III. LA CONVENTION, LA LÉGISLATION FRANÇAISE ET LE DROIT EUROPÉEN

A. LA LÉGISLATION FRANÇAISE AU REGARD DE LA CONVENTION

La législation française prévoit la plupart des incriminations que la convention oblige à introduire dans le droit pénal des Etats parties.

En ce qui concerne la participation à un groupe criminel organisé (article 5), elle correspond à l'incrimination de l' association de malfaiteurs prévue par l'article 450-1 du code pénal.

Depuis la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, l'association de malfaiteurs en droit interne est applicable à la préparation d'un crime ou d'un délit puni d'une peine d'au moins 5 ans d'emprisonnement (article 450-1 du code pénal).

Rappelons qu'au sens de la convention, l'incrimination de la participation à un groupe criminel organisé suppose que l'objectif poursuivi soit de commettre une «infraction grave», définie comme une infraction punie d'une peine privative de liberté dont le maximum ne doit pas être inférieur à 4 ans ou d'une peine plus lourde.

Dès lors, notre droit pénal est conforme aux exigences de la convention.

S'agissant du blanchiment d'argent (article 6), la définition qu'en donne la convention de Palerme, très largement inspirée de la convention de 1990 du Conseil de l'Europe, est compatible avec les articles 324-1 (blanchiment) et 321-1 (recel) du code pénal. Il convient de préciser qu'en droit interne, le recel et le blanchiment s'appliquent au produit de tout crime ou délit, ce qui satisfait à l'article 6 § 2.

En matière de corruption (article 8), les éléments constitutifs des infractions de corruption active et corruption passive d'agents publics nationaux définis par la convention de Palerme correspondent aux délits prévus par les articles 433-1 1°, 432-11 1° et 434-9 du code pénal et n'appellent pas d'adaptation du droit interne.

Le code pénal ne prévoit pas les infractions de corruption active et passive d'agents publics étrangers et de fonctionnaires internationaux prévues par le paragraphe 2, sauf pour ce qui concerne la corruption active d'agents publics étrangers dans le cadre des transactions commerciales et la corruption de fonctionnaires communautaires ou de fonctionnaires des autres Etats membres de l'Union européenne.

Mais ce paragraphe 2 de la convention n'est pas contraignant. Le gouvernement a précisé à votre rapporteur qu'il jugeait prématuré de s'engager dans une modification du droit positif alors que vient de s'ouvrir, sous l'égide de l'ONU, la négociation d'une convention générale de lutte contre la corruption.

Enfin, les éléments constitutifs de l'infraction d' entrave au bon fonctionnement de la justice (article 23) correspondent déjà à des incriminations prévues en droit interne, essentiellement la subornation de témoins (art. 434-15 du code pénal) ou d'experts (art. 434-21 du code pénal) et les menaces et actes d'intimidation à l'égard des personnels exerçant une fonction publique (art. 433-3 alinéa 2 du code pénal). Elles n'appellent pas d'adaptation du droit interne.

D'autres dispositions de la Convention, bien que rédigées en termes très généraux ou non contraignants, pourraient justifier une modification de notre droit interne, principalement en ce qui concerne la protection des témoins et des collaborateurs de justice. Il faut d'ailleurs préciser sur ce point que la loi relative à la sécurité quotidienne du 15 novembre 2001 prévoit un dispositif de protection des témoins (articles 706-58 à 706-62 du code de procédure pénale), qui se conforme aux exigences de la jurisprudence européenne relative au respect de l'article 6 de la Convention européenne des Droits de l'Homme et dont les grands traits sont :

- un statut juridique de l'anonymat défini par des règles de procédure pénale précises et spécifiant un certain niveau de gravité (infractions punies d'au moins cinq ans d'emprisonnement);

- un critère de protection lié au «danger pour la vie ou l'intégrité physique de la personne, des membres de sa familles ou de ses proches» ;

- l'audition d'un témoin sous couvert d'anonymat est autorisée par le juge des libertés et de la détention, saisi par une requête motivée du procureur de la République ou du juge d'instruction ;

- la possibilité d'une confrontation de la personne mise en examen ou renvoyée devant la juridiction de jugement avec le témoin, par l'intermédiaire d'un procédé technique permettant l'audition à distance qui préserve l'anonymat et la sécurité du témoin ou de la victime (vidéo masquée) ;

- l'exigence de ne pas retenir le témoignage anonyme comme élément déterminant de la déclaration de culpabilité ;

- la création du délit (article 706-59 du code pénal) de révélation de l'identité ou de l'adresse d'un témoin ayant bénéficié des dispositions sur l'anonymat de la déposition.

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