N° 337

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2000-2001

Annexe au procès-verbal de la séance du 23 mai 2001

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission des Affaires économiques et du Plan (1) sur le projet de loi , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE, portant mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier ,

Par M. Gérard LARCHER,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : MM. Jean François-Poncet, président ; Philippe François, Jean Huchon, Jean-François Le Grand, Jean-Paul Emorine, Jean-Marc Pastor, Pierre Lefebvre, vice-présidents ; Georges Berchet, Léon Fatous, Louis Moinard, Jean-Pierre Raffarin, secrétaires ; Louis Althapé, Pierre André, Philippe Arnaud, Mme Janine Bardou, MM. Bernard Barraux, Michel Bécot, Jacques Bellanger, Jean Besson, Jean Bizet, Marcel Bony, Jean Boyer, Mme Yolande Boyer, MM. Dominique Braye, Gérard César, Marcel-Pierre Cleach, Gérard Cornu, Roland Courteau, Charles de Cuttoli, Désiré Debavelaere, Gérard Delfau, Christian Demuynck, Marcel Deneux, Rodolphe Désiré, Michel Doublet, Paul Dubrule, Bernard Dussaut , Jean-Paul Emin, André Ferrand, Hilaire Flandre, Alain Gérard, François Gerbaud, Charles Ginésy, Serge Godard, Francis Grignon, Louis Grillot, Georges Gruillot, Mme Anne Heinis, MM. Pierre Hérisson, Rémi Herment, Bernard Joly, Alain Journet, Philippe Labeyrie, Gérard Larcher, Patrick Lassourd, Gérard Le Cam, André Lejeune, Guy Lemaire, Kléber Malécot, Louis Mercier, Aymeri de Montesquiou, Paul Natali, Jean Pépin, Daniel Percheron, Bernard Piras, Jean-Pierre Plancade, Ladislas Poniatowski, Paul Raoult, Jean-Marie Rausch, Charles Revet, Henri Revol, Roger Rinchet, Josselin de Rohan, Michel Souplet, Mme Odette Terrade, MM. Michel Teston, Pierre-Yvon Trémel, Jean-Pierre Vial.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 11 ème législ.) : 2990 , 3028 et T.A. 665

Sénat : 301 , 336 et 338 (2000-2001)

Politique économique.

EXPOSÉ GÉNÉRAL

Mesdames, Messieurs,

Le projet de loi qui vous est soumis, après son adoption par l'Assemblée nationale, porte mesures urgentes de réformes à caractère économique et financier. Votre Commission des Affaires économiques est saisie pour avis des articles 11 à 13 de ce texte qui traitent respectivement du statut de la Compagnie nationale du Rhône (CNR), du domaine immobilier de La Poste et des sanctions applicables aux communes pour insuffisance de construction de logements sociaux.

On laissera à la Commission des Finances, saisie au fond, le soin d'apprécier la cohérence d'ensemble et l'unité du dispositif proposé. On observera cependant que l'intitulé du projet de loi ne nous éclaire guère là-dessus.

Certes, les dix-neuf articles du texte ont bien tous, peu ou prou, un caractère économique et financier.

Pour le reste, ces mesures seraient des « réformes ». Mais ce terme n'est-il pas applicable à tout changement législatif ?

Enfin, ces mesures seraient marquées du sceau de l'« urgence », justifiant ainsi opportunément le recours à la procédure du même nom.

Le Sénat s'est trop souvent élevé contre l'abus de la procédure d'urgence pour qu'il soit utile d'insister sur ce point. D'exception, cette procédure est devenue règle, depuis le début de la législature, pour la quasi-totalité des grands textes intéressant la Commission des Affaires économiques. Le projet de loi sur la modernisation et le développement du service public de l'électricité, pour lequel le Gouvernement a déclaré l'urgence... mais laissé s'écouler près de sept mois entre le débat à l'Assemblée nationale et la discussion au Sénat, est emblématique de cette dérive.

Les trois articles du présent texte qui intéressent la Commission des Affaires économiques n'ont, quant au fond, aucun lien entre eux. Ils ne sont pas sans parenté, en revanche, si l'on considère les circonstances de leur inclusion dans le projet de loi : c'est en effet, pour chacun d'entre eux, une erreur de jugement ou une défaillance du Gouvernement qui a obligé celui-ci soit à « revoir sa copie » (article 13), soit (articles 11 et 12) à traiter -de façon au demeurant très partielle et bien tardive- des questions qu'il aurait été plus pertinent d'aborder dans un autre cadre.

La loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité, arc-boutée sur son choix d'une transposition a minima de la directive européenne, a fait l'impasse sur la question du statut de la CNR, dont il était clair qu'il ne pouvait rester en l'état. C'est donc aujourd'hui, par un article 11 perdu au milieu d'un texte « fourre-tout », qu'on apporte un début de réponse à cette question.

Pour la Poste, il s'agit moins d'« impasse » que d'une manière d'obstruction. Le Sénat, par la voix de parlementaires de toutes sensibilités, demande depuis des années un débat législatif d'ensemble sur le secteur postal et sur son opérateur. Ce débat, le Gouvernement a semblé l'accepter, et l'a même promis, à l'Assemblée nationale comme au Sénat. Mais le Parlement l'attend toujours, et risque de l'attendre en vain. Le Gouvernement, en effet, préférant jouer la discrétion sur un débat jugé « sensible », réforme La Poste en catimini et par tronçons, utilisant pour cela tous les « véhicules législatifs » possibles. C'est ainsi qu'une transposition partielle de la directive postale du 15 décembre 1997 a été opérée dans la loi d'aménagement du territoire du 25 juin 1999, par un amendement gouvernemental de dernière minute, -autant dire sans débat- et que l'hiver dernier, seule la mobilisation du Sénat a permis de contrer la tentative gouvernementale d'achever, par ordonnance, cette transposition.

L'article 12 du présent projet, qui traite cette fois du régime domanial de la Poste, donne une nouvelle illustration de ce refus d'un débat d'ensemble.

L'article 13, quant à lui, tire les conséquences d'une inconstitutionnalité.

Il revoit, en effet, le mécanisme de sanctions applicable aux communes ne respectant pas leurs obligations en matière de logement social, prévu à l'article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains. Le Sénat s'était opposé avec raison à cet article, identifiant notamment dans le mécanisme proposé une méconnaissance du principe de libre administration des collectivités locales. Le Conseil constitutionnel, dans une décision du 7 décembre 2000, a, sur ce point, fait sienne l'analyse de la Haute Assemblée et déclaré le texte en cause non conforme à la Constitution. Le Gouvernement se trouve ainsi contraint de remettre son ouvrage sur le métier.

Si votre Commission des affaires économiques trouve beaucoup à redire à la méthode du Gouvernement à propos de ces trois dispositifs, leur contenu appelle de sa part un jugement nuancé.

S'agissant de la CNR, la transformation de cette « société anonyme d'intérêt général » en société anonyme est souhaitable. Votre commission vous proposera, cependant, de redéfinir la place de l'Etat au sein de son conseil de surveillance, et de prévoir divers mécanismes destinés à éviter que l'entrée en vigueur de ces dispositions ne soit retardée. Au-delà du texte soumis aujourd'hui à son examen, elle insiste pour que le financement des missions d'intérêt général de cette société soit pérennisé et souhaite obtenir du Gouvernement l'assurance que la CNR sera bien, sur le marché électrique, un acteur de plein exercice, pour la production comme pour la vente d'énergie.

Pour la Poste, l'article 12 propose de faire sortir les biens immobiliers de La Poste du régime juridique de la domanialité publique, afin d'accroître la liberté de gestion de l'établissement. Un mécanisme d'opposition de l'Etat est instauré, pour le cas où une cession ou apport contredirait les obligations d'aménagement du territoire et de service public fixées par le cahier des charges et le contrat de plan de La Poste. Ce droit d'opposition est calqué sur celui que l'Etat détient sur France Télécom. Votre commission estime que cet article est un premier pas, même insuffisant, dans la bonne direction.

S'agissant des sanctions à l'encontre des communes ne remplissant pas leurs obligations en matière de construction de logements sociaux, l'article 13 propose un dispositif sinon facultatif, du moins non automatique, où le représentant de l'Etat doit tenir compte des circonstances locales avant de prononcer la carence. En outre, la sanction financière appliquée est proportionnelle au nombre de logements manquants par rapport à l'objectif imposé et la charge financière supportée par la commune, en cas de subvention foncière versée par l'Etat, est plafonnée par la loi.

Votre commission constate certes que le nouveau texte reste éloigné du mécanisme incitatif et contractuel qu'elle avait défendu au printemps dernier, prenant en compte la réalité intercommunale. Elle demeure plus que jamais convaincue que la vraie solution réside dans une relance de la production de logements sociaux alors que depuis plusieurs années, les mises en chantier ne correspondent qu'à la moitié des programmations physiques affichées par le Gouvernement en loi de finances .

Fallait-il pour autant supprimer l'article 13 et rouvrir un débat vieux de moins d'un an ? Votre rapporteur pour avis n'a pas manqué de se poser la question. La Commission a finalement choisi, pour cet article, une rédaction tendant à mieux encadrer le dispositif, et à le rendre plus proche des conceptions défendues par le Sénat.

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