B. DES DÉPENSES TRÈS DYNAMIQUES

Les charges de la branche progressent à vive allure ces dernières années.

Dépenses consolidées AT-MP des régimes de base (champ LFSS)

(en milliards d'euros)

1999

2000

2001

2002 1

2003 2

Montant

7,622

7,935

8,760

9,021

9,404

Evolution

+ 4,1 %

+ 10,4 %

+ 3,0 % 3

+ 4,2 % 4

1 Objectif révisé PLFSS 2003 (objectif initial : 8.530 millions d'euros)

2 Objectif PLFSS 2003

3 + 5,7 % par rapport à l'objectif initial PLFSS 2001

4 + 10,2 % par rapport à l'objectif initial PLFSS 2002

Certes, ces dépenses ne représentent qu'environ 3 % des dépenses totales des régimes de base de sécurité sociale.

Il n'en reste pas moins que l'évolution des dépenses de la branche AT-MP devient aujourd'hui la plus soutenue des dépenses des branches de la sécurité sociale.

Cette évolution se vérifie à un double niveau :

- une forte dérive par rapport aux objectifs initiaux : + 5 % dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001, + 5,7 % dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002 ;

- une croissance soutenue des dépenses effectivement réalisées : + 10,4 % en 2001.

Certes, le présent projet de loi de financement table sur une progression plus modérée des dépenses en 2002 et 2003.

L'objectif de dépenses pour 2002, révisé à la hausse par le présent projet de loi 31 ( * ) , retient une simple progression de 3 % des dépenses effectives en 2002.

De même, l'objectif de dépenses pour 2003 prévoit une hausse ramenée à 4,2 % par rapport à l'objectif révisé pour 2002, mais équivalente à une hausse de 10,2 % par rapport à l'objectif initial pour 2002.

Ces objectifs concernent les dépenses d'AT-MP de l'ensemble des régimes de base comptant plus de 20.000 cotisants. Or, à elle seule, la CNAMTS-AT représente 90 % des dépenses des régimes de base en la matière.

Il importe donc d'attacher une attention toute particulière au régime général

Charges de la branche AT-MP (CNAMTS)

(en droits constatés et en millions d'euros)

2000

2001

%

2002

%

2003

%

CHARGES

7.178,7

7.971,1

11,0

8.279,0

3,9

8.641,9

4,4

CHARGES DE GESTION TECHNIQUE

6.438,0

7.354,3

14,2

7.600,6

3,3

7.998,5

5,2

Prestations

5.556,6

5.914,5

6,4

6.180,6

4,5

6.389,5

3,4

Prestations légales

5.494,6

5.748,7

4,6

6.014,8

4,6

6.223,4

3,5

Prestations extralégales

2,0

2,0

1,2

2,4

20,0

2,4

0,0

Autres prestations

14,0

135,4

868,0

137,9

1,8

140,4

1,8

Dotations nettes aux provisions (pour prestations)

38,0

20,5

- 46,0

17,6

- 14,3

15,4

- 12,5

Pertes sur créances irrécouvrables (pour prestations)

8,1

7,9

- 2,8

8,0

1,3

8,0

0,0

Transferts entre organismes de sécurité sociale

685,3

714,0

4,2

867,4

21,5

899,4

3,7

Compensations

581,0

580,4

- 0,1

738,0

27,2

758,5

2,8

Compensations intégrales

1,4

1,1

- 17,6

1,1

0,0

1,1

0,0

Compensation avec le régime des Mines (CANSSM)

438,6

435,1

- 0,8

437,1

0,5

427,3

- 2,2

Reversement à la CNAM/Maladie

141,0

144,1

2,2

299,7

108,0

330,0

10,1

Transferts divers et autres

104,3

133,6

28,1

129,4

- 3,1

141,0

8,9

Compensation avec le régime des salariés agricoles

104,3

108,9

4,5

104,0

- 4,5

114,8

10,4

Dotation au FNGA (ACOSS)

0,0

24,7

-

25,4

3,0

26,2

3,0

Autres transferts techniques

188,0

723,7

285,0

550,5

- 23,9

704,9

28,0

Contribution au FCAATA

102,9

205,8

100,0

300,0

45,8

450,0

50,0

Contribution au FIVA

0,0

438,3

-

180,0

- 58,9

190,0

5,6

Contribution au FCAT

83,5

78,1

- 6,5

69,0

- 11,7

63,4

- 8,1

Contributions aux autres fonds nationaux

1,5

0,7

- 53,4

0,7

2,0

0,7

0,0

Subventions à des organismes hors sécurité sociale

0,0

0,8

-

0,8

0,0

0,8

0,0

Diverses charges techniques

5,1

2,1

- 59,6

2,1

0,0

2,1

0,0

Autres charges techniques

3,0

0,1

- 97,0

0,1

0,0

2,6

-

CHARGES DE GESTION COURANTE

740,8

616,8

- 16,7

678,4

10,0

643,4

- 5,2

Source : Direction de la sécurité sociale

L'étude du tableau ci-dessus permet alors d'analyser plus en détail les sources du dynamisme des dépenses.

Celui-ci tient nettement moins à la progression des prestations traditionnellement servies par la branche qu'à la forte hausse des transferts à la charge de la branche.

1. Une évolution modérée mais différenciée des prestations

Le versement direct de prestations par la branche représentait, en 2001, 74 % de ses charges.


Les prestations versées aux victimes par l'assurance
accidents du travail-maladies professionnelles

« La reconnaissance de l'origine professionnelle de l'accident ou de la maladie permet à la victime d'être indemnisée au titre de la législation des accidents du travail et des maladies professionnelles. Elle a droit :

« - à la couverture intégrale des frais médicaux de toute nature selon le système du « tiers payant » : la caisse paie directement les professionnels de santé ;

« - en cas d'arrêt de travail, à des indemnités journalières pendant toute la période d'incapacité temporaire, c'est-à-dire jusqu'à reprise du travail ou à constatation médicale de la stabilisation de son état de santé ;

« - à partir de cette consolidation, à une rente ou à un capital visant à compenser forfaitairement l'incapacité de travail qui subsistera, appelée incapacité permanente.

« Quand l'accident ou la maladie provoque le décès, les ayants droit reçoivent une rente.

« Quand l'accident ou la maladie résulte d'une faute inexcusable de l'employeur, la victime a droit à une indemnisation plus large, couvrant, outre le préjudice professionnel direct, les préjudices personnels (préjudice moral, physique, esthétique et d'agrément, ainsi que préjudice résultant de la perte ou de diminution de ses possibilités de promotion professionnelle).

« Lorsque l'accident est imputable à une personne autre que l'employeur, la victime ou ses ayants droit peuvent demander devant un tribunal une réparation conforme au droit commun, s'ils estiment y avoir intérêt. Le montant de cette réparation ne peut pas se cumuler avec les prestations de l'assurance AT-MP, celle-ci récupérant alors auprès de l'assuré les prestations qu'elle a versées . »

Source : Cour des comptes, rapport public précité.

L'évolution des prestations apparaît sensiblement plus modérée que l'ensemble des dépenses de la branche.

Evolution comparée des prestations versées
et des dépenses de la branche AT-MP (CNAMTS)

2001

2002

2003

Prestations

+ 6,4 %

+ 3,9 %

+ 4,4 %

Total des dépenses

+ 11,0 %

+ 4,5 %

+ 3,4 %

Toutefois, la progression des prestations varie selon la nature de celles-ci.

Ainsi, les rentes d'incapacité permanente (qui représentaient 41 % des charges de la branche en 2001 et s'élevaient à 3,3 milliards d'euros) ne progressent que lentement. Les dépenses correspondantes n'ont augmenté que de 1,9 % en 2001. Elles ne devraient progresser également que faiblement en 2002 (+ 2,6 %) et en 2003 (+ 1,5 %).

Comme le souligne le rapport de la Commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2002, la progression prévue en 2002 tiendrait avant tout à l'incidence des mesures nouvelles prévues par la loi de financement pour 2002 : revalorisation des rentes des ayants droit, extension de la qualité d'ayant droit aux concubins et aux pacsés, majoration des rentes pour tierce personne, indemnisation des accidents successifs, revalorisation et indexation de l'indemnité en capital, extension du système dérogatoire de reconnaissance des maladies professionnelles. Pour 2003, en l'absence de mesures nouvelles, les rentes ne devraient donc évoluer qu'au rythme de revalorisation des pensions.

A l'inverse, les prestations d'incapacité temporaire (qui représentaient 31 % des charges de la branche en 2001 et s'élevaient à 2,5 milliards d'euros) progressent rapidement, à un rythme équivalent à celui des soins de villes.

Après avoir augmenté de 8,6 % en 2001, elles devraient continuer à progresser de manière soutenue : + 7,4 % en 2002, + 6 % en 2003.

2. Une forte hausse des transferts

Mais, plus que par l'évolution des prestations, la progression des dépenses de la branche est désormais tirée par la hausse des transferts.

Evolution des transferts à la charge de la branche AT-MP (CNAMTS)

(en millions d'euros)

2000

2001

2002

2003

Transferts totaux

873

1.438

1.418

1.604

dont vers la branche-maladie

141

144

300

330

dont vers le FCAATA

103

206

300

450

dont vers le FIVA

0

438

180

190

Part des transferts dans les dépenses totales de la branche

12,2 %

18,0 %

17,1 %

18,6 %

Les transferts devraient augmenter de 84 % entre 2000 et 2003 alors que les dépenses de la branche ne progresseraient que de 20 % sur la période.

En 2003, les transferts représenteraient ainsi 18,6 % des dépenses alors qu'ils n'en constituaient que 12,2 % en 2000.

Cette progression des transferts ne tient pas à la hausse des transferts vers les régimes de sécurité sociale à effectif décroissant (Mines et salariés agricoles) qui sont stables, mais à des financements supplémentaires en direction des fonds d'aide aux victimes de l'amiante (FCAATA et FIVA) et à la hausse des transferts vers l'assurance maladie.

- l'accentuation des transferts vers la branche maladie

Depuis 1997, existe en effet un versement annuel de la branche AT-MP vers la branche maladie afin de compenser les dépenses supportées par cette dernière branche au titre des maladies professionnelles puis, depuis la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, au titre des accidents du travail.

Montants annuels des versements de la branche AT/MP à la branche maladie

(en millions d'euros)

1997

1998

1999

2000

2001

2002

2003

137,2

138,7

140,4

141,0

144,1

299,6

330,0

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoit une forte hausse de ce transfert : + 10 %. Cette croissance va sans doute perdurer, dans la mesure où la commission Levy-Rosenwald estime que « la dépense imputée à tort à l'assurance maladie atteint probablement, a minima, une fourchette se situant entre 368 et 550 millions d'euros ».

- le poids croissant de l'indemnisation des victimes de l'amiante

L'indemnisation des victimes de l'amiante repose sur deux dispositifs principaux : le f onds de cessation anticipée d'activité des travailleurs de l'amiante (FCAATA) institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 1999 et le fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (FIVA) institué par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2001.

Les dépenses correspondantes atteignent 8,1% du total des dépenses de la branche.

La montée en charge du FCAATA apparaît en effet très rapide et très lourde. En 2001, le nombre de dossiers transmis au FCAATA a doublé, passant de 9.510 à 18.429.

Dès lors, les dépenses du FCAATA sont en forte hausse. Ainsi, en 2002, il est probable que les dotations initialement prévues se révèlent insuffisantes.

FCAATA

(en millions d'euros)

1999

2000

2001

2002 1

2002 2

2003 1

2003 2

Dotations

15,2

133,8

238,0

333,9

333,9

486,5

484,6

. contribution CNAMTS-AT

0

102,9

205,8

300,0

300,0

450,0

450,0

. contribution de l'Etat

15,2

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

0,0

. droits sur les tabacs

0,0

30,5

31,5

33,2

33,2

34,6

33,2

. produits financiers

0,0

0,4

0,6

0,6

0,6

1,9

1,3

Charges

8,6

54,4

166,4

351,1

322,9

724,6

544,0

Résultat net

6,6

79,4

71,6

- 17,2

10,0

- 238,1

- 59,5

Résultat net cumulé

-

79,4

150,9

133,7

160,9

- 104,4

102,4

1 Hypothèses « hautes » Source : direction de la sécurité sociale

2 Hypothèses « basses »

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoit en conséquence de majorer de 200 à 300 millions d'euros la dotation de la CNAMTS-AT pour 2002 et la fixe à 450 millions d'euros en 2003.

Il n'est pourtant pas garanti que cette augmentation de la dotation permette l'équilibre du fonds à la fin 2003 comme en témoigne le tableau ci-dessus.

Comme le souligne M. François Goulard, rapporteur pour avis de la commission des finances de l'Assemblée nationale 32 ( * ) , « on ne peut être que très surpris par l'évolution des financements et l'ampleur des révisions des versements » et regretter, comme lui, l'absence de visibilité à moyen terme.

La montée en charge du FIVA est, elle, beaucoup plus lente.

Installé officiellement en avril 2002, celui-ci est encore en phase de mise en place. Les barèmes indicatifs d'indemnisation ne sont toujours pas établis et le FIVA n'a pour l'instant versé que quelques provisions dans l'attente d'une indemnisation définitive 33 ( * ) .

A l'heure actuelle, le FIVA est pourtant déjà doté de 552 millions d'euros de réserves (514 versés par la CNAMTS-AT et 38 par l'Etat).

Dotations du FIVA

(en millions d'euros)

2001

2002

2003

. Contribution CNAMTS-AT

438,0

180,0

190,0

. Contribution Etat

38,1

0,1

40,0

Mais, là encore, l'ampleur des besoins reste difficile à déterminer, comme le reconnaît d'ailleurs le rapport d'activité du FIVA examiné le 29 octobre dernier par son conseil d'administration :

« Les dépenses d'indemnisation au titre de l'exercice 2002 ne peuvent encore être estimées précisément du fait de la phase de montée en charge du nombre de dossiers reçus qui se poursuit. Les dotations complémentaires prévues par la loi de financement de la sécurité sociale visent à permettre la prise en charge de ces dépenses, ainsi que celles de l'exercice 2003. »

De fait, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 prévoit de majorer de 76 à 180 millions d'euros le versement de la CNAMTS-AT pour 2002 et fixe à 190 millions d'euros ce versement pour 2003.

Selon la réponse apportée par le Gouvernement à votre rapporteur dans son questionnaire écrit, « cette dotation, additionnée au report de l'exercice précédent, permettrait au fonds de satisfaire entre 10.000 et 20.000 demandes d'indemnisation. »

Au 18 octobre dernier, le FIVA avait reçu 1.763 demandes d'indemnisation 34 ( * ) .

* 31 Il serait fixé à 9,02 milliards d'euros contre 8,53 prévus par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2002, soit un « dérapage » de 5,7 %.

* 32 Avis de la commission des finances sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2003 (n° 327 - 12 ème législature)

* 33 Au 24 octobre 2002, 370 provisions ont été versées pour un montant de 3,8 millions d'euros.

* 34 Le formulaire nécessaire à la présentation des demandes a été adopté le 4 juin 2002 par le conseil d'administration du FIVA.

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