Question de M. PACCAUD Olivier (Oise - Les Républicains) publiée le 03/07/2025

M. Olivier Paccaud attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la problématique de vacance des locaux agricoles. En effet, il n'est pas rare qu'un agriculteur habite sur le lieu de son exploitation, parfois dans un bâtiment dédié. C'est d'ailleurs souvent le cas dans la filière hippique. Or, lorsque l'exploitation s'arrête, si l'agriculteur peut encore habiter dans ce logement, même sans aucune exploitation agricole liée, n'est-il pas regrettable que des locaux à vocation purement agricole restent abandonnés ? Ce sujet n'est pas à prendre à la légère puisque cette problématique rencontrée par le maire de Lamorlaye ne risque pas d'être isolée. Ainsi, d'ici 2030, 50 % des agriculteurs qui exerçaient avant 2020 devraient avoir pris leur retraite. En l'état actuel du droit, le maire ne peut qu'appliquer à cette situation le droit pénal de l'urbanisme. Il peut alors sanctionner les agriculteurs qui, n'utilisant plus leur local à destination purement agricole, les abandonnent ou les transforment en locaux d'habitation. Toutefois, cette solution est complexe à appréhender en droit et les solutions pénales prévues à ce jour sont laborieuses à mettre en oeuvre. Il semble ainsi délicat humainement et juridiquement d'envisager seulement une réponse pénale à d'anciens agriculteurs arrivant tout juste à la retraite. Il s'agirait seulement de « sanctionner » et non pas d'encourager, d'inciter les agriculteurs à vendre ou louer leurs locaux agricoles. De plus, la qualification juridique de ces bâtiments est très floue et difficilement accessible pour les propriétaires actuels et futurs. La solution ne serait-elle pas de mettre en place un outil fiscal s'inspirant de la taxe d'habitation sur les logements vacants (THLV) ? Ce faisant, plusieurs adaptations seraient à envisager. Ainsi, la taxe devrait être fonction de la surface non-louée, tout en ciblant éventuellement certains types de locaux particuliers, comme par exemple les boxes pour la filière hippique. Elle pourrait aussi être fortement dégressive à compter d'une location même partielle des locaux. Il serait également opportun de prévoir certaines exonérations spécifiques pour les agriculteurs à la retraite. Cette solution présenterait des avantages politiques et pratiques indéniables.

- page 3737

Transmise au Ministère de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche


Réponse du Ministère délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux publiée le 09/07/2025

Réponse apportée en séance publique le 08/07/2025

M. le président. La parole est à M. Olivier Paccaud, auteur de la question n° 664, transmise à Mme la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.

M. Olivier Paccaud. Monsieur le ministre, je souhaite attirer votre attention sur une problématique particulière de vacance de locaux agricoles.

Il est fréquent qu'un agriculteur habite sur le lieu de son exploitation, parfois dans un bâtiment prévu à cet effet. Ainsi, lorsque l'exploitation s'arrête, si l'agriculteur peut encore habiter dans ce logement, même sans aucune exploitation agricole liée, il est regrettable que des locaux à vocation purement agricole restent parfois, eux, abandonnés. Or, d'ici à 2030, 50 % des agriculteurs qui exerçaient avant 2020 devraient avoir pris leur retraite.

Permettez-moi d'évoquer le cas particulier de la filière hippique, à partir d'un exemple dans le département de l'Oise, à Lamorlaye, dont le maire, M. Nicolas Moula, déplore la vacance actuelle de nombreux boxes, pour lesquels une forte demande existe.

En l'état actuel du droit, le maire ne peut appliquer à cette situation que le droit pénal de l'urbanisme, sanctionnant les exploitants qui, n'utilisant plus leurs locaux à destination purement agricole, les abandonnent ou les transforment en locaux d'habitation. Toutefois, cette solution est complexe à appréhender en droit et les solutions pénales prévues à ce jour sont laborieuses à mettre en oeuvre.

Il est en outre délicat, humainement et juridiquement, d'envisager la seule réponse pénale à l'encontre d'anciens agriculteurs arrivant tout juste à la retraite. Il s'agirait alors seulement de sanctionner et non d'encourager ou d'inciter les agriculteurs à vendre ou à louer leurs locaux agricoles.

Enfin, la qualification juridique de ces bâtiments est très floue et difficilement accessible pour les propriétaires actuels et futurs.

La solution ne serait-elle pas à trouver dans la création d'un outil fiscal s'inspirant de la taxe d'habitation sur les logements vacants ? Ce faisant, plusieurs adaptations seraient bien évidemment à envisager. Ainsi, la taxe devrait être fonction de la surface non louée tout en ciblant éventuellement certains types de locaux particuliers, par exemple les boxes pour la filière hippique. Elle pourrait aussi être dégressive à compter d'une location, même partielle, des locaux avec certaines exonérations spécifiques.

Monsieur le ministre, les élus de Lamorlaye et d'autres villes attendent votre réponse.

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué.

M. Thani Mohamed Soilihi, ministre délégué auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, chargé de la francophonie et des partenariats internationaux. Je vais m'empresser de vous répondre, monsieur le sénateur Olivier Paccaud.

Un agriculteur qui prend sa retraite dispose généralement de locaux nécessaires à son ancienne activité et, parfois, d'un logement situé sur le lieu même de l'exploitation. Or, s'il peut souhaiter continuer à habiter son logement, il est important que les locaux professionnels puissent être remis à disposition de ceux qui reprendraient l'exploitation. Il est donc salutaire que les élus locaux s'attachent au maintien de la vocation agricole desdits locaux.

À ce titre, ils peuvent déjà instituer, par une délibération prise dans les conditions de l'article 1639 A bis du code général des impôts, une taxe annuelle sur les friches commerciales. Cette dernière, prévue par l'article 1530 du même code, s'applique aux biens qui ne sont plus affectés à une activité depuis au moins deux ans au 1er janvier de l'année d'imposition. L'inoccupation doit avoir été ininterrompue au cours de la période.

Dans l'hypothèse où des agriculteurs retraités souhaiteraient valoriser différemment leurs biens, les documents d'urbanisme permettent aux élus de s'opposer aux changements de destination. En outre, la société d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer) dispose d'outils juridiques permettant de maintenir ces biens au service de l'agriculture.

Dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme (PLU), les bâtiments agricoles pouvant faire l'objet d'un changement de destination doivent être identifiés dans le règlement. L'autorisation d'urbanisme portant sur un tel changement de destination est soumise à l'avis conforme de la commission départementale de la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF), en zone agricole, et de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites (CDNPS), en zone naturelle.

Par ailleurs, si la loi du 16 juin 2025 visant à faciliter la transformation des bureaux et autres bâtiments en logements permet à l'autorité compétente, pour délivrer l'autorisation d'urbanisme, de déroger au règlement du PLU afin d'autoriser le changement de destination des bâtiments ayant une destination autre que l'habitation en bâtiments à destination d'habitation, cette dérogation ne peut être accordée, pour les bâtiments agricoles, que s'ils ont cessé d'être utilisés pendant vingt ans. Voilà bien une preuve de l'attachement du législateur au maintien de la destination agricole des bâtiments.

- page 7319

Page mise à jour le