2. Un retard vis-à-vis des autres pays industrialisés
Prix d'un approfondissement sans doute exagéré du diagnostic, la France est moins en avance aujourd'hui que ses partenaires, qui, selon l'heureuse expression retenue par le rapport du COR, ont eu le courage de « renégocier le compromis social relatif aux retraites ».
Votre rapporteur, qui s'est livré l'année dernière à une présentation exhaustive de la réforme des retraites en Allemagne, rappellera cette année les mesures prises en Suède et en Italie 11 ( * ) .
q La réforme des retraites en Suède
En Suède, un consensus s'est dessiné autour de la nécessité de réformer le système de retraite existant. Après concertation, le Parlement suédois a voté, le 8 juin 1998, une loi introduisant un nouveau système de retraite original.
Ce système mixte est fondé sur les revenus professionnels antérieurs. Une cotisation de 18,5 % est prélevée et donne des droits à une retraite dont le montant peut atteindre un plafond de 213.400 francs annuels. 16 % des 18,5 % sont utilisés en répartition pure et financent les pensions de l'année. Les 2,5 % restants sont épargnés et produisent des intérêts sur un « compte de réserve à prime » propre au salarié. Celui-ci peut choisir l'organisme qui gérera son compte.
Dans le régime par répartition, des droits à la retraite sont accordés sur les revenus de prestations sociales -chômage, maladie- ainsi que pour les périodes durant lesquelles l'assuré a peu ou pas cotisé, notamment l'éducation des enfants, l'invalidité ou la retraite anticipée. Les droits correspondant à ces périodes sont calculés en reconstituant un revenu correspondant au niveau de vie du bénéficiaire. La totalité des droits a pour contrepartie le versement de cotisations sociales, un prélèvement sur le revenu ou une prise en charge par le budget de l'Etat.
L'âge minimal de liquidation des droits à la retraite a été fixé à 61 ans. Au-delà et jusqu'à 70 ans, le mode de calcul de la pension est fonction de l'âge effectif de liquidation de la pension. Ainsi les salariés sont incités à prolonger leur activité sans passer par des mesures légales de recul de l'âge de départ.
Ce nouveau système est à la fois généreux, équitable, solidaire et intelligent. Généreux parce qu'indexé sur la croissance moyenne des revenus, il fait participer les retraités aux fruits de la croissance. Equitable parce qu'il verse des prestations en rapport avec l'espérance de vie, étant ainsi sensible aux variations démographiques. Solidaire parce qu'une pension de base est prévue pour les plus démunis. Intelligent parce que ce système refuse les idéologies. Il conjugue à la fois répartition et capitalisation au profit de tous. Enfin, il respecte le désir d'autonomie des assurés en leur laissant moduler l'âge et le montant de leur retraite.
q La réforme des retraites en Italie
La réforme des retraites en Italie se fait par touches successives. Ce pays disposait à l'origine d'un régime public qui assurait l'ensemble des prestations.
En 1992, la réforme Amato a modifié les règles relatives à l'âge de départ en retraite qui fut porté progressivement de 55 à 60 ans pour les femmes et de 60 à 65 ans pour les hommes. La base de calcul était élargie des cinq aux dix dernières années de cotisation pour les actifs et sur l'ensemble de la carrière pour les nouveaux embauchés. Par ailleurs, les retraites sont indexées sur l'inflation, sauf disposition contraire.
Un nouveau train de réformes fut mis en oeuvre par le Gouvernement Dini en 1995. Le minimum vieillesse et les pensions d'invalidité sont à l'avenir financés par la solidarité nationale. Une part des cotisations familiales est transférée au financement des retraites. Les règles de calcul des pensions sont entièrement remaniées et uniformisées entre les régimes : les cotisations versées pendant la carrière sont capitalisées fictivement au rythme de la croissance du produit intérieur brut. La retraite est calculée à partir d'un taux appliqué à ce montant. L'âge de départ reste différé mais il devient possible de liquider ses droits de manière flexible, moyennant pondération du montant de la pension. Les coefficients tiennent compte de la durée moyenne de la retraite. Les pensions des fonctions publiques sont par ailleurs alignées sur celles du privé.
La négociation avait prévu alors une adhésion facultative à des fonds de pension par capitalisation. Cette mesure alors peu attractive a été renforcée au début de l'année 2000 par des avantages fiscaux incitatifs. La réforme du traitement de fin de rapport (TFR) devrait ouvrir de nouvelles possibilités pour les salariés.
* 11 Voir également le rapport de la mission d'information - La réforme des retraites en Suède et en Italie (Sénat n° 265, 2000-2001).