raisons d'un tel blocage.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée auprès de la ministre de la santé, des familles, de l'autonomie et des personnes handicapées, chargée de l'autonomie et des personnes handicapées. Madame la sénatrice, je vous prie de bien vouloir excuser l'absence de Mme la ministre de la santé, qui m'a chargée de vous répondre sur ce sujet essentiel de l'accès aux soins d'orthophonie et de notre capacité à former davantage de professionnels.
Depuis quinze ans, le nombre d'orthophonistes en exercice a augmenté : il est passé de 19 000 à 25 000. Malgré cette hausse, l'accès aux soins reste difficile dans tous les territoires. De plus, il existe de fortes disparités de répartition territoriale, puisque 75 % des orthophonistes exercent en zone urbaine.
Le Gouvernement partage votre souhait de voir la situation s'améliorer, et c'est pourquoi il fait en sorte d'accroître le nombre de professionnels formés.
Pour la rentrée 2025, le nombre de places offertes sur Parcoursup au sein des centres de formation universitaire a dépassé les 1 000, soit une augmentation de 28 % en dix ans. Sur l'initiative d'Agnès Firmin Le Bodo, une proposition de loi a été adoptée par l'Assemblée nationale il y a quelques mois, afin de porter à 1 500 le nombre de personnes à former annuellement à l'horizon 2030.
Mon collègue Philippe Baptiste, ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'espace, et moi-même visons ce même objectif. Aussi, nous soutenons pleinement votre démarche et renforçons la formation en mobilisant plusieurs leviers.
D'abord, nous ne fixons plus de quotas de formation depuis deux ans, pour laisser toute latitude aux acteurs de l'enseignement de définir le nombre de places offertes en fonction des besoins.
Ensuite, nous nous concertons avec certaines universités afin de créer de nouveaux centres de formation. À titre d'exemple, nous en ouvrirons un à La Réunion en 2026 : cela permettra de former des orthophonistes sur place et de répondre aux besoins locaux.
M. le président. Il faut conclure, madame la ministre.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq, ministre déléguée. Enfin, le Gouvernement poursuit l'effort de création de postes universitaires dans la section 91 du Conseil national des universités des sciences de la rééducation et de la réadaptation.
M. le président. La parole est à Mme Catherine Morin-Desailly, pour la réplique.
Mme Catherine Morin-Desailly. Madame la ministre, les quotas sont définis après consultation des agences régionales de santé. Dès lors que la Normandie a massivement investi dans le Ségur de la santé - c'est un cas unique en France - et dans l'enseignement supérieur, alors même que cette compétence n'est pas du ressort de la région, je demande que l'on débloque enfin la situation. Nos concitoyens viennent nous voir dans nos permanences, car ils sont désespérés : il n'est pas tolérable d'attendre aussi longtemps pour avoir accès à un orthophoniste, quand il s'agit de se rééduquer le plus rapidement possible.
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