Accéder au dossier législatif

Rapport n° 217 (2002-2003) de M. Jean-Jacques HYEST , Mme Annick BOCANDÉ et M. René TRÉGOUËT , fait au nom de la commission spéciale, déposé le 19 mars 2003

Disponible au format Acrobat (1,1 Moctet)

Tableau comparatif au format Acrobat (367 Koctets)

N° 217

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2002-2003

Annexe au procès-verbal de la séance du 19 mars 2003

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission spéciale (1) chargée d'examiner le projet de loi, ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE, pour l' initiative économique ,

Par M. Jean-Jacques HYEST,
Mme Annick BOCANDÉ
et M. René TRÉGOUËT,

Sénateurs.

(1) Cette commission est composée de : M. Francis Grignon , président ; MM. Philippe Marini, Marc Massion, Mme Odette Terrade, M. Pierre Laffitte , vice-présidents ; M. Jean-Paul Emin , Mme Yolande Boyer , secrétaires ; M. Jean-Jacques Hyest, Mme Annick Bocandé, M. René Trégouët , rapporteurs ; MM. Philippe Adnot, Jean-Paul Alduy, Bernard Angels, Jean Chérioux, Gérard Cornu, Gérard Dériot, Paul Dubrule, Thierry Foucaud, Christian Gaudin, Jean-Pierre Godefroy, Charles Guené, Gérard Larcher, Philippe Leroy, Roland du Luart, Roland Muzeau, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Jean-François Picheral, Bernard Piras, Henri de Raincourt, Daniel Raoul, Bernard Saugey, Claude Saunier, Louis Souvet, Pierre-Yvon Trémel, André Vallet, François Zocchetto.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 12 ème législ.) : 507 rect. , 572 et T.A. 85

Sénat : 170 (2002-2003)

Politique économique.

RÉSUMÉ DES TRAVAUX DE LA COMMISSION SPÉCIALE CHARGÉE D'EXAMINER LE PROJET DE LOI POUR L'INITIATIVE ÉCONOMIQUE

Créée par le Sénat dans sa séance du mercredi 12 février 2003, la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi pour l'initiative économique a procédé à la désignation de son bureau le jeudi 13 février 2003.

Après avoir entendu, le mercredi 26 février 2003, M. Renaud Dutreil , secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, la commission spéciale, présidée par M. Francis Grignon (UMP - Bas-Rhin), a procédé à deux journées d'audition des personnes et organismes particulièrement concernés par le projet de loi. Ainsi, les jeudis 27 février et 6 mars 2003, elle a organisé 19 auditions (16 heures) et entendu dans ce cadre 37 personnes ( ( * )

1)

.

Réunie les mardi 18 et mercredi 19 mars 2003, la commission spéciale a adopté le rapport présenté par ses trois rapporteurs, M. Jean-Jacques Hyest (UMP - Seine-et-Marne), Mme Annick Bocandé (UC - Seine-maritime) et M. René Trégouët (UMP - Rhône), assorti de 62 amendements ( ( * )

2)

.

Les principales propositions de modifications adoptées par la commission spéciale sont les suivantes :

- à l' article 2 (récépissé de création d'entreprise) , suppression de la possibilité ouverte par l'Assemblée nationale aux centres de formalités des entreprises de délivrer le récépissé de création d'entreprise (RCE) dans la mesure où seuls les greffes ont la compétence pour effectuer un premier contrôle de la régularité juridique de la création et peuvent ainsi garantir la sécurité juridique des tiers, et mention obligatoire sur le RCE signalant aux tiers que la société est en attente d'immatriculation ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 3 visant à améliorer l'efficacité des contrôles sur l'exercice des activités artisanales dans le respect des exigences légales relative à la qualification et rappelant le rôle des chambres de métiers à cet égard ;

- à l' article 6 (déclaration d'insaisissabilité de la résidence principale) , renforcement de la protection du déclarant en cas de vente de sa résidence principale pour en acheter une nouvelle ;

- à l' article 6 ter (protection de la caution envers un créancier professionnel) , renforcement des obligations d'information de la caution personne physique envers les créanciers professionnels par la généralisation de dispositifs existants ;

- suppression des articles 6 quater (création d'un service d'aide aux entreprises utilisatrices du chèque-emploi entreprises) et 6 quinquies (création du chèque-emploi entreprises) pour, conformément aux souhaits exprimés en plusieurs occasions par le Gouvernement, instituer ces importantes mesures de simplification dans le cadre des ordonnances de simplification , et garantir par là-même, après une concertation approfondie avec les différentes parties concernées, leur faisabilité technique et leur cohérence d'ensemble avec les dispositifs déjà existants (GIP « Modernisation des déclarations sociales » ) ou en projet (chèque-emploi associatif, par exemple) ;

- à l' article 8 (exonération des cotisations sociales des salariés créateurs ou repreneurs d'entreprise pendant un an) , extension du dispositif à tout créateur ou repreneur disposant d'une couverture sociale (et suppression de conséquence de l'article 8 bis qui n'étendait ce droit qu'au conjoint ou concubin d'un assuré social) ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 9 bis afin d'étendre aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle les dispositions autorisant les entreprises industrielles à organiser le travail en continu sous réserve d'un accord collectif ;

- à l' article 10 (création d'un contrat d'accompagnement à la création d'entreprise) , extension du dispositif aux repreneurs d'entreprise , reconnaissance de l'importance de la formation et possibilité de mettre en cause la responsabilité de l'accompagnateur en matière d'engagements pris après l'immatriculation uniquement si le contrat la prévoit ;

- à l' article 12 (calcul prorata temporis des cotisations sociales des entrepreneurs occasionnels) , remplacement du palier forfaitaire minimum de cotisations, qui s'avère trop élevé pour certains types d'activités et d'entrepreneurs, par une cotisation annuelle calculée sur le bénéfice réel dégagé par l'activité ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 12 bis permettant, pour faciliter la transition entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur, les transferts d'épargne d'assurance-vie accumulée dans un contrat groupe pour salariés sur un contrat groupe souscrit par une association de non-salariés ;

- à l' article 13 (création de fonds d'investissement de proximité) , affectation du quota d'investissement de 10 % au financement des entreprises de moins de trois ans ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 14 afin, par la correction d'une erreur de codification du code monétaire et financier relative aux entreprises éligibles aux FCPI, de renforcer la sécurité juridique des épargnants ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 17 bis prévoyant le dépôt par le Gouvernement d'un rapport annuel au Parlement sur les achats des services de l'Etat aux PME , afin de promouvoir un « réflexe PME » dans les administrations publiques ;

- suppression de l'article 18 bis (détermination d'un collecteur unique des cotisations sociales des professions artisanales, industrielles et commerciales) pour mettre efficacement en oeuvre ce dispositif, attendu par les professions indépendantes, dans le cadre des ordonnances de simplification ;

- à l' article 22 (relèvement des seuils d'exonérations des plus-values professionnelles à long terme des personnes soumises à l'impôt sur le revenu) , lissage des paliers d'exonération prévus afin d'en supprimer les effets pervers ;

- à l' article 26 bis (exonération partielle à l'ISF des parts de société faisant l'objet d'un engagement collectif de conservation) , abaissement des seuils de détention du capital pour les sociétés cotées à 20 % , faculté de prolonger un engagement collectif de conservation, possibilité d' entrer dans un engagement en cours, précision du régime de sortie du dispositif, et obligation d'information de l'autorité des marchés financiers pour les titres négociés sur les marchés réglementés ;

- à l' article 26 ter (exonération des apports en numéraire aux PME) , extension du champ des sociétés visées aux sociétés financières et prise en compte dans l'exonération des apports en nature ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 26 ter exonérant d'ISF les apports aux fonds d'investissement de proximité (FIP) pour lancer ce nouveau support d'épargne dans une conjoncture difficile ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 26 quater exonérant d'ISF à hauteur de 50 % les parts et actions détenues par les salariés dans leur entreprise afin de conforter l'actionnariat salarié ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 26 quater exonérant d'ISF les apports en numéraire aux groupements fonciers agricoles pour inciter à l'installation de jeunes agriculteurs ;

- insertion d'un article additionnel après l'article 26 quater écartant pour six mois le droit de reprise de l'administration fiscale en cas de dépôt spontané d'une déclaration rectificative ou nouvelle à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Cet article doit permettre le retour des capitaux délocalisés .



Mesdames, Messieurs,

Alors Sénateur, M. Jean-Pierre Raffarin avait présidé le groupe de travail « Nouvelles entreprises et territoires » constitué en juin 1998 par la commission des affaires économiques et du plan du Sénat, dont les travaux ont conduit au dépôt d'une proposition de loi détaillant dix-huit mesures afin de promouvoir la création et le développement des entreprises et des territoires ( ( * )1).

Devenu Premier ministre, il est demeuré fidèle à ses ambitions puisqu'il affirmait, dans la déclaration de politique générale du gouvernement du 3 juillet 2002, sa volonté de libérer « toutes les forces vives de notre pays ».

Cette volonté se traduisait dès le 7 octobre 2002 à Lyon, lors du colloque « Agir pour l'initiative économique » organisé par M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, par la présentation des principales mesures du présent projet de loi, adopté le 11 février 2003 par l'Assemblée nationale, dont beaucoup, comme la création des fonds d'investissement de proximité, trouvent leur source dans les travaux du groupe de travail de la commission des affaires économiques du Sénat.

Cette rapidité résulte d'un constat d'urgence : la France a plus que jamais besoin d'offrir à ceux de nos concitoyens qui souhaitent créer ou reprendre leur entreprise la faculté de le faire , non seulement parce que la création d'entreprises est le moteur de la création d'emplois, mais aussi parce qu'« il y a un peu de bonheur dans la création d'entreprise, et [que] le bonheur, ça se partage », rappelait M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, en conclusion de son intervention lors du colloque précité.

Comme le soulignait encore le Livre vert de la Commission européenne du 27 janvier 2003 sur l'esprit d'entreprise en Europe, « l'initiative économique » est un « vecteur d'épanouissement personnel » .

Mais elle est aussi un formidable vecteur d'innovation, une source de lien social et, pour beaucoup de nos concitoyens, un levier de promotion sociale.

Dès lors, favoriser la création d'entreprise, c'est accélérer la croissance, soutenir l'emploi, renforcer la cohésion sociale et promouvoir l'égalité des chances.

Votre commission spéciale se félicite donc tout particulièrement de ce présent projet de loi, dont les diverses mesures, adaptées à la diversité des entreprises et des entrepreneurs, bénéficient à l'ensemble des activités économiques, quelle que soit leur forme juridique d'exercice, et rompent avec le désintérêt progressif pour l'initiative économique constaté ces dernières années : l'inspection générale des finances estimait ainsi, dans un rapport de septembre 2001 relatif à l'évaluation des dispositifs nationaux d'aide à la création d'entreprise, que les moyens (subventions et dépenses fiscales) consacrés aux aides à la création d'entreprise se sont réduits d'un tiers entre 1994 et 2001 ( ( * )1).

Elle s'en félicite d'autant plus que ce projet de loi ne constitue nullement « la » réponse du Gouvernement, pour solde de tout compte, aux difficultés de la création d'entreprise, mais s'inscrit dans un ensemble cohérent rassemblant le projet de loi, annoncé pour la fin de l'année 2003, sur le statut de l'entrepreneur, et le projet portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de codification du droit, présenté au Conseil des ministres le 19 mars 2003. A cet égard, les enquêtes réalisées par le Centre des jeunes dirigeants d'entreprises soulignent la nécessité de simplifier la législation et la réglementation , de réduire le nombre des documents devant être remplis par les entreprises et, au delà, de passer pour les administrations d'une logique de contrôle-sanction à une logique de service .

EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. LE CONTRASTE ENTRE LE DÉSIR D'ENTREPRENDRE ET LE RALENTISSEMENT DU RENOUVELLEMENT DU TISSU ÉCONOMIQUE S'EXPLIQUE PAR LES DIFFICULTÉS DE LA CRÉATION ET DE LA TRANSMISSION D'ENTREPRISE

A. LE CONTRASTE ENTRE LE DÉSIR D'ENTREPRENDRE ET LE RALENTISSEMENT DE LA CRÉATION D'ENTREPRISES

Le baromètre Salon des entrepreneurs-Agence pour la création des entreprises (APCE), réalisé par l'IFOP en décembre 2002 et rendu public le 23 janvier 2003, soulignait que plus d'un quart des français envisagent de créer leur entreprise au cours de leur vie et que plus d'un français sur dix souhaite le faire dans les deux ans à venir .

Comme le relevait pourtant le Livre vert de la Commission européenne du 27 janvier 2003 sur l'esprit d'entreprise en Europe, l'enquête Eurobaromètre suggère cependant que moins de 2 % des Français ont actuellement un projet de création d'entreprise ou bien ont créé ou repris une entreprise au cours des trois dernières années , alors ce taux s'élèverait à 4,5 % en moyenne dans l'Union européenne et à 13 % aux Etats-Unis .

Par ailleurs, le nombre effectif de créations d'entreprises et le taux de création d'entreprise ont baissé depuis le début des années 1990 , comme le montrent le tableau figurant page suivante.

Le taux de créations pures (nombre de créations pures rapporté au nombre d'entreprises) est ainsi passé de 8,1 % en 1994 à 7,1 % en 2002 . De même, le taux de reprises (nombre de reprises rapporté au nombre d'entreprises individuelles) s'est réduit de 3,5 % en 1994 à 2,9 % en 2002 . Ainsi, le tissu économique français se renouvelle de moins en moins, alors même que le nombre des entrepreneurs amenés à prendre leur retraite dans les dix années à venir devrait s'élever à plus de 500.000 personnes .

La combinaison de ces différentes observations rend ainsi absolument nécessaire, pour garantir et renforcer le dynamisme économique de notre pays, de mettre en oeuvre les moyens propres à permettre au désir d'entreprendre de nombre de nos concitoyens de trouver à s'exprimer .

Cet objectif est rendu d'autant plus impérieux que la situation de l'emploi dépend pour l'essentiel de l' activité des quelque 2,3 millions de petites et moyennes entreprises de notre pays . Il convient à cet égard de rappeler que les 270.000 entreprises créées, reprises ou réactivées en 2002 ont créé ou permis le maintien de 490.000 emplois , dont 285.000 emplois non-salariés et 205.000 emplois salariés.

Certes, un certain nombre de ces entreprises vont disparaître dans les prochaines années. Cependant, l'étude des créations réalisées au cours des années passées montre que l'emploi, du moins salarié, va croître dans les entreprises « pérennes » créées en 2002, et que cette croissance des emplois des entreprises pérennes (salariés et non salariés) va en partie compenser les disparitions d'emplois des entreprises créées également en 2002 et ayant cessé leur activité depuis : la création d'entreprises est donc bien la principale source de créations d'emplois. A contrario , le ralentissement des créations d'entreprises est de nature à pénaliser l'emploi.

Cet affaissement de l'entrepreuneriat est en outre particulièrement préoccupant, ainsi qu'il a été écrit ci-dessus, dans la perspective de l'accélération des départs à la retraite des chefs d'entreprise aujourd'hui en activité , dont témoigne le graphique ci-dessous :

Il paraît donc absolument nécessaire de lever résolument les obstacles qui rendent trop souvent difficile la création et la reprise des entreprises dans notre pays, pour atteindre l'objectif, fixé par le Président de la République, de créer un millions d'entreprises d'ici cinq ans en retrouvant le rythme annuel de 200.000 créations d'entreprises que connaissait notre pays au milieu des années quatre-vingt.

B. LES OBSTACLES À LA CRÉATION ET À LA REPRISE D'ENTREPRISES

Les premiers obstacles à la création et à la reprise d'entreprise sont d'ordre culturels : notre pays est encore trop imprégné de méfiance vis-à-vis de l'initiative économique, sinon d'une culture de dénigrement des « patrons », d'une part, d'aversion profonde au risque et de stigmatisation de l'échec, d'autre part. En outre, on ne peut que déplorer que l'entreprise, la connaissance économique et l'expérience entrepreneuriale ne connaissent qu'une place si congrue dans notre système d'enseignement, qu'il soit général, secondaire ou universitaire. Comment les jeunes Français peuvent-ils se voir insuffler le goût d'entreprendre ou préparer la réalisation de leurs aspirations alors même que si peu est fait pour leur faire ne serait-ce que découvrir le monde de l'entreprise ?

Ce constat souligne la nécessité d'un discours public mobilisateur , accompagné d'une action pédagogique de longue haleine, de nature à réhabiliter la prise de risques , valoriser la création d'entreprise et apporter aux entrepreneurs, y compris s'ils échouent, la reconnaissance et la confiance qui leur font trop souvent défaut .

Le Sénat y prend d'ailleurs toute sa part, au travers d'initiatives comme l'accueil, le 27 janvier 2003, de 500 entrepreneurs dans l'hémicycle du Palais du Luxembourg, en présence de M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, pour le 6 ème Masters de la création d'entreprises .

De même, votre commission spéciale souhaite rappeler que la statistique, trop souvent avancée, selon laquelle une entreprise sur deux disparaît avant sa cinquième année, n'est pas seulement de nature à dissuader les créateurs d'entreprise, comme d'ailleurs les établissements de crédit, mais aussi trompeuse. En fait, comme l'a souligné M. François Hurel, délégué général de l'Agence pour la création d'entreprises (APCE), lors de son audition par votre commission spéciale ( ( * )1), seulement 15 % des nouvelles entreprises connaissent un réel et définitif échec économique dans les trois à cinq années qui suivent leur création .

Cela étant, les créateurs ou repreneurs d'entreprise potentiels sont également souvent dissuadés par la complexité du processus de création d'entreprise . Ce sentiment repose pour partie sur des idées qui ne reflètent plus la réalité. Il est en effet d'ores et déjà possible de créer son entreprise en une journée. Cependant, ce sentiment, qui explique pour partie l'écart impressionnant entre le désir d'entreprendre de nos concitoyens et leur passage à l'acte, justifie de nouvelles avancées , même et surtout symboliques, comme la suppression d'une exigence de capital minimal pour la SARL prévue par le présent projet de loi.

Par ailleurs, il s'avère que la transition entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur , qui constitue déjà en elle-même une réelle prise de risques personnels et souvent familiaux, peut être freinée par des obstacles juridiques et sociaux et un manque de souplesse de notre droit du travail.

En outre, les créateurs d'entreprise sont trop souvent seuls pour faire face à un environnement économique et administratif complexe et stressant. Ainsi, contrairement à une idée reçue, moins d'une création d'entreprise sur quatre est aidée par les pouvoirs publics . Les risques économiques encourus au cours des toutes premières années sont aggravés par une législation sociale qui ponctionne immédiatement les revenus tirés de l'activité, sans considération pour la possibilité contributive réelle de l'entrepreneur.

De plus, seules 25.000 à 30.000 créations d'entreprises par an bénéficient d'un accompagnement , alors même que les taux de réussite des créations d'entreprises accompagnées sont considérablement plus élevés que la moyenne, et que l'accompagnement constitue parfois la condition sine qua non pour que certains de nos concitoyens les plus démunis puissent donner vie à leurs idées.

Mais la difficulté de trouver des financements constitue le principal frein pour les porteurs de projet . En effet, les créateurs ou repreneurs de petites entreprises n'ont, sauf exception, pas accès aux marchés financiers. En outre, malgré les dispositifs publics de garantie ou l'intervention des sociétés de caution mutuelle, le crédit bancaire leur est souvent rationné , en raison notamment des effets conjugués des coûts d'examen de la viabilité d'un micro-projet, des normes internationales de fonds propres imposées aux établissements de crédit à raison de leurs concours aux PME, et du plafonnement à bas niveau des taux d'intérêts du fait de notre législation sur « l'usure ».

Enfin, la reprise d'entreprises existantes est logiquement plus efficiente que la création ex nihilo d'entreprises nouvelles dans le même secteur d'activité. Or , la transmission d'une entreprise est considérablement freinée par le frottement fiscal que subissent le vendeur et/ou l'acquéreur du fait de l'imposition des plus-values, des droits de mutation et, dans certaines configurations, de la non-déductibilité des intérêts des emprunts souscrits par le repreneur. Il est à cet égard indispensable de rompre avec un discours, bien éloigné de la vie de nos territoires, consistant à mettre en exergue les créations pures d'entreprises pour mieux ignorer les problèmes de transmission des entreprises ayant fait la preuve de leur pérennité .

C'est à cette multiplicité d'obstacles et de contraintes que s'attaque, avec détermination et méthode, le présent projet de loi pour l'initiative économique, dont l'objectif est de modifier en profondeur l'environnement juridique dans lequel évoluent les créateurs et entrepreneurs de ce pays.

II. LE CONTENU DU PROJET DE LOI ET LES PRINCIPALES PROPOSITIONS DE VOTRE COMMISSION SPÉCIALE

Le projet de loi est articulé en six titres, qui traitent successivement de la simplification de la création d'entreprise , de la transition entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur , du financement de l'initiative économique , de l' accompagnement social des projets , et du développement et de la transmission de l'entreprise , le dernier titre étant consacré aux dispositions diverses .

A. SIMPLIFICATION DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE (TITRE IER)

Initialement constitué de six articles, le titre Ier du projet de loi pour l'initiative économique en compte douze après son examen en première lecture par l'Assemblée nationale, les deux derniers, relatifs respectivement au guichet social unique et au chèque-emploi entreprises, relevant du volet social.

Les dispositions de ce titre ont pour objet de contribuer à simplifier la création d'entreprise, non seulement en facilitant le démarrage de l'activité mais également en créant un climat de confiance et en sécurisant la situation de l'entrepreneur et de ses proches. Les mesures prévues bénéficient tantôt aux entrepreneurs individuels, tantôt aux créateurs d'entreprise ayant fait le choix de la forme sociétaire, parfois aux deux. Rappelons qu'en 2002, sur les 2,5 millions d'entreprises de l'industrie, du commerce et des services, 842.000 sont des SARL, soit 33,7 %, dont 82.000 entreprises unipersonnelles à responsabilité limitée (EURL), et 1,38 million sont des entreprises individuelles, soit 55,6 %. On observe une forte augmentation de la proportion des SARL au cours des dix dernières années (elle n'était que de 27 % en 1994), cette évolution indiquant la préférence de plus en plus grande des entrepreneurs pour la forme sociétaire.

1) Les mesures bénéficiant à la création d'entreprise, que le choix du créateur se soit porté sur la forme individuelle de l'exercice de l'activité ou sur la forme sociétaire

- le récépissé de création d'entreprise (RCE) ( article 2 ) :

Délivré dès qu'un dossier complet de demande d'immatriculation aura été déposé, le RCE, qui comportera la mention d'un numéro délivré par l'INSEE, devrait faciliter le démarrage de l'activité en permettant, grâce à l'identification qu'il procure à l'entreprise en création, de procéder aux premières démarches indispensables telles que l'ouverture d'une ligne téléphonique ou l'obtention d'une boîte postale, actuellement fréquemment retardées par les délais d'obtention de l'extrait Kbis. Le projet de loi initial prévoyait que ce document serait délivré par le greffe du tribunal de commerce pour les personnes assujetties à l'inscription au registre du commerce et des sociétés et par la chambre des métiers pour les personnes assujetties à l'inscription au répertoire des métiers.

Bien que le répertoire des entreprises agricoles n'ait pas encore été créé, l'Assemblée nationale a souhaité prévoir la compétence des chambres d'agriculture pour délivrer le RCE aux créateurs d'entreprises agricoles. Elle a également, contre l'avis du Gouvernement, étendu la faculté de délivrer ce document aux centres de formalités des entreprises (CFE) en cas de création d'une société.

Considérant que seuls les greffes ont la capacité et sont légalement investis de la mission de vérifier la régularité juridique du dossier, même si celle-ci est sommaire à ce stade de la procédure (capacité du créateur, licéité de l'objet de la société), votre commission spéciale estime que la garantie d'une sécurité juridique impose sur ce point de revenir au projet de loi initial, les CFE conservant leur rôle de conseil et de guichet pour les multiples formalités à accomplir auprès des organismes administratifs et sociaux ;

- la possibilité d'effectuer une déclaration de création d'entreprise par voie électronique ( article 3 ) ;

- l' assouplissement des conditions de domiciliation des entreprises , au domicile de l'entrepreneur s'il s'agit d'une entreprise individuelle ou au domicile du représentant légal s'il s'agit d'une société ( article 4 ), et l'extension aux représentants légaux des personnes morales de la possibilité d'exercer une activité professionnelle dans une partie d'un local à usage d'habitation ( article 5 ) :

L'interprétation qui est faite des textes en vigueur limite aujourd'hui à deux années la durée de domiciliation possible. Dorénavant, cette durée sera illimitée pour l'entrepreneur individuel ne disposant pas d'un établissement lui permettant de nouer des relations avec sa clientèle, ce qui est fréquemment le cas des artisans qui exercent leur activité chez le client et disposent par ailleurs d'un simple atelier ou d'un local de stockage. La durée serait portée de deux à cinq ans pour les personnes morales afin d'éviter d'imposer à l'entreprise un déménagement à un moment où elle doit franchir un cap du fait la cessation des mécanismes d'aide à la création.

Sous réserve de la suppression d'une mention prêtant à confusion, dans la mesure où elle pourrait laisser croire que seuls les entrepreneurs individuels exerçant une activité itinérante pourraient bénéficier de l'extension des possibilités de domiciliation, votre commission spéciale souscrit pleinement au dispositif proposé ;

- le renforcement des garanties accordées à la caution envers un créancier professionnel ( article 6 ter ) :

Avec le souci de renforcer la sécurité juridique des personnes qui témoignent leur confiance au créateur d'entreprise en se portant caution de ses dettes professionnelles, l'Assemblée nationale a prévu, contre une interprétation restrictive de la jurisprudence, de généraliser le bénéfice de la procédure de surendettement à l'ensemble des dettes professionnelles dont une personne s'est portée caution. Cette mesure est en particulier de nature à protéger le conjoint de l'entrepreneur. Le dispositif prévoit en outre d'améliorer l'information de la caution envers un créancier professionnel en rendant obligatoires des mentions manuscrites destinées à lui faire prendre connaissance de l'étendue des engagements auxquels elle souscrit.

Dans le prolongement de ces dispositions et tout en estimant nécessaire d'éviter qu'un encadrement excessif du cautionnement n'aboutisse à un tarissement du crédit, votre commission spéciale vous propose de compléter ce dispositif de sécurisation de la caution personne physique envers un créancier professionnel en lui étendant des mécanismes actuellement réservés à des cas particuliers : l'exigence que le cautionnement d'une personne physique soit, à peine de déchéance, proportionné à ses biens et revenus (mesure en vigueur pour les cautions des opérations de crédit immobilier et de crédit à la consommation) ; l'exigence de limiter contractuellement la caution à un montant maximal lorsque la personne physique s'engage solidairement et renonce au bénéfice de la discussion (mesure en vigueur pour les seules personnes physiques garantes d'une dette professionnelle d'un entrepreneur individuel) ; l'obligation faite au créancier professionnel de délivrer à la caution une information annuelle sur le montant de la dette et le terme de l'engagement, et sur la faculté de révocation de l'engagement lorsque celui-ci est à durée indéterminée (cautionnement d'un concours financier accordé à une entreprise) ;

- la simplification de la procédure de mainlevée d'un nantissement de fonds de commerce ( article 2 bis ) :

L'Assemblée nationale a prévu d'alléger la procédure de radiation de l'inscription d'un nantissement de fond de commerce en autorisant qu'il y soit désormais procédé par un simple acte sous seing privé, dûment enregistré afin de lui conférer date certaine, et non plus par acte authentique.

2) Les mesures prévues en faveur des entreprises créées sous forme de sociétés

- la libre fixation par les statuts du montant du capital social ( article 1 er ) :

Partant de l'observation selon laquelle le seuil légal requis de 7.500 € pour créer une SARL ne remplit plus sa fonction de gage pour les créanciers, du fait de la faiblesse de son montant, et revêt un caractère arbitraire puisqu'il ne correspond à aucune nécessité économique, le projet de loi renvoie désormais aux statuts le soin de définir le capital social.

Votre commission spéciale approuve cette évolution qui conduit à son terme la logique d'un processus amorcé dans la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques prévoyant la faculté d'une libération du capital social échelonnée sur cinq ans. Elle tient cependant à souligner le danger de la formule de « la société à un euro », qui risque de conduire les créateurs « en herbe » à d'amères désillusions s'ils la prennent à la lettre, et rappelle qu'une des faiblesses caractérisant les entreprises françaises est l'insuffisance de leurs fonds propres, dont le capital constitue une des composantes ;

- l' exonération de droits fixes pour les opérations d'apports en capital effectuées dans les sociétés dotées d'un capital inférieur à 7.500 € ( article 1 er bis ) :

Cette mesure, adoptée par l'Assemblée nationale avec un avis de sagesse du Gouvernement, a pour objet d'encourager les augmentations de capital lorsque la société a été créée avec un capital initial inférieur à 7.500 €. Votre commission spéciale observe que, du fait de sa modicité, l'économie résultant de l'exonération des droits fixes de 230 € ne peut constituer une réelle incitation à un renforcement du capital et risque tout au plus de créer un effet d'aubaine en conduisant des entrepreneurs ayant la capacité de constituer une société avec un capital plus important à faire le choix d'un capital de départ à 7.499 € pour se réserver le bénéfice ultérieur de l'exonération le jour où ils effectueront une augmentation de capital. En outre, la disposition proposée fait référence au seuil de 7.500 € dont il a été démontré qu'il ne correspondait à aucune logique économique. Pour ces raisons, votre commission spéciale vous propose la suppression de l'article 1 er bis .

3) Les mesures prévues en faveur des entrepreneurs individuels

- la protection de la résidence principale par la déclaration d'insaisissabilité ( article 6 ) :

Le projet de loi permet à l'entrepreneur individuel de mettre à l'abri sa résidence principale en procédant devant notaire à une déclaration d'insaisissabilité des droits qu'il détient sur l'immeuble. Cette déclaration sera opposable aux créances nées à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant postérieurement à la publication de la déclaration à la conservation des hypothèques. Cette mesure protectrice diffère par son objet bien circonscrit de celle qui consisterait à créer un patrimoine professionnel d'affectation dont le Sénat, et en particulier votre commission des Lois au début de l'année 2000 ( ( * )1), ont estimé à l'occasion de l'examen de la proposition de loi n° 254 (1998-1999), présentée par M. Jean-Pierre Raffarin et plusieurs de ses collègues, que sa mise en oeuvre se heurterait à de trop importantes difficultés.

Sur cette disposition, l'Assemblée nationale a précisé que l'établissement de la déclaration donnerait lieu au versement aux notaires d'émoluments fixes et plafonnés et a prévu une information obligatoire du conjoint lors de la demande d'immatriculation de l'entreprise. Votre commission spéciale vous propose à son tour de modifier le dispositif pour en combler une lacune et garantir l'efficience de la protection du déclarant dans l'hypothèse d'une vente de la résidence principale et d'un remploi des sommes tirées de la vente ;

- l' extension aux entreprises individuelles du champ d'action des groupements de prévention agréés créés par la loi du 1 er mars 1984 sur la prévention et le règlement amiable des difficultés des entreprises ( article 6 bis ) :

Votre commission spéciale souscrit à cette disposition, introduite par l'Assemblée nationale, faisant bénéficier les entreprises individuelles de la possibilité, jusque-là réservée aux seules entreprises constituées sous forme de personne morale, d'adhérer à un groupement de prévention agréé qui, moyennant la fourniture d'informations comptables et financières, procède à un dépistage des difficultés et alerte le chef d'entreprise.

Outre ces observations et ces propositions de modifications, votre commission spéciale vous soumet un amendement qui insère un article additionnel après l'article 3 ayant pour objet d'améliorer l'efficacité des contrôles sur l'exercice de certaines activités artisanales en conformité avec les exigences légales relatives à la qualification . Les chambres de métiers seraient ainsi investies d'une mission d'alerte de l'autorité publique pour les anomalies qu'elles constateraient en la matière.

4) Les mesures visant à faciliter le recouvrement des cotisations sociales versées par les employeurs pour le compte de certains salariés

Les nombreuses déclarations sociales et fiscales auxquelles sont assujettis les entrepreneurs qui embauchent des salariés, ainsi que la multiplicité des caisses, des assiettes, des taux et des échéances qui caractérisent le dispositif actuel des assurances sociales, sont autant de complications qui découragent l'embauche, nuisent à l'emploi et favorisent le travail au noir (notamment dans le cas d'activité temporaire). Ces écueils sont particulièrement importants pour les travailleurs indépendants, les créateurs d'entreprises et les petites entreprises, et pénalisent notamment très fortement le recrutement du premier salarié. La simplification du système de déclarations et de recouvrement des cotisations sociales apparaît donc comme une véritable nécessité, ainsi que l'ont au demeurant reconnu le Premier ministre et le Gouvernement en prévoyant d'y procéder par voie d'ordonnances.

L'Assemblée nationale a toutefois voulu anticiper une telle réforme de quelques semaines en adoptant deux articles additionnels au présent projet de loi visant, respectivement :

- à la création d'un chèque-emploi entreprises ( article 6 quinquies ) : à la fois contrat de travail, bulletin de paie et déclaration sociale, ce document, inspiré du chèque-emplois services, vise à aider les petites entreprises à accomplir les formalités sociales liées à l'embauche et à l'emploi de leurs salariés. Il pourrait être utilisé au titre des salariés dont l'activité n'excède pas cent jours (consécutifs ou non) par an, ou des salariés relevant d'entreprises employant au plus trois équivalent temps plein ;

- à l' organisation , au profit des petites entreprises recourant à ce chèque-emploi entreprises, d'un service d'aide procédant notamment au calcul de l'ensemble des cotisations et contributions sociales et à leur recouvrement ( article 6 quater ) : ce service libérerait l'employeur des contraintes liées au calcul des cotisations et à l'établissement des déclarations sociales, et lui masquerait une partie de la complexité de l'organisation de notre système de protection sociale en lui permettant de disposer d'un interlocuteur unique.

Ces deux articles additionnels, qui sont intimement liés, ont été adoptés par l'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission spéciale, malgré l'avis défavorable du Gouvernement qui en avait demandé le retrait. Rappelant en effet que le principe d'une telle mesure va figurer dans le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de codification du droit, M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, avait souligné que « le recours à un amendement pour une mesure aussi importante a l'inconvénient d'empêcher toute consultation officielle des partenaires sociaux » , ajoutant que « le Gouvernement a une méthode qui prévoit un temps pour la concertation avec les partenaires sociaux et tous ceux qui peuvent être intéressés par telle ou telle mesure de simplification » .

L'analyse technique des articles 6 quater et 6 quinquies démontre que de nombreuses difficultés pratiques doivent encore être résolues pour permettre la mise en oeuvre générale, dans toutes les branches d'activités, de leurs dispositifs. En outre, les très nombreuses auditions auxquelles a procédé votre commission spéciale ont révélé qu'aucun dialogue préalable formel et précis n'avait été entrepris, ni avec les syndicats de salariés et les organisations professionnelles d'employeurs, ni avec les divers organismes de sécurité sociale, sur ce nouveau mécanisme.

Il a donc semblé à votre commission spéciale que ce temps de la concertation était absolument nécessaire pour parvenir à réformer et simplifier de manière utile, c'est-à-dire efficace et pérenne. Aussi a-t-elle jugé opportun d'en revenir au moyen législatif et au calendrier initialement prévus par le Gouvernement, la voie des ordonnances paraissant être à la fois la plus sûre et la plus rapide pour instituer un dispositif technique pertinent qui allège effectivement les contraintes des petits entrepreneurs en matière de formalités liées aux assurances sociales. C'est pour ces raisons de procédure qu'elle vous propose donc de supprimer les articles 6 quater et 6 quinquies .

B. TRANSITION ENTRE LE STATUT DE SALARIÉ ET CELUI D'ENTREPRENEUR (TITRE II)

Aujourd'hui, 70 % des créateurs ou repreneurs d'entreprises sont des salariés. Pourtant, le passage du statut de salarié à celui d'entrepreneur comporte des risques importants, qui ne permettent pas toujours aux intéressés de concrétiser leur projet de manière constructive et sereine. C'est pourquoi, les six articles initiaux du titre II du projet de loi pour l'initiative économique, complétés par trois articles additionnels introduits par l'Assemblée nationale, proposent de faciliter cette transition à travers plusieurs mesures tendant à améliorer le statut des salariés créateurs ou repreneurs d'entreprise et à améliorer leur environnement statutaire, financier et social.

1) Les mesures visant à aménager les relations entre les salariés créateurs d'entreprise et leur employeur

Actuellement, le code du travail n'est pas adapté à la situation du salarié qui souhaite créer ou reprendre une entreprise. Afin de lui permettre de concrétiser son projet en le libérant, sous certaines conditions destinées à protéger l'employeur et à garantir l'activité de l'entreprise, d'entraves liées à son statut de salarié, les articles 7, 9 et 9 bis nouveau visent à aménager les relations de travail entre le salarié biactif et son employeur. Ces aménagements portent sur :

- les clauses du contrat de travail : l' article 7 propose une levée des clauses d'exclusivité figurant dans certains contrats de travail afin d'autoriser le salarié, sous réserve d'une obligation de loyauté, à initier un projet de création ou de reprise d'entreprise tout en restant salarié, et ce, pendant un an, éventuellement prorogé en cas de recours au temps partiel ;

- le temps de travail : l' article 9 modifie les règles actuelles relatives au congé et accorde au salarié un nouveau droit au temps partiel pour création ou reprise d'entreprise . Il encadre les modalités de cet aménagement du temps de travail en le soumettant à des conditions portant tant sur l'ouverture (ancienneté, limitation de la durée) que sur l'exercice de ces droits (obligation d'information de l'employeur, possibilités pour l'employeur de différer ou de refuser l'aménagement demandé). Parallèlement, il prévoit des dispositions tendant à permettre une réorganisation de l'entreprise par la définition d'un régime d'heures complémentaires et la fixation des modalités du retour du salarié, ainsi que la nature des sanctions à l'encontre de l'employeur qui ne respecterait pas les nouveaux droits du salarié.

En contrepartie, l' article 9 bis étend les possibilités de recours au contrat à durée déterminée et à l'intérim pour remplacer le salarié bénéficiant d'un passage provisoire à temps partiel pour création ou reprise d'entreprise.

En outre, les députés ont souhaité lever les incertitudes pénales qui pèsent aujourd'hui sur les entreprises en matière de sous-traitance. Opérant un retour à la philosophie de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, que la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail avait remise en cause, l' article 12 bis , introduit par l'Assemblée nationale, rétablit la présomption simple de non salariat au profit du travailleur indépendant régulièrement immatriculé. L'objectif de cette disposition est de préciser exactement dans quelles conditions le juge peut être éventuellement conduit à requalifier des contrats de sous-traitance en contrats de travail et à établir la dissimulation de travail salarié. Votre commission spéciale approuve tout particulièrement cette mesure propre à garantir la stabilité juridique des relations entre donneur d'ouvrage et sous-traitant. En outre, les députés ont souhaité l'étendre aux relations contractuelles liant un donneur d'ouvrage à une société régulièrement immatriculée au registre du commerce et des sociétés.

Au titre des améliorations à apporter pour faciliter la transition entre le statut de salarié et celui d'entrepreneur, votre commission spéciale vous propose, dans un article additionnel après l'article 12 bis , de permettre les transferts d'épargne d'assurance-vie accumulée dans un contrat groupe pour salariés sur un contrat groupe souscrit par une association de non-salariés.

2) Les mesures tendant à alléger les cotisations sociales de certains créateurs d'entreprise

- l' exonération pendant un an des cotisations sociales dues par les salariés créateurs ou repreneurs d'entreprise au titre de cette nouvelle activité ( article 8 ) : partant du constat que le salarié créateur d'entreprise dispose d'une couverture sociale au titre de son activité salariée, et que les cotisations sociales appelées au titre de sa nouvelle activité peuvent lourdement peser sur la viabilité de son projet entrepreneurial, l'article 8 prévoit de l'en exonérer pendant sa première année d'activité, sous certaines limites et conditions (plafond de revenus ou de rémunérations, durée d'activité salariée préalable et postérieure à la création ou à la reprise).

Constatant que l'Assemblée nationale a, par l'adjonction d'un article 8 bis , étendu ce dispositif d'exonération temporaire aux créateurs d'entreprise couverts par le régime social de leur conjoint ou de leur concubin , votre commission spéciale, par souci d'équité, vous propose à l'article 8 de l'étendre de manière générale à tout créateur ou repreneur d'entreprise disposant d'une couverture sociale, à un titre ou à un autre, et, en conséquence, de supprimer l'article 8 bis ;

- le calcul prorata tempori s des cotisations d'assurance maladie et maternité des entrepreneurs occasionnels non salariés non agricoles ( article 12 ) : cette mesure a pour objet de limiter la dissimulation d'activité temporaire ou saisonnière résultant du montant, parfois déconnecté de la réalité des revenus réalisés, du seuil minimal actuel de cotisation annuelle exigé des entrepreneurs occasionnels. Tout en approuvant le principe de cette disposition, votre commission spéciale estime à la fois équitable et de nature à favoriser l'activité de ces petits entrepreneurs occasionnels de remplacer ce palier forfaitaire annuel, dont le niveau peut être excessivement élevé par rapport aux revenus dégagés par l'activité, par une cotisation annuelle calculée sur le bénéfice réel de l'intéressé.

3) La création du contrat d'accompagnement

Une entreprise sur deux échoue avant cinq ans. De l'avis de tous les porteurs de projets, l'accompagnement joue un rôle indispensable dans la consolidation des choix des créateurs et repreneurs d'entreprises et la pérennisation de leurs entreprises. Organisées ou non en réseaux, associations, chambres de métiers, chambres de commerce et d'industrie, boutiques de gestion, ce sont près de 3.000 structures qui maillent le territoire français pour offrir un panel de services avant et après la création ou la reprise de l'entreprise. Afin de renforcer l'implantation et de sécuriser le cadre juridique dans lequel elles opèrent, les articles 10 et 11 du projet de loi proposent la création d'un contrat d'accompagnement, auquel les pouvoirs publics peuvent apporter leur concours.

L' article 10 fixe un cadre contractuel dans lequel porteurs de projets et accompagnateurs peuvent collaborer à la création d'une entreprise, pendant une année, renouvelable deux fois. Les droits et les devoirs des parties contractantes sont précisés par des dispositions visant à assurer la transparence des comptes et l'autonomie des statuts. A cet égard, l'Assemblée nationale a supprimé la responsabilité légale de l'accompagnateur à l'égard des tiers pour les dommages causés par le bénéficiaire à l'occasion du programme d'accompagnement après l'immatriculation de la société, et prévu que la responsabilité de l'accompagnateur ne pourrait être engagée dans cette circonstance que si le contrat d'accompagnement le prévoit. Favorable à cette limitation, votre commission spéciale vous propose de l'étendre en matière d'engagements : il lui semble en effet que seule une mention expresse au contrat peut conduire les accompagnateurs à être solidairement engagés, notamment financièrement, avec le bénéficiaire après l'immatriculation de la société. A défaut d'un tel dispositif, elle craint que les personnes morales se refusent à s'engager dans un processus d'accompagnement en raison des risques importants qu'elles prendraient : il lui paraît essentiel que ces risques soient assumés uniquement si la personne morale concernée y consent, et qu'elle l'indique alors dans le contrat d'accompagnement.

A cet article 10, votre commission spéciale a par ailleurs procédé à diverses modifications rédactionnelles, dont deux méritent d'être particulièrement citées : l'extension du contrat d'accompagnement à la reprise d'entreprise ( ( * )1), qui mérite tout autant, en particulier au regard de son intérêt au plan économique, d'être favorisée et encouragée, et la substitution, au terme « préparation » , du mot « formation » , qui précise davantage la nature du programme que le créateur s'engage à suivre dans le cadre du contrat d'accompagnement.

Lorsque le projet accompagné présente un intérêt qui rencontre les priorités des pouvoirs publics, l' article 11 donne à l'Etat et aux collectivités publiques la possibilité de mobiliser des aides financières ou logistiques , au titre de l'accompagnement. Il organise par ailleurs la protection des bénéficiaires des contrats contre le chômage, les risques couverts par les assurances sociales et les accidents du travail.

*

Sous ce titre II, votre commission spéciale vous propose par ailleurs d'insérer un article additionnel après l'article 9 bis étendant aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle les dispositions du code du travail autorisant les entreprises industrielles à organiser le travail en continu sous réserve d'un accord collectif. Il s'avère en effet qu'à la suite d'une récente décision jurisprudentielle, cette législation ne paraît pouvoir être mise en oeuvre dans ces trois départements qu'à la condition que le législateur prévoie explicitement leur applicabilité par dérogations aux dispositions du code professionnel local. Le maintien de règles d'organisation datant des lois impériales prussiennes du début du siècle dernier étant, notamment, de nature à créer des difficultés pour trouver un repreneur en cas de cession d'une entreprise, il convient donc d'adapter en la matière le droit local alsacien-mosellan aux dispositions applicables dans le reste du pays.

C. FINANCEMENT DE L'INITIATIVE ÉCONOMIQUE (TITRE III)

Initialement constitué de cinq articles, le titre III du projet de loi pour l'initiative économique en compte huit après son examen en première lecture par l'Assemblée nationale, et votre commission spéciale vous proposera deux articles additionnels.

Les dispositions de ce titre ont pour objet de faciliter le financement des entreprises, et plus particulièrement de remédier aux problèmes de financement de la création d'entreprise et des petites et moyennes entreprises.

La dépense fiscale correspondante est très difficile à appréhender, mais pourrait être au total de l'ordre de grandeur de la centaine de millions d'euros par an .

1) Six articles visent à renforcer les fonds propres des entreprises

Trois de ces articles, qui répondent d'ailleurs aux préconisations formulées depuis plusieurs années par la commission des finances et par la commission des affaires économiques du Sénat, visent à favoriser le financement en fonds propres par des personnes physiques des petites et moyennes entreprises organisées en forme sociétaire :

- l'article 13 crée une nouvelle catégorie de fonds communs de placement à risques (FCPR) : les fonds d'investissement de proximité (FIP), auxquels l'article 14 confère un avantage fiscal important puisque les souscripteurs personnes physiques des FIP bénéficieront d'une réduction d'impôt sur le revenu égale à 25 % du montant de leur souscription dans la limite de 24.000 euros pour un couple soumis à imposition commune, et de 12.000 euros pour les personnes seules. Pour donner droit à cet avantage, les FIP devront investir au moins 60 % des fonds récoltés dans des PME exerçant la majeure partie de leurs activités dans la zone géographique qu'ils ont choisie.

A l'article 13, votre commission spéciale estime tout d'abord nécessaire de préciser que seront également éligibles au financement par les FIP les entreprises ayant établi leur siège social dans la zone géographique couverte par le fonds. Par ailleurs, en contrepartie de la dépense fiscale consentie en faveur du développement des FIP, elle souhaite que 10 % des fonds récoltés financent les entreprises nouvelles, de moins de trois ans . En outre, s'agissant de la situation particulière des départements d'outre-mer, elle croit utile que les FIP puissent mutualiser leurs investissements sur un, deux ou trois départements d'outre-mer.

Enfin, pour compléter ce dispositif, votre commission spéciale vous propose par ailleurs dans un article additionnel après l'article 14 de remédier à une omission, survenue lors de la codification du code monétaire et financier, qui crée une source d'insécurité juridique pour les souscripteurs des fonds communs de placement pour l'innovation (FCPI), qui constituent une autre catégorie de FCPR ;

- l'article 15 vise à apporter des précisions au dispositif « Madelin » accordant une réduction d'impôt sur le revenu égale à 25 % de leur souscription aux personnes physiques souscrivant en numéraire au capital de petites et moyennes entreprises non cotées, et surtout à en tripler le plafond pour le porter de 12.000 à 40.000 euros par an pour un couple soumis à imposition commune et de 6.000 à 20.000 euros par an pour les personnes seules. La dépense fiscale attachée à cette mesure est estimée à 36 millions d'euros par an.

Par ailleurs, un article vise indirectement à favoriser l'apport de fonds propres par des personnes physiques aux jeunes entreprises et aux entreprises en difficulté organisées sous forme sociétaire : l'article 16 propose en effet de doubler, pour le porter de 30.500 à 60.000 euros par an pour un couple soumis à imposition commune et de 15.250 à 30.000 euros par an pour les personnes seules, le montant des pertes en capital subies à la suite de la souscription au capital d'une société nouvelle ou d'une société en difficulté déductibles du revenu des souscripteurs, le bénéfice de ce régime étant alternatif à celui du régime « Madelin ». La dépense fiscale attachée à cette mesure est estimée à 1,5 million d'euros par an.

Enfin, deux de ces articles, insérés par l'Assemblée nationale, contribuent au renforcement des fonds propres des sociétés comme des entrepreneurs individuels :

- d'une part, l'article 16 bis permet aux créateurs ou repreneurs d'entreprises de mobiliser de manière anticipée l'épargne investie dans des plans d'épargne en actions (PEA) pour leur projet de création ou de reprise d'entreprise, sans perdre leur avantage fiscal et sans clôture de leur plan ;

- d'autre part, l'article 17 bis accroît la rentabilité des entreprises individuelles et des sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés exerçant leur activité en Corse, puisqu'il prévoit d'instaurer une sortie en sifflet pour le régime de zone franche de Corse issu de la loi du 26 décembre 1996 relative à la Corse, dont le bénéfice serait désormais cumulable avec celui du crédit d'impôt institué par la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse.

2) Deux articles tendent à remédier au rationnement du crédit bancaire au détriment des PME et à accroître la confiance mutuelle entre les PME et leurs établissements de crédit

- l'article 17 propose principalement de supprimer le plafonnement des taux d'intérêt sur les concours accordés « à froid » par les établissements de crédit à l'ensemble des personnes morales se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale, ce qui englobe notamment les entreprises organisées sous forme sociétaire. Cette mesure ouvre la faculté aux banques d'accorder à des conditions rémunératrices des micro-crédits comme de financer plus largement des activités risquées telles que la création d'entreprise, le développement d'entreprises innovantes ou le soutien aux entreprises confrontées à des difficultés de trésorerie. En revanche, l'encadrement des taux des crédits serait maintenu inchangé pour les entrepreneurs individuels et pour les découverts en compte accordés « à chaud » aux personnes morales précitées, si ce n'est que les sanctions pénales prévues en cas de dépassement des plafonds fixés pour ces derniers concours seraient supprimées ;

- parallèlement, l'article 13 A , introduit à l'initiative de l'Assemblée nationale, tend à instituer un délai de préavis d'une duré fixée par décret pour la suppression par un établissement de crédit de ses concours à une entreprise, ce qui est de nature à rassurer les plus vulnérables d'entre elles.

3) Enfin, partant de l'idée selon laquelle les achats publics peuvent contribuer davantage au développement des petites et moyennes entreprises, votre commission spéciale vous propose un article additionnel prévoyant la réalisation d'un rapport annuel au Parlement relatif aux achats des services de l'Etat aux PME

A terme, le rapport annuel prévu par cet article additionnel après l'article 17 bis pourrait ainsi servir de support à la formalisation, pour chacun des ministères, d'objectifs pour la fraction de leurs achats bénéficiant aux petites et moyennes entreprises.

D. ACCOMPAGNEMENT SOCIAL DES PROJETS (TITRE IV)

Composé de six articles, dont deux insérés à l'initiative de l'Assemblée nationale, ce titre IV répond au souci de créer un environnement socialement plus favorable à la création ou à la reprise d'entreprises. Les mesures proposées visent essentiellement à adapter l'acquittement des cotisations sociales aux réalités des revenus des entrepreneurs au début de leur activité, à renforcer le dispositif d'aide à la création ou à la reprise d'entreprise par les populations en difficulté, et à accorder une déduction fiscale aux entreprises apportant leur concours financier aux réseaux d'accompagnement. En outre, un article additionnel tend à l'institution d'un collecteur unique des cotisations sociales dues à titre personnel par les travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales.

1) Les mesures visant à adapter l'acquittement des cotisations sociales à la réalité des revenus des entrepreneurs au début de leur activité

- l' extension du régime fiscal des micro-entreprises aux charges sociales des travailleurs indépendants ( articles 18 A ) : introduit par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, cet article nouveau tend à permettre le calcul des cotisations des travailleurs non salariés imposés au régime fiscal des micro-entreprises, dès l'année au titre de laquelle elles sont dues, sur la base du revenu effectivement réalisé. Il permet ainsi de rendre plus équitable le système de calcul du montant des cotisations des travailleurs indépendants, d'améliorer la lisibilité du montant prévisionnel de leurs charges, et d'atténuer le déséquilibre de trésorerie causé par l'acquittement de cotisations élevées que la modestie du chiffre d'affaires ne permet pas de couvrir en début d'activité ;

- le report et l'étalement des charges sociales de la première année d'activité ( article 18 ) : dans le même souci d'efficacité, cet article a pour objet de permettre aux créateurs et repreneurs d'une entreprise, qu'ils exercent sous la forme individuelle ou sociétale, de reporter sans majoration de retard le paiement des charges sociales personnelles dues la première année d'activité, et d'en étaler l'acquittement en fractions annuelles d'au moins 20 % chacune, sur une période maximale de cinq ans.

2) Les mesures tendant à renforcer le dispositif d'aide à la création ou à la reprise d'entreprise par les populations en difficulté

- les améliorations apportées au dispositif d'aide à la création d'entreprise ( article 19 ) : tout en conditionnant le bénéfice des aides à la création ou à la reprise d'entreprise destinées aux populations en difficulté, cet article en étend le dispositif aux bénéficiaires d'un contrat d'accompagnement, autorise le cumul du revenu minimum d'insertion, de l'allocation de solidarité spécifique ou de l'allocation parent isolé avec un revenu d'activité pour les allocataires qui créent ou reprennent une entreprise, et étend le dispositif d'« encouragement au développement des entreprises nouvelles », dit EDEN, (qui devrait par ailleurs retrouver la forme d'une avance remboursable) aux chômeurs de plus de 50 ans, qui, comme l'ensemble des bénéficiaires, pourront se voir appliquer automatiquement certaines mesures d'exonération de cotisations sociales et le maintien d'une couverture sociale gratuite. Ces propositions sont complétées par la possibilité donnée à l'Etat et aux collectivités locales de participer, de manière plus adaptée, à l'accompagnement des projets de création ou de reprise d'entreprises par les populations en difficulté ;

- l' harmonisation du maintien des revenus de solidarité en cas de création d'entreprise ( article 20 ) : cet article porte de six mois à un an le délai de maintien de l'allocation spécifique de solidarité et de l'allocation veuvage au profit des titulaires qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise, procédant ainsi à une harmonisation des délais de maintien entre ces allocations et ceux relatifs au revenu minimum d'insertion et à l'allocation de parent isolé.

3) L'ouverture du bénéfice de déductions fiscales aux entreprises apportant un concours financier aux réseaux d'accompagnement

Outre une adaptation à la réglementation communautaire en vigueur en matière d'aides d'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises du dispositif actuel de déductions des dons faits par les entreprises à des organismes ayant pour objet de participer, par le versement d'aides financières, à la création d'entreprises, à la reprises d'entreprises en difficulté et au financement d'entreprises de moins de cinquante salariés, l' article 21 vise essentiellement à étendre le champ des organismes éligibles aux aides financières en visant ceux ayant pour objet de fournir des prestations d'accompagnement aux PME.

4) L'institution d'un collecteur unique des cotisations sociales dues à titre personnel par les travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales

L' article 18 bis propose qu'un organisme unique, déterminé par décret, procède au recouvrement des cotisations et des contributions sociales dues pour eux-mêmes par les entrepreneurs indépendants. Le principe de cette mesure de simplification ne peut que susciter l'approbation : il est en effet essentiel de libérer les artisans et les commerçants des charges administratives qui obèrent leur activité et de faire assumer la complexité du système de protection sociale par les organismes concernés plutôt que par les assujettis.

Mais en l'état, cet article n'est pas applicable puisqu'il ne paraît pas possible de déterminer par voie réglementaire l'organisme chargé du recouvrement. Or, au cours de ses travaux préparatoires, votre commission spéciale a constaté que diverses possibilités pouvaient être ouvertes, de l'attribution de cette mission à un seul réseau ou à plusieurs jusqu'à la mise en place d'un dispositif permettant d'offrir à l'assuré un point d'entrée unique (en « front office ») sans pour autant remettre en cause l'organisation actuelle de la collecte des cotisations (en « back office »). Elle a en outre observé que toutes les professions indépendantes ne semblaient pas visées par la mesure, alors qu'un approfondissement de la réflexion pourrait peut-être leur permettre d'en bénéficier. Enfin, elle a du prendre en compte la vigueur du débat suscité, ainsi que les auditions auxquelles elle a procédé l'ont démontré, non pas tant par l'objectif en lui-même que par les conditions dans lesquelles il s'est trouvé posé.

En effet, tout comme les article 6 quater et 6 quinquies , cet article 18 bis a été adopté par l'Assemblé nationale à l'initiative de sa commission spéciale, contre l'avis du Gouvernement. Rappelant son engagement de procéder à une simplification de la collecte des cotisations sociales personnelles des travailleurs indépendants par la voie d'ordonnance, le secrétaire d'Etat a ainsi demandé le retrait de l'amendement pour « procéder aux consultations officielles préalables des partenaires sociaux, afin que cette mesure puisse être mise en place dans les meilleurs conditions de dialogue et de concertation » .

Cette consultation, qui s'est engagée dans des conditions particulières, a conduit le Premier ministre, le 18 février dernier, à diligenter une mission conjointe de l'Inspection générale des affaires sociales, de l'Inspection générale des finances et de l'Inspection générale de l'industrie et du commerce pour expertiser, préalablement à toute décision, l'ensemble des voies possibles d'évolution permettant d'aboutir à une véritable simplification. Les conclusions de cette mission devront être rendues avant le 31 mars prochain, c'est-à-dire après l'examen du présent projet de loi par le Sénat . Comment, dès lors, celui-ci devrait-il être contraint de délibérer sur une architecture dont le Gouvernement lui-même ne peut, à l'heure actuelle, dégager les lignes directrices sans faire appel à une mission d'expertise ?

Aussi votre commission spéciale a-t-elle estimé qu'il était plus sage, là encore, de respecter le calendrier initialement fixé par le Gouvernement et de procéder dans le cadre des ordonnances à la simplification que le Sénat, tout comme l'Assemblée nationale et le Gouvernement, appelle de ses voeux. L'analyse des préconisations de la mission d'expertise aura alors pu être effectuée, tout comme les conclusions qu'il conviendra d'en tirer. On doit ajouter que le complexe dossier du recouvrement des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants ne peut en aucun cas être dissocié des questions relatives au mode actuel de calcul desdites cotisations et contributions et aux dates d'échéance des versements. Pour être applicables, la simplification et l'harmonisation doivent être menées d'un même pas dans ces trois domaines. C'est précisément tout l'intérêt du projet de loi d'habilitation que de permettre ce mouvement cohérent et organisé.

Telles sont les raisons pour lesquelles votre commission spéciale propose de supprimer l'article 18 bis du projet de loi.

E. TRANSMISSION DE L'ENTREPRISE (TITRE V)

Initialement constitué de cinq articles, le titre V du projet de loi pour l'initiative économique en compte huit après son examen en première lecture par l'Assemblée nationale, et votre commission spéciale vous proposera quatre articles additionnels.

Les dispositions de ce titre ont pour objet de faciliter la transmission des entreprises et la création d'emplois.

1) Les cinq articles initialement proposés par le Gouvernement visent à réduire le frottement fiscal des transmissions d'entreprise

Les cinq articles initialement proposés par le gouvernement tendent à réduire les coûts de la transmission d'entreprise aussi bien pour les vendeurs que pour les repreneurs.

La dépense fiscale correspondante est au total supérieure à 300 millions d'euros par an , auxquels s'ajoute une perte de recettes pour les organismes de sécurité sociale.

L' article 22 réduit le coût de la transmission pour les cédants . Il relève des deux-tiers les seuils d'exonération des plus-values professionnelles à long terme et prévoit un dispositif d'exonération en paliers pour les plus-values réalisées dans le cadre d'activités dépassant ces seuils de moins de 20 %. Cette mesure, qui ne concerne que les activités soumises à l'impôt sur le revenu, conduirait à exonérer la cession de plus de 80 % des entreprises, au prix d'une dépense fiscale estimée à 245 millions d'euros par an , soit plus que les dépenses fiscales proposées par tous les autres articles du présent projet de loi, à laquelle s'ajoutent d'importantes pertes de recettes pour les organismes de sécurité sociale. Afin de réduire l'effet de couperet des seuils, votre commission spéciale vous proposera de « lisser » les paliers d'exonération prévus par le présent article ;

Quatre de ces articles réduisent le coût de la transmission pour les repreneurs :

- l' article 23 propose d'instituer une réduction d'impôt sur le revenu au titre des emprunts contractés pour la reprise d'une société non cotée. Cette réduction serait égale à 25 % de ces intérêts, dans la limite de 20.000 euros par an pour les contribuables mariés soumis à imposition commune et de 10.000 euros par an pour une personne seule. Dans le cas d'une reprise d'entreprise réalisée par un contribuable marié soumis à imposition commune à l'aide d'un prêt de 250.000 euros sur dix ans à un taux d'intérêt annuel de 8 %, cette mesure conduirait à rendre les intérêt de cet emprunt entièrement déductibles, ce qui revient à donner au contribuable concerné une bonification d'intérêt d'un quart (soit en l'espèce de 2 %) ou un avantage fiscal égal à 5.000 euros par an pendant dix ans. La dépense fiscale résultant de cette mesure est estimée par l'administration à 7 millions d'euros par an ;

- l' article 24 vise à encourager la transmission anticipée d'entreprise en étendant aux donations en plein propriété l'abattement de 50 % qui existe pour les successions, sous condition de signature d'un engagement de conservation des titres pour une durée d'au moins six ans. Cet engagement de conservation des parts doit porter sur au moins 25 % des droits sociaux s'il s'agit d'une entreprise cotée et 34 % des parts ou actions s'il s'agit d'une entreprise non cotée. Votre commission spéciale vous proposera des améliorations de ce dispositif par coordination avec ses propositions sur l'article 26 bis ;

- l' article 25 propose d'introduire une exonération des droits de mutation en cas de donation à un salarié d'un fonds artisanal, de commerce ou de clientèle dont la valeur est inférieure à 300.000 euros à la place du dispositif actuel qui prévoit un abattement de 15.000 euros, pour les seules donations de titres d'une société. Le régime proposé est donc élargi aux entreprises individuelles, tout en étant ciblé sur la transmission du fonds de commerce ou de clientèle ;

- l' article 26 propose d'instituer pour les droits de mutation un abattement , d'un montant maximum de 23.000 euros, sur les cessions de parts sociales de sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions. La dépense fiscale résultant de cette mesure, qui ne concerne ni les transmissions d'entreprises exploitées en nom personnel, ni les transmissions de sociétés dont le capital est divisé en actions (comme les SA), est estimée à 60 millions d'euros par an , l'avantage fiscal pouvant atteindre jusqu'à 1.104 euros par cession (soit 23.000 euros x 4,80 %).

2) Les trois articles ajoutés par l'Assemblée nationale cherchent à diminuer les effets anti-économiques liés à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF)

- l' article 26 bis introduit un abattement de 50 % au titre de l'ISF pour les parts ou actions de société que les propriétaires s'engagent à conserver dans le cadre d'un engagement collectif de conservation , d'une durée minimale de six ans, portant sur au moins 25 % des droits financiers et des droits de vote pour une société cotée, et 34 % pour une société non cotée. Au moins un associé de l'accord collectif doit être un dirigeant de l'entreprise. Votre commission spéciale vous proposera des améliorations pour mieux faire « respirer » cet engagement collectif, en diminuant, pour les sociétés cotées, le seuil de 25 % à 20 %, en ouvrant la possibilité d'une prolongation de l'engagement, en permettant des cessions entre associés au sein de l'engagement, en autorisant l'entrée dans un engagement en cours, en adoptant un régime de sortie du dispositif non dissuasif et en garantissant l'information de l'autorité des marchés financiers pour les titres admis à la négociation sur un marché réglementé ;

- l' article 26 ter prévoit d' exonérer de l'ISF les titres reçus en contrepartie d'apports en numéraire au capital de PME (définies au sens européen du terme : moins de 40 millions d'euros de chiffre d'affaires et moins de 250 salariés) dès lors que la société exerce exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et a son siège de direction effective dans un Etat membre de la communauté européenne. Votre commission spéciale souhaite ouvrir le champ de cet article à tous les secteurs économiques et propose que soit pris en compte l'ensemble des apports de richesse aux PME, au-delà des seules apport en numéraire ;

- l' article 26 quater prévoit que les dirigeants d'entreprises ne détenant pas les 25 % du capital de leur entreprise leur ouvrant droit à exonération automatique au titre de l'ISF, bénéficient de l'exonération dès lors que leurs parts représentent plus de 50 % de la valeur brute de leur patrimoine imposable, contre 75 % actuellement.

3°) Votre commission spéciale vous proposera en outre quatre articles additionnels après l'article 26 quater , relatifs à l'impôt de solidarité sur la fortune, destinés à favoriser l'investissement des patrimoines concernés dans l'économie

- le premier vise à exclure les titres reçus par le contribuable en contrepartie de sa souscription aux fonds d'investissement de proximité (FIP) de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour assurer le lancement de ce nouveau produit d'épargne dans une conjoncture difficile ;

- le deuxième propose d'exonérer d'ISF les titres et parts de sociétés détenus par les salariés détenant un contrat à durée indéterminée de plus de trois ans dans leur entreprise, afin de conforter l'actionnariat salarié ;

- le troisième suggère d'exonérer au titre de l'ISF les apports en numéraire aux groupements fonciers agricoles (GFA) pour inciter à l'installation de jeunes agriculteurs ;

- le quatrième envisage d'écarter le droit de reprise de l'administration fiscale en cas de dépôt spontané d'une déclaration rectificative ou nouvelle à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Il doit permettre le retour des capitaux délocalisés

F. DISPOSITIONS DIVERSES (TITRE VI)

Initialement constitué d'un article 27 unique destiné à étendre à la Polynésie française, à Wallis-et-Futuna et à la Nouvelle-Calédonie, collectivités situées outre-mer et soumises au principe de la spécialité législative, certaines dispositions du titre premier relatives respectivement à la suppression du seuil légal pour le capital d'une SARL en création, au récépissé de création d'entreprise et à la déclaration d'insaisissabilité de la résidence principale de l'entrepreneur individuel, et à rendre applicables à ces mêmes collectivités et à Mayotte des dispositions issues de la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques relatives à la libération échelonnée sur cinq ans du capital social, le titre VI comprend désormais aussi un article 27 A , introduit sur proposition du rapporteur de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, ayant pour objet d'assouplir la possibilité offerte aux volontaires internationaux en entreprise d'effectuer leur volontariat dans les petites et moyennes entreprises.

Sur ce titre, votre commission spéciale vous propose d'ajuster le dispositif de l'article 27 d'extension de certaines dispositions du projet de loi aux collectivités susvisées pour tenir compte des modifications introduites par l'Assemblée nationale et de certains ajouts qu'elle vous propose. Il s'agit également de prendre en considération l'évolution du statut constitutionnel de ces collectivités résultant de l'adoption par le Congrès du Parlement, le lundi 17 mars 2003, du projet de loi constitutionnelle relatif à l'organisation décentralisée de la République : Wallis-et-Futuna ne peut plus, en effet, être qualifié de territoire d'outre-mer.

EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER
SIMPLIFICATION DE LA CRÉATION D'ENTREPRISE
Article 1er
Montant du capital social de la SARL

(Articles L. 223-2, L. 223-14 et L. 223-42 du code de commerce
et article 27 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947)

Commentaire : le présent article supprime toute exigence d'un montant minimal de capital social défini par la loi pour la création d'une société à responsabilité limitée (SARL).

I. Le texte initial

L'article 1 er du projet de loi modifie l'article L. 223-2 du code de commerce pour supprimer toute exigence d'un montant minimal de capital défini par la loi pour la création d'une société à responsabilité limitée (SARL) : il reviendra désormais aux statuts de déterminer le capital social. Notons que ce principe de fixation du capital social par les statuts, quelle que soit la forme de la société, résulte de l'article L. 210-2 du code de commerce. Par coordination, sont abrogées les dispositions figurant sous ce même article L. 223-2 qui prévoient un capital réduit pour la création d'une SARL exploitant une entreprise de presse (300 euros au lieu de 7.500 euros).

L'exposé des motifs du projet de loi dénonce en effet le caractère illusoire de la protection des créanciers que constitue un capital social minimal d'un montant de 7.500 euros, le plus souvent dépensé dans les premières semaines de l'activité. Il observe que « l'utilité d'un capital social de départ n'est pas avérée » et qu'il n'existe « aucune logique à ce que la loi détermine arbitrairement quel est le bon niveau de capital pour lancer une activité économique ».

Selon les informations délivrées à votre rapporteur, les SARL existantes ont, à une très large majorité, un capital social d'un niveau proche du minimum légal. Ainsi, fin février 2003, sur les quelque 140.000 SARL en activité inscrites au registre du commerce de Paris, 72 % ont un capital inférieur à 8.000 euros, 21 % un capital dont le montant se situe entre 8.000 et 50.000 euros et moins de 1 % un capital supérieur ou égal à 500.000 €.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

Sur cet article, l'Assemblée nationale, à l'initiative de sa rapporteure et avec l'avis favorable du Gouvernement, a abrogé le second alinéa du texte proposé pour l'article L. 223-2 qui conservait l'exigence selon laquelle, sauf transformation de la SARL en une société d'une autre forme, la réduction du capital social au dessous du montant défini lors de la création de la société ne pouvait être décidée que sous la condition suspensive d'une augmentation de capital destinée à le ramener au moins à ce niveau initial.

Cette disposition a été supprimée avec raison : si elle avait en effet un sens quand la loi fixait un minimum, elle n'en a plus dès lors que le capital social est fixé librement par les statuts et que l'on admet que sa fonction de gage pour les créanciers est illusoire. En tout état de cause, les créanciers disposent toujours d'un droit d'opposition à la réduction du capital social.

L'Assemblée nationale a également, à l'initiative de sa rapporteure et avec l'avis favorable du Gouvernement, procédé à plusieurs coordinations, la première en supprimant le seuil légal de 3.750 € pour la création d'une coopérative sous la forme d'une SARL (troisième alinéa de l'article 27 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération), les deux autres pour supprimer la référence à l'article L. 223-2, devenue sans objet, aux articles L. 223-14 et L. 223-42 du code de commerce.

III. La position de votre commission spéciale

De longue date, la vulnérabilité des entreprises françaises est imputée pour une bonne part à la faiblesse de leurs fonds propres, dont le capital social constitue un élément essentiel. La question, jusqu'à présent, portait sur le point de savoir s'il fallait réévaluer le seuil légal, inchangé depuis 1984. Toujours conçu comme un gage pour les créanciers et un élément permettant d'asseoir la crédibilité de l'entreprise, les propositions tendaient davantage à relever le seuil légal qu'à le faire disparaître ( ( * )1).

La loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques a, au contraire, tenté d'assouplir les exigences légales en matière de capital social initial : sans modifier le montant du seuil, elle a permis la libération progressive du capital constitué d'apports en numéraire sur cinq ans . Cette mesure a en outre eu pour objectif de mettre fin à la pratique consistant à créer une SARL à capital variable permettant, selon l'interprétation jurisprudentielle de l'article 51 de la loi du 24 juillet 1867, la création en libérant un dixième seulement du capital social pour contourner l'exigence de la libération intégrale du seuil légal posée par l'article 38 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales, devenu l'article L. 223-7 du code de commerce.

Le projet de loi conduit le processus au bout de sa logique en supprimant toute exigence de seuil légal . Il rejoint ainsi les lois britannique et américaine qui ne prévoient aucun capital minimum alors que la plupart des autres pays de l'Union européenne en prévoient un comme cela résulte du tableau figurant page suivante.

Si elle souscrit pleinement à l'analyse selon laquelle un seuil légal de faible montant ne peut être conçu comme un gage pour les créanciers d'une part, et la détermination du capital par les statuts permet d'en adapter le montant à la nature de l'activité de la société d'autre part, votre commission spéciale récuse en revanche le slogan de « la société à un euro ».

Elle estime en effet que ce message trahit le pragmatisme qui caractérise la disposition du projet de loi renvoyant la fixation du capital social aux seuls statuts en laissant croire aux candidats à la création d'entreprise qu'un euro suffira à fonder leur crédibilité. Il peut être en outre dangereux pour le dirigeant dans la mesure où un capital inexistant est susceptible de contribuer à l'insuffisance des fonds propres au regard des besoins de l'activité, la jurisprudence ( ( * )1) estimant alors que le gérant commet une faute de gestion.

Sur cet article 1 er , votre commission spéciale vous soumet un amendement tendant à opérer une coordination à l'article L. 223-9 du code de commerce.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

FORMES SOCIALES ET CAPITAL SOCIAL MINIMUM EXPRIMÉ EN EUROS
DANS LES 14 PAYS DE L'UNION EUROPÉENNE (HORS ÉLARGISSEMENT)

PAYS

EURL

SARL

SA


ROYAUME-UNI


Sans capital minimum


Sans capital minimum

76.000 €
dont ¼ au moins libéré à la constitution


ALLEMAGNE

25.5000 €
dont ½ au moins libéré à la constitution

25.500 €
dont ¼ au moins libéré à la constitution

51.000 €
dont ¼ au moins libéré à la constitution


BELGIQUE

18.500 €
dont 1/3 au moins libéré à la constitution

18.500 €
dont 1/3 au moins libéré à la constitution


61.900 €


ITALIE

10.000 €
dont 3/10 au moins libéré à la constitution

10.000 €
dont 3/10 au moins libéré à la constitution


103.000 €


ESPAGNE


3.000 €


3.000 €

60.000 €
dont ¼ au moins libéré à la constitution



PAYS-BAS

18.000 € entièrement libérés, mais pour la fraction du capital > 18.000 €, chaque part sociale supplémentaire peut être libérée au ¼ de sa valeur faciale à l'émission

18.000 € entièrement libérés, mais pour la fraction du capital > 18.000 €, chaque part sociale supplémentaire peut être libérée au ¼ de sa valeur faciale à l'émission

45.000 € entièrement libérés, mais pour la fraction du capital > 45.000 €, chaque action supplémentaire peut être libérée au ¼ de sa valeur faciale à l'émission


PORTUGAL

19.900 € avec possibilité sous certaines conditions de différer la libération

19.900 € avec possibilité sous certaines conditions de différer la libération

24.900 € dont 30 % au moins libéré à la constitution

GRÈCE

23.477 €
(entièrement libérés)

59.000 €
(entièrement libérés)

FINLANDE

8.000 €
(entièrement libérés)

80.000 €
(entièrement libérés)

AUTRICHE

35.000 €
(dont 17.500 € libérés à la constitution)

70.000 €
(entièrement libérés)


LUXEMBOURG

12.400 €
(libéré en totalité à la constitution)

30.000 €
(dont 7750 € libérés
à la constitution)


IRLANDE


1 €

38.092 €
(dont 9.523 € libérés
à la constitution)

DANEMARK

16.780 €
(entièrement libérés)

67.115 €
(entièrement libérés)


SUÈDE

Pas de société comparable à l'EURL et la SARL, mais la forme sociale de la commandite par actions, donc sans capital social minimal, puisque la responsabilité des commandités est totale

10.600 €
(entièrement libérés)

Article 1er bis -
Exonération des droits fixes des opérations d'apport en capital

(Articles 810 bis et 902 du code général des impôts)

Commentaire : le présent article exonère de droits fixes les opérations d'apport en capital pour les sociétés dont le capital est inférieur à 7.500 euros.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

Introduit par l'Assemblée nationale, l'article 1 er bis modifie les articles 810 bis et 902 du code général des impôts pour exonérer des droits fixes les opérations d'apport en capital lorsque le montant du capital avant la réalisation de l'apport est inférieur à 7.500 euros. Il s'agit, sinon d'encourager, du moins de ne pas dissuader les augmentations du capital social par l'exigence du paiement des droits fixes de 230 euros, c'est-à-dire du droit fixe d'enregistrement et du droit de timbre, lorsque le capital de départ est d'un faible montant. Précisons que l'exonération ne s'applique pas aux sociétés à prépondérance immobilière ni aux sociétés de gestion de portefeuille.

Présenté par la rapporteure au nom de la commission spéciale, l'amendement correspondant à cette disposition a reçu un avis de sagesse du Gouvernement au motif qu'une augmentation de capital témoigne du fait que « la société peut être assez prospère pour croître » et qu'elle doit dès lors « pouvoir s'acquitter d'impôts, au demeurant modestes ».

II. La position de votre commission spéciale

Tout en souscrivant à la nécessité d'encourager le renforcement du capital social, qui constitue une des composantes des fonds propres, votre commission spéciale estime, comme le secrétaire d'Etat l'a d'ailleurs fait valoir devant les députés, que les droits considérés correspondent à des sommes très modestes qui ne paraissent pas de nature à faire renoncer à une augmentation de capital. Elle considère que cette mesure relève davantage du symbole que d'un véritable encouragement. De plus, elle observe qu'il est paradoxal de réintroduire la référence au seuil de 7.500 euros alors qu'il a été supprimé par l'article 1 er , car considéré comme non pertinent puisqu'il ne correspond à aucune réalité économique.

En outre, votre commission spéciale souligne qu'une telle mesure n'est pas de nature à inciter les créateurs de sociétés à prévoir d'emblée un capital d'un montant supérieur à 7.500 euros : ils auront en effet intérêt à prévoir initialement un montant légèrement plus faible, ne serait-ce que d'un euro, pour pouvoir profiter ultérieurement de l'exonération fiscale lors d'une augmentation de capital significative.

Aussi votre commission vous propose-t-elle la suppression de cet article.

Article 2 -
Récépissé de création d'entreprise

(Articles L. 123-9-1 et L. 223-8 du code de commerce,
19-1 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 et L. 311-2-1 du code rural)

Commentaire : le présent article institue, pour faciliter et rendre plus rapides les démarches que doit entreprendre le créateur d'entreprise auprès de divers organismes, la délivrance gratuite d'un récépissé de création d'entreprise (RCE) lors du dépôt d'un dossier complet d'immatriculation.

I. Le texte initial

Cet article complète la division du code de commerce relative à la tenue du registre du commerce et des sociétés et aux effets attachés à l'immatriculation à ce registre, ainsi que la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, pour créer un récépissé de création d'entreprise (RCE).

Cette disposition tend à répondre au constat selon lequel, contrairement aux délais prescrits par les textes, la procédure de délivrance du Kbis, c'est-à-dire de la carte d'identité de la société, est trop longue et freine le démarrage de l'activité. L'objectif assigné au nouveau document ainsi institué est de permettre au créateur, dès le dépôt d'un dossier complet de demande d'immatriculation, d'effectuer les premières démarches telles que l'ouverture d'une ligne téléphonique et d'une boîte postale. Il est également prévu que le RCE permette de retirer les fonds provenant de la libération des parts sociales avant même l'immatriculation effective de la société. Précisons que la délivrance de ce document serait gratuite.

Le projet de loi initial prévoyait que le RCE devait être délivré par le greffe du tribunal de commerce chargé de la tenue du registre du commerce et des sociétés aux personnes assujetties à l'immatriculation à ce registre, et par la chambre de métiers aux personnes assujetties à l'inscription au répertoire des métiers .

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a, à l'initiative de sa rapporteure, à la fois modifié et complété le dispositif.

Elle a ainsi étendu aux chambres d'agriculture le pouvoir de délivrer un RCE à toute personne exerçant à titre habituel des activités agricoles, bien que le Gouvernement ait donné un simple avis de sagesse en partant du constat qu'en l'absence de répertoire de l'agriculture, il n'était pas demandé de preuve d'immatriculation aux nouveaux agriculteurs.

Elle a par ailleurs confié non seulement aux greffes de tribunaux de commerce mais également aux centres de formalités des entreprises (CFE) le pouvoir de délivrer le RCE.

III. La position de votre commission spéciale

Au cours des auditions qu'elle a organisées, votre commission spéciale a pu observer que la création d'un récépissé de création d'entreprise suscitait des réactions nombreuses et contradictoires, ce qui s'explique sans doute pour partie par les responsabilités partagées dans le retard enregistré pour l'attribution de l'extrait Kbis . La procédure actuelle fait en effet intervenir successivement plusieurs acteurs et les délais prévus par les textes ne sont pas toujours respectés. Cependant, le sentiment de lenteur qui peut être éprouvé par le créateur d'entreprise résulte aussi parfois des difficultés rencontrées en amont pour la constitution de la société, l'établissement de ses statuts et la confection du dossier de demande d'immatriculation lui-même.

S'agissant de l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, la procédure est actuellement organisée en quatre étapes.

1° - Le dossier peut être directement déposé au greffe du tribunal de commerce , à charge pour le créateur d'avoir préalablement saisi de la demande le centre de formalités des entreprises (CFE) par lettre recommandée avec demande d'avis de réception (article 3 du décret n° 96-650 du 19 juillet 1996) ; il est cependant le plus souvent déposé au CFE .

2° - Le CFE vérifie le caractère complet du dossier : selon les réponses au questionnaire établi par votre commission spéciale, « le CFE peut prendre plus de quelques heures pour examiner le dossier » ; « le constat que le dossier déposé est complet et transmissible aux partenaires peut durer plusieurs jours en fonction de l'encombrement du CFE ». En vertu de l'article 6 du décret du 19 juillet 1996 susvisé, le CFE doit pourtant transmettre le dossier complet au greffe le jour même. S'il manque des pièces au dossier, le déclarant dispose de quinze jour pour le compléter : au terme de ce délai le dossier est transmis en l'état.

Parallèlement à la vérification de la constitution du dossier, le CFE saisit l'INSEE aux fins de détermination d'un numéro SIREN ainsi que d'autres partenaires administratifs : les services fiscaux et sociaux. Selon les informations délivrées à votre commission spéciale, la procédure de délivrance électronique des numéros d'immatriculation par l'INSEE n'est pas encore généralisée. Il apparaît que seul un tiers des CFE de chambres de commerce et d'industrie ou de chambres de métiers sont actuellement équipés.

3° - Le greffier du tribunal de commerce vérifie que le dossier est complet mais également et surtout que les conditions légales d'immatriculation sont remplies (objet de l'activité, conformité des statuts avec les dispositions légales, capacité juridique de gérer des dirigeants, avec demande d'un extrait n° 2 du casier judiciaire). L'article 31 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce et des sociétés dispose que « le greffier procède à l'inscription dans le délai franc d'un jour ouvrable après réception de la demande », ce délai étant porté à cinq jours lorsque la complexité du dossier exige un examen particulier.

Notons que, s'agissant de l'immatriculation au répertoire des métiers, l'article 17 du décret du 2 avril 1998 relatif à la qualification artisanale et au répertoire des métiers prévoit que la « décision doit être notifiée par lettre recommandée avec avis de réception aux intéressés dans un délai maximum de deux mois courant à compter de la notification à ces derniers de la réception du dossier complet ». La modification de cette disposition est en cours d'instruction, en vue d'aligner ce délai sur celui de l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

Parallèlement, l'INSEE détermine le numéro d'identification et le transmet au greffier, mais aucun délai ne lui est légalement imparti pour ce faire . En pratique, la transmission de ce numéro prend le plus souvent vingt-quatre heures, mais le plan de charge des services de l'INSEE et, jusqu'à présent, les délais postaux, engendrent parfois des délais plus importants. C'est au demeurant la raison pour laquelle l'INSEE met actuellement au point un dispositif automatisé de délivrance et que les greffes se dotent également des équipements informatiques nécessaires.

4° - Le greffier du tribunal notifie l'immatriculation ainsi que le numéro SIREN au déclarant dans un extrait Kbis . Aucun délai légal ne s'impose à ce stade .

On constate donc qu'au gré des diverses étapes, les occasions de retard sont multiples. Cependant, selon les témoignages recueillis à l'occasion des auditions, il ne semble pas que les délais moyens soient excessifs, les performances variables s'expliquant bien souvent par la disparité de moyens et d'importance tant des CFE que des greffes. Selon les informations délivrées à votre commission spéciale, « dans le meilleur des cas, une immatriculation et la délivrance du Kbis pourraient être opérés en 24 heures. Toutefois, on doit considérer que, du fait des transferts physiques, deux jours constituent une évaluation raisonnable ».

Afin de permettre aux créateurs d'entreprise de procéder aux démarches nécessaires au démarrage de la société sans attendre la délivrance de l'extrait Kbis, le projet de loi propose ainsi la création d'un récépissé de création d'entreprise dont les mentions, qui seront définies par décret en Conseil d'Etat, seraient les suivantes :

- une date d'émission ;

- des éléments d'identification de l'entreprise et, notamment, pour les personnes morales, la désignation de leurs dirigeants ;

- le domicile de l'entreprise (siège ou établissement principal) ;

- un numéro SIREN provisoire, délivré par l'INSEE, ce numéro étant provisoire dans la mesure où il ne deviendra le numéro unique d'identification qu'après l'immatriculation effective.

Outre ces mentions, le décret devrait définir une durée de validité pour le RCE qui, selon les réponses faites à votre commission spéciale, pourrait être de un mois. On peut cependant s'interroger sur ce qu'il adviendrait en cas de caducité du RCE avant l'attribution de l'extrait Kbis et, partant, sur la nécessité de définir une durée de validité qui pourrait laisser croire à la possibilité de différer l'octroi du Kbis, alors même que seul celui-ci permettra réellement de développer l'activité de l'entreprise par l'identification qu'il procure pour nouer des liens de clientèle et fonder la confiance des relations commerciales. Aussi votre commission spéciale vous propose-t-elle un amendement supprimant une mention sans portée normative contenant la référence à cette durée de validité dans le dispositif proposé pour insérer un article L. 123-9-1 dans le code de commerce.

Elle propose par ailleurs quatre amendements ayant pour point commun de renforcer la sécurité juridique du dispositif.

Le premier tend à revenir au texte du projet de loi initial en réservant aux seuls greffes des tribunaux de commerce le pouvoir de délivrer le RCE dans l'attente de l'extrait Kbis .

Rappelons que l'extension de ce pouvoir aux CFE a été introduite par l'Assemblée nationale contre l'avis du Gouvernement, le secrétaire d'Etat évoquant l'hypothèse où l'activité de l'entreprise serait illicite et emporterait un refus d'immatriculation pour estimer que ce serait « dangereux à la fois pour le déclarant lui-même et pour les tiers », et par conséquent « logique que ce soit le service qui immatricule qui délivre le récépissé » ( ( * )1).

Il apparaît nécessaire à la sécurité juridique que la délivrance du RCE soit réservée aux seuls greffes , même si le CFE a pu être présenté comme un « portail » de la création d'entreprises. En effet, si le rôle naturel du CFE est de conseiller le créateur d'entreprise pour monter son dossier de demande d'immatriculation et pour transmettre les déclarations et pièces justificatives aux divers organismes et administrations partenaires auprès desquels le déclarant devait auparavant faire des démarches distinctes (INSEE, services fiscaux, URSSAF, organismes sociaux), celui du greffe est de vérifier la régularité juridique du dossier et de la demande d'immatriculation . Il dispose pour cela des compétences juridiques nécessaires.

En outre, rappelons que les greffiers, en tant qu' officiers publics , sont délégataires de la puissance publique et ont seuls la capacité de procéder à ce contrôle préventif. La directive 68/151 du 9 mars 1968 pose ainsi le principe d'un contrôle, de nature administrative ou judiciaire, en amont de la constitution des sociétés commerciales : cette tâche a en France été attribuée aux greffiers par le législateur, comme cela résulte aujourd'hui de l'article L. 210-7 du code de commerce.

Cette analyse est d'ailleurs confirmée par les réponses aux questions posées par votre commission spéciale, qui indiquent : « Pour les tiers, et à un moindre degré pour le déclarant, un RCE délivré par le greffe du tribunal de commerce est donc une quasi-assurance que l'entreprise sera immatriculée assez rapidement. Cette assurance est, de facto, plus faible si c'est le CFE qui le délivre, puisqu'il peut y avoir différence d'appréciation entre le CFE et le greffier sur le caractère complet du dossier. »

Toujours dans un souci de sécurité juridique, l'amendement suivant proposé par votre commission spéciale tend à alerter les tiers sur le fait que le RCE ne constitue pas un document d'immatriculation en exigeant qu'il comporte la mention « En attente d'immatriculation ». Le fait que le numéro INSEE y soit porté pourrait en effet induire certaines personnes en erreur.

Les deux derniers amendements tendent à éviter les conflits de compétence entre les greffes tenant le registre du commerce et des sociétés d'une part, et les chambres de métiers et les chambres d'agriculture d'autre part. Il s'agit de préciser que le RCE sera bien délivré par le greffe lorsque l'entreprise sera créée sous la forme d'une société et en dépit d'une inscription au répertoire des métiers s'il s'agit d'une entreprise artisanale ; en revanche, les chambres de métiers ou d'agriculture seront compétentes pour délivrer le RCE s'agissant d'entreprises individuelles.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 2 bis -
Procédure de mainlevée du nantissement de fonds de commerce

(Articles L. 143-20 du code de commerce)

Commentaire : le présent article prévoit que la radiation de l'inscription au registre du commerce et des sociétés du nantissement d'un fonds de commerce puisse se faire par acte sous seing privé.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

Introduit par l'Assemblée nationale par un amendement de M. Jean-Michel Fourgous et plusieurs de ses collègues sous-amendé par le Gouvernement, l'article 2 bis tend à assouplir la procédure de radiation de l'inscription du nantissement de fonds de commerce en autorisant la mainlevée par acte sous seing privé alors qu'actuellement un acte authentique est requis. Il s'agit de rétablir un parallélisme avec la procédure d'inscription , les contrats de nantissement pouvant être établis par acte sous seing privé.

II. La position de votre commission spéciale

L'article 29 de la loi du 17 mars 1909 relative à la vente et au nantissement des fonds de commerce, codifié à l'article L. 143-20 du code de commerce, prévoit que la radiation du nantissement de fonds de commerce est opérée soit sur présentation d'un jugement, soit par acte authentique.

Historiquement, cette exigence d'un acte authentique pour opérer la radiation s'explique par le fait que le législateur de 1909, pour mettre en place le nantissement des fonds de commerce, s'est largement inspiré des mécanismes de l'hypothèque immobilière prévue par le code civil, dont la radiation est opérée par acte authentique. Le législateur de l'époque n'a pas tiré les conséquences du choix tendant à autoriser la constitution du nantissement par simple acte sous seing privé enregistré, créant de ce fait une absence de parallélisme des formes.

La suppression proposée de l'exigence d'un acte authentique ne risque pas de créer une insécurité juridique pour les tiers, en particulier pour les créanciers inscrits sur le fonds de commerce postérieurement à la radiation, dans la mesure où ceux-ci sont protégés par les règles de la publicité au greffe du tribunal de commerce, qui déterminent la date d'opposabilité de la radiation. Dès lors que la radiation est effectuée par le greffier du tribunal, les tiers de bonne foi sont protégés des conséquences d'une remise en cause éventuelle de la validité de la radiation.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 3 -
Transmission des déclarations de création d'entreprises
par voie électronique

(Article 4 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994)

Commentaire : le présent article revient sur l'interdiction d'effectuer par voie électronique les déclarations relatives à la création de l'entreprise, à la modification de sa situation ou à la cessation de son activité.

I. Le texte initial

Lors de son examen par le Sénat le 25 janvier 1994 ( ( * )1), un amendement présenté par le Gouvernement a été introduit dans le projet de loi, devenu la loi du 11 février 1994, dite « loi Madelin », pour exclure la possibilité de procéder par voie électronique aux « déclarations relatives à la création de l'entreprise, à la modification de sa situation ou à la cessation de son activité », au motif de la nécessité d'assortir la déclaration de justificatifs qui, à l'époque , ne pouvaient être transmis par voie électronique.

Le développement de moyens sécurisés de transmission électronique rend désormais sans objet cette justification, ce qui permet au projet de loi de lever cette interdiction.

Les dispositifs qui seront autorisés à effectuer des déclarations d'entreprise par voie électronique doivent évidemment être fiables tant sur le plan des techniques informatiques et de communication que du point de vue juridique.

Sur le plan des techniques , on peut considérer que, moyennant le respect de certaines normes devenues usuelles, la transmission de données par Internet peut être assurée d'une manière sécurisée et de façon à garantir la confidentialité. Certains organismes privés ont d'ores et déjà mis au point des systèmes qui, sans permettre la déclaration en ligne, facilitent la constitution des dossiers.

Du point de vue juridique , les conditions ne sont pas définitivement arrêtées. Un groupe de travail a été constitué, auquel participent des administrations concernées du ministère de la justice et du ministère des finances, ainsi que des représentants des réseaux de CFE et des organismes destinataires des déclarations d'entreprise. Les travaux menés, quoique non encore achevés, ont néanmoins conclu sur deux points importants :

- la nécessité d'une signature électronique obtenue par un dispositif de signature sécurisée utilisant un certificat électronique qualifié, délivré par une autorité également qualifiée telle que définie par l'article 3 du décret n° 2001-272 du 30 mars 2001 pris pour l'application de l'article 1316-4 du code civil ;

- la possibilité de transmettre des pièces justificatives , numérisées par le déclarant ou fournies par un émetteur tiers directement sous cette forme, en leur appliquant la même signature sécurisée .

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale se félicite des progrès accomplis en matière d'encadrement juridique des procédures de transmission et souhaite que le groupe de travail susvisé aboutisse dans les meilleurs délais . Selon les informations dont elle dispose, ces nouvelles procédures devraient en effet concerner plus d'un million et demi de démarches chaque année . Ces facilités de déclaration à distance devraient être un argument supplémentaire militant en faveur d'une rationalisation de la carte des tribunaux de commerce et donc des greffes , d'une part, de la carte des chambres de commerce et d'industrie et donc des CFE , d'autre part.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 3 -
Efficience du contrôle sur les qualifications exigées
pour l'exercice de certaines activités artisanales

(Article 19 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996)

Commentaire : le présent article vise à améliorer l'efficacité des contrôles sur l'exercice de certaines activités artisanales dans le respect des exigences légales relatives à la qualification et à rappeler le rôle des chambres de métiers à cet égard.

En vertu de l'article 16 de la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996 relative au développement et à la promotion du commerce et de l'artisanat, certaines activités artisanales limitativement énumérées dont l'exercice comporte des risques pour la sécurité ou la santé des consommateurs font l'objet d'une exigence de qualification professionnelle . Ainsi, quels que soient le statut juridique et les caractéristiques de l'entreprise, ces activités ne peuvent être exercées « que par une personne qualifiée professionnellement ou sous le contrôle effectif et permanent de celle-ci ». Aux termes de l'article 24 de la même loi, l'exercice desdites activités en méconnaissance de ces exigences légales est constitutif d'un délit puni de 7.500 euros d'amende.

Les activités concernées sont : l'entretien et la réparation des véhicules et des machines ; la construction, l'entretien et la réparation des bâtiments ; la mise en place, l'entretien et la réparation des réseaux et des équipements utilisant les fluides, ainsi que des matériels et équipements destinés à l'alimentation en gaz, au chauffage des immeubles et aux installations électriques ; le ramonage ; les soins esthétiques à la personne autres que médicaux et paramédicaux ; la réalisation de prothèses dentaires ; la préparation ou la fabrication de produits frais de boulangerie, pâtisserie, boucherie, charcuterie et poissonnerie ainsi que la préparation ou la fabrication de glaces alimentaires artisanales ; l'activité de maréchal-ferrant.

Il apparaît que le contrôle du respect de ces dispositions , dont la mise en oeuvre appartient aux services déconcentrés de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), est diversement mis en oeuvre et que les exigences légales sont insuffisamment respectées . Des contrôles systématiques nécessitent, pour être efficaces, des moyens importants qui ne sont pas toujours disponibles. Aussi est-il apparu à votre commission spéciale que les chambres de métiers pourraient exercer une mission d'alerte de l'autorité publique lorsqu'elles estiment que l'activité considérée est exercée sans la qualification requise . Tel est l'objet de son amendement tendant à insérer un article additionnel après l'article 3.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 4 -
Domiciliation des entreprises au domicile du chef d'entreprise

(Articles L. 123-10 à L. 123-11-1 du code de commerce)

Commentaire : le présent article autorise les personnes physiques à domicilier leur entreprise dans leur local d'habitation et à y exercer leur activité et aménage les conditions de domiciliation des personnes morales.

I. Le texte initial

Le régime de domiciliation de l'entreprise au domicile du chef d'entreprise est actuellement défini par les articles L. 123-10 et L. 123-11 du code de commerce, dont l'article 4 du projet de loi propose la refonte pour assouplir ces conditions de domiciliation en distinguant la situation de l'entreprise personne physique de l'entreprise personne morale, et lever certaines ambiguïtés juridiques.

Actuellement, l'article L. 123-10 prévoit que la demande d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés doit s'accompagner de la justification de la jouissance de locaux où est installé le « siège » de l'entreprise, et que la domiciliation commune à plusieurs entreprises est autorisée. En vertu de l'article L. 123-11, il est possible au créateur d'entreprise, nonobstant toute disposition légale ou stipulation contraire, d'installer le siège dans son local d'habitation ou dans celui du représentant légal de la société si l'entreprise est créée sous forme de société, pour une durée ne devant pas excéder deux ans ni le terme légal, contractuel ou judiciaire, de l'occupation des locaux.

En premier lieu, la domiciliation dans le local d'habitation constituant, aux termes de ce dispositif, une dérogation à des stipulations contractuelles ou à des dispositions législatives contraires, la jurisprudence l'a interprété de façon restrictive ( ( * )1) et n'y a autorisé que la tenue des livres et la réception du courrier ; elle a formellement jugé qu' aucune activité ne pouvait y être exercée , aussi bien pour les personnes physiques que pour les personnes morales. Par ailleurs, ce dispositif, qui mentionne « l'entreprise », distingue mal entre personne physique et personne morale : en effet, la notion de « siège » n'est pas adaptée pour les personnes physiques et cela a pu avoir, au gré de certaines jurisprudences, l'inconvénient de changer l'affectation des locaux, le local d'habitation se transformant en local commercial : une telle situation avait pour conséquence de permettre au bailleur de faire résilier le bail ou à la copropriété de faire cesser la situation et pouvait mettre la personne physique en contravention avec les dispositions du code de la construction et de l'habitation.

Le projet de loi s'attache à résoudre ces difficultés en distinguant la situation des personnes physiques de celle des personnes morales et il assouplit les conditions de domiciliation de façon, notamment, à aligner la situation des commerçants personnes physiques sur celle des artisans qui, en vertu de l'article L. 631-7-3 du code de la construction et de l'habitation, peuvent établir leur activité dans leur local d'habitation pour une durée indéterminée.

Désormais, la situation des commerçants personnes physiques au regard des possibilités de domiciliation au domicile de l'entrepreneur sera la suivante : si l'entreprise dispose d'un établissement commercial tel qu'une boutique, l'adresse commerciale sera celle de cet établissement. Il ne sera possible dans ce cas de choisir comme adresse celle du domicile de l'entrepreneur qu'à la condition qu'aucune disposition légale ou stipulation ne s'y oppose. Rappelons que la notion d'établissement est définie à l'article 9 du décret n° 84-406 du 30 mai 1984 relatif au registre du commerce et des sociétés, et fait référence à la notion de rapports juridiques noués avec les tiers : ce ne saurait donc être un simple local à usage de remisage d'outillage ou de marchandises ; l'entrepreneur ne disposant que d'un local de cette nature, comme ce peut être le cas pour des professions exerçant essentiellement leur activité chez le client, sera réputé ne pas avoir d'établissement et pourra déclarer comme adresse commerciale l'adresse de son domicile personnel sans limitation de durée .

Concernant la domiciliation des entreprises relevant du registre du commerce créées sous forme de société, et donc de personne morale, le régime applicable résulte désormais des articles L. 123-11 et L. 123-11-1 du code de commerce. Plusieurs situations sont distinguées :

- soit le siège est installé au domicile du représentant légal et aucune disposition ni stipulation ne l'interdit : le siège peut alors rester à cette adresse sans limitation de durée ;

- soit il existe des dispositions ou stipulations contraires, interdisant la transformation en local commercial du domicile du représentant légal : alors le siège peut tout de même y être installé, mais pour une durée limitée à cinq années contre deux actuellement .

Par ailleurs, le projet de loi, comme c'est déjà le cas aujourd'hui, prévoit la possibilité de domicilier plusieurs personnes morales à une même adresse, ce qui leur permet d'y recevoir leur courrier et d'y tenir leurs livres.

Pour les commerçants, personnes physiques ou personnes morales, le nouveau dispositif prévoit enfin la possibilité d' exercer l'activité au domicile de l'entrepreneur ou du représentant légal sans limitation de durée, à la condition qu'aucune disposition ou stipulation ne s'y oppose.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

A l'initiative de sa rapporteure et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a, sur cet article, adopté plusieurs amendements de précision tendant à harmoniser le libellé du dispositif conçu pour les personnes physiques avec celui applicable aux personnes morales.

Elle a ainsi été précisé que lorsque la personne physique ne disposant pas d'un « établissement fixe » utilise la faculté de déclarer comme adresse de l'entreprise celle de son domicile, la déclaration de cette adresse n'entraîne ni changement d'affectation des locaux ni application du statut des baux commerciaux. Par ailleurs, comme cela était prévu dans le projet de loi initial pour les personnes physiques, l'Assemblée nationale a ouvert la possibilité aux personnes morales d'exercer l'activité sociale au domicile du représentant légal où est fixé son siège, à la condition qu'aucune disposition législative ou stipulation contractuelle ne s'y oppose.

III. La position de votre commission spéciale

A cet article, votre commission spéciale vous soumet à son tour une modification ayant pour objet de lever une ambiguïté : le texte proposé pour l'article L. 123-10 du code de commerce définit comme condition pour un créateur personne physique de domicilier l'entreprise à son domicile personnel sans limitation de durée et nonobstant toute disposition ou stipulation contraire, le fait de ne pas disposer d'un « établissement fixe » . L'adjectif « fixe » pourrait laisser croire que cette faculté n'est ouverte qu'aux activités itinérantes , ce qui ne correspond pas à la cible visée . Lors de l'examen de cet article à l'Assemblée nationale, le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation a d'ailleurs bien précisé que la notion d'établissement fixe désignait le local de travail où l'entrepreneur « noue des relations commerciales ». Aussi, afin d'éviter de donner une nouvelle occasion à la jurisprudence de restreindre le champ du dispositif, il semble préférable à votre commission spéciale de supprimer l'adjectif « fixe ».

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Articles 5 -
Extension aux sociétés de la possibilité d'exercer l'activité
au domicile du représentant légal dans certaines zones

(Articles L. 631-7-3 du code de la construction et de l'habitation)

Commentaire : le présent article permet au représentant légal d'une personne morale d'exercer son activité professionnelle, y compris commerciale, dans une partie du local d'habitation de l'entrepreneur.

I. Le texte initial

Le projet de loi modifie l'article L. 631-7-3 du code de la construction et de l'habitation pour étendre aux représentants légaux des personnes morales une facilité accordée à l'entrepreneur individuel et qui consiste, par dérogation aux dispositions de l'article L. 621-7 du même code, à autoriser l'exercice d'une activité professionnelle, y compris commerciale, dans une partie d'un local d'habitation, « dès lors que l'activité considérée n'est exercée que par le ou les occupants ayant leur résidence principale dans ce local et ne conduit à y recevoir ni clientèle ni marchandises ».

Rappelons que l'article L. 631-7 susvisé interdit le changement d'affectation des locaux d'habitation ou des locaux à usage professionnel situés à Paris, dans les communes situées dans un rayon de cinquante kilomètres des anciennes fortifications et dans celles de plus de 10.000 habitants. Ces dispositions peuvent également être rendues applicables à d'autres communes par décision du ministre chargé du logement, après avis du maire et du préfet ; elles ne sont en revanche pas applicables dans les zones franches urbaines.

L'article L. 631-7-3 instaure ainsi au profit de l'entrepreneur individuel une dérogation permanente subordonnée à la réalisation d'une triple condition : le local correspond à la résidence principale de l'entrepreneur ; l'activité est exclusivement exercée par le ou les occupants du local ; l'activité pratiquée ne doit conduire à recevoir dans ce local ni clientèle ni marchandises.

Le projet de loi initial prévoyait de faire bénéficier les entrepreneurs créant leur entreprise sous forme de société de cette dérogation, qu'il étendait aux représentants légaux des personnes morales. Toutefois, ce bénéfice était limité dans le temps aux cinq premières années, c'est-à-dire la durée prévue pour l'installation du siège de la société au domicile de son représentant légal dans l'hypothèse où il existe des dispositions ou des stipulations contraires.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

A l'initiative de sa rapporteure et avec l'avis favorable du Gouvernement, l'Assemblée nationale a voulu placer effectivement sur un pied d'égalité les entrepreneurs individuels et les représentants légaux de société au regard de la possibilité d'exercer leur activité professionnelle à leur domicile, sous réserve de la triple condition sus-énoncée. Elle a jugé qu'il n'y avait pas lieu, pour les seconds, de limiter cette possibilité aux cinq premières années consécutives à la création de l'entreprise.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale souscrit pleinement à la modification apportée par l'Assemblée nationale à ce dispositif, qui évite d'appliquer des régimes différents en fonction du statut juridique de l'entreprise. Le choix de la forme juridique de l'entreprise ne doit pas en effet être dicté par des considérations tenant simplement à la commodité d'exercice de l'activité.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 6 -
Déclaration d'insaisissabilité de la résidence principale
de l'entrepreneur individuel

(Articles L. 526-1 à L. 526-4 nouveaux du code de commerce)

Commentaire : le présent article autorise l'entrepreneur individuel à assurer l'insaisissabilité de sa résidence principale par une déclaration publiée au bureau des hypothèques.

I. Le texte initial

Cet article vient compléter le titre II du livre V du code de commerce consacré aux effets de commerce et aux garanties par un nouveau chapitre relatif à la protection de l'entrepreneur individuel comprenant trois nouveaux articles. Comme le fait valoir l'exposé des motifs, ces dispositions ont pour objet de « réduire la prise de risque de l'entrepreneur individuel pour lequel aucune distinction n'est établie entre le patrimoine professionnel et le patrimoine privé », en lui permettant de « déclarer insaisissables par ses créanciers professionnels les droits qu'il détient sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale ».

Selon les informations délivrées à votre commission spéciale en réponse à son questionnaire, sur la base des données pour l'année 2000, l'effectif moyen des personnes physiques immatriculées au registre du commerce et des sociétés était de 1.026.016 personnes potentiellement en mesure de revendiquer le droit à l'insaisissabilité de leur habitation principale, à supposer toutefois qu'elles en soient propriétaire. A ce nombre, il convient d'ajouter 507.305 artisans à titre individuel inscrits au répertoire des métiers, soit une population potentielle totale de 1.533.321 personnes.

Le dispositif proposé déroge à l'article 2093 du code civil en vertu duquel « les biens du débiteur sont le gage commun de ses créanciers ». En effet, la déclaration d'insaisissabilité soustrait les droits sur l'immeuble constituant la résidence principale du patrimoine constituant le gage des créanciers. Cette possibilité est offerte à « toute personne physique immatriculée à un registre de publicité légale à caractère professionnel ou exerçant une activité professionnelle agricole ou indépendante », c'est-à-dire les entrepreneurs en nom propre commerçants et artisans, les agents commerciaux, les professionnels libéraux et les agriculteurs. Il s'agit de permettre à ces personnes, qui ne bénéficient pas de la protection conférée par la forme sociétaire, de limiter leur responsabilité financière liée à l'exercice de leur activité professionnelle.

Précisons que la déclaration d'insaisissabilité n'est opposable qu'aux créances professionnelles , c'est-à-dire celles nées à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant, postérieurement à la publication de la déclaration. Par ailleurs, sont rendus insaisissables les droits détenus sur l'immeuble où est fixée la résidence principale du déclarant : il s'agit de toute forme de droits réels immobiliers (pleine propriété ou démembrements du droit de propriété tels que la jouissance ou la nue-propriété) que l'entrepreneur peut avoir sur l'immeuble où est fixée sa résidence principale, qu'il s'agisse d'un immeuble propre, indivis ou commun.

Il est prévu que la déclaration soit reçue par un notaire à peine de nullité et qu'elle soit publiée au bureau des hypothèques. C'est d'ailleurs cette publication qui détermine la date à partir de laquelle le bien est soustrait au gage des créanciers professionnels . Lorsque l'immeuble est à usage mixte professionnel et d'habitation, la partie affectée à la résidence principale doit être désignée dans un état descriptif de division joint à la déclaration. Ainsi, en cas de poursuite en paiement sur l'immeuble en son entier, seule la partie professionnelle matériellement délimitée par l'état descriptif de division pourra être saisie par les créanciers de l'entrepreneur. Enfin, la déclaration comporte la description détaillée de l'immeuble et l'indication de son caractère « propre, commun ou indivis » : ces termes précisent que la déclaration d'insaisissabilité peut porter sur un immeuble en indivision (dans ce cas, seuls les droits indivis du déclarant sont rendus insaisissables), sur un immeuble commun en application du régime matrimonial de l'entrepreneur, ou sur un immeuble propre sur lequel l'entrepreneur a un droit de propriété exclusif (dans ces deux derniers cas, l'insaisissabilité porte sur l'ensemble de l'immeuble).

Outre la publication au bureau des hypothèques, qui paraît incontournable s'agissant de droits immobiliers, d' autres mesures de publicité sont prévues pour assurer l'information, et donc la protection, des tiers : mention de la déclaration est portée dans le registre de publicité légale à caractère professionnel lorsque la personne est immatriculée ; en l'absence d'exigence d'immatriculation dans un registre de publicité légale, un extrait de la déclaration doit être publié dans un journal d'annonces légales du département où est exercée l'activité professionnelle. La sanction du défaut de publicité est l'impossibilité pour le déclarant de se prévaloir de l'insaisissabilité du bien.

Le dispositif précise qu'en cas de remploi ( i.e. l'opération d'acquisition d'un bien au moyen de capitaux provenant de la vente d'un autre bien) de l'immeuble objet de la déclaration initiale, il convient d'établir une nouvelle déclaration d'insaisissabilité. Il ajoute que la seule constatation de la vente et de l'utilisation du prix pour l'acquisition d'une nouvelle résidence principale ne suffit pas à rendre automatiquement insaisissable cette dernière acquisition, pour laquelle une nouvelle déclaration devra être établie.

Il est par ailleurs précisé que :

- la déclaration peut, à tout moment, faire l'objet d'une renonciation qui doit, comme la déclaration elle-même, résulter d'un acte notarié et faire l'objet des mêmes mesures de publicité. Cette renonciation n'aura toutefois pas pour effet de rouvrir une possibilité de poursuite du recouvrement des créances nées entre la publication de la déclaration d'insaisissabilité et la renonciation à celle-ci ;

- les effets de la déclaration se poursuivent en cas de dissolution du régime matrimonial au profit de l'entrepreneur rendu attributaire du bien. Notons que, dans l'hypothèse où l'immeuble serait attribué au conjoint qui n'exerce pas l'activité professionnelle, les créanciers de celui-ci, dont les créances ne sont pas nées dans le cadre de l'activité, peuvent poursuivre la saisie du bien. En revanche, le recouvrement des créances nées à l'occasion de l'activité professionnelle du déclarant postérieurement à la publication de la déclaration d'insaisissabilité à la conservation des hypothèques ne pourra pas être poursuivi sur l'immeuble attribué au conjoint dans la mesure où ce dernier n'a pas à répondre des dettes contractées par l'entrepreneur ;

- le décès du déclarant emporte révocation de la déclaration, cette révocation valant pour l'avenir. Au moment du décès de l'entrepreneur, l'insaisissabilité de l'habitation se poursuit pour toutes les dettes professionnelles nées avant le décès, y compris celles qui ne sont exigibles que postérieurement à cette date. Les héritiers continuent donc à être protégés après le décès à l'occasion de l'activité professionnelle poursuivie par l'un des héritiers, celui-ci devant procéder lui-même à une déclaration pour rendre insaisissable l'immeuble où il réside. S'agissant des héritiers qui ne poursuivent pas l'activité, le maintien de l'insaisissabilité n'a pas lieu d'être puisqu'ils n'ont pas à répondre des dettes nées à l'occasion de la poursuite de l'activité par un tiers.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

Sur cet article, l'Assemblée nationale a introduit plusieurs modifications à l'initiative de sa rapporteure.

Elle a tout d'abord précisé le dispositif pour prendre en considération l'organisation spécifique de la publicité foncière en Alsace-Moselle. En effets, dans les trois départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, il n'existe pas de conservation des hypothèques, rattachée au ministère des finances, mais un livre foncier, rattaché au ministère de la justice. Dans ces départements, qui connaissent par ailleurs le régime de la faillite civile, la déclaration d'insaisissabilité devra donc être publiée au livre foncier.

L'Assemblée nationale a en outre prévu que, pour l'établissement de la déclaration et l'accomplissement des formalités corrélatives, les émoluments versés au notaire seront fixes dans le cadre d'un plafond déterminé par décret. La rapporteure a expliqué qu'il convenait d'éviter que le montant des émoluments notariés soit dissuasif, et le ministre a indiqué qu'ils pourraient avoisiner les cent euros ( ( * )1).

Enfin, l'Assemblée nationale a complété le présent article pour ajouter un article L. 526-4 dans le nouveau chapitre consacré à la protection de l'entrepreneur individuel : cet article exige que lors de la demande d'immatriculation à un registre de publicité légale à caractère professionnel, l'entrepreneur individuel marié sous un régime de communauté légale ou conventionnelle justifie que son conjoint a été informé des conséquences sur les biens communs des dettes contractées pour les besoins de l'activité. Précisons que l'amendement initial présenté par la commission, avant d'être sous-amendé par le Gouvernement, exigeait le consentement du conjoint à la création de l'entreprise, ce qui était contraire au principe constitutionnel de la liberté du commerce et de l'industrie. Le dispositif finalement adopté répond ainsi à un impératif d'information du conjoint et devrait conduire les époux à s'interroger en amont sur le choix du régime matrimonial le mieux adapté à leurs besoins.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale se félicite que, tout en apportant une protection concrète à l'entrepreneur individuel, le projet de loi ait renoncé à consacrer l'existence d'un « patrimoine professionnel » et préféré un dispositif apparemment moins ambitieux, mais plus réaliste, qui est celui de la protection de la résidence principale de l'entrepreneur individuel.

Votre commission des lois avait eu l'occasion, au printemps 2000, dans son rapport pour avis sur la proposition de loi n° 254 présentée par MM. Raffarin, Grignon et plusieurs de leurs collègues ( ( * )2), d'énoncer les difficultés auxquelles se heurtaient la création d'un patrimoine professionnel d'affectation et d'en dénoncer les inconvénients du point de vue des risques de tarissement du crédit et de la sécurité juridique pour les tiers.

Selon une approche pragmatique, le projet de loi, s'inspirant des propositions faites par le Conseil économique et social dans un rapport de 1993 ainsi que dans le rapport Hurel remis au Premier ministre en juillet 2002, a préféré retenir un mécanisme protecteur de la seule résidence principale de l'entrepreneur. Le dispositif proposé est une déclinaison du régime applicable au « bien de famille » issu de la loi du 12 juillet 1909, le bien de famille étant un immeuble que son propriétaire soumet à un régime d'insaisissabilité pour en assurer la conservation dans l'intérêt de la famille. Il apporte une dérogation limitée au principe de l'unité du patrimoine selon lequel le débiteur répond de ses engagements sur la totalité de ses biens meubles et immeubles présents et à venir.

A cet article, votre commission spéciale vous soumet trois amendements , dont deux de précision, dans la mesure où il convient dans un texte de loi de viser les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle et non l'Alsace et la Moselle, et un pour combler une faille du dispositif proposé. En effet, en l'état, en cas de remploi des sommes provenant de l'aliénation de l'immeuble protégé, le recouvrement des créances nées postérieurement à la première déclaration et antérieurement à la deuxième déclaration d'insaisissabilité pourrait être poursuivi sur l'immeuble acquis en remploi , ce qui affaiblit sérieusement le dispositif de protection, sauf à condamner l'entrepreneur à ne pas changer de résidence principale. Votre commission spéciale vous propose donc de compléter le dispositif pour faire en sorte que les effets de la première déclaration ne soient pas annulés par un simple changement de résidence principale .

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 6 bis -
Extension du champ de compétence des groupements de prévention agréés

(Articles L. 611-1 du code de commerce)

Commentaire : le présent article permet aux entreprises individuelles d'adhérer aux groupements de prévention agréés institués par la loi de 1984 sur la prévention et au règlement amiable des difficultés des difficultés des entreprises.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'article 6 bis résulte d'un amendement présenté conjointement par la rapporteure et M. Jean-Michel Fourgous, sous-amendé par le Gouvernement. Il modifie l'article L. 611-1 du code de commerce pour étendre le champ de compétence des groupements de prévention agréés en autorisant l'adhésion des entreprises individuelles et en prévoyant que les adhérents leur transmettent, aux fins d'analyse, non seulement des informations comptables et financières, mais également des informations de nature économique sur la situation de l'entreprise.

Actuellement, l'article L. 611-1 du code de commerce, qui résulte de l'article 33 de la loi du 1 er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises, ne prévoit la possibilité d'adhérer aux groupements de prévention agréés que pour les entreprises créées sous forme de personnes morales (sociétés, associations, groupements d'intérêt économique). Un groupement de prévention agréé a pour mission « de fournir à ses adhérents, de façon confidentielle, une analyse des informations comptables et financières que ceux-ci s'engagent à leur transmettre régulièrement » et d'informer le chef d'entreprise en lui proposant, le cas échéant, l'intervention d'un expert, lorsque « des indices de difficultés » sont constatés.

Selon les informations délivrées à votre commission spéciale, il existe aujourd'hui dix groupements de prévention agréés qui ont établi quelque 1.500 diagnostics. Force est donc de constater leur faible succès, qui s'explique d'une part par l'appui réduit qui est offert par les pouvoirs publics à leur développement en dépit des dispositions légales et, d'autre part, par la mauvaise connaissance de ces groupements sur le terrain et la prévention naturelle des chefs d'entreprise contre toute immixtion dans leur gestion.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale souscrit à l'élargissement du champ d'action des groupements de prévention agréés, les modifications proposées pouvant être de nature à soutenir leur développement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 6 ter (nouveau) -
Renforcement de la protection des cautions

(Article L. 331-2 et L. 341-2 à L. 341-3 nouveaux
du code de la consommation)

Commentaire : le présent article renforce la protection des personnes physiques qui se portent caution envers un créancier professionnel en améliorant leur information et en élargissant les compétences des commissions de surendettement.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

Introduit par l'Assemblée nationale sur proposition de sa rapporteure avec un avis favorable du Gouvernement, le présent article tend à assurer une meilleure protection des cautions par le renforcement de leur information sur les engagements auxquels ils souscrivent, ainsi que par un élargissement du champ des compétences des commissions de surendettement afin qu'elles prennent en compte, dans l'évaluation de la situation de la personne surendettée, le fait de s'être portée caution d'un entrepreneur individuel ou d'une société.

Le I de cet article modifie l'article L. 331-2 du code de la consommation pour intégrer, dans l'évaluation à laquelle procède la commission de surendettement, les dettes résultant pour la personne surendettée de l'engagement de la caution ou du paiement solidaire qu'elle a accordé à un entrepreneur individuel ou à une société.

En vertu du premier alinéa de l'article L. 331-2 susvisé, la situation de surendettement est en effet actuellement caractérisée par « l'impossibilité manifeste pour le débiteur de bonne foi de faire face à l'ensemble de ses dettes non professionnelles exigibles et à échoir ». Ainsi, la jurisprudence a eu l'occasion de préciser les cas dans lesquels une personne physique qui s'est portée caution pour garantir le paiement de certaines dettes professionnelles est éligible ou non à la procédure de traitement des situations de surendettement. Selon cette jurisprudence, il apparaît que le caractère professionnel de la dette ne se déduit pas du fait qu'elle a été contractée pour les besoins de l'activité professionnelle du débiteur principal, mais selon l'intérêt personnel que retire de son engagement le requérant devant la commission de surendettement. Lorsque la caution est donnée par le conjoint du chef d'entreprise, le caractère non professionnel de sa caution n'est pas automatique dans la mesure où il a pu bénéficier, à travers le régime matrimonial, des gains engendrés par l'activité de l'entrepreneur. Désormais, la modification proposée permettra au conjoint qui s'est porté caution de bénéficier de façon certaine de la procédure de surendettement.

Par ailleurs, le II de l'article 6 ter complète le titre IV du livre III du code de la consommation, consacré au cautionnement et actuellement constitué d'un article unique L. 341-1 issu de la loi n° 98-657 du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions, par deux nouveaux articles tendant à renforcer l'information des personnes physiques qui se portent caution envers un créancier professionnel.

Actuellement, l'article L. 341-1 oblige le créancier professionnel, à peine de déchéance des pénalités ou intérêts de retard, à informer toute personne physique qui s'est portée caution de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l'exigibilité de ce paiement.

Le projet de loi prévoit deux nouvelles obligations d'information de la caution personne physique qui s'engage envers un créancier professionnel :

- l'exigence de faire précéder l'engagement d'une mention manuscrite indiquant la limite financière et la durée du cautionnement ;

- l'exigence que la renonciation au bénéfice de discussion défini à l'article 2021 du code civil fasse également l'objet d'une mention manuscrite en cas de cautionnement solidaire .

Le non respect de ces exigences serait sanctionné par la nullité de l'engagement.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale se félicite des mesures d'information introduites par l'Assemblée nationale, qui doivent conduire la caution à prendre clairement connaissance de la portée de l'engagement auquel elle souscrit. Elle vous propose, par un amendement, de compléter le dispositif en étendant à toute caution, personne physique, qui s'engage envers un créancier professionnel certains mécanismes protecteurs qui existent aujourd'hui dans des cas particuliers. Ces mécanismes sont les suivants :

- l'exigence que l'engagement de la caution personne physique soit proportionné à ses biens et ses revenus , à peine de déchéance du cautionnement. Cette mesure existe déjà pour les cautions des opérations de crédit à la consommation et de crédit immobilier, en application de l'article L. 313-10 du code de la consommation ;

- l'exigence, lorsque la caution personne physique s'engage solidairement et renonce au bénéfice de discussion, que l'engagement soit limité à un montant global, expressément et contractuellement déterminé . Ce mécanisme existe aujourd'hui, aux termes de l'article 47 de la loi n° 96-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, au profit de la caution personne physique garante d'une dette professionnelle d'un entrepreneur individuel ;

- l'exigence de la délivrance, par le créancier professionnel, d'une information annuelle sur le montant de la dette, le terme de l'engagement et sur la faculté de révocation à tout moment lorsque le cautionnement est à durée indéterminé e. Cette mesure résulte de l'article L. 313-22 du code monétaire et financier pour le cautionnement d'une entreprise, et de l'article 47 de la loi n° 96-126 du 11 février 1994 susvisée pour le cautionnement par une personne physique d'une dette professionnelle contractée par un entrepreneur individuel.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 6 quater (nouveau) -
Création d'un service d'aide à l'accomplissement des formalités sociales au profit des entreprises utilisatrices du chèque-emploi entreprises

(Article L. 133-5 du code de la sécurité sociale)

Commentaire : introduit par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission spéciale, le Gouvernement ayant demandé le retrait de l'amendement, le présent article vise à créer un service d'aide à l'accomplissement des formalités sociales au profit des petites entreprises utilisatrices du chèque-emploi entreprises, institué à l'article 6 quinquies du présent projet de loi, pour l'embauche et l'emploi de certains de leurs salariés.

I. Le dispositif proposé

L'article 6 quinquies du présent projet de loi institue un chèque-emploi entreprises afin de simplifier les formalités sociales à la charge des entreprises (voir infra le commentaire de cet article).

Or, ce type de dispositif nécessite obligatoirement la désignation d'une structure unique habilitée à traiter ces chèques-emploi et à recouvrer les cotisations et contributions sociales exigibles, sous peine de contraindre l'utilisateur à adresser autant de déclarations sociales (le « volet social » du chéquier) qu'il existe d'organismes compétents (sécurité sociale, assurance-chômage, retraites complémentaires, etc.).

A. Une structure de simplification des formalités

Tel est l'objet du présent article 6 quater , qui crée un service d'aide au profit des entreprises pouvant utiliser le chèque-emploi entreprises dans les conditions définies à l'article 6 quinquies ( ( * )1). Ce service vise, d'une part, à simplifier, pour l'employeur recourant au chèque-emploi, les formalités prévues au code du travail et au code de la sécurité sociale et, d'autre part, à lui fournir une assistance appropriée en ce domaine. Selon la rédaction de l'article, il devrait notamment permettre :

- le calcul de l'ensemble des cotisations et contributions sociales dues par l'entreprise ;

- l'établissement, aux échéances légales, des déclarations sociales périodiques (déclaration unifiée de cotisations sociales - DUCS) et annuelles (déclaration annuelle de données sociales - DADS) correspondantes ;

- l'information sur les obligations sociales de l'employeur et l'évaluation du montant de ses cotisations et contributions.

En contrepartie, l'employeur adhérant à ce service accepte le paiement direct, par virement ou prélèvement automatique sur le compte bancaire de son choix, des cotisations et contributions dues. Ce paiement s'effectue sous la forme d'un versement unique, réparti ensuite entre les organismes destinataires.

Les modalités d'organisation et de fonctionnement de ce nouveau service d'aide aux entreprises seront déterminées par accord entre l'ensemble des organismes sociaux concernés (dont la liste précise sera fixée par arrêté). A défaut d'un tel accord au 31 décembre 2003, ces modalités seront fixées par arrêté interministériel.

B. Un service d'aide aux entreprises qui existe déjà sous une autre forme : « Net-entreprises »

La présentation du nouveau dispositif ainsi défini serait incomplète si elle omettait de préciser que les entrepreneurs, qu'ils exercent de manière indépendante ou en société, disposent déjà d'un service d'aide à l'accomplissement de l'ensemble de leurs formalités sociales et à l'acquittement des paiements qui s'y rattachent : « Net-entreprises » . Les objectifs et les principes de ce dispositif « virtuel », accessible par Internet, sont similaires à ceux prévus au présent article.

Ayant pour base législative le paragraphe I de l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, le groupement d'intérêt public « Modernisation des relations sociales » (GIP-MDS) a pour mission de «rendre transparente» pour les entreprises, grâce au recours aux nouvelles technologies, la complexité de notre réglementation sociale. Il gère et anime à cet égard un portail Internet : « Net-entreprises » .

A partir d'un ordinateur personnel et par le biais d'Internet, les employeurs s'adressent ainsi à ce guichet unique « virtuel » qui leur permet notamment, de manière gratuite :

- de procéder aux formalités et déclarations sociales obligatoires (les informations étant directement télétransmises à leurs différents destinataires par le biais de procédures sécurisées) ;

- de réaliser des simulations de calcul de cotisations ;

- d'effectuer directement, par télérèglement, le paiement des cotisations et contributions sociales dues. Dans ce cas, les flux financiers correspondants ne sont pas centralisés par un tiers avant d'être répartis entre les différents régimes destinataires, mais directement envoyés à ceux-ci, toujours à l'aide de procédures automatisées et sécurisées ;

- de bénéficier des conseils d'un centre d'accueil.

Compte tenu du dispositif prévu au présent article, il existerait donc désormais deux guichets « uniques » destinés à aider les entreprises à accomplir leurs formalités sociales et à simplifier le paiement des cotisations correspondantes, à savoir :

- d'une part, « Net-entreprises » , guichet unique « Internet» visé au paragraphe I de l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, qui resterait à la disposition des entreprises, y compris celles d'entre elles qui, bien qu'éligibles au chèque-emploi entreprises, souhaiteraient néanmoins conserver ce mode de gestion ;

- et, d'autre part, le nouveau service d'aide institué par le présent article et qui, visé au paragraphe II de l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, serait réservé aux entreprises éligibles au chèque-emploi entreprises créé par l'article 6 quinquies du présent projet de loi.

Régimes et partenaires sociaux associés au GIP-MDS

l'agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS), représentant les URSSAF ;

la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (CNAVTS) ;

l'association générale des institutions de retraite des cadres (AGIRC) ;

l'association pour le régime de retraite complémentaire des salariés (ARRCO) ;

l'union nationale interprofessionnelle pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (UNEDIC) représentant les ASSEDIC et le GARP en région parisienne ;

la caisse nationale d'assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ;

la caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes (CANAM) ;

la caisse centrale de la mutualité sociale agricole (CCMSA) représentant les caisses de mutualité sociale agricole (MSA) ;

l'organisation autonome nationale de l'assurance vieillesse de l'industrie et du commerce (ORGANIC) ;

la caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale (CANCAVA) ;

la caisse nationale de surcompensation du bâtiment et des travaux publics (CNSBTP) ;

la fédération française des sociétés d'assurances FFSA (FFSA-SINTIA) ;

le centre technique des institutions de prévoyance (CTIP) ;

la fédération nationale de la mutualité française (FNMF) ;

la fédération des mutuelles de France (FMF) ;

le mouvement des entreprises de France (MEDEF) ;

la confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) ;

l'union professionnelle artisanale (UPA) ;

la fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA).

Il conviendrait donc de veiller, lors de la mise en place concrète de ce dernier dispositif, à ce que la coexistence de ces deux guichets « uniques » ne se traduisent pas par une complexité qui pourrait s'avérer, à l'usage, contraire à l'objectif recherché, à savoir la simplification des formalités sociales mises à la charge des entreprises.

C. Une interrogation sur l'avenir de la solution « Impact emploi » , déjà utilisée par les petites entreprises et les associations

Le présent article insère le nouveau dispositif prévu au paragraphe II de l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale. Or, ce paragraphe sert actuellement de « support » juridique à un service d'aide à l'accomplissement des formalités sociales au profit des très petites entreprises ( « Impact emploi » ) et des associations ( « Impact emploi associations » ).

En effet, conscients du fait que les très petites entreprises ou associations ne disposent pas nécessairement des moyens matériels ou humains leur permettant d'accéder directement au service Internet « Net-entreprises » , les pouvoirs publics ont récemment développé, à leur profit, une solution technique alternative visant à les faire bénéficier des avantages de ce guichet unique virtuel en passant par l'intermédiaire d'un tiers dit « de confiance », équipé des outils informatiques et des compétences nécessaires (expert-comptable, maison des associations, URSSAF locales...).

A l'occasion de l'examen, en première lecture, de la proposition de loi relative à la création d'un chèque-emploi associatif, le Sénat a d'ailleurs choisi ce nouvel outil (« Impact emploi association ») pour assurer le traitement du « volet social » rempli par l'association utilisatrice. Or, l'introduction, à ce même paragraphe II de l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, du nouveau service prévu par le présent article, « écraserait » la disposition servant de fondement juridique au service « Impact emploi », et serait ainsi susceptible de compromettre, en droit, son existence même.

Au-delà de cette difficulté technique, qu'une modification formelle de l'article 6 quater permettrait de lever, c'est l'articulation même entre le dispositif « Impact emploi » et le nouveau service d'aide envisagé qui suscite l'interrogation : dès lors qu'ils s'adressent à des publics en partie identiques, et qu'ils proposent des prestations similaires, est-ce véritablement concourir à l'oeuvre de simplification que de juxtaposer ces deux mécanismes ?

II. La position de votre commission spéciale

A cet égard, si votre commission spéciale constate avec satisfaction que l'impératif de simplification des formalités sociales a désormais pris un caractère d'urgence, elle ne peut manquer de souligner que la pluralité des initiatives engagées au cours des derniers mois commence à créer une relative complexité autour de cet objectif de simplification .

Il existe déjà, ainsi qu'il a été rappelé ci-dessus, le guichet « Net-entreprise » et le dispositif « Impact-emploi » .

Par ailleurs, le 10 octobre 2002, l'Assemblée nationale a adopté une proposition de loi relative à la création d'un chèque-emploi associatif , qui a été examinée à son tour par le Sénat le 13 mars 2003 et enrichie à cette occasion, à l'initiative de notre collègue M. Henri de Raincourt, d'un dispositif de chèque-emploi jeune été.

Puis le présent article 6 quater , tout comme les articles 6 quinquies et 18 bis , ont été introduits dans le présent projet de loi pour l'initiative économique par l'Assemblée nationale en février dernier.

Enfin, le projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de codification du droit, adopté en conseil des ministres le 19 mars 2003, comporte dans son article 19 plusieurs habilitations pour, notamment :

- harmoniser les dispositions législatives relatives aux différents dispositifs d'allégement de cotisations sociales et réduire le nombre de ces dispositifs ;

- créer un titre emploi simplifié pour les déclarations et paiements des cotisations et contributions sociales des personnes salariées, afin notamment de faciliter l'embauche des premiers salariés et des emplois de courte durée ;

- réduire le nombre des déclarations, leur périodicité et leur contenu, par la mise en oeuvre de déclarations communes à plusieurs administrations ou services publics ;

- accroître l'aide fournie par les organismes de protection sociale aux très petites entreprises et aux associations pour l'accomplissement de leurs obligations déclaratives.

L'ensemble des questions soulevées par la création, par le présent article 6 quater et par l'article 6 quinquies qui lui est associé, de ce service d'aide aux entreprises utilisatrices du chèque-emploi entreprises, devrait ainsi pouvoir être examiné, dans un cadre commun, en cohérence avec les divers dispositifs déjà existants.

En outre, s'agissant du calendrier, on ne peut manquer d'observer que ce projet de loi d'habilitation devrait être examiné au début du mois d'avril prochain à l'Assemblée nationale, et au Sénat un mois plus tard, c'est-à-dire simultanément avec la suite de la navette du présent projet de loi.

A l'évidence, la multiplication des supports législatifs spécifiques et simultanés conduit à craindre que ne se mette en place une mosaïque cloisonnée qui semblerait négliger, de surcroît, les réalisations déjà entreprises sur le terrain et qui utilisent les technologies les plus modernes. Ainsi, lors des débats tenus au Sénat sur la proposition de loi relative à la création d'un chèque-associatif, notre collègue M. Nicolas About, président de la commission des affaires sociales du Sénat, s'interrogeait-il sur la méthode et relevait qu' « un esprit perfide soulignerait que la procédure est bien compliquée pour un dispositif qui vise à la simplification » ( ( * )1). Il observait à cet égard que c'était avec bon sens que le Gouvernement s'était opposé -vainement il est vrai - à l'insertion dans le présent projet de loi d'un dispositif faisant double emploi, dans une certaine confusion, avec l'habilitation que le Gouvernement allait parallèlement demander au Parlement de lui accorder.

M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, a au demeurant lui-même déclaré, lors de son intervention sur l'amendement proposé par la commission spéciale de l'Assemblée nationale : « Le Gouvernement a une méthode qui prévoit un temps pour la concertation avec les partenaires sociaux et tous ceux qui peuvent être intéressés par telle ou telle mesure de simplification » ( ( * )2) .

Certes, le Parlement peut considérer qu'une telle habilitation n'est pas opportune et vouloir faire prévaloir son propre dispositif. Il semble toutefois à votre commission spéciale que la simplification est une tâche minutieuse qui appelle une vision cohérente d'ensemble, et gagne à être engagée en étroite concertation avec les acteurs qui en assurent la mise en oeuvre sur le terrain.

Aussi, la voie des ordonnances qu'a choisie le Gouvernement paraît, pour le moment, la plus appropriée dans ce domaine très technique et spécifique, et votre commission spéciale n'y voit guère d'atteinte portée aux prérogatives du Parlement auquel, de surcroît, il revient en tout état de cause d'être saisi le moment venu d'un projet de ratification.

Dès lors, afin que l'objectif de simplification puisse être poursuivi avec méthode et succès, votre commission spéciale vous propose, en l'état actuel des choses, de supprimer le présent article afin de rester dans la cohérence du cadre initialement défini par le Gouvernement. Elle considère que, sauf à ce que la poursuite de la navette parlementaire permette à celui-ci, après consultation des partenaires sociaux, de proposer au Parlement la mise en place d'un dispositif s'inscrivant en cohérence avec les mécanismes de simplification déjà mis en oeuvre, la sagesse commande de parvenir à cet objectif majeur, auquel elle souscrit pleinement, par la voie initialement envisagée des ordonnances .

Votre commission vous propose la suppression de cet article.

Article 6 quinquies (nouveau) -
Création d'un chèque-emploi entreprises

(Article L. 128-1 nouveau du code du travail)

Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale sur proposition de sa commission spéciale, le Gouvernement ayant demandé le retrait de l'amendement, vise, par la création d'un chèque-emploi entreprises, à simplifier les formalités sociales à la charge des entreprises au titre de l'embauche et de l'emploi de certains de leurs salariés.

I. Le dispositif proposé

A. Un mécanisme directement inspiré des divers « chèques emploi » ou « titres emploi » déjà existants

Le présent article rétablit un chapitre VIII (« Chèque-emploi entreprises » ) dans le titre II (« Contrat de travail ») du livre 1 er (« Conventions relatives au travail ») du code du travail, et y insère un article L. 128-1 nouveau créant un chèque-emploi entreprises. Sa rédaction s'inspire directement de celle des dispositions législatives applicables aux divers « chèques emploi » ou « titres emploi » déjà existants.

« Chèques-emploi » et « titres-emploi »

Sont actuellement en vigueur :

Le chèque-emploi services , permettant à un particulier employeur de rémunérer un salarié employé à son domicile, pour une aide occasionnelle à caractère familial ou domestique, et de s'acquitter de la déclaration et du paiement des charges sociales correspondantes.

Le titre emploi simplifié agricole (TESA ), pouvant être utilisé par les employeurs de la production agricole (exploitants agricoles, entreprises de travaux agricoles, forestiers, coopératives employant moins de onze salariés permanents, CUMA) afin d'effectuer, au moyen d'un document unique remis par leur caisse de mutualité sociale agricole, dix formalités liées à l'embauche et à l'emploi de leurs salariés saisonniers (sous contrats à durée déterminée).

Dans les départements d'outre-mer uniquement : le titre de travail simplifié ( TTS ) qui s'adresse aux entreprises de moins de onze salariés et pour les emplois dont la durée n'excède pas cent jours par an.

Par ailleurs, une proposition de loi visant à créer un chèque-emploi associatif au profit des petites associations à but non lucratif est actuellement en cours d'examen devant le Parlement : adoptée le 10 octobre 2002 par l'Assemblée nationale, cette proposition de loi a été adoptée avec modifications par le Sénat le 13 mars dernier.

A ce sujet, il convient de souligner que « chèque emploi » et « titre emploi » ne sont pas des expressions synonymes. Dans le premier cas, le document remit à l'utilisateur comprend, d'une part, des chèques (au sens bancaire du terme) pour la rémunération du salarié et, d'autre part, des volets sociaux pour l'accomplissement des formalités sociales correspondantes. En revanche, le « titre emploi » ne comprend que les volets sociaux, la rémunération du salarié étant effectuée selon d'autres modalités (chèque bancaire ordinaire, virement, paiement en espèces...).

Par ailleurs, et même dans le cadre d'un « chèque-emploi », l'utilisation du chèque n'est pas obligatoire pour le paiement du salarié. Ainsi a-t-il été constaté que beaucoup de particuliers ayant recours au chèque-emploi services n'utilisaient ce dernier que pour son volet social, et préféraient payer leur employé de maison avec leur chéquier ordinaire.

En l'absence d'explications de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, tant dans son rapport qu'au cours des débats en séance publique, sur les modalités pratiques d'utilisation du dispositif qu'elle souhaitait instituer , il doit être déduit de l'intitulé et de la rédaction retenus par le présent article 6 quinquies que ce chèque-emploi entreprises pourrait être composé :

- d'une part, d'un chèque, au sens propre du terme, « pour rémunérer les salariés » . La rémunération portée sur ce chèque inclurait une indemnité de congés payés d'un montant égal au dixième de la rémunération totale brute due au salarié. Cette dernière disposition ne s'appliquerait toutefois pas aux professions affiliées aux caisses de compensation prévues à l'article L. 223-16 du code du travail (c'est-à-dire notamment tout le secteur du bâtiment et des travaux publics , ainsi que les intermittents du spectacle), dont les salariés bénéficieraient des indemnités de congés payés dans les conditions de droit commun ;

- d'autre part, d'un volet social, dont les mentions seraient précisées par décret en Conseil d'Etat, « pour simplifier les déclarations et paiements afférents aux cotisations et contributions dues au régime de sécurité sociale, au régime d'assurance chômage et aux institutions de retraites complémentaires et de prévoyance au titre de ces salariés » .

Sur le modèle des formules déjà existantes, le chèque-emploi entreprises serait émis et délivré, soit par les établissements de crédits, soit par la Banque de France, La Poste, le Trésor public, les caisses d'épargne et les instituts d'émission des DOM-TOM, dans le cadre d'une convention passée avec l'Etat.

En tout état de cause, et toujours par référence aux autres chèques ou titres emplois, le chèque-emploi entreprises ne pourrait être utilisé qu'avec l'accord du salarié.

Ainsi que cela a été déjà précisé, le traitement du chèque-emploi entreprises serait organisé dans le cadre du service d'aide aux entreprises visé à l'article 6 quater du présent projet de loi.

B. Une mesure visant à simplifier les formalités sociales à la charge des entreprises

Le chèque-emploi entreprises pourrait être utilisé par les entreprises au titre de leurs salariés dont l'activité dans la même entreprise n'excède pas cent jours, consécutifs ou non, par année civile, et de tout salarié pour ce qui concerne les entreprises employant au plus trois équivalents temps plein.

Cette mesure vise à simplifier les formalités sociales à la charge des entreprises concernées. En effet, et parallèlement au paiement des cotisations et contributions sociales exigibles, celles-ci sont, en leur qualité d'employeurs de droit privé, astreintes à diverses obligations ( ( * )1) définies par le code du travail. Il s'agit, principalement, des formalités suivantes :

La déclaration unique d'embauche (article L. 320 du code du travail)

A l'occasion de l'embauche d'un salarié, un employeur doit le déclarer auprès de plusieurs organismes sociaux, pour que l'intéressé puisse disposer des droits sociaux auxquels il peut prétendre.

Afin d'éviter à l'employeur d'envoyer à chacun de ces organismes des informations parfois identiques, et dans un souci de simplification, les déclarations concernées ont déjà été regroupées dans un formulaire commun : la déclaration unique d'embauche (DUE). L'employeur envoie cette déclaration à son URSSAF, qui retransmet ensuite les informations utiles aux différents organismes destinataires. Les formalités auxquelles permet de procéder la DUE, et les organismes qui sont ensuite destinataires des informations recueillies par l'URSSAF, sont rappelées dans l'encadré figurant page suivante.

Dans les départements d'outre-mer (DOM), le chéquier de titres de travail simplifié comprend un volet relatif à la déclaration unique d'embauche, que l'employeur envoie lors de l'embauche du salarié.

L'utilisation du titre emploi simplifié agricole au moment de l'embauche d'un travailleur saisonnier dans l'agriculture vaut, notamment, déclaration unique d'embauche. En réalité, le titre emploi simplifié agricole comporte plusieurs volets, dont le premier (volet 0) correspond à la déclaration d'embauche.

Les formalités regroupées dans la DUE :

la déclaration préalable à l'embauche ;

la déclaration d'une première embauche dans un établissement ;

la demande d'immatriculation d'un salarié à la Sécurité Sociale ;

la demande d'affiliation au régime d'assurance chômage ;

la demande d'adhésion à un centre de médecine du travail ;

la déclaration d'embauche du salarié auprès du centre de médecine du travail en vue de la visite médicale obligatoire ;

la demande d'exonération des cotisations patronales pour l'embauche du premier salarié (1) ;

la déclaration en vue d'appliquer l'abattement des cotisations patronales pour l'embauche d'un salarié à temps partiel ;

la liste des salariés permettant le pré-établissement de la déclaration annuelle des données sociales (DADS).

Les destinataires des informations regroupées dans la DUE :

l'URSSAF (destinataire initial, qui retransmet ensuite aux organismes suivants) ;

l'INSEE ;

l'ASSEDIC ;

la caisse régionale d'assurance maladie ;

la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ;

le centre de médecine du travail.

(1) Pour les embauches antérieures au 1 er janvier 2002

Le projet de chèque-emploi entreprises dispose, quant à lui, que l'obligation de procéder à une déclaration unique d'embauche est réputée « accomplie lorsque l'employeur tient à la disposition de chacun des salariés concernés un double du chèque-emploi, dûment renseigné et signé des deux parties de façon indélébile au moment de l'embauchage. »

Le registre unique du personnel (article L. 620-3 du code du travail)

L'employeur doit tenir un registre unique du personnel sur lequel figurent, dans l'ordre d'embauchage, les noms et prénoms de tous les salariés occupés par l'établissement à quelque titre que ce soit. Ces mentions sont portées sur le registre au moment de l'embauchage et de façon indélébile.

Dans les DOM, les employeurs utilisant le titre de travail simplifié doivent tenir un registre unique du personnel dans les conditions définies par le code du travail.

En revanche, pour les employeurs utilisant le titre emploi simplifié agricole, l'inscription sur le registre unique du personnel est réputée accomplie lorsque ces employeurs tiennent à la disposition des contrôleurs des URSSAF, et pour chacun de leurs salariés, « un double du titre emploi portant un numéro d'inscription correspondant à leur ordre d'embauchage ».

Une règle similaire est définie dans le projet de chèque-emploi entreprises. En effet, l'inscription des salariés au registre unique du personnel est réputée accomplie dans les mêmes conditions que celles précédemment exposées pour la déclaration unique d'embauche.

L'obligation d'un contrat de travail écrit en cas de travail à durée déterminée (article L. 122-3-1 du code du travail) ou à temps partiel (article L. 212-4-3)

Conformément aux dispositions du code du travail, le contrat de travail est obligatoirement un contrat écrit en cas de travail à durée déterminée ou de travail à temps partiel

Les employeurs utilisant le titre de travail simplifié, le titre emploi simplifié agricole ou le chèque-emploi services sont réputés satisfaire à l'obligation d'établir un contrat de travail écrit en cas de travail à durée déterminée ou à temps partiel. S'agissant cependant du chèque-emploi services, l'obligation d'un contrat de travail écrit est maintenue pour les emplois dont la durée de travail est supérieure à certains seuils (huit heures par semaine ou quatre semaines consécutives dans l'année).

Dans la rédaction actuelle du présent article, l'utilisation du chèque-emploi entreprises ne vaudrait toutefois contrat de travail écrit que pour les contrats à durée déterminée, aucune mention relative au contrat de travail à temps partiel n'étant prévue. En l'état actuel de cette rédaction, les employeurs utilisant le chèque-emploi entreprises devraient donc établir un contrat de travail écrit en cas de travail à temps partiel, et ce à la différence des utilisateurs des autres chèques ou titres emplois.

La remise d'un bulletin de salaire au salarié (article L. 143-3 du code du travail)

Lors de chaque paie, l'employeur doit remettre au salarié, à titre de justificatif, un bulletin de paie.

Dans la totalité des dispositifs existants ou en projet, et notamment le chèque-emploi entreprises, l'utilisation d'un chèque ou d'un titre emploi vaut bulletin de salaire ( ( * )1).

Les déclarations au titre de la médecine du travail et des garanties de ressources accordées aux travailleurs privés d'emplois

L'employeur doit également déclarer son salarié au titre, d'une part, de la médecine du travail et, d'autre part, du régime des prestations visées à l'article L. 351-2 du code du travail (revenu de remplacement des travailleurs privés d'emploi).

Ces obligations déclaratives sont réputées satisfaites pour les employeurs utilisant le titre de travail simplifié, le titre emploi simplifié agricole ou qui utiliseraient le chèque-emploi entreprises.

Les déclarations devant accompagner le règlement des cotisations de sécurité sociale et d'assurance chômage

L'employeur doit accompagner le versement périodique des cotisations dues à la sécurité sociale et à l'assurance chômage de bordereaux récapitulatifs.

Par ailleurs, il doit obligatoirement déclarer, chaque année avant le 31 janvier, et pour chaque salarié, l'ensemble des rémunérations versées l'année précédente, à l'occasion de sa déclaration annuelle des données sociales (DADS). Ces informations constituent une base fiscale et sociale indispensable pour garantir les droits des salariés.

Il est toutefois nécessaire de préciser que l'obligation de transmettre les bordereaux périodiques et la DADS est fixée par des dispositions réglementaires. Les textes de loi relatifs aux divers chèques ou titres emploi ne précisent donc pas si les employeurs qui les utilisent sont également dispensés de ces formalités. Cette précision, quand elle existe, est fournie par leur décret d'application (tel est le cas, par exemple, du titre de travail simplifié en vigueur dans les DOM).

C. Un nouveau dispositif qui coexisterait avec les solutions déjà proposées dans le cadre des formalités sociales dématérialisées assurées par le GIP-MDS « Net entreprises »

Enfin, il convient de souligner que la rédaction du présent article n'empêcherait nullement les entreprises concernées de recourir, si elles le souhaitaient, aux formalités sociales dématérialisées proposées dans le cadre de la solution « Net-entreprises » , dont le dispositif a été examiné dans le cadre du commentaire de l'article 6 quater ci-dessus, plutôt qu'au chèque-emploi entreprises.

II. La position de votre commission spéciale

S'agissant tout d'abord de l'insertion du présent dispositif dans le code du travail, votre commission spéciale rappelle que l'Assemblée nationale a déjà, le 10 octobre 2002, modifié l'intitulé du chapitre VIII du code du travail et créé un article L. 128-1 nouveau afin d'y insérer les dispositions relatives au chèque-emploi associatif . Le Sénat ayant confirmé, depuis, l'adoption de cette disposition en première lecture, il serait à tout le moins nécessaire de modifier, sur ce point, la rédaction du présent article, afin d'éviter que la création du chèque-emploi entreprises n'entraîne la suppression involontaire du futur chèque-emploi associatif.

Au-delà de ces considérations de technique législative, il reste que les observations de méthode et de cohérence formulées à l'occasion de l'examen de l'article 6 quater valent également pour le présent article, qui lui est intimement lié . En effet, « la création d'un titre emploi simplifié pour les déclarations et paiements des cotisations et contributions sociales des personnes salariées, afin notamment de faciliter l'embauche des premiers salariés et des emplois de courte durée » figure expressément parmi les mesures que le Gouvernement prévoit de prendre par ordonnance, sur habilitation du Parlement (troisième alinéa 2° de l'article 19 du projet de loi d'habilitation adopté par le conseil des ministres le mercredi 19 mars 2003).

Aussi, tout comme pour le service d'aide aux entreprises de l'article 6 quater , M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, a demandé, de manière au demeurant réitérée, le retrait de l'amendement déposé par la commission spéciale de l'Assemblée nationale.

Pour sa part, votre commission spéciale ne peut manquer de relever que l'apparente précipitation avec laquelle a été institué ce dispositif a conduit à négliger plusieurs questions pratiques auxquelles un approfondissement de la réflexion, et l'engagement d'une concertation avec les divers organismes concernés, permettraient sans aucun doute de répondre . C'est ainsi qu'un nombre significatif d'interrogations demeurent, relatives notamment :

- à la manière dont devrait être traitée, au regard du recours au chèque-emploi entreprises, la situation d'un salarié dont l'activité occasionnelle viendrait à dépasser les cent jours par année civile ;

- à la façon dont les entreprises devraient calculer la notion « d'équivalent temps plein » : alors même que le dispositif du chèque-emploi prétend simplifier leurs obligations de gestion, la loi leur imposerait ici une contrainte supplémentaire et particulièrement complexe ;

- à la raison pour laquelle est retenu le seuil de trois emplois ; si, selon les réponses apportées à votre rapporteur, ce seuil nouveau permettrait d'ouvrir le dispositif à plus de 85 % des entreprises, force est de constater qu'il s'ajoute aux différents seuils actuellement fixés par le droit du travail et la législation sociale, créant ainsi un élément nouveau de complexité ; pourquoi n'avoir pas plutôt choisi le seuil de cinq ou celui de dix salariés, que l'on rencontre ailleurs dans la législation (ce qui aurait élargi le vivier des entreprises susceptibles de bénéficier du dispositif), ou, au contraire, n'avoir pas réservé le chèque-emploi entreprises à l'embauche et à l'emploi du premier salarié, dont les formalités constituent la véritable contrainte pesant sur les petits entrepreneurs ?

- à la méthode qui permettrait d' ouvrir totalement le bénéfice de la simplification aux entreprises du secteur du bâtiment et des travaux publics : il est tout à fait paradoxal que l'un des secteurs d'activité les plus utilisateurs de main d'oeuvre, animé par un réseau extrêmement important de très petites entreprises, ne puisse pas bénéficier pleinement du dispositif de simplification tel qu'il est proposé en raison de la contrainte technique de l'affiliation de ses salariés aux caisses de compensation ;

- aux délais qu'il serait nécessaire d'ouvrir pour procéder, par la négociation sociale, à l' adaptation des conventions collectives dans les secteurs d'activité qui auraient recours au chèque-emploi entreprises, afin de garantir les droits des salariés concernés ;

- à la participation des établissements de crédit au dispositif , les représentants des réseaux bancaires entendus par votre commission spéciale n'ayant pas manifesté un enthousiasme particulier pour assurer l'émission et la délivrance des chèques-emploi entreprises dans les conditions prévues par le projet de loi.

Il semble ainsi nécessaire de donner davantage de place à la concertation préalable pour garantir que les mesures de simplification en matière de déclarations et de paiements des cotisations et contributions sociales des personnes salariées, auxquelles votre commission spéciale est tout aussi attachée que tout autre , seront instituées dans des conditions techniques qui garantissent leur réel succès . Il n'est rien de pire que des dispositifs dits « simplificateurs » qui restent lettre morte faute d'avoir été suffisamment préparés.

Aussi, dans l'état actuel des informations dont elle dispose sur la réflexion du Gouvernement, votre commission spéciale propose de soutenir la méthode qu'il a officiellement préconisée de manière constante, et de procéder aux simplifications attendues par tous par voie d'ordonnance plutôt que dans le cadre de ce projet de loi.

Aussi votre commission vous propose-t-elle la suppression de cet article.


TITRE II-
TRANSITION ENTRE LE STATUT DE SALARIÉ
ET CELUI D'ENTREPRENEUR
Article 7 -
Non-opposabilité des clauses d'exclusivité
au salarié créateur ou repreneur d'entreprise

(Article L. 121-9 (nouveau) du code du travail)

Commentaire : cet vise à rendre non opposables les clauses d'exclusivité figurant dans certains contrats de travail afin de permettre au salarié créateur ou repreneur d'une entreprise d'initier un projet tout en restant salarié, et ce pendant un an, durée éventuellement prorogée en cas de recours au temps partiel.

I. Le texte initial

A. Le régime actuel des clauses d'exclusivité

Le chapitre IV du titre II du livre II du code du travail permet à un salarié de cumuler des emplois privés à condition de ne pas exercer d'activités concurrentes à celles de son employeur et de respecter la durée maximale du travail. Toutefois, lors de la conclusion du contrat de travail à durée déterminée ou indéterminée, les parties peuvent introduire des clauses particulières qui soumettent le salarié à des conditions de travail particulières.

Parmi elles, les clauses d'exclusivité, qui appartiennent à la catégorie des clauses facultatives, visent à prémunir l'employeur de l'éventuelle concurrence de ses salariés. Elles peuvent, selon les cas, interdire au salarié à temps complet de :

- travailler pour le compte d'un autre employeur ou d'exercer une autre activité professionnelle ;

- exercer une activité de même nature ;

- exercer une activité dans le même secteur que l'employeur.

S'agissant des salariés à temps partiel, bien que la jurisprudence soit inexistante, les juristes considèrent que l'interdiction générale d'exercer toute autre activité professionnelle porterait atteinte à la liberté du travail et aux libertés individuelles dans la mesure où elle est susceptible de restreindre les revenus du salarié.

La validité des clauses d'exclusivité a été reconnue à l'article L. 751-3 du code du travail relatif à l'activité des voyageurs, représentants et placiers (VRP). Devant être écrites et acceptées par le salarié, elles s'apprécient au regard de la nature de l'activité exercée et de la nécessité de protéger les intérêts de l'employeur. Le non respect de la clause d'exclusivité constitue une faute grave (Cass. Soc., 22 novembre 1979, Dauchy c/ SA Philips ), voire une faute lourde, susceptible d'entraîner le licenciement du salarié fautif.

Cependant, au nom du principe constitutionnel de la liberté de travail, la Cour de cassation a récemment réduit la portée de sa jurisprudence traditionnelle en rappelant que la validité des clauses d'exclusivité est liée au respect de certaines conditions (Cass. Soc., 13 novembre 2002, Mme X contre Société Direct Ménager ( ( * )1), dont elle a, par ailleurs, souligné le caractère impératif dans un arrêt du 29 janvier 2002.

Par conséquent, l'article 7 du projet de loi pour l'initiative économique propose un assouplissement des conditions d'application des clauses d'exclusivité, lorsque le salarié à temps complet envisage de créer ou de reprendre une entreprise.

B. La réforme proposée par l'article 7 initial du projet de loi

L'article L. 121-9 nouveau introduit dans le code du travail par le texte initial de l'article 7 comporte deux alinéas qui :

- dispose que les clauses d'exclusivité ne pourront être opposées par l'employeur au salarié à temps complet qui souhaite créer ou reprendre une entreprise, et ce pendant un an ;

- prévoit d'étendre au profit des salariés passant à temps partiel pour création ou reprise d'entreprise la durée de non-opposabilité de la clause d'exclusivité, lorsque la période de temps partiel fait l'objet d'une prolongation.

Selon les dispositions du premier alinéa, la non-opposabilité des clauses d'exclusivité prend effet soit à compter de l'inscription de la nouvelle entreprise au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers, soit à compter de la déclaration de début d'activité professionnelle agricole ou indépendante.

Dans la mesure où la levée des clauses d'exclusivité est d'ordre public, elle concernera autant les contrats conclus après la promulgation de la présente loi que les contrats conclus antérieurement. De même, elle visera l'ensemble des salariés créateurs ou repreneurs d'une entreprise, qu'ils soient à temps complet ou à temps partiel, en contrat à durée indéterminée ou à durée déterminée, en congé pour création d'entreprise ou en congé sabbatique.

En revanche, et bien que le code du travail n'interdise pas expressément la possibilité d'introduire une telle clause dans un contrat d'intérim ou dans un contrat d'apprentissage, la levée de la clause d'exclusivité ne semble pas destinée à ces contrats. Dans le cadre de l'intérim, le salarié signe un contrat de travail avec la société intérimaire pour la durée d'une mission. Il paraît dès lors difficile d'identifier les motifs que pourrait invoquer la société d'intérim pour protéger ses intérêts en incluant une clause d'exclusivité dans le contrat de travail, si ce n'est une demande de la société utilisatrice. Toutefois, une telle demande semble peu probable, car rien n'interdit à cette dernière de recruter directement l'intérimaire auquel elle veut à ce point s'assurer les services. Pour les contrats d'apprentissage, une clause d'exclusivité, bien que non prohibée de façon expresse, est inutile puisque ce type de contrat ne permet pas de travailler pour une autre entreprise, dès lors que la durée maximale hebdomadaire est dépassée.

La non-opposabilité des clauses d'exclusivité n'entraîne pas leur nullité. Les employeurs peuvent encore les intégrer dans les contrats de travail, de telle sorte qu'au terme de la période de non-opposabilité, le salarié ne pourra plus se prévaloir de la levée de l'exclusivité. L'objet du présent article est donc de permettre au salarié de bénéficier de conditions favorables à l'installation de son entreprise et non d'étendre indéfiniment la période de bi-activité.

Le salarié pourra cependant éventuellement bénéficier d'une prolongation de la période de non-opposabilité des clauses d'exclusivité s'il souhaite que soit allongée la période de temps partiel pour création d'entreprise dont il dispose, prévue par l'article 9 du présent projet de loi.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

Sur proposition de sa commission spéciale, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements tendant à :

- supprimer l'extension temporaire de la période de non-opposabilité de la clause d'exclusivité au profit des salariés passant à temps partiel, cette prolongation lui apparaissant sans objet et de nature à jeter un doute sur la jurisprudence, et à étendre parallèlement la non-opposabilité des clauses à la période éventuelle de prolongation du congé pour création d'entreprise.

- réaffirmer la soumission du salarié créateur à l'obligation de loyauté vis-à-vis de l'employeur , les députés estimant nécessaire de lever les ambiguïtés liées à la levée de la clause d'exclusivité en rappelant au salarié son obligation de loyauté à l'égard de son employeur ( ( * )1).

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale estime que les dispositions proposées par le présent article vont dans le bon sens en établissant un équilibre souhaitable entre l'urgence de favoriser la création ou la reprise d'entreprises et la nécessité de sauvegarder les entreprises existantes.

A. La prolongation de la période de non-opposabilité des clauses d'exclusivité au bénéfice du salarié en congé pour création d'entreprise

L'amendement de l'Assemblée nationale visant à étendre la non-opposabilité des clauses d'exclusivité à la période éventuelle de prolongation du congé pour création d'entreprise semble fondé. Cette extension permettra ainsi au salarié souhaitant prolonger son congé de disposer du temps nécessaire à l'installation de son entreprise sans subir les contraintes liées aux clauses d'exclusivité.

B. L'obligation de loyauté

Le second amendement introduit par l'Assemblée nationale vise à réaffirmer l'obligation de loyauté du salarié envers son employeur. Cette disposition nouvelle, qui fait référence à une notion construite par la jurisprudence, reçoit l'assentiment de votre commission spéciale, qui souhaite qu'un équilibre existe entre la volonté de favoriser la création d'entreprises nouvelles et la nécessité de protéger les entreprises existantes.

Comme l'Assemblée nationale, votre commission spéciale admet volontiers que l'obligation de non-concurrence n'a pas sa place dans cet article, pour des raisons tant de forme que de fond.

D'une part, les clauses d'exclusivité ne doivent pas être confondues avec les clauses de non-concurrence :

- d'abord, les premières interdisent systématiquement toute activité parallèlement à l'activité salariée alors que les secondes ne prohibent que les activités concurrentielles ;

- ensuite, les clauses d'exclusivité s'appliquent durant le contrat de travail alors que celles de non-concurrence ne valent qu'après la rupture des relations contractuelles. Or, durant le congé ou la période de temps partiel pour création d'entreprise, le contrat de travail n'est pas rompu mais seulement suspendu.

D'autre part, il n'est guère concevable d'inscrire l'obligation de non-concurrence comme un principe d'ordre général, sachant que, pour certaines professions, il est interdit d'insérer dans le contrat de travail une clause de non-concurrence ( ( * )1).

Quant aux raisons de fond, elles sont liées à la nécessité de stabiliser la jurisprudence, qui a défini un équilibre entre le principe fondamental de la liberté d'entreprendre et la nécessité de protéger les entreprises existantes de la concurrence déloyale de leurs salariés. Ainsi, la liberté d'entreprendre, principe constitutionnel majeur dont le juge veille à l'application, et la liberté de travailler ne doivent pas être entravées. C'est pourquoi le juge a relativisé la portée de la clause d'exclusivité et, estimant qu'elle « porte atteinte à la liberté du travail », il lie désormais sa validité à des conditions bien définies.

En tout état de cause, l'obligation de non-concurrence ne disparaît pas avec les nouvelles dispositions de l'article L. 121-9 du code du travail. Ainsi :

- pendant l'exécution du contrat de travail , la clause d'exclusivité s'applique, ce qui signifie que le salarié n'a aucune possibilité d'exercer une activité parallèle à celle de son employeur, qu'elle soit concurrente ou non. Mais pendant la période de suspension des clauses d'exclusivité, la possibilité pour le salarié d'exercer une activité ne l'exonère toutefois pas de respecter l'obligation de non-concurrence ;

- après rupture du contrat de travail , il n'y a plus de clause d'exclusivité puisqu'il n'y a plus de contrat de travail. Mais une clause de non-concurrence la remplace : le salarié peut exercer une activité sous réserve qu'elle ne constitue pas une concurrence déloyale pour l'ancien employeur.

L'obligation de non-concurrence est donc applicable, y compris lorsque le salarié bénéficie d'une levée temporaire des clauses d'exclusivité. Aurait-il fallu pour autant définir l'obligation de loyauté ?

Sur le plan formel, rien ne s'oppose à l'introduction dans la loi de ce principe général du droit. Le législateur dispose, en effet, d'une totale liberté pour donner des bases légales à une notion purement jurisprudentielle en l'introduisant formellement dans le code du travail, lequel dispose déjà, en son article L. 120-4, que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi. L'obligation de loyauté est, en effet, inhérente à l'exécution du contrat de travail, que celui-ci comporte ou non une clause d'exclusivité. Elle interdit au salarié de développer, directement ou indirectement, pour son compte ou celui d'un tiers, tout acte de concurrence à l'encontre de l'entreprise qui l'emploie, pendant la durée du contrat de travail comme pendant la suspension de celui-ci.

Sur cette base, la Chambre sociale de la Cour de cassation a d'abord défini l'obligation de loyauté en la distinguant de l'obligation de non-concurrence. Si la première doit être respectée par le salarié pendant la durée d'exécution de son contrat de travail, la seconde, quant à elle, s'impose au salarié après la rupture du contrat de travail ( ( * )1). Puis, la Cour lui a donné un contenu, en se fondant sur l'article 1134 du Code civil, selon lequel « les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi ». L'obligation de loyauté imposée au salarié suppose, par conséquent, que les actions de celui-ci ne portent pas préjudice à l'employeur et implique une relation de confiance ( ( * )2) et une obligation de discrétion ( ( * )3) et de fidélité ( ( * )4).

Ainsi, dégagée par une jurisprudence active, la notion d'obligation de loyauté peut être laissée à l'interprétation des juges qui l'invoqueront en vertu de la jurisprudence qu'ils ont progressivement mis en place.

En revanche, votre commission spéciale estime que les créations d'entreprises ne doivent pas occulter les reprises d'entreprises , qui sont souvent moins risquées et plus pérennes que les premières. Négligées par les statistiques officielles, elles méritent de figurer au premier rang des priorités en matière d'initiative économique. C'est pourquoi elle souhaite que les salariés repreneurs d'entreprises soient systématiquement mentionnés dans les dispositions de ce projet de loi, et notamment, dans le présent article. Elle vous propose donc un amendement en ce sens.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 8 -
Exonération de cotisations sociales et ouverture de droits
à prestations des salariés créateurs ou repreneurs d'entreprises
durant la première année d'activité

(Articles L. 161-1-2 (nouveau) du code de la sécurité sociale
et L. 731-13-1 (nouveau) du code rural)

Commentaire : cet article insère un article L. 161-1-2 au code la sécurité sociale visant à alléger la charge financière qui pèse sur les salariés créateurs ou repreneurs d'entreprise par l'exonération des cotisations sociales acquittées auprès du régime des non-salariés pendant la première année d'exercice de création ou de reprise d'une entreprise, sans perdre le droit aux prestations correspondantes.

I. Le texte initial

Lorsqu'un salarié crée ou reprend une entreprise, il doit s'acquitter d'une double cotisation : les cotisations sociales payées en tant que salarié et les cotisations appelées pour son activité de chef d'entreprise. Afin d'alléger cette double charge financière et administrative, il est prévu d'exonérer le salarié pendant un an des cotisations sociales dues au régime des non-salariés.

Les cotisations visées sont celles d'allocations familiales, d'assurance-maladie et maternité, d'assurance-veuvage, invalidité et décès, et d'assurance vieillesse. En revanche, les cotisations accidents du travail et d'assurance chômage ne sont pas concernées, pas plus que la cotisation au régime de retraite complémentaire obligatoire car celui-ci relève de la responsabilité des partenaires sociaux, dont les caisses s'autofinancent.

Le bénéfice des exonérations de cotisations sociales précitées n'enlève en rien le droit aux prestations correspondantes , citées au premier alinéa de l'article L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale. Il s'agit des allocations familiales, de l'assurance-maladie et maternité, de l'assurance-veuvage, invalidité et décès, et de l'assurance vieillesse.

Pour autant, le champ de l'exonération n'est pas illimité , puisque l'article 8 tend à circonscrire le bénéfice de l'exonération au seul démarrage de l'activité et à préserver les mécanismes concurrentiels en matière de création d'entreprise. Les limites portent sur :

- la nature de l'activité : l'exonération étant dérogatoire aux articles L. 612-4, L. 633-10, L. 642-1 et L. 723-5 du code de la sécurité sociale, elle vise les activités artisanales, industrielles et commerciales, les professions libérales et les avocats. Le caractère limitatif de la liste montre que l'exonération ne s'applique pas de façon générale ;

- la durée de la période d'exonération : elle s'étend sur les douze premiers mois d'activité, le but recherché étant de soutenir le démarrage de l'activité et non de maintenir artificiellement en vie une entreprise non viable ;

- le montant de l'exonération : celle-ci est limitée à un plafond de revenu, au-delà duquel l'entreprise est considérée comme devant fonctionner de manière autonome. Un décret déterminera le montant de ce plafond ;

- le renouvellement : le créateur dont l'activité serait un échec devra attendre trois années avant de pouvoir obtenir une nouvelle exonération ;

- le statut du créateur ou du repreneur d'entreprise : selon que celui-ci exerce une activité avec un statut de salarié ou de non-salarié, l'exonération portera dans le premier cas sur les cotisations patronales et salariales, et dans le second cas, sur les cotisations applicables au travailleur indépendant ;

- la durée d'activité préalablement requise : afin de limiter les détournements de procédures par les travailleurs indépendants, un décret déterminera un minimum d'heures salariées préalables à la création d'entreprise ; pour les professions dont l'activité ne se mesure pas en heures, une durée équivalente ou assimilée sera fixée.

Par ailleurs, le texte du présent article prévoit, en son paragraphe II, une exonération des cotisations sociales assises sur les revenus provenant de l'entreprise au bénéfice du salarié créateur ou repreneur d'une entreprise agricole, selon une procédure analogue à celle décrite ci-dessus.

Enfin, le paragraphe III précise que ces dispositions seront applicables à partir du 1 er janvier 2004.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté quatre amendements, qui ont recueilli l'accord du Gouvernement :

- le premier reprend la formulation « un régime de salariés » figurant à l'article L. 161-1 du code de la sécurité sociale, jugée plus adaptée à la diversité des régimes de salariés, plutôt que la formule : « du régime des salariés » retenue par le projet de loi initial ;

- les deux suivants précisent quelques points constitutifs de l'exonération de cotisations en faveur des créateurs ou repreneurs bi-actifs, et ajoutent que l'exonération porte également sur les cotisations d'accidents du travail s'agissant des entrepreneurs choisissant d'exercer leur activité sous forme indépendante ;

- le dernier précise que l'exonération est demandée par « l'employeur » dans le cas où le créateur choisit d'exercer sa nouvelle activité en tant que salarié, et par le « non-salarié » en cas inverse.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale partage la philosophie de cet article, qui propose de limiter temporairement la multiplicité des prélèvements sociaux sur les revenus tirés, par une même personne, d'activités différentes. En effet, comme l'ont confirmé les débats à l'Assemblée nationale, si tout revenu appelle cotisation, il n'appelle pas nécessairement double cotisation . Il semble nécessaire d'aménager au profit du salarié créateur ou repreneur d'entreprise un régime de transition lui permettant de tester la viabilité de son projet dans des conditions financières plus allégées.

Or, depuis l'alignement des prestations en nature du régime des non-salariés sur celles du régime général et la création d'indemnités journalières dans le régime des commerçants, la double cotisation devient une surcharge financière incomprise. Seul le principe de solidarité professionnelle, qui fonde les régimes par répartition, permettait encore de légitimer encore cette double charge. Il n'y a guère que les cotisations d'assurance vieillesse dans chacun des régimes qui pourrait se justifier, puisque les prélèvements effectués sont créateurs de droits futurs différents.

Les organismes de sécurité sociale ne seront pas pénalisés par la perte des cotisations puisque l'Etat assurera la compensation financière nécessaire. Le niveau de revenu de cette catégorie de créateurs ou repreneurs étant sensiblement inférieur à celui du revenu moyen des créateurs en première année d'activité (6.555 euros), la perte de recettes pour les régimes de sécurité sociale des travailleurs indépendants est estimée à 16 millions d'euros.

Cependant, en ne visant que les salariés (et, en vertu de l'article 8 bis du projet de loi, les conjoints d'assurés ), l'article 8 crée une inégalité entre les créateurs d'entreprises bénéficiant déjà, au moment de la mise en oeuvre de leur activité, d'une couverture sociale. D'autres catégories d'assurés ne pourront en effet prétendre à cette exonération de droit :

- les chômeurs indemnisés , qui ne pourront bénéficier d'une exonération totale qu'à l'issue de démarches administratives incertaines où il devront prouver la viabilité de leur entreprise et obtenir l'accord de la commission ACCRE ;

- les jeunes, les chômeurs non indemnisés et les titulaires de minima sociaux , qui devront également respecter la procédure ACCRE et, en cas d'acceptation de leur dossier, ne seront exonérés qu'à concurrence de revenus ne dépassant pas 120 % du SMIC (article L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale) ;

- les étudiants , qui ne continueront à n'être exonérés que de cotisations d'assurance maladie, et uniquement si leur nouvelle activité les place dans un régime de non-salariés (article L. 615-2 du code de la sécurité sociale) ;

- les retraités , qui ne seront concernés par aucune mesure d'exonération.

Aussi, dans un souci de simplification et d'équité , votre commission spéciale estime souhaitable que l' exonération concerne les créateurs ou repreneurs , quel que soit leur statut , à partir du moment où ils ont des droits ouverts au titre d'assurances sociales avant la création ou la reprise d'entreprise . Elle vous propose donc de remplacer l'article L. 161-1-1 du code la sécurité sociale actuellement en vigueur, relatif aux exonérations de cotisations sociales en faveur des bénéficiaires du dispositif ACCRE, par une nouvelle rédaction de cet article visant à étendre à tout créateur ou repreneur bénéficiant d'une couverture sociale, qu'il soit salarié ou non, le dispositif d'exonération prévu par le présent article.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 8 bis( nouveau) -
Extension du dispositif d'exonération au créateur bénéficiaire d'un régime de sécurité sociale en tant que conjoint ou concubin d'un assuré

(Article L. 161-1-3 (nouveau) du code de la sécurité sociale)

Commentaire : cet article vise à étendre aux conjoints ou concubins de personnes bénéficiant d'une couverture sociale, en tant qu'ayant droits d'un assuré social, l'exonération temporaire de cotisations sociales personnelles prévues à l'article 8 du présent projet de loi lorsqu'ils souhaitent créer ou reprendre une entreprise.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

En insérant un article L. 161-1-3 nouveau dans le code de la sécurité sociale, l'Assemblée nationale a voulu étendre le bénéfice du dispositif d'exonération temporaire , institué par l'article 8 du projet de loi examiné ci-dessus, aux conjoints ou concubins ayants droit d'assurés qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise .

Dans le droit actuellement en vigueur, l'ayant droit d'un assuré social qui souhaite créer ou reprendre une entreprise se voit appliquer les dispositions suivantes :

L'AYANT DROIT D'UN ASSURÉ SOCIAL

Phase antérieure à l'immatriculation

Phase postérieure à l'immatriculation

S'il a été inscrit à l'ANPE pendant six mois au cours des dix-huit derniers mois, il peut prétendre :

Il cesse d'être ayant-droit et adopte le statut social correspondant à sa nouvelle activité ;

- à l'aide aux demandeurs d'emploi créant ou reprenant une entreprise (ACCRE) qui consiste en une exonération de cotisations sociales pendant un an ;

S'il a obtenu l'ACCRE, il est exonéré de cotisations sociales pendant un an.

- aux chéquiers-conseil.

Source : Lettre d'information de l'Agence pour la création d'entreprise (APCE)

L'extension du dispositif de l'article 8 s'adresse en priorité aux mères de famille et femmes au foyer n'exerçant pas d'activité professionnelle . Elle a été proposée par un amendement de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, dont le Gouvernement a demandé le retrait au motif que d'autres solutions existaient (comme la prolongation de l'allocation parent isolé) et qu'il serait préférable d'aborder le sujet dans le cadre de la réforme de la politique familiale. La mesure n'étant susceptible d'entrer en vigueur qu'au 1 er janvier 2004, les députés ont estimé que ce délai laissait au Gouvernement tout le loisir d'apporter au dispositif proposé les adaptations nécessaires, tout en permettant aux femmes de se préparer à cette nouvelle opportunité. Ce droit est, en effet, ouvert aux personnes qui remplissent les conditions suivantes :

- en tant que conjoint d'un assuré , elles bénéficient des prestations d'un régime de sécurité sociale sous réserve de n'être pas couvertes à titre personnel par un régime obligatoire d'assurance-maladie et maternité ;

- en tant que personne vivant maritalement ou lié par un pacte civil et de solidarité avec un assuré , elles doivent bénéficier des prestations d'un régime de sécurité sociale à condition qu'elles prouvent qu'elles sont à la charge effective, totale et permanente, de l'assuré, et en apportent la preuve dans les conditions de l'article L. 161-14 du code de la sécurité sociale.

Comme pour l'article 8, l' exonération sera plafonnée à un revenu fixé par décret, ne pourra être obtenue pour une nouvelle création ou reprise d'entreprise intervenant moins de trois ans après la précédente, et sera ouverte à partir du 1 er janvier 2004.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale adhère à l'objectif poursuivi par le présent article additionnel, qui propose une mesure ciblée permettant aux femmes ou compagnes d'assurés sociaux d'accéder à l'autonomie professionnelle. La mesure peut ainsi concerner, par exemple, les mères au foyer en milieu rural qui souhaiteraient créer ou reprendre une entreprise d'artisanat ou initier un projet d'enseignement à distance.

Mais, estimant que le dispositif prévu à l'article 8 du présent projet de loi était pertinent, elle a souhaité l'étendre à tous les créateurs d'entreprises bénéficiant déjà, à un titre ou à un autre, d'une couverture sociale. Elle a, à cet égard, considéré qu'il n'était pas légitime de réserver aux conjoints d'assurés un traitement plus favorable qu'aux personnes isolées ou qu'à d'autres candidats à la création ou à la reprise d'entreprise . Aussi, le dispositif qu'elle a adopté à l'article 8 du projet de loi englobant les personnes visées par le présent article 8 bis , elle propose, par coordination, la suppression de celui-ci .

Votre commission vous propose de supprimer cet article additionnel.

Article 9 -
Congé et période de travail à temps partiel pour la création d'entreprise

(Articles L. 122-32-12 à L. 122-32-15, L. 122-32-16-1 à L. 122-32-16-3 (nouveaux), L. 122-32-26, L. 122-32-27 et L. 227-1 du code du travail)

Commentaire : en sus du droit au congé pour création d'entreprise figurant à l'article L. 122-32-12 du code du travail et dont les règles sont ici modifiées, cet article propose d'accorder au salarié un droit au temps partiel afin de lui permettre de créer ou de reprendre une entreprise. Il fixe les conditions et les modalités du recours à cette possibilité.

I. Le texte initial

Cet article s'inspire directement des dispositions de la proposition de loi de M. Jean-Pierre Raffarin déposée au Sénat le 9 mars 2000. Ce texte proposait, en son article 16, un « droit à une activité à temps partiel pour création d'entreprise ». L'assouplissement des modalités de passage à temps partiel pour création d'entreprise répond à une préoccupation, révélée par l'enquête SINE 98. Celle-ci a, en effet, montré en 1998 que, parmi les créateurs ou repreneurs d'entreprises encore en activité trois années après l'acte de création ou de reprise, 7 % exerçaient, en sus de leur activité de chef d'entreprise, une activité salariée à temps partiel ou à temps complet.

Contenant des dispositions communes au congé et au passage à temps partiel, le paragraphe I du présent article modifie les intitulés de la section V-2 et de sa sous-section 1 du chapitre II du titre II du livre 1 er du code du travail et propose une nouvelle rédaction de ses articles L. 122-32-12 à L. 122-32-15. Il institue de nouvelles conditions de recours au congé pour création d'entreprise et introduit une possibilité nouvelle de recours au temps partiel pour création d'entreprise .

Ces droits sont entourés de conditions analogues aux deux procédures, quant à leur ouverture et à leur exercice. Celles relatives à l' ouverture des droits au congé et au passage à temps partiel sont :

- des conditions d'ancienneté : l'article L. 122-32-13, qui prévoyait une période d'ancienneté minimale de trente-six mois, permet désormais au salarié de jouir de son droit de congé ou de passage à temps partiel dès vingt-quatre mois d'ancienneté dans l'entreprise, consécutifs ou non . Les conditions d'ancienneté sont donc significativement réduites ;

- une durée maximale de l'ouverture du droit : la durée maximale de ce congé ou de cette période de passage à temps partiel est portée à un an , et peut être prolongée d'au plus un an . Malgré un léger changement de rédaction, ces dispositions sont identiques à celles qui figurent actuellement à l'article L. 122-32-12 du code du travail.

Quant aux conditions relatives à l' exercice des droits au congé et au passage à temps partiel , il s'agit :

- d'une obligation d'information de l'employeur par le salarié souhaitant partir en congé ou passer à temps partiel. L'article L. 122-32-14 prévoit que la lettre recommandée, envoyée au moins deux mois à l'avance et assortie d'un accusé de réception, doit contenir les informations suivantes : souhait du salarié d'exercer son droit au congé ou au passage à temps partiel ; date à partir de laquelle le salarié souhaite l'exercer et durée du congé ou de la période de temps partiel ; activité de l'entreprise que le salarié a l'intention de créer ou de reprendre, en application de l'obligation de loyauté et du principe de non-concurrence. Si le salarié souhaite une prolongation de l'exercice des droits énoncés ci-dessus, il en informe son employeur dans les mêmes conditions de forme, deux mois avant le terme desdits droits.

- d'une possibilité pour l'employeur de différer ou de refuser ces droits au salarié , au nom des intérêts de l'entreprise. S'agissant de la demande de congé ou de passage à temps partiel, l'article L. 122-32-15 donne le droit à l'employeur d'en différer le départ ; pour cela, il dispose au maximum de six mois après réception de la lettre recommandée. Concernant spécifiquement la demande de passage à temps partiel , l'employeur a deux possibilités, énoncées par l'article L. 122-32-16-2 du code du travail :

soit il est le chef d'une entreprise de moins de deux cents salariés , et il peut refuser d'accorder au salarié son droit au passage à temps partiel . Cependant, cette faculté est entourée d'une condition de consultation du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, et d'une condition de fond, à savoir que le passage à temps partiel aurait un impact préjudiciable sur la production et la bonne marche de l'entreprise ;

soit il est le chef d'une entreprise de deux cents salariés ou plus , et il peut différer son accord . Mais cette faculté ne peut être invoquée par l'employeur que si le nombre de salariés bénéficiant d'un passage à temps partiel pour création d'entreprise dépasse 2 % de l'effectif de l'entreprise. Cette disposition est moins avantageuse pour le salarié que les mesures de l'article 16 de la proposition de loi du 9 mars 2000 mentionnée précédemment, qui prévoyait que l'employeur d'une entreprise de plus deux cents salariés était tenu d'accorder ce droit si la demande du salarié remplissait les conditions de délai et de procédure.

Outre le nouvel article L. 122-32-16-2 précité, le paragraphe II du présent article contient d'autres dispositions spécifiques à la demande de passage au temps partiel pour création d'entreprise. Les articles L. 122-32-16-1 et L. 122-32-16-3 nouveaux du code du travail décrivent aussi les modalités de passage à temps partiel pour création d'entreprise.

Certaines dispositions visent à permettre au salarié de disposer du temps nécessaire à la création ou à la reprise d'une entreprise .

L'article L. 122-32-16-1 prévoit ainsi qu'un avenant soit assorti au contrat de travail, lorsque l'employeur a accepté la demande de passage à temps partiel du salarié pour cause de création d'entreprise. De même, toute demande de prolongation de la période de temps partiel par le salarié donne lieu à la signature d'un nouvel avenant . Celui-ci est établi selon une procédure conforme à celle applicable au contrat de travail initial des salariés à temps partiel, décrite à l'article L. 212-4-3 du code du travail : il s'agit d'un contrat écrit contenant des mentions obligatoires telles que la qualification du salarié, la rémunération, la durée de travail, les cas et les conditions de modification de la durée de travail, les modalités de communication des heures travaillées au salarié et le régime des heures complémentaires.

Afin d'éviter que l'employeur compense les absences du salarié créateur ou repreneur d'entreprise par le recours aux heures complémentaires, l'article L. 122-32-16 nouveau du code du travail définit en outre le régime des heures complémentaires , c'est-à-dire des heures effectuées au-delà de la durée de travail fixée par le contrat . Le salarié n'encourt aucune sanction ni licenciement s'il refuse d'effectuer des heures complémentaires, même si l'avenant qu'il a signé en accord avec l'employeur prévoyait une possibilité de recours à ces heures complémentaires. Le régime envisagé renforce donc les mesures de protection en faveur du salarié puisque les dispositions de l'article L. 212-4-3 du code du travail précisaient déjà que le nombre d'heures complémentaires ne peut être supérieur au dixième de la durée hebdomadaire ou mensuelle de travail prévue par le contrat et que le refus du salarié d'effectuer ces heures complémentaires ne constitue pas une faute ou un motif de licenciement.

D'autres dispositions visent, parallèlement, à protéger tant le salarié que l'entreprise à l'issue de la période de travail à temps partiel prévue par l'avenant au contrat de travail . Ainsi, dans l'hypothèse où il ne rompt pas ce contrat pour poursuivre l'activité entrepreneuriale qu'il envisageait d'assurer, le salarié doit retrouver son activité dans l'entreprise, à temps plein et avec une rémunération au moins équivalente à celle qui lui était précédemment servie. Cependant, votre commission spéciale relève que le texte de l'article L. 122-32-16-3 nouveau du code du travail ne précise pas si l'intéressé retrouve le même poste de travail. Cette observation doit être rapprochée de la combinaison des dispositions de l'article 9 bis nouveau du présent projet de loi relatif au remplacement du salarié créateur ou repreneur d'entreprise par un salarié en contrat à durée déterminée, et de l'article L. 122-32-21 du même code relatif au congé sabbatique précise, quant à lui, que « le salarié retrouve son précédent emploi ou un emploi similaire » . Par ailleurs, afin de garantir la stabilité de la gestion de l'entreprise, l'article L. 122-32-16-3 n'autorise pas le salarié à temps partiel pour création d'entreprise à demander sa réintégration à temps plein au sein de l'entreprise avant les termes prévus dans l'avenant .

Le paragraphe III du présent article 9 dispose, comme le prévoit déjà l'article L. 122-32-26 du code du travail pour le congé pour création d'entreprise et le congé sabbatique, que l'employeur devra payer des dommages et intérêts s'il ne respecte pas les droits du salarié à temps partiel pour création d'entreprise à refuser des heures complémentaires, prolonger la période de temps partiel ou réintégrer l'entreprise à temps plein avec rémunération équivalente. En outre, il fixe des conditions assez attractives à la réintégration du salarié au sein de l'entreprise pour l'inciter à demander un aménagement du temps de travail pour création d'entreprise. De plus, il apporte une précision formelle à l'article L.122-32-26 du code actuellement en vigueur en indiquant que l'attribution de dommages et intérêts au salarié est assortie d'une indemnité de licenciement , sachant que l'attribution de celle-ci n'est qu'une éventualité. Cette disposition ne vient en aucune façon restreindre le droit à dommages et intérêts pour le salarié par rapport au droit existant, mais rappelle seulement la nécessité de l'existence d'un préjudice effectif. D'ailleurs, l'attribution de dommages et intérêts au salarié lésé par l'employeur qui n'aurait pas respecté ce droit est toujours effectuée en fonction du préjudice par une décision de justice.

Le paragraphe IV modifie, par coordination, l'article L. 122-32-27 du code du travail en prévoyant que l'employeur communique au comité d'entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel, la liste des demandes de congé pour création d'entreprise et de congé sabbatique, ainsi que les demandes de passage (et leur prolongation) à temps partiel pour création d'entreprise.

Enfin, le paragraphe V ajoute à l'article L. 227-1 du code du travail le passage à temps partiel pour création d'entreprise à la liste des situations permettant de recourir au compte épargne-temps pour indemniser les périodes de travail à temps partiel (passages à temps partiel pour congé maternité ou d'adoption, congé maladie, accident, handicap d'un enfant et passage d'un poste à temps plein à un poste à temps partiel).

LE COMPTE-ÉPARGNE-TEMPS (CET)

Institué par la loi du 25 juillet 1994 relative à la participation des salariés dans l'entreprise, le CET « a pour objet de permettre au salarié qui le désire d'accumuler des droits à congé rémunéré » . Son régime a été ultérieurement modifié par les lois du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail et du 19 février 2001 sur l'épargne salariale, qui ont diversifié les sources d'alimentation du CET et en ont élargi les possibilités d'utilisation.

Mise en place : la mise en place du CET est conditionnée à la conclusion d'un accord collectif (convention ou accord de branche étendu, convention ou accord d'entreprise ou d'établissement) qui en précise les modalité de gestion.

Alimentation : l'article L. 227-1 du code du travail prévoit que le compte peut être alimenté par deux sources principales :

- en temps (dans la limite de 22 jours par an) : report de congés payés, jours de repos issus d'une réduction collective de la durée du travail, bonification en repos des quatre premières heures supplémentaires et repos compensateur de remplacement ;

- en argent : primes conventionnelles ou indemnités, épargne salariale, fraction de l'augmentation individuelle de salaire et abondement éventuel de l'employeur.

Utilisation : le congé doit être pris dans un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle le salarié a accumulé un nombre de jours de congé au moins égal à deux mois, modulable par accord. L'accord qui met en place le CET doit prévoir les congés pour lesquels il peut être utilisé (congé sans solde, passage au temps partiel, formation en dehors du temps de travail, cessation d'activité des salariés de plus de 50 ans). Le montant de l'indemnité est calculé sur la base du salaire que le salarié perçoit au moment de son départ en congé.

Lorsque l'entreprise connaît des variations d'activité , l'accord peut prévoir les conditions dans lesquelles les heures effectuées au-delà de la durée collective du travail peuvent être affectées sur le CET. Cette affectation ne doit pas excéder une limite de cinq jours par an et, au total, quinze jours. L'utilisation des heures affectées collectivement sur le CET est possible, soit à titre individuel, soit à titre collectif (afin de permettre à l'entreprise de faire face à des périodes de baisse d'activité).

Ce paragraphe a pour objet de permettre au salarié qui part créer ou reprendre une entreprise de faire valoir ses droits accumulés dans le CET pour compléter ses revenus dans la période de passage à temps partiel.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté quatorze amendements à cet article.

Au paragraphe I, elle a apporté cinq modifications ou précisions :

- suspension du contrat de travail pendant la période de congé pour création d'entreprise ;

- interdiction d'enchaîner les périodes de bi-activité ;

- précision par le salarié de la nature de l'activité exercée pendant le congé ;

- précisions sur la forme de la réponse de l'employeur à la demande de prolongation de la période de congé ou de temps partiel ;

- précisions sur les conditions formelles auxquelles l'employeur peut différer le départ.

Au paragraphe II, elle a adopté, outre un amendement rédactionnel et un autre de coordination, les six amendements suivants :

- fixation dans l'avenant au contrat de travail de la durée de la période de travail à temps partiel ;

- suppression de la possibilité donnée au salarié, sans risque de sanction ou de licenciement, de refuser d'effectuer des heures complémentaires même quand le recours à celles-ci est autorisé par l'avenant au contrat de travail ;

- précision selon laquelle le nouvel avenant signé en cas de prolongation de la période de temps partiel doit répondre aux mêmes conditions que l'avenant initial ;

- précisions sur les conditions de forme de la réponse de l'employeur à une demande de temps partiel à laquelle il ne souhaite pas répondre positivement ;

- précision sur les conditions d'appréciation du seuil de 2 % des effectifs en temps partiel pour création d'entreprise ;

- fixation d'un terme au report de la demande de passage à temps partiel .

Enfin, un amendement a été adopté au paragraphe III qui, notamment, vise à ne pas sanctionner la seule inobservation des dispositions concernant le retour à temps plein du salarié à temps partiel.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale estime que les dispositions de cet article sont de nature à faciliter la transition du statut de salarié à celui d'entrepreneur, en lui aménageant des possibilités plus adéquates d'absence pour création ou reprise d'entreprise . En effet, le recours au congé pour création d'entreprise est relativement peu utilisé. Quelques centaines seulement de congés pour création d'entreprise sont prises chaque année par des salariés , en général des cadres, des techniciens ou des commerciaux. Au-delà de l'incertitude liée à la création d'entreprise, le caractère insuffisamment incitatif des dispositifs en vigueur explique pour l'essentiel ce succès d'estime.

En effet, dans le droit actuellement en vigueur, le salarié en poste qui souhaite créer ou reprendre une entreprise se voit appliquer les dispositions suivantes :

LE SALARIÉ EN POSTE

Phase antérieure à l'immatriculation

Phase postérieure à l'immatriculation

Le salarié peut préparer son projet dès l'instant où il n'empiète pas sur ses horaires de travail et ne cause pas de préjudice à son employeur.

Le salarié peut demander un congé pour création d'entreprise s'il justifie d'une ancienneté de 36 mois au moins, consécutifs ou non, dans l'entreprise.

L'employeur peut différer le départ en congé

Dans les entreprises de moins de 200 salariés, il peut refuser le congé s'il estime que celui-ci aura des conséquences préjudiciables pour l'entreprise ou que l'activité envisagée est concurrente de la sienne.

Le salarié peut également demander un congé sabbatique s'il justifie d'une ancienneté de 36 mois au moins et d'une activité professionnelle de six ans au minimum. L'employeur peut également, sous certaines conditions, reporter ou refuser le congé.

Pendant un congé création ou un congé sabbatique, les salariés ne perçoivent pas de rémunération mais continuent d'être couverts par la sécurité sociale.

Le salarié peut créer une entreprise si aucune clause de son contrat de travail ne l'interdit et si sa nouvelle activité n'est pas susceptible de concurrencer celle de l'employeur.

S'il relève, au titre de sa nouvelle activité, du régime des non salariés, sa situation est la suivante :

- sur le plan fiscal, les revenus afférents aux deux activités sont imposés distinctement, dans la catégorie qui leur est propre pour leur activité non-salariée ; l'intéresser peut opter pour le régime de la micro-entreprise lorsque ses recettes n'excèdent pas 76.300 euros pour les activités d'achat-revente et de fourniture de logements, et 27.000 euros pour les prestations de service ;

- au plan social, l'intéressé doit cotiser simultanément aux deux régimes, salarié et non salarié. Néanmoins, lorsque l'activité salariée est exercée à titre principal, le créateur n'est pas soumis à la cotisation forfaitaire normalement acquittée, à titre de provision, auprès de la caisse d'assurance maladie des non-salariés : il versera ses cotisations l'année suivante en fonction de ses revenus réels.

Source : Lettre bimensuelle de l'APCE

Les nouvelles dispositions de l'article 9 vont ainsi contribuer à limiter les risques encourus par les salariés souhaitant créer leur entreprise en leur assurant qu'ils conserveront leur protection sociale même sans acquitter, pendant une année, l'intégralité des cotisations correspondantes. Cette disposition vise à faciliter les évolutions du parcours professionnel et à rendre plus fluide le passage d'un statut à un autre, le salarié conservant un lien avec l'entreprise sur laquelle il peut, de manière rassurante, se replier en cas d'échec. Jusqu'à présent, la solution la plus courante est celle du licenciement, qui permet au salarié de percevoir des indemnités et des allocations chômage. Mais cette pratique est aléatoire dans la mesure où le licenciement peut être contesté par le salarié lui-même ou par les organismes sociaux.

Dans le droit actuellement en vigueur, le salarié démissionnaire qui souhaite créer ou reprendre une entreprise se voit, ainsi, appliquer les dispositions suivantes :

LE SALARIÉ DÉMISSIONNAIRE

Phase antérieure à l'immatriculation

Phase postérieure à l'immatriculation

Le salarié peut préparer son projet pendant sa période de préavis dès l'instant où il n'empiète pas sur ses horaires de travail et ne cause pas de préjudice à son employeur.

S'il a obtenu l'ACCRE, il est exonéré de cotisations sociales pendant un an.

Il ne peut prétendre à des allocations de chômage. Il lui sera toutefois conseillé de s'inscrire comme demandeur d'emploi auprès des ASSEDIC. En effet, cette démarche pourra lui permettre, au bout de quatre mois, d'obtenir une révision de sa situation et, dans certains cas, une indemnisation.

En cas d'échec de son entreprise, il pourra s'inscrire à l'ANPE et bénéficier d'une indemnité ASSEDIC dans un délai de 36 mois suivant la fin de son ancien contrat de travail.

Il bénéficie du maintien de sa protection sociale (pendant quatre ans maximum).

Il ne peut prétendre à l'ACCRE, sauf s'il demande son inscription à l'ANPE et attend six mois avant de créer son entreprise.

Source : Lettre bimensuelle de l'APCE

L' équilibre trouvé par le présent article 9 entre les droits du salarié créateur d'entreprise et de son employeur semble, par ailleurs, satisfaisant . Il apparaît en effet difficilement envisageable d'attribuer aux salariés un droit au temps partiel pour création d'entreprise sans préserver les intérêts des employeurs, en particulier des chefs de petites entreprises. Alors que certaines petites entreprises artisanales souffrent déjà d'un manque de main-d'oeuvre qualifiée, il serait, en effet, catastrophique de leur imposer une disposition qui leur ferait perdre le concours efficace de leurs meilleurs salariés. C'est pourquoi, la possibilité de refuser le passage au temps partiel est maintenue dans les entreprises de moins de deux cents salariés quand le chef d'entreprise peut démontrer que la production et la bonne marche de l'entreprise sont compromises .

Pour autant, votre commission spéciale s'interroge sur la manière dont le droit au passage à temps partiel pour création d'entreprise prévu par le présent article s'articule avec le passage à temps partiel de droit commun à la demande du salarié , prévu à l'article L. 212-4-9 du code du travail qui reste en vigueur. En effet, cet article prévoit que « les salariés à temps complet qui souhaitent occuper ou reprendre un emploi à temps partiel dans le même établissement ou, à défaut, dans la même entreprise, ont priorité pour l'attribution d'un emploi ressortissant à leur catégorie professionnelle ou d'un emploi équivalent ». Ces deux procédures présentent, en effet, des différences notables, comme l'indique le tableau figurant page suivante.

Même si les risques paraissent limités, ces différences peuvent créer des effets d'aubaine incitant certains salariés à demander le droit le plus avantageux alors même qu'ils n'ont pas la réelle intention de créer ou reprendre une entreprise. C'est pourquoi, votre commission spéciale estime qu'une harmonisation des deux procédures du présent article 9 et de l'article L. 212-4-9 est indispensable, ce qu'elle vous propose par un amendement.

Guidée par un souci d'équité, votre rapporteur s'est personnellement interrogée sur la méthode qu'il conviendrait de retenir afin que les fonctionnaires bénéficient du dispositif de cet article . Elle estime en effet qu'aucune raison n'impose de priver les fonctionnaires de la possibilité de créer ou de reprendre une entreprise. L'incompatibilité éventuelle entre cette mesure et le statut général de la fonction publique et le décret-loi du 29 octobre 1956 ne lui semble pas devoir constituer un motif absolument dirimant.

D'une part, le principe d'égalité entre fonctionnaires et salariés doit aussi pouvoir s'appliquer en matière de création d'entreprises , les fonctionnaires pouvant aussi compter de potentiels créateurs ou repreneurs d'entreprises dans leurs rangs. Or, en dehors de quelques exceptions prévues par les textes ( ( * )1), le principe de non-cumul interdit aujourd'hui au fonctionnaire d'entreprendre une activité indépendante . En fonction de sa position statutaire, il peut certes demander une mise en disponibilité pour création d'entreprise ou pour convenance personnelle. Il peut en outre, sous certaines conditions, participer financièrement à la création ou la reprise d'une entreprise, et donc être associé.

Mais ces formules sont extrêmement limitées et ne peuvent être comparées aux dispositions existantes et substantiellement améliorées par le présent projet de loi visant à favoriser la démarche entrepreneuriale des salariés de droit privé. Pour votre rapporteur, il est dès lors indispensable, à travers la création d'entreprise, d'établir des passerelles entre les secteurs privés et publics, qui ont trop longtemps été opposés.

LES POSSIBILITÉS DE PASSAGE À TEMPS PARTIEL À LA DEMANDE DES SALARIÉS

Temps partiel pour création
ou reprise d'entreprise

(Article 9 du projet de loi)

Temps partiel à la
demande du salarié

(Article L. 212-4-9 CT)

Motif de la demande

Création ou reprise d'entreprise

Aucun

Délai entre la demande et sa mise en oeuvre

Deux mois

Six mois

Durée de la période du passage à temps partiel

Un an (qui peut être prolongée d'un an)

Proposée par le salarié et décidée par l'employeur (refus motivé)

Salariés concernés

Les salariés à temps complet ayant au moins ving-quatre mois d'ancienneté, consécutifs ou non

Les salariés à temps complet (sans précision sur l'ancienneté)

Procédure à suivre

Lettre recommandée explicative précisant l'activité de l'entreprise, la date de départ, la durée du passage à temps partiel demandée

En l'absence de convention ou d'accord collectif, lettre recommandée précisant la date de départ et la durée du passage à temps partiel demandée

Décision de l'employeur

- accord tacite, à défaut d'une réponse de l'employeur réponse de l'employeur dans les 30 jours

- possibilité de différer la mise en oeuvre de la période

- dans les entreprises de moins de 200 salariés, possibilité de refus si le départ porte atteinte à la production et à la bonne marche de l'entreprise

- dans les entreprises de plus de 200 salariés, possibilité de différer la date de départ si le nombre de salariés à temps partiel pour création d'entreprise dépasse 2 % de l'effectif de l'entreprise

- réponse de l'employeur dans les trois mois si un délai précis n'a pas été déterminé par convention ou accord collectif

- possibilité de refus si l'employeur justifie de l'absence d'emploi disponible ressortissant de la catégorie professionnelle du salarié ou de l'absence d'emploi équivalent ou si le changement d'emploi demandé peut avoir des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l'entreprise

Retour du salarié

Activité à temps plein et salaire équivalent

- obligation faite à l'employeur de reprendre le salarié à temps complet, si celui-ci respecte les conditions légales

- priorité pour l'attribution d'un emploi de la même catégorie ou d'un emploi équivalent

Régime des heures complémentaires

Possibilité pour le salarié de refuser les heures complémentaires, sauf si celles-ci étaient prévues dans l'avenant

Impossibilité pour le salarié ayant été autorisé à travailler à temps partiel d'imposer à son employeur un horaire de travail à temps complet en se prévalant d'heures complémentaires non décidées par l'employeur

D'autre part, elle considère que le principe énoncé à l'article 25 du statut général, selon lequel « les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées » , ne doit pas constituer un obstacle à cette mesure. Après tout, le droit de la fonction publique a déjà été adapté pour permettre aux fonctionnaires de bénéficier d'une mise en disponibilité . Et des précautions, telles que la nécessité de l'accord de la commission de déontologie, peuvent toujours encadrer l'assouplissement envisagé par votre rapporteur afin de ménager les principes fondamentaux de la fonction publique.

Votre rapporteur est cependant convaincue que la réforme qu'elle appelle de ses voeux ne peut être envisagée sans une consultation préalable des intéressés . C'est pourquoi elle ne propose pas d'étendre aux fonctionnaires un dispositif similaire à celui institué par l'article 9 pour les salariés de droit privé dans le cadre du présent projet de loi pour l'initiative économique. Cependant, elle ne manquera pas d'en faire état à nouveau lorsqu'une occasion plus opportune se présentera, qui pourrait être à cet égard l'examen du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de codification du droit.

A cet article 9, votre commission spéciale propose trois amendements rédactionnels visant, à nouveau, pour deux d'entre eux, à tenir compte des reprises d'activité dont elle a souligné l'intérêt lors de l'examen de l'article 7, et, pour le troisième, à préciser que le droit au passage à temps partiel prévu au présent article est exclusivement réservé aux salariés qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise , les autres demandes de passage à temps partiel pour toute autre raison que celle-ci devant se faire sous le bénéfice des dispositions de l'article L. 212-4-9 du code du travail.

En outre, un quatrième et dernier amendement tend à revenir sur la mention « s'il y a lieu » , introduite à la fin de l'article L. 122-32-26 du code du travail par l'Assemblée nationale. En effet, l' indemnité de licenciement est due lorsque les conditions fixées à l'article L.122-9 sont réunies. Afin d'éviter de jeter le trouble sur les conditions de versement de l'indemnité dans le cadre du congé sabbatique, cet amendement propose ainsi de substituer aux termes « s'il y a lieu » la mention plus claire, car juridiquement précise : « lorsque celle-ci est due » .

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 9 bis (nouveau) -
Extension des cas de recours au contrat à durée déterminée au remplacement d'un salarié de passage provisoire à temps partiel

(Articles 122-1-1 et L. 124-2-1 du code du travail)

Commentaire : le présent article est issu d'un amendement du Gouvernement visant à autoriser l'employeur à remplacer un salarié passé à temps partiel par un salarié en contrat à durée déterminée ou en intérim, même lorsque l'absence du salarié n'est pas expressément motivée par l'intention de créer ou de reprendre une entreprise.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

Cet article additionnel résulte d'un amendement du Gouvernement étendant le champ d'application de celui présenté par la commission spéciale de l'Assemblée nationale, qui ne prévoyait une telle possibilité qu'en cas de remplacement du salarié absent pour création ou reprise d'entreprise .

Le paragraphe I modifie l'article L. 122-1-1 du code du travail en ajoutant un nouveau cas de recours aux salariés en contrat à durée déterminée : désormais, un employeur dont un ou plusieurs salariés sont passés provisoirement à temps partiel pourra avoir recours à un ou plusieurs salariés en contrat à durée déterminée pour le(s) remplacer .

Le paragraphe II modifie, quant à lui, l'article L. 124-2-1 du code du travail en ajoutant un nouveau cas de recours aux salariés des entreprises temporaires pour des tâches non durables dénommées « missions » : ainsi, un employeur dont un ou plusieurs salariés sont passés provisoirement à temps partiel pourra avoir recours à un ou plusieurs salariés d'entreprises temporaires pour le(s) remplacer .

Actuellement, les cas de passage provisoire à temps partiel, figurant dans le code du travail et pour lesquels un remplacement est possible , sont limités au nombre de quatre :

- création d'entreprise (L. 122-32-12 du code du travail) ;

- congé parental d'éducation (L. 122-28-1) ;

- accompagnement d'une personne en fin de vie (L. 225-15) ;

- enfant malade ou handicapé (L. 122-28-9).

Ces situations prévoient une durée expressément limitée (et donc provisoire) de bénéfice du temps partiel, pendant laquelle le salarié absent peut être remplacé par un salarié en contrat à durée déterminée ou un salarié d'une entreprise intérimaire. Les autres situations de temps partiel prévues par le code du travail ne sont pas présumées « provisoire ».

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale estime que s'il est essentiel de prévoir une possibilité pour l'employeur de remplacer le salarié absent pour création d'entreprise, il l'est tout autant de pallier aux diverses difficultés résultant éventuellement du congé pris par le salarié pour d'autres raisons. Considérant qu'il est juste que ces absences ne portent pas préjudice à la production et à la bonne marche de l'entreprise, elle est favorable au dispositif du présent article.

Formellement, son texte mérite cependant d'être explicité. Aussi votre commission spéciale suggère-t-elle de répertorier aux articles L. 122-1-1 et L. 124-2-1 du code du travail l'ensemble des cas de passage provisoire à temps partiel qui figurent dans le code du travail et pour lesquels un remplacement par un salarié en contrat à durée déterminée ou un salarié intérimaire est envisageable.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article additionnel après l'article 9 bis -
Extension aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle de la possibilité pour les entreprises industrielles de
recourir au travail en continu en cas d'accord collectif

(Articles L. 221-5-1 et L. 221-10 du code du travail)

Commentaire : cet article vise à étendre aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle les modalités du code du travail relatives au travail continu afin d'éviter que les règles spécifiques au droit local de ces départements n'empêchent la création ou les reprises d'entreprises.

Actuellement, l'article L. 221-5-1 du code du travail permet aux entreprises industrielles de déroger à la règle du repos dominical en instituant le travail continu pour des raisons économiques après la conclusion d'un accord collectif ou l'obtention d'une autorisation de l'inspection du travail. Quant à l'article L. 221-10, il admet de droit les industries à donner le repos hebdomadaire par roulement en cas d'accord collectif.

Or, ces dispositions ne sont pas applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, faute d'une disposition législative expresse le prévoyant. En effet, le travail y est globalement, et sauf exceptions limitativement énumérées, interdit le dimanche et les jours fériés, en vertu de l'article L. 105 a du code professionnel local, issu de la loi impériale du 26 juillet 1900 toujours en vigueur dans ces départements.

Une toute récente jurisprudence a ainsi estimé qu'une disposition législative devait expressément prévoir que les articles précités du code du travail s'appliquent dans ces départements. Tel est l'objet de cette proposition d'amendement qui, en modifiant les articles L. 221-5-1 et L. 221-10 du code du travail pour permettre une extension de leurs dispositions aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle, vise à éviter que les entreprises locales ne soient confrontées à une confirmation jurisprudentielle qui les priverait d'une souplesse dans l'organisation du travail et les mettrait dans une situation inéquitable par rapport aux autres départements.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 10 -
Contrat d'accompagnement à la création d'une activité économique

(Articles L. 127-1 à L. 127-7 (nouveaux) du code du commerce)

Commentaire : afin de conforter la pratique dite des « couveuses d'entreprises » , cet article propose d'instituer dans le code du commerce un contrat d'accompagnement entre une personne morale et une personne physique à temps complet ou un dirigeant d'associé unique d'une personne morale.

I. Le texte initial

Cet article institue un dispositif nouveau : le contrat d'accompagnement à la création d'une activité économique.

A. Définition

L'article L. 127-1 nouveau du code du commerce définit le cadre juridique du contrat conclu entre l'accompagnateur et la personne qui se propose de créer ou de reprendre une entreprise. Le contrat est conclu entre deux parties :

- une personne morale de droit privé ou public, qu'il s'agisse de couveuses ou d'incubateurs de projets comme d'entreprises privées qui souhaitent développer auprès de leurs salariés une politique d'essaimage, d'établissements publics de recherche, d'associations et coopératives oeuvrant dans le champ de l'économie solidaire, ou encore de certaines sociétés de portage qui permettent à des cadres de développer leur clientèle à condition qu'elles répondent à l'objet du contrat ;

- et une personne physique, non salariée à temps complet, ou un dirigeant associé unique d'une personne morale. Dans le premier cas, il peut s'agir de salariés dans le cadre d'une politique d'essaimage, de salariés démissionnaires, de doctorants ou post-doctorants qui intègrent les incubateurs dans la phase de développement du projet, de jeunes diplômés, de personnes qui souhaitent créer une entreprise tout en étant salariées à temps partiel, de personnes sans emploi ou d'allocataires de minima sociaux.

ÉVALUATION « DES COUVEUSES D'ACTIVITÉS OU D'ENTREPRISES »
QUI « ONT MONTRÉ LEUR INTÉRÊT » ( ( * )

1)

Présentation générale

Le concept de « couveuse d'activité et d'entreprise » a émergé au milieu des années 90 avec comme objet la mise en oeuvre d'un accompagnement original au profit de publics rencontrant des difficultés particulières pour passer à l'acte d'entreprendre. Elles proposent un cadre social et juridique adapté à la progressivité de la démarche entrepreneuriale et un accompagnement personnalisé d'apprentissage entrepreneurial organisé autour du test de l'activité. Ces initiatives permettent en outre de lutter contre le travail non déclaré et de développer des niches d'activités répondant aux besoins des territoires tout en évitant « la casse sociale ». Les « couveuses d'activités et d'entreprises », qui se sont développées en l'absence de cadre juridique pertinent, se sont données comme objet d'assurer auprès des porteurs de projets en difficultés d'accès au marché du travail, pour une période limitée, des fonctions pédagogiques, économiques et d'appui à la gestion .

Bien qu'objet expérimental, la progression du nombre de couveuses est exponentielle. On en comptait deux en 1995, une vingtaine en 1998, une quarantaine en 2000, 60 en 2001. En 2002 , 80 couveuses étaient en activité et 20 en projet sur l'ensemble du territoire.

Le statut juridique des couveuses est majoritairement la forme associative (60 %) et la forme coopérative (40 %), et de façon plus marginale des montages SARL/association . Elles sont implantées à 90 % en zones urbaines ou suburbaines, avec une concentration importante dans le sud de la France (plusieurs structures dans les départements des Bouches-du-Rhône, de l'Hérault, de la Haute-Garonne), et dans le Nord et l'Est, dans des zones industrielles en friche.

Le nombre de personnes accompagnées en 2002 est d'environ 2.000 (il faut multiplier ce chiffre par trois pour le nombre d'accueils réalisés). La moyenne des personnes accompagnées par structure et par an est d'une vingtaine ; cependant, on note des écarts de cinq à plus d'une centaine. Les personnes bénéficiaires du RMI, les demandeurs d'emploi bénéficiaires de l'allocation unique dégressive (DEAUD) et les demandeurs d'emploi longue durée (DELD) représentent les publics les plus nombreux des couveuses (80 %) toutes catégories de public confondues. On note une mixité des publics au regard du niveau de qualification, de la culture, des âges et de la répartition hommes/femmes (22 % publics jeune, 34 % de femmes).

Type d'activités accueillies en couveuse

Dans l'ensemble, les couveuses sont plutôt généralistes . On note cependant des spécialisations dans certains services, comme le stylisme et le prêt-à-porter haut de gamme. On observe, par ailleurs, l'émergence de partenariats avec des fédérations professionnelles , comme des fédérations d'artisans dans les métiers du bâtiment, ou des métiers traditionnels dynamiques qui peuvent préfigurer un développement de spécialisations par filières.

Près d'une couveuse sur deux abrite en son sein les services à la personne, la culture et l'art, l'artisanat et les services aux entreprises . Un tiers des couveuses accueille également des services aux collectivités. Certaines activités sont très marginales, comme celles du BTP compte tenu des garanties assurantielles qu'elles nécessitent, les activités réglementées ou nécessitant des investissements importants, qui sont exclues du champ des activités concernées.

La relation contractuelle entre la personne et la structure emprunte des cadres divers : convention de stage, convention d'accompagnement, contrat de travail. Ces contrats définissent notamment les prestations assurées, les moyens mis à disposition et les conditions de gestion de l'activité (le pourcentage sur le chiffre d'affaires versé à la structure, par exemple).

Les durées d'hébergement varient de 10 mois à 36 mois (avec une moyenne de 24 mois), selon le degré d'engagement de la couveuse et la nature du projet.

Les conditions d'équilibre financier

On peut répartir les besoins de la façon suivante :

- le « coût couvé » global annualisé se situe dans une fourchette comprise entre 2.500 et 3.500 €. Ce montant prend en compte le suivi individualisé et l'ensemble des coûts affectés à cette action (cette estimation ne prend pas en compte les phases d'accueil et de pré-test) ;

- le « coût structurel » évalué à 75.000 € en moyenne, répartis en besoins en ingénierie, en investissements matériels et immatériels au démarrage, et en besoin en fonds de roulement.

Les sorties de la couveuse

Elles sont à 95 % positives en termes de création d'activités économiques (55 %) ou de retour à l'emploi (40 %). On note que le retour à l'emploi salarié se fait souvent à l'occasion de démarchage chez des clients ou de réalisation de prestations. On observe également des cas de report du projet de création (acquisition de compétences complémentaires).

Dans la quasi-exclusivité des cas, le passage en couveuse représente une plus-value sociale importante en termes de retour à l'emploi et de création d'activités économiques.

Le cadre contractuel que propose d'instituer le présent article 10 pour assurer l'exercice de l'accompagnement permet de déduire que la charge du contrôle de celui-ci reviendra au juge. En outre, l'Etat et les collectivités publiques exercent un contrôle via la possibilité de redistribuer les aides que l'article 11 du présent projet de loi leur donne la faculté de mobiliser.

B. Conditions de validité du contrat

La validité du contrat est tout d'abord soumise à des conditions de fond : la personne morale s'oblige à fournir une aide particulière et continue à la personne physique ou au dirigeant associé unique d'une personne morale qui, parallèlement, s'engage à suivre un programme de préparation à la création et à la gestion d'une activité économique. Cette aide doit se traduire matériellement (fourniture de locaux et de matériel ainsi que de moyens financiers) et théoriquement (fourniture d'informations relatives aux procédures administratives, préparation à la gestion de l'entreprise, etc.).

La personne morale qui accompagne doit fournir cette aide par tous moyens, qu'ils soient matériels, techniques ou juridiques, mais à la condition que le dispositif proposé par l'accompagnateur soit prévu par le contrat. Il subsiste, cependant, une imprécision liée à l'emploi d'expressions différentes - « tous moyens » et « tout moyen » - aux articles 127-1 et L.127-3 du code de commerce. La nécessité de clarifier le texte conduira votre commission à vous proposer sur ce point un amendement de précision et d'harmonisation de la rédaction.

La validité du contrat est également soumise à des conditions de forme, exposées à l'article L. 127-2 nouveau du code de commerce. Aux termes de cet article, le contrat est, de façon classique, écrit sous peine de nullité. Il est conclu pour douze mois et renouvelable deux fois. Il précise les modalités du programme, les engagements pris par les parties contractantes et les relations entre le bénéficiaire et des tiers.

C. Liens entre l'entreprise en cours d'installation et son accompagnateur

Entre l'accompagnateur et le bénéficiaire, il existe un lien de solidarité, assorti d'une responsabilisation de chacun et d'une transparence des relations, organisé par les articles L. 127-3 à L. 127-6 nouveaux du code du commerce.

Afin de garantir la transparence des comptes et des statuts , le premier alinéa de l'article L. 127-5 interdit le marchandage et le prêt de main-d'oeuvre illicite (articles L. 125-1 et L. 125-3 du code du travail) ainsi que le travail dissimulé (articles L. 324-9 et L. 324-10 du même code). En outre, le deuxième alinéa de cet article L. 127-5 prévoit que l'activité du bénéficiaire doit être, afin d'écarter tout risque de confusion dans les comptes et dans les statuts des contractants, clairement distinguée de l'activité propre de l'accompagnateur et exercée de façon autonome . L'objet de ces dispositions est d'éviter qu'une entreprise ne prête l'un de ses salariés à une entreprise partenaire pour l'exercice par celle-ci de son activité sous forme d'un contrat d'accompagnement. Il s'agit aussi d'éviter que les entreprises utilisent ce mode contractuel pour s'affranchir de leurs obligations déclaratives pour l'emploi d'un salarié.

La responsabilisation des contractants est assurée par l'article L. 127-3, lequel précise qu'il n'existe aucun lien de subordination du bénéficiaire de l'aide à la création d'une activité économique envers l'accompagnateur. En effet, le contrat d'accompagnement n'étant pas un contrat de travail, le bénéficiaire n'est pas un salarié de l'entreprise accompagnatrice et n'a donc d'ordres à recevoir de celle-ci.

S'agissant de la solidarité entre les contractants , elle est organisée par l'article L. 127-4, qui distingue deux situations :

- avant l'immatriculation de l'entreprise , l'accompagnateur est tenu d'assumer les engagements pris par le bénéficiaire auprès des tiers à l'occasion du programme d'accompagnement ; cette disposition assure et renforce la position du bénéficiaire vis-à-vis de ses engagements ;

- après l'immatriculation de l'entreprise et jusqu'à expiration du contrat , les contractants sont tenus solidairement des engagements pris auprès d'un tiers ; il s'agit là d'un régime de coresponsabilité obligatoire.

En revanche, l'article L. 127-6 relatif à la responsabilité de l'accompagnateur pour les dommages causés par le bénéficiaire à des tiers à l'occasion du programme d'accompagnement ne procède à aucune distinction entre la période qui précède et celle qui succède à l'immatriculation . Enfin, le lien comptable est beaucoup plus étroit que le lien statutaire décrit à l'article L. 127-5, puisque l'article L. 127-3 prévoit l'inscription dans les comptes de l'entreprise des frais engagés dans le cadre du contrat d'accompagnement. Doit également être inscrite dans le bilan la contrepartie éventuelle des frais engagés par l'employeur (par exemple, produits de l'activité et aides des collectivités publiques).

D. Publicité

Le contrat d'accompagnement fera, aux termes de l'article L. 127-7 du code du commerce, l'objet d'une publicité dont les modalités seront fixées par décret en Conseil d'Etat.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a enrichi d'un amendement substantiel l'article 10 du projet de loi. Cette modification, introduite à l'article L. 127-4 nouveau du code du commerce, tend à substituer à la coresponsabilité systématique de l'accompagnant et du bénéficiaire à l'égard des dommages causés aux tiers une faculté pour les parties de définir dans le contrat d'accompagnement les modalités d'une éventuelle coresponsabilité . En d'autres termes, l'accompagnateur ne sera plus soumis à un régime de coresponsabilité, sauf si le contrat le prévoie .

L'Assemblée nationale a en effet estimé que s'il était concevable, avant l'immatriculation de l'entreprise, de poursuivre une activité sous la protection d'un accompagnant, cette tutelle devait, après l'immatriculation, résulter d'un choix des deux parties, la nouvelle entreprise devant alors être en mesure d'assumer seule les responsabilités découlant des engagements qu'elle a souscrits.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale se félicite qu'un cadre juridique entoure plus efficacement les opérations d'accompagnement à la création ou à la reprise d'une entreprise . Il est indiscutable que les projets accompagnés aboutissent plus souvent que les autres et leur pérennité est mieux assurée. Nombre de porteurs de projets, rencontrant des difficultés d'accès au marché de l'emploi, ne trouvent pas de cadre approprié pour jauger la faisabilité économique de leur entreprise ainsi que leurs capacités entrepreneuriales. L'enquête SINE 98, déjà citée, a révélé que 66 % des créateurs n'ont eu recours à aucune formation, et 47 % à aucun conseil. Pour 45 % des personnes interrogées par l'INSEE, la création d'entreprise est une démarche solitaire (dans 44 % des cas, elle est menée avec un membre de la famille), et seuls 8 % des créateurs déclarent avoir mis en place leur projet avec l'aide d'un organisme de soutien à la création d'entreprise .

Aussi un encadrement est-il indispensable pour surmonter les difficultés liées à l'isolement des personnes créatrices, au caractère innovant de leur activité et à l'environnement local dans lequel ils opèrent (quartiers en difficulté, zones désertifiées). L'accompagnement leur permettra donc d'assurer la continuité de leur statut et de leurs droits et la protection des risques liées à l'exercice de leur activité. Le créateur ou le repreneur d'entreprise pourra tester la viabilité de son entreprise tout en bénéficiant d'un appui logistique, juridique et pédagogique pour une durée déterminée.

Néanmoins, le texte du projet de loi comporte quelques imprécisions et carences auxquelles il convient de remédier, d'une part, par des amendements rédactionnels et, d'autre part, par des amendements « de fond ».

S'agissant des amendements rédactionnels, votre commission spéciale vous en propose quinze. Tout d'abord, et comme elle en a précédemment exprimé le souci, huit amendements à l'objet identique visent à permettre aux repreneurs d'entreprises de bénéficier aussi des dispositions de cet article. Deux autres amendements de type rédactionnel viennent préciser les moyens mobilisés par les accompagnateurs : il serait, en effet, plus approprié que ces derniers soient tenus de mobiliser les moyens dont ils disposent plutôt que de leur imposer la mobilisation de tous les moyens actuels de préparation à la gestion de l'entreprise, qui ne sont pas toujours à leur portée. Par ailleurs, il est suggéré de remplacer, à la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 127-1 nouveau, l'expression « au bénéfice de » , peu seyant, par la formule « entre une personne morale et le dirigeant associé unique d'une personne morale» . Deux amendement proposent de supprimer les expressions « pour sa bonne exécution » à l'article L. 127-2 et « afin d'écarter tout risque de confusion » à l'article L.127-5, qui n'ont pas leur place dans un texte à valeur normative. Enfin, il convient de lever l'ambiguïté relative à l'indépendance des activités de l'accompagnateur et du créateur, de façon à ne pas exclure les entreprises qui recourent à la pratique de l'essaimage.

S'agissant des propositions d'amendements « de fond », votre commission spéciale estime que les accompagnateurs de projets doivent pouvoir exercer leur activité dans un cadre sécurisé.

Aussi souhaite-t-elle en premier lieu assouplir la responsabilité des accompagnateurs en matière d'engagements. Elle a approuvé la proposition de l'Assemblée nationale tendant à alléger la responsabilité des accompagnateurs en matière de dommages. Il s'agit, en effet, de ne pas décourager les accompagnateurs de la création d'entreprises en les soumettant à des contraintes excessives. Ce n'est pas non plus un service à rendre aux nouvelles entreprises que de les dégager de toute responsabilité, sachant que la création d'entreprise suppose une part de risque, à l'épreuve duquel se mesure la viabilité d'un projet. Il faut rappeler que la philosophie du présent article est d'aider les nouveaux entrepreneurs à mettre le pied à l'étrier et non de faire des accompagnateurs les pilotes de la nouvelle entreprise et à les obliger, surtout lorsqu'ils sont bénévoles, à endosser la responsabilité des dettes éventuellement contractées par le créateur. Le contrat d'accompagnement devra donc permettre de définir les droits, mais aussi les obligations de chacun.

En conséquence, il apparaît souhaitable à votre commission spéciale d' appliquer un régime de responsabilité identique en matière d'engagements (qui peuvent être financiers) et de dommages . Elle propose ainsi que, tout comme le régime défini en matière de dommages par l'Assemblée nationale, la responsabilité de l'accompagnateur en matière d'engagements après l'immatriculation ne puisse être mise en cause que si le contrat le prévoit .

En contrepartie, votre commission spéciale souhaiterait que la notion de formation soit mentionnée dans le contrat d'accompagnement. Elle est en effet convaincue de la nécessité de dispenser une formation à la gestion aux créateurs ou repreneurs d'entreprise , et en particulier aux chômeurs. Il ne s'agit pas d'exiger des créateurs ou repreneurs d'entreprise une qualification professionnelle, mais de permettre aux créateurs ou repreneurs sans expérience en matière de création ou de reprise d'entreprises d'avoir accès à un dispositif de formation au métier d'entrepreneur et à ses techniques (gestion, comptabilité, management). Votre commission spéciale vous propose par conséquent deux amendements, dont un de coordination, tendant à ce que le terme de « formation » à la gestion d'entreprise soit explicitement mentionné dans ce contrat.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 11-
Dispositif d'aide au contrat d'accompagnement
à la création d'entreprise et à leurs bénéficiaires

(Articles L. 322-8, L. 783-1 et L. 783-2 du code du travail
et articles L. 311-3 et L. 412-8 du code de la sécurité sociale)

Commentaire : le présent article a pour objet, d'une part, d'apporter un soutien financier à l'accompagnement à la création d'entreprise grâce à des aides de l'Etat et des collectivités publiques et, d'autre part, d'étendre à certains créateurs chômeurs les garanties d'hygiène et sécurité ainsi que d'affiliation aux régimes de sécurité sociale.

I. Le texte initial

Le paragraphe I décrit le contenu du nouvel article L. 322-8 du code du travail qui, d'une part, permet de mobiliser les aides de l'Etat et des collectivités publiques (régions conseils généraux, villes, agglomérations de communes) au bénéfice de l'accompagnement à la création d'entreprise , tel qu'il est défini à l'article 127-1 nouvellement introduit dans le code de commerce par l'article 10 précité du projet de loi, et, d'autre part, renvoie à un décret en Conseil d'Etat l'application de ces dispositions.

L'idée est de faire en sorte que, lorsque les porteurs de projets et leurs accompagnateurs développent des actions qui rencontrent les priorités des pouvoirs publics, des conventions puissent être conclues dans le cadre d'un partenariat politique, technique et opérationnel autour du projet, en particulier dans les territoires pour lesquels les dispositifs d'accompagnement classiques ne sont pas adaptés (zones urbaines sensibles, zones industrielles en friche, territoires en désertification). La participation des pouvoirs publics pourrait ainsi porter sur les aides à la création d'entreprises (ACCRE, EDEN, FRE), mobiliser les structures compétentes en matière de formation et d'emploi (ANPE, DATAR, FSE) et s'inscrire dans un cadre d'action précis (politique de la Ville, de la parité et de l'égalité professionnelle, insertion des personnes handicapées). Un cahier des charges devrait permettre de vérifier que les compétences et les moyens mis en oeuvre répondent à des objectifs définis.

Jusqu'à présent, le partenariat public-privé en matière de création ou la reprise d'entreprises n'a pas connu un essor comparable à ce qui existe chez certains de nos voisins européens, de telle sorte qu'aujourd'hui, la France accuse un retard important (voir par exemple l'encadré de la page suivante portant sur les Business Links britanniques).

Le paragraphe II prévoit de remplacer le chapitre III du titre VIII du livre VII du code du travail par un nouveau chapitre relatif à la « Situation des personnes bénéficiaires du contrat d'accompagnement à la création d'une activité économique » et comportant deux articles L. 783-1 et L. 783-2 nouveaux.

L'article L. 783-1 octroie aux créateurs d'entreprises visés à l'article L. 127-1 nouveau du code du commerce le bénéfice de certaines dispositions du code du travail, dont la personne morale accompagnatrice veille à l'application. Il s'agit :

- des dispositions relatives à l'hygiène, à la sécurité et aux conditions du travail, ainsi que celles relatives aux services de santé au travail (titres III et IV du livre II du code du travail) ;

- des dispositions relatives aux travailleurs privés d'emplois (titre V du livre III du code du travail) telles que l'affiliation obligatoire à l'assurance-chômage et un droit à l'indemnisation du risque chômage ;

- des dispositions figurant dans les nouveaux articles L. 311-3 et L. 412-8 du code de la sécurité sociale, relatives à l'affiliation obligatoire des bénéficiaires de contrats d'accompagnement aux assurances sociales du régime général.

LES BUSINESS LINKS BRITANNIQUES

Créés en 1993, les Business Links constituent l'interlocuteur unique des entreprises, nouvelles (ils mettent alors en oeuvre plutôt un « accompagnement-orientation ») comme existantes (« accompagnement-conseil »). Il s'agit de structures partenariales associant l'autorité régionale, les collectivités locales, une chambre de commerce et d'autres organismes agissant dans le domaine du conseil aux entreprises.

Les neuf bureaux régionaux du ministère de l'industrie et du commerce (DTI) établissent des contrats de trois ans avec les Business Links de leur ressort (cinq en moyenne, soit un pour 1,3 million d'habitants), en assurent le suivi et vérifient que les objectifs chiffrés fixés sont atteints. Le contrat détaille également le mode de rémunération du Business Link , qui comporte en général une part variable en fonction des performances. Les Business Links peuvent eux-mêmes utiliser des sous-traitants pour remplir certaines des missions qui leur sont confiées par contrat.

Les partenaires et l'Union européenne apportent l'essentiel du financement (la part du DTI étant de 40 % environ), mais les Business Links peuvent faire payer un ticket modérateur sur certains des services qu'ils proposent aux entreprises.

Les Business Links ont permis de structurer l'offre d'accompagnement, dans un contexte de foisonnement des structures proches du cas français ( ( * )

1)

. Les interventions des différents acteurs ont été rationalisées, une très large marge d'initiative étant toutefois laissée à l'échelon local.

L'impact du système britannique apparaît en outre supérieur au nôtre : 15 à 20 % des créateurs d'entreprises bénéficieraient d'un soutien par les Business Links , chiffre à comparer avec le taux français de 8 % d'entreprises soutenues en France, tiré de l'enquête SINE98 ( ( * )

2)

. Cette audience a pu être atteinte grâce à la clarté et à la visibilité du dispositif.

Enfin, ce dispositif privilégie l'« accompagnement-conseil », selon des modalités qui permettent au chef d'entreprise de recourir à des conseillers ou à des consultants compétents dans le domaine de la gestion d'entreprise. L'idée en a été reprise par la Finlande, sous une autre forme, au sein des TE-Keskus .

Source : Rapport d'enquête sur les dispositifs étrangers d'aide à la création et au développement des entreprises, Inspection générale des Finances/Conseil général des Mines, octobre 2002.

Le paragraphe III complète l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale en ajoutant les bénéficiaires d'un accompagnement à la création d'une activité économique à la liste des personnes auxquelles s'impose l'obligation prévue à l'article L. 311-2 de s'affilier aux assurances sociales du régime général.

Enfin, le paragraphe IV complète l'article L. 412-8 du code de la sécurité sociale en ajoutant ces bénéficiaires à la liste des personnes bénéficiant des mesures de protection contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

Un seul amendement, de nature rédactionnelle, a été introduit par l'Assemblée nationale au présent article, afin de procéder à une rédaction plus appropriée de son paragraphe IV.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale estime que la participation de l'Etat et des collectivités publiques est indispensable au succès de l'accompagnement des entreprises nouvelles, qui sont indispensables à la régénération de notre tissu économique national et qui peuvent, en outre, avoir un réel impact en termes de revitalisation des territoires désertés ou en difficulté. La complémentarité des actions privées et des politiques publiques sur un territoire donné participe de l'aménagement du territoire et de la dynamisation des réseaux d'accompagnement. Notre pays affiche sur ce plan un retard important sur ses voisins, auquel il convenait de remédier.

A cet article, votre commission spéciale propose, par coordination, que les reprises d'entreprises soient mentionnées au même titre que les créations d'entreprises, comme cela a été suggéré pour les articles précédents.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 12 -
Calcul prorata temporis des cotisations sociales

(Article L. 612-4 du code de la sécurité sociale)

Commentaire : cet article tend à proposer un rééquilibrage de l'assiette des cotisations d'assurance maladie et maternité payées par les entrepreneurs exerçant une activité occasionnelle non salariée non agricole en fonction de la réalité de leurs revenus.

I. Le texte initial

Cet article complète les dispositions du cinquième alinéa de l'article L. 612-4 du code de la sécurité sociale relatif à la proratisation des cotisations d'assurance maladie des assurés exerçant plusieurs activités non salariées successives au cours d'une même année civile afin d' en ouvrir le bénéfice aux entrepreneurs individuels exerçant une activité occasionnelle .

Cette disposition répond à un double souci d'équité - il s'agit de soustraire les entrepreneurs saisonniers de l'acquittement des cotisations calculées sur la base d'un revenu annuel forfaitaire alors même que les revenus n'ont pas encore été dégagés - et d'efficacité , puisqu'elle vise à combattre le travail non déclaré dans lequel les saisonniers peuvent être tentés de se réfugier pour échapper à l'acquittement de cotisations trop élevées au regard des revenus tirés de leur activité.

En effet, les interventions des URSSAF pour recouvrer les cotisations sociales éludées à raison du travail illégal augmentent sans cesse. En 2000, les URSSAF ont perçu 35,8 millions d'euros de redressement, dont 34,4 millions pour des cotisations dues pour l'emploi de salariés et 1,4 millions de cotisations dues par des employeurs et des travailleurs indépendants. La part des travailleurs occasionnels verbalisés y occupe une place importante.

Dans la législation actuelle, l'article 131-6 du code de la sécurité sociale relatif aux travailleurs non salariés non agricoles dispose que les cotisations d'assurance maladie et vieillesse sont assises sur le revenu professionnel non salarié ou, le cas échéant, sur des revenus forfaitaires. Les cotisations sont calculées chaque année à titre provisionnel en pourcentage du revenu professionnel de l'avant-dernière année ou des revenus forfaitaires. L'article L. 612-4 ajoute que ces cotisations sont calculées dans les limites d'un plafond, et dans des conditions déterminées par décret. C'est l'article D. 612-5 qui prévoit que le montant de la cotisation annuelle ne peut être inférieure à celui de la cotisation qui serait due au titre d`un revenu égal à 40 % du plafond de la sécurité sociale (11.290 euros). Ainsi, quel que soit le revenu dégagé de son activité par l'entrepreneur non agricole, celui-ci doit s'acquitter d'une cotisation annuelle s'élevant au moins à 734 euros .

Sur la base d'une activité moyenne annuelle égale à un trimestre, et partant de l'hypothèse maximale que toutes les entreprises sont concernées en termes de revenu, le dispositif proposé par le présent article permet de réaliser une économie moyenne de 230 euros par cotisant, susceptible de ramener à un niveau équitable le poids des charges sociales du travailleur occasionnel.

Naturellement, la proratisation appliquée aux 10.000 entreprises concernées aurait, pour les régimes de sécurité sociale, un coût potentiel estimé à 5,5 millions d'euros , dont on peut toutefois espérer qu'il serait compensé par les recettes issues de l'augmentation du nombre de déclarants.

La mesure est soumise à des trois conditions :

- la proratisation ne porte que sur les cotisations d'assurance maladie et de maternité, assises sur un revenu forfaitaire, tandis que les cotisations d'allocations familiales et d'assurance vieillesse, soumises à régime particulier, ne sont pas concernées ;

- la proratisation s'applique à un nombre de jours par année civile n'excédant pas un seuil fixé par décret ;

- une cotisation minimale annuelle, au montant également fixé par décret, sera exigée.

II. La position de votre commission spéciale

L'économie générale de l'article 12 du projet de loi répond à un souci d'équité et d'efficacité, qu'approuve pleinement votre commission spéciale. En permettant un calcul prorata temporis des cotisations maladie et maternité des entrepreneurs non agricoles occasionnels, l'article apporte une modification substantielle et attendue.

Sur les 2.496.000 entreprises de l'industrie, du commerce et des services recensées par l'INSEE en 2002, 13.000, soit 0,5 %, déclaraient avoir une activité saisonnière. Ces entreprises relevaient pour la quasi-totalité (12.000) d'activités liées au tourisme : commerce de détail (2.400), hôtels et restaurants (3.800) et services récréatifs, culturels ou sportifs (5.800).

Si le principe posé par l'article 12 semble pertinent à votre commission spéciale, elle estime aussi que le dispositif qu'il propose d'instituer pêche par manque d'ambition. Les travailleurs occasionnels devront, en effet, continuer à s'acquitter d'un montant minimum de cotisations calculées sur une assiette égale à 18 fois la base mensuelle de calcul des prestations familiales (334,83 euros), soit 6.027 euros. Or, beaucoup d'entre eux ne dégagent pas annuellement un tel revenu au titre de leur activité occasionnelle.

Votre commission spéciale vous propose donc de prendre comme base le bénéfice réellement dégagé par les entrepreneurs occasionnels visés par cet article, sans fixer de plancher minimum. Ainsi, le montant des cotisations serait proportionnel au résultat de leur activité. Tel est le sens de l'amendement visant compléter le sixième alinéa de l'article 612-4 du code de la sécurité sociale par une disposition nouvelle supprimant le plancher minimum pour les entrepreneurs occasionnels et fondant le calcul de leur cotisation d'assurance maladie sur le bénéfice réel de l'entreprise.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 12 bis (nouveau) -
Présomption de non-salariat des travailleurs

(Articles L. 120-3 et L. 120-3-1 (nouveaux) du code du travail) -

Commentaire : cet article additionnel, issu d'un amendement proposé par la rapporteure de la commission spéciale de l'Assemblée nationale et sous-amendé par le Gouvernement, opère un retour aux dispositions de la loi « Madelin »du 11 février 1994 instituant la présomption simple de non-salariat, qui avaient été remises en cause par la loi du 19 janvier 2000. En outre, il prévoit une disposition nouvelle relative à la sécurisation des contrats passés entre donneurs d'ouvrage et sociétés sous-traitantes.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

A. Le régime actuel

La loi n° 91-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, dite « loi Madelin », avait cherché, par l'insertion d'un article L. 120-3 dans le code du travail, à sécuriser les relations entre donneurs d'ouvrage et exécutants en instituant une présomption simple de non-salariat pour les personnes physiques inscrites au registre du commerce et des sociétés . Ce principe de présomption d'indépendance pour les personnes physiques qui choisissaient de devenir entrepreneur individuel favorisait la stabilisation des relations juridiques.

Il permettait par exemple aux médecins indépendants d'exercer dans des centres de thalassothérapie, aux kinésithérapeutes indépendants d'exercer dans des clubs sportifs ou encore aux apporteurs d'affaires d'effectuer du démarchage pour le compte de certaines entreprises, sans pour autant être considérés comme les salariés « dissimulés » des entreprises dans lesquelles ils exerçaient.

Cependant, la loi n° 2000-37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail a supprimé cette présomption de non-salariat et rétabli une présomption inverse , qui a conduit les juges, saisis par les URSSAF, l'inspection du travail, voire les salariés eux-mêmes, à requalifier en contrats de travail certains contrats d'entreprise . Cette requalification peut, dans le droit actuellement en vigueur, entraîner une condamnation pénale des dirigeants de l'entreprise donneuse d'ouvrage (voire de l'entreprise en tant que personne morale) pour travail dissimulé .

B. La modification proposée

Le présent article 12 bis , outre qu'il revient sur les dispositions de la loi du 19 janvier 2000 pour rétablir celles de la loi Madelin relatives aux personnes physiques , propose en outre un nouveau régime de présomption légale en ce qui concerne les contrats conclus entre les donneurs d'ouvrage et les sociétés .

Le paragraphe I de l'article procède à une nouvelle rédaction de l'article L. 120-3 du code du travail.

Le premier alinéa dispose ainsi que les personnes physiques qui se voient confier la charge de l'exécution d'une activité sont présumées ne pas être liées par un contrat de travail, à la condition qu'elles soient immatriculées pour cette activité au registre du commerce et des sociétés, au répertoire des métiers, au registre des agents commerciaux ou auprès des URSSAF pour le recouvrement des cotisations d'allocations familiales.

Le second alinéa précise les conditions dans lesquelles l'existence du contrat de travail est établie et les cas pour lesquels la dissimulation d'emploi salarié est avérée . Pour que l'existence d'un contrat de travail soit établie, il est nécessaire que les personnes citées ci-dessus fournissent directement ou par l'intermédiaire d'une autre personne des prestations à un donneur d'ouvrage de telle sorte qu'elles soient placées dans un lien de subordination juridique permanente à l'égard du donneur d'ordre. Cette situation est constitutive d'un délit si la dissimulation de travail salarié est prouvée.

Cette notion de dissimulation de travail salarié est définie au quatrième alinéa de l'article L. 324-10 du code du travail comme le fait pour un employeur de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de l'une des formalités prévues aux articles L. 143-3 et L. 320 du code du travail, à savoir la remise par l'employeur d'un bulletin de paie à toutes les personnes avec lesquelles il a conclu un contrat de travail et la remise à l'URSSAF d'une déclaration nominative avant toute embauche d'un salarié . Seul, désormais, le rassemblement de ces preuves pourra permettre d'établir que le donneur d'ouvrage a préféré passer un contrat d'entreprise dans « le but principal » (et non dans « le seul but » , comme le prévoyait la rédaction initiale de la commission spéciale de l'Assemblée nationale) de se soustraire aux obligations qu'impose la conclusion d'un contrat de travail à un employeur.

Le paragraphe II ajoute par ailleurs un article L. 120-3-1 au code du travail afin d'organiser plus précisément les relations entre les donneurs d'ouvrage et les sociétés régulièrement immatriculées afin de les clarifier au regard de la notion de sous-traitance.

Rappelons qu'il y a sous-traitance lorsque deux conditions sont réunies : le sous-traitant « effectue un travail spécifique en vertu d'indications particulières » que lui donne l'entrepreneur principal, ce qui lui interdit de substituer à la prestation commandée une prestation équivalente ( ( * )1). En outre, le sous-traitant doit garder suffisamment d'indépendance vis-à-vis de l'entrepreneur principal pour que les obligations qui pèsent sur lui ne soient pas constitutives d'un lien de subordination comparable au lien hiérarchique qui existe entre son salarié et son employeur( ( * )2).

Avec le texte proposé par l'Assemblée nationale pour le nouvel article L. 120-3 du code du travail, l'infraction ne pourrait être désormais constituée que si le donneur d'ouvrage a imposé des conditions contractuelles plaçant les dirigeants et les salariés de la société sous-traitante dans un lien de subordination juridique permanente à son égard, et agi dans le but principal de se soustraire aux obligations qui auraient pesé sur lui en tant qu'employeur.

Evaluation du travail dissimulé

Le travail dissimulé constitue 71 % des infractions liées aux activités productrices non déclarées. Le délit de dissimulation de salarié y occupe une place prépondérante et en forte croissance (son poids est passé de 34 % en 1992 à 58 % en 1999) au détriment de la dissimulation d'activité. Les fraudes aux ASSEDIC, le marchandage et le prêt de main-d'oeuvre représentent entre 2 et 3 % du total.

Un quart des infractions de dissimulation de salariés est relevé dans l'hôtellerie-restauration et un cinquième l'est dans le secteur du commerce ; 40 % du marchandage et prêt illicite de main-d'oeuvre provient du BTP.

Les tentatives de déqualification des relations d'emploi qui permettent de s'affranchir du statut protecteur du salariat se traduisent par le recours abusif à d'autres statuts ou à des fournisseurs de main-d'oeuvre sous couvert d'une fausse prestation de services : contrat de mandat, contrat de stage, bénévolat, contrat d'entreprise avec des travailleurs indépendants, contrat de franchise, contrat de gérance-mandat et fausse sous-traitance.

Source : Secrétariat d'Etat PME, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale approuve la clarification et la simplification apportées par l'Assemblée nationale. Le régime applicable à la présomption de non salariat a atteint un degré de complexité et d'obscurité auxquels la jurisprudence n'a pas pu remédier . Il en est résulté une pénalisation accrue de ce droit, qui pèse lourdement sur la dynamique entrepreneuriale dans notre pays.

La confusion du régime applicable à la présomption de non salariat s'explique surtout en raison de l'imprécision de la distinction entre contrat d'entreprise, tel que les contrats de sous-traitance, et contrat de travail. Il en résulte que les entreprises n'ont d'autres critères que des repères jurisprudentiels complexes pour tenter d'éviter le risque pénal lié à la requalification, de telle sorte qu'elles se trouvent dans une situation d`insécurité juridique inacceptable.

Pour autant, le travail dissimulé est une réalité que votre commission spéciale n'ignore pas . Il était nécessaire de revenir aux dispositions de la loi du 11 février 1994 : c'est chose faite avec le paragraphe I du présent article 12 bis . A l'inverse, il faudra veiller à ce que l'application de son paragraphe II ne permette pas des détournements portant atteinte tant à l'équilibre social qu'à la loyauté économique.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 12 bis -
Possibilité de transfert d'épargne d'assurance-vie

(Article L.132-23 du code des assurances)

Commentaire : afin de faciliter le passage du statut de salarié à celui d'entrepreneur, cet article additionnel proposé par votre commission spéciale vise à permettre de transférer l'épargne d'assurance-vie accumulée dans un contrat groupe pour salariés sur un contrat groupe souscrit par une association de non salariés, et inversement.

I. Le régime actuel

L'article L. 132-23 du code des assurances dispose que les contrats d'assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle ne comportent pas de possibilité de rachat.

Il prévoit toutefois une dérogation dans certains cas limitativement énumérés pour lesquels un tel transfert est possible. Cette dérogation permet aux contractants d'une assurance-vie de groupe de transférer, donc de racheter, l'épargne ainsi accumulée lorsque se produisent certains événements tels que :

- l'expiration des droits de l'assuré aux allocations d'assurance chômage prévues par le code du travail en cas de licenciement ;

- la cessation d'activité non salariée de l'assuré à la suite d'un jugement de liquidation judiciaire en application des dispositions de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises ;

- l'invalidité de l'assuré correspondant au classement dans les deuxième (invalides capables d'exercer une activité rémunérée) ou troisième (invalides qui, étant absolument incapables d'exercer une profession, sont, en outre, dans l'obligation d'avoir recours à l'assistance d'une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires) catégories prévues à l'article L. 341-4 du code de la sécurité sociale.

Le sixième alinéa de l'article L. 132-23 du code des assurances ajoute cependant les contrats d'assurance de groupe en cas de vie dont les prestations sont liées à la cessation d'activité professionnelle doivent comporter une clause de transférabilité . Ainsi, les contractants d'un contrat d'assurance-vie cessant leur activité professionnelle peuvent transférer à d'autres fins l'épargne qu'ils ont accumulée.

II. La modification proposée

L'article additionnel que vous propose d'adopter votre commission spéciale tend, dans le but de lever un obstacle supplémentaire à l'éventuelle décision, pour un salarié, de se lancer dans l'aventure entrepreneuriale et de changer de statut, à reconnaître que la nature des contrats de groupe de salariés et des contrats de groupe de non-salariés est identique au regard de l'applicabilité de la clause de transférabilité.

Ainsi, le passage du statut de salarié à celui de non-salarié (comme le passage inverse au demeurant) sera neutre en matière de gestion de l'épargne d'assurance-vie accumulée dans le cadre d'un contrat de groupe.



TITRE III-
FINANCEMENT DE L'INITIATIVE ÉCONOMIQUE
Article 13 A (nouveau) -
Obligation de respecter un délai de préavis en cas de
suppression des concours bancaires à une entreprise

(Article L. 313-12 du code monétaire et financier)

Commentaire : le présent article tend à instituer un délai de préavis d'une durée fixée par décret pour la suppression par un établissement de crédit de ses concours à une entreprise.

I. Le droit existant

L'article 60 de la loi bancaire du 24 janvier 1984, codifié à l'article L. 313-12 du code monétaire et financier, accorde des garanties aux entreprises qui bénéficient de concours bancaires en disposant, en son premier alinéa, que « tout concours à durée indéterminée, autre qu'occasionnel, qu'un établissement de crédit consent à une entreprise, ne peut être réduit ou interrompu que sur notification écrite et à l'expiration d'un délai de préavis fixé lors de l'octroi du concours » .

Le troisième et dernier alinéa de cet article précise que « le non-respect de ces dispositions peut entraîner la responsabilité pécuniaire de l'établissement de crédit ».

Le deuxième alinéa de l'article prévoit toutefois que l'établissement de crédit n'est pas tenu de respecter le délai précité ( ( * )1) :

- « en cas de comportement gravement répréhensible du bénéficiaire du crédit », comme la cession de créances professionnelles éteintes ou la présentation de faux bilans ;

- « ou au cas où la situation de ce dernier serait irrémédiablement compromise », c'est-à-dire lorsqu'il lui est impossible de continuer à faire face à l'exploitation.

A cet égard, l'établissement de crédit qui maintient son concours à une entreprise en difficulté risque même de voir sa responsabilité pécuniaire engagée pour soutien abusif, dès lors que le maintien d'un crédit bancaire est de nature à tromper les tiers créanciers sur la solvabilité de l'entreprise et que le passif s'accroît avec la prolongation de la vie de celle-ci. Cependant, comme le relevait en février 2002 notre collègue député M. Jean-Claude Daniel, dans son rapport sur le projet de loi pour le développement des petites entreprises et de l'artisanat ( ( * )1), « la responsabilité de l'établissement de crédit n'est engagée que si le crédit administré ne peut être remboursé sur les seules ressources de l'entreprise et si la banque n'a pas été suffisamment vigilante... [En outre], le financement consenti ou maintenu en période de difficultés financières ne peut être considéré de ce seul fait comme fautif ; il ne l'est que si la situation est désespérée et l'issue inévitable (Cass. Com, 9 mai 1978) ».

II. Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le présent article résulte d'un amendement présenté par notre collègue député M. Jean-Michel Fourgous, sous-amendé par le Gouvernement, lequel lui a donc donné un avis favorable.

Cet article reprend en fait le texte de l'article 3 du projet de loi « Patriat » pour le développement des petites entreprises et de l'artisanat, adopté en première lecture par l'Assemblée nationale au cours de la précédente législature, qui dispose :

- d'un côté, que le délai prévu par le premier alinéa de l'article L. 313-12 du code monétaire et financier « ne peut être inférieur à une durée fixée, par catégorie de crédits et en fonction des usages bancaires, par un décret pris après avis de la commission bancaire » ;

- de l'autre, que « l'établissement de crédit ne peut être tenu pour responsable des préjudices financiers éventuellement subis par d'autres créanciers du fait du maintien de son engagement durant ce délai ».

III. La position de votre commission spéciale

Le droit existant se traduit par une certaine insécurité pour les deux partenaires de la relation entreprise-établissement de crédit, en particulier dans le cas, extrêmement fréquent s'agissant de PME, où les crédits de trésorerie accordés par l'établissement de crédit prennent la forme de découverts tacites et non autorisés.

En effet, outre qu'elles doivent poursuivre leur exploitation avec l'épée de Damoclès de la suppression de ces crédits de trésorerie dans des délais très resserrés, les PME concernées peuvent éprouver des difficultés à établir, lorsque cette suppression intervient, que leur banque a mis brutalement fin à une pratique constante résultant d'un accord non écrit.

Inversement, les banques courent le risque de voir leur responsabilité pécuniaire engagée si elles ont accordé trop longtemps des découverts tacites à des entreprises dont la situation apparaîtrait ex post avoir été irrémédiablement compromise.

Compte tenu de ce contexte, votre commission spéciale estime que l'initiative de l'Assemblée nationale est opportune en ce qu'elle est susceptible d'accroître la confiance qui doit présider aux relations entre les entreprises et leurs établissements de crédit :

- en accordant aux entreprises qui bénéficient de concours de trésorerie un délai garanti par des dispositions extra-contractuelles ;

- en dégageant, en contrepartie, les établissements de crédit de leur responsabilité pécuniaire vis-à-vis des autres créanciers du fait du maintien de ce concours pendant ce délai réglementaire.

Les dispositions proposées par le présent article sont ainsi susceptibles d'améliorer le financement bancaire des PME.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 13 -
Fonds d'investissement de proximité (FIP)

(articles L. 214-41-1, L. 214-36 du code monétaire et financier,
L. 4211-1 du code général des collectivités territoriales, et
125-O A, 150-O C, 163 bis G, 163 octodecies A du code général des impôts)

Commentaire : le présent article vise à créer une nouvelle sous-catégorie de fonds communs de placement à risque (FCPR), les fonds d'investissement de proximité (FIP), dédiés au financement des petites et moyennes entreprises établies en région.

I. Une émergence du capital-investissement dont doivent pouvoir profiter les PME établies en région

A. Une croissance récente du capital-investissement en France

Si l'émergence du capital-risque en France est déjà ancienne, les années récentes ont connu une forte croissance des capitaux collectés et des investissements réalisés par ce biais. Ainsi, entre 1995 et 2002, année qui n'est pourtant pas au plan financier une des meilleures, les capitaux levés par l'intermédiaire des fonds de capital-investissement ont été multipliés par huit et les investissements par cinq.

SITUATION DU CAPITAL-INVESTISSEMENT EN FRANCE

(en milliards d'euros)

1995

1996

1997

1998

1999

2000

2001

2002 *

Capitaux levés

0,53

0,72

0,66

2,60

3,26

6,11

5,1

4,2

Investissements réalisés

0,75

0,87

1,26

1,79

2,82

5,30

3,29

3,52

dont amorçage/création

0,08

0,15

0,17

0,26

0,52

1,16

0,56

0,46

* Données provisoires pour 2002

Source : AFIC-PWC, communication du 11 mars 2003 et rapport 2001 sur l'activité du capital investissement

Ne sont investis dans l'amorçage et la création d'entreprise que 12,9 % des investissements réalisés par ces fonds de capital-investissement. L'entreprise naissante reste donc encore insuffisamment prise en compte en comparaison avec les autres cibles du capital-investissement que sont les entreprises déjà matures, en développement, ou celles susceptibles de faire l'objet d'une reprise.

INVESTISSEMENTS DES SOCIÉTÉS DE CAPITAL-INVESTISSEMENT PAR STADE

(en millions d'euros)

2002*

Amorçage

65

Création / post création

390

Développement

691

Transmission

2201

Rachats minoritaires

177

Total des montants investis

3524

Pour mémoire

- Investissements amorçage + création / post création

455

- Part de ces investissements dans le total

12,9 %

* Données provisoires pour 2002

Source : AFIC-PWC, communication du 11 mars 2003

Les placements dans les fonds de capital-risque connaissent une diffusion croissante parmi les épargnants. Si les fonds communs de placement à risque (FCPR) paraissent réservés à un public averti, voire à des investisseurs institutionnels, la diffusion publique des fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) ne cesse de progresser, comme en témoigne la part prépondérante des réseaux bancaires dans leur distribution.

SITUATION DES FPCI AU 31 DÉCEMBRE 2002

Année

1997

1998

1999

2000

2001

2002

Nombre de FCPI crées

5

5

11

17

30

31

Souscriptions en M €

67

151

248

421

567

370

Source : Commission des opérations de bourse

Les encours levés par les FCPI sont en forte croissance, manifestant ainsi l'attrait de ces produits dont l'argumentaire de placement repose largement sur la fiscalité applicable. Ceci explique que les volumes placés soient peu affectés par la situation des marchés de valeurs innovantes et l'évolution des valorisations.

Les années récentes permettent de tirer deux enseignements relatifs au capital-investissement « à la française ».

D'une part, il est apparu clairement que les investisseurs institutionnels et les investisseurs individuels ne peuvent cohabiter dans les mêmes fonds d'investissement. Le placement dans le public suppose en effet une libération immédiate des fonds alors que la souscription des institutionnels est fonction de la réalisation des investissements des fonds concernés. Il existe une réserve importante d'investissements du côté des investisseurs institutionnels nationaux qui allouent une part encore très faible de leurs actifs au capital-investissement par rapport à leurs homologues, américains notamment.

D'autre part, le capital investissement dispose d'une importante marge de progression auprès des grandes entreprises et des PME françaises qui peut s'expliquer par la réticence de certains entrepreneurs à ouvrir le capital de leur entreprise à des investisseurs professionnels. Cette réticence peut trouver sa source dans la méconnaissance et l'éloignement des outils du capital-investissement des entreprises.

Les fonds d'investissement de proximité que le présent article propose de créer devront tenir compte de ces deux enseignements.

B. Drainer l'épargne de proximité vers les PME régionales

Il existe aujourd'hui un marché concurrentiel dynamique du capital-investissement régional. Plus de cent soixante fonds de capital-investissement interviennent au niveau régional, drainant chaque année plusieurs milliards d'euros dans l'économie régionale ( ( * )1) ; les montants investis annuellement ont triplé depuis 1997 et dépassent aujourd'hui 200 millions d'euros. Les organismes régionaux, en moyenne au nombre d'une dizaine ( ( * )2) par région, couvrent l'ensemble de la chaîne de financement des entreprises ( ( * )3) et se sont fortement professionnalisés, en adoptant les outils de l'épargne collective (société de gestion, FPCR).

Il est cependant apparu que les PME régionales moyennes, d'une valorisation de cinq à cinquante millions d'euros, pouvaient rencontrer des difficultés à trouver des investisseurs professionnels correspondant à leurs caractéristiques. Ceci ne résulte pas d'une pénurie d'épargne ni sur un plan macroéconomique ni sur un plan territorial, mais de la faiblesse des outils territoriaux permettant une intermédiation de proximité.

C'est la raison pour laquelle est proposée la création des fonds d'investissement de proximité (FIP). Ils auront pour objet de drainer une épargne cherchant à s'investir dans des entreprises clairement « territorialisées ». L'outil d'investissement serait structuré comme un FCPR afin de capitaliser sur le succès de cette formule juridique éprouvée. Les sociétés de gestion feront l'objet d'un agrément par la commission des opérations de bourse et tout appel public à l'épargne sera subordonné à l'obtention d'un visa.

Votre commission spéciale souligne cependant à cette occasion que la création des FIP ne répondra pas au besoin de financement des très petites entreprises. D'une part, ces dernières sont structurées dans la majorité des cas sous forme de société individuelle : des produits d'intervention en capital ne leur sont donc pas adaptés. D'autre part, le modèle du capital-investissement suppose la réalisation de plus-values sur la cession de parts de l'entreprise dans un délai compatible avec la durée de vie du fonds, en général de huit ans, ce qui nécessite à la fois une forte croissance de l'entreprise et la liquidité de ses parts. Ces deux caractéristiques ne sont généralement pas remplies par les très petites entreprises.

Toutefois, les pouvoirs publics disposent d'autres leviers pour intervenir en leur faveur, notamment afin de favoriser leur financement bancaire. C'est en particulier le cas de la SOFARIS, qui leur consacre ses interventions à hauteur de 70 %. Reste que ces outils devront être développés.

II. Le dispositif proposé pour les fonds d'investissements de proximité

Le présent article crée un nouvel article du code monétaire et financier, l'article L. 214-41-1, au sein d'une nouvelle section consacrée aux fonds d'investissements de proximité. Ces fonds constitueront juridiquement une nouvelle sous-catégorie des fonds communs de placement à risque ( ( * )1). Ce sont les règles entourant ces FCPR qui donnent aux FIP leur physionomie « régionale ».

A. Une zone d'investissement régionale étendue à trois régions

Le fonds d'investissement de proximité devra retenir une zone géographique pour ses investissements limitée à une, deux ou trois régions limitrophes.

B. Une préférence pour les souscripteurs « personnes physiques »

Le dispositif proposé, qui prévoit un avantage fiscal, organisé à l'article 14 du présent projet de loi, pour les personnes physiques souscrivant aux FIP, s'adresse avant tout aux investisseurs physiques intéressés par la mobilisation de leur épargne pour des projets d'entreprises de proximité. Le réseau bancaire jouera un rôle capital pour la promotion de ce support d'épargne auprès des épargnants.

La part que pourra prendre les investisseurs institutionnels dans l'apport de capitaux aux FIP devrait rester limitée. En effet, le dispositif, modifié par l'Assemblée nationale, prévoit que les parts du fonds d'investissement de proximité ne pourront être détenues à plus de 20 % par une même personne morale de droit privé et à plus de 10 % par un même investisseur personne morale de droit public. En outre, la part détenue collectivement par ces personnes morales ne pourra dépasser 30 %.

Pour garantir la sécurité du placement pour les particuliers, la commission des opérations de bourse, qui agréera les FIP, a indiqué qu'elle souhaitait limiter les risques pris par les nouveaux fonds en fixant un coefficient de dispersion des risques de 5 %.

C. Un quota d'investissement dans les PME

Le fonds d'investissement doit investir au moins 60 % de ses actifs dans des valeurs mobilières, parts de société à responsabilité limitée et avances en compte courant émises par des PME.

La définition de la PME retenue dans le présent article est celle de l'annexe I au règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de l'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises. Ainsi que cela est précisé dans le commentaire de l'article 21 du présent projet de loi, il s'agit d'une entreprise employant moins de 250 personnes, dont soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 40 millions d'euros, soit le total du bilan annuel n'excède pas 27 millions d'euros, et qui respectent le critère de l'indépendance (dont la définition figure infra au commentaire de l'article 21, voir note (2) page 201).

Un sous-quota, ajouté par l'Assemblée nationale, prévoit en outre que 10 % des fonds investis devront l'être dans des entreprises de moins de huit ans.

Les PME financées devront être des entreprises « régionales », définies dans le dispositif comme celles exerçant la majeure partie de leurs activités dans des établissements situés dans la zone géographique choisie par le fonds. Cette définition sera précisée par décret.

L'Assemblée nationale a par ailleurs ajouté que pourront être prises en compte dans le quota de 60 % les participations versées à des sociétés de caution mutuelle ou à des organismes de garantie dans la zone géographique retenue par le fonds.

Enfin, au sein des 60 % pourront également figurer des parts de FCPR et des actions de capital risque à concurrence du pourcentage d'investissement direct de l'actif dans des PME « régionales ». Un FIP ne pourra détenir plus de 10 % dans des parts de FCPR ou d'actions de sociétés de capital-risque.

D. Une obligation d'investir les fonds rapidement

Le 5 de l'article L 214-36 du code monétaire et financier dispose que « le quota d'investissement de 50 % doit être respecté au plus tard lors de l'inventaire de clôture de l'exercice suivant l'exercice de la constitution du fonds commun de placement à risques et jusqu'à la clôture du cinquième exercice du fonds » . En ce qui concerne les FIP, le dispositif proposé indique que « les dispositions du 5 de l'article L. 214-36 s'appliquent aux fonds d'investissement de proximité sous réserve du respect du quota de 60 % » .

Les FIP devront donc avoir respecté ce quota de 60 % de fonds investis dans les deux ans. Si cette durée peut apparaître courte au regard de la pratique des fonds institutionnels de capital investissement régional, qui disposent généralement d'une période d'investissement de quatre à cinq ans, il ne paraît pas souhaitable de l'allonger pour les raisons suivantes :

- le fonds n'étant plus tenu de respecter le ratio d'investissement à la clôture du cinquième exercice, un fonds dont la durée moyenne est de huit ans ne devra donc le respecter que pendant trois ans ; aussi ne paraît-il pas souhaitable d'atténuer encore cette contrainte qui justifie le traitement fiscal très favorable des souscripteurs des FIP ;

- à cette occasion d'une réforme structurelle du statut des FCPR adoptée en 2002, il a été introduit le principe d'un « droit à l'erreur » permettant à un fonds, en cas de dépassement ponctuel d'un ratio, de disposer à titre exceptionnel d'un délai de régularisation ;

- un allongement de la période d'investissement accentuerait le délai séparant le moment de la collecte des fonds de celui de l'investissement dans les entreprises, délai qui apparaît déjà trop élevé pour les associations professionnelles d'entrepreneurs, et qui diminuerait la visibilité de l'efficacité économique des FIP ;

- enfin, il n'est économiquement pas efficace que des quantités importantes d'épargne soient stockés trop longtemps de manière stérile en trésorerie dans les fonds d'investissement.

Il appartiendra donc aux sociétés de gestion de dimensionner la taille du fonds afin d'être en mesure d'investir les montants levés en deux ans. Cette contrainte de gestion paraît saine au regard de la durée d'immobilisation de l'épargne dans les FIP.

E. Un rôle non négligeable reconnu aux acteurs locaux

Les collectivités locales joueront un rôle éminent dans le succès des FIP. Si des garde-fous ont été introduits, les collectivités territoriales et leurs groupements ne pouvant détenir directement ou indirectement des parts ou actions de FIP , l'appui de celles-ci sera déterminant.

Les relations entre les FIP et les collectivités locales - en priorité les régions, mais pas uniquement - seront établies par convention. Celle-ci pourra prévoir des priorités d'investissement dans tel ou tel secteur d'activité ou mettre l'accent sur certains types d'entreprise. En contrepartie, elle pourra prévoir une aide financière de la collectivité locale, par exemple sous la forme d'une aide financière pour amortir les frais de gestion.

III. La position de votre commission spéciale

Selon les informations fournies par la direction du Trésor, le nombre de FIP selon les régions sera variable et dépendra fortement tant de la réserve d'épargne que du potentiel économique de la région. A partir de projections financières établies sur les hypothèses de deux fonds en moyenne par région, d'une collecte moyenne de 7 millions d'euros par fonds par région et d'une taille moyenne pour les FIP de l'ordre de 15 millions d'euros (un FIP pourra couvrir jusqu'à trois régions), la collecte serait de l'ordre de 350 millions d'euros. Si l'investissement moyen par entreprise est de l'ordre de 250.000 euros, ce seront un peu plus de 1.300 entreprises qui seront ainsi financées.

Dans ces conditions, compte tenu des montants collectés, il paraît essentiel que les encours des FIP soient investis dans les entreprises ayant les plus gros besoins en fonds propres et les plus grosses difficultés pour attirer les investisseurs. La jeune entreprise régionale doit pouvoir bénéficier de l'effet de levier des FIP. Tel est l'objectif du sous-quota obligeant à investir 10 % du quota d'investissement de 60 % dans des entreprises de moins de huit ans.

Votre commission spéciale considère que les entreprises de moins de trois ans connaissent les risques de cessation d'activité les plus réels, faute de fonds-propres suffisants. Il paraît conforme à l'intérêt général que les fonds collectés sur la base d'un avantage fiscal soient utilisés par les FIP, dans la limite du sous-quota de 10 %, en direction des entreprises les plus fragiles mais aussi les plus prometteuses en termes de rentabilité. Elle propose donc que le sous-quota de 10 % s'adresse aux entreprises de moins de trois ans .

Par ailleurs, elle souhaite poser un critère alternatif, de siège social , pour définir les entreprises éligibles à un FIP. Les entreprises susceptibles d'être financées devront exercer la majeure partie de leurs activités dans des établissements situés dans la zone géographique choisie par le FIP ou y avoir établi leur siège social . Toutes les PME «régionales » devraient donc, grâce à ces deux critères alternatifs , être couvertes par un FIP.

Enfin, votre commission spéciale constate, en ce qui concerne la zone géographique couverte par un FIP, le caractère inapproprié de l'expression "régions limitrophes" pour les départements d'outre mer. Elle propose dès lors, en ce qui concerne l'outre-mer, que le fonds puisse choisir une zone géographique constituée de un, deux ou trois départements d'outre-mer .

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 14 -
Réduction d'impôt accordée au tire de la
souscription en numéraire de parts de FIP

(Article 199 terdecies -0 A du code général des impôts)

Commentaire : le présent article vise à introduire une réduction d'impôt en contrepartie de la souscription aux fonds d'investissement de proximité.

I. Le droit existant

Les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 25 % des souscriptions en numéraire de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) à la condition de :

- prendre l'engagement de conserver les parts de fonds pendant cinq ans au moins à compter de leur souscription ;

- ne pas détenir, collectivement avec son conjoint, ses ascendants et descendants, plus de 10 % des parts du fonds et, directement ou indirectement, plus de 25 % des droits dans les bénéfices des sociétés dont les titres figurent à l'actif du fonds ou avoir détenu ce montant à un moment quelconque au cours des cinq années précédant la souscription des parts du fonds ou l'apport des titres.

Lorsque le FCPI ne remplit pas son quota d'investissement de 60 % des sommes récoltées dans les entreprises innovantes prévu à l'article L. 214-41 du code monétaire et financier, ou lorsque le contribuable ne remplit pas les conditions citées ci-dessus, la réduction d'impôt sur le revenu fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours. Cette disposition ne s'applique pas pour la première condition liée à l'engagement de conservation en cas de licenciement, d'invalidité ou encore de décès du contribuable ou de l'un des époux soumis à une imposition commune.

II. Le dispositif proposé

A. La disposition initiale

Le présent article a prévu d'appliquer aux FIP le droit existant pour les FCPI. Les versements ouvrant droit à la réduction d'impôt sont ceux effectués jusqu'au 31 décembre 2006. Le texte initial prévoyait que la réduction d'impôt de 25 % soit retenue dans les limites annuelles de 10.000 euros pour les contribuables célibataires, veufs ou divorcés, et de 20.000 euros pour les contribuables mariés soumis à imposition commune.

B. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté, sur avis favorable du Gouvernement, un amendement portant la limite de l'avantage fiscal à 12.000 euros pour un célibataire et 24.000 euros pour un couple afin d'aligner l'incitation fiscale pour les FIP sur celle des FCPI.

III. La position de votre commission spéciale

En raison des objectifs d'intérêt général poursuivis par les FIP, qui visent à la fois au développement des PME et à l'aménagement du territoire, et compte tenu des risques qui pèsent par ailleurs en termes de rentabilité sur les investissements dans les PME, l'octroi d'un avantage fiscal important paraît justifié à votre commission spéciale. C'est à cause de cet avantage fiscal que peuvent être posées diverses contraintes d'investissement aux FIP, comme celles d'investir dans des entreprises nouvelles.

La majeure partie des souscriptions aux FCPI s'effectue aujourd'hui dans les deux derniers mois de l'année : la motivation fiscale est donc cruciale pour les épargnants. Il a fort à parier que tel sera également le cas pour les FIP.

Il appartiendra dès lors aux réseaux bancaires et d'assurances de calibrer correctement la vente de ces produits d'épargne pour que les sommes collectés n'excèdent pas la capacité d'investissement des fonds dans les délais impartis. Dès lors, il serait souhaitable de mener des expérimentations à partir de quelques « FIP pilotes », pour bien évaluer la taille idéale d'un FIP et bien dimensionner ensuite la politique commerciale vis-à-vis des épargnants. Il semble en effet, en ce qui concerne les FCPI, que la pratique soit aujourd'hui inverse : ces fonds sont parfois survendus par les réseaux par rapport aux besoins réels d'apport en capital que connaissent les entreprises innovantes.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 14 -
Correction d'une erreur de codification

(Article L. 214-41 du code monétaire et financier)

Commentaire : le présent article tend à corriger une omission survenue lors de la rédaction de l'article L. 214-41 du code monétaire et financier relatif aux fonds communs de placement dans l'innovation.

La rédaction de l'article L. 214-41 du code monétaire et financier dispose aujourd'hui que les fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) sont des fonds communs de placement à risque (FCPR) dont l'actif est composé pour 60 % au moins de valeurs mobilières, parts de SARL et avances en compte courant émises par des sociétés (...) « dont le capital est détenu, majoritairement, par des personnes physiques ou par des personnes morales détenues par des personnes physiques qui remplissent les conditions suivantes (...) ».

Cette rédaction ne tient donc pas compte de l'article 5 de la loi n° 99-587 sur l'innovation et la recherche du 12 juillet 1999, dont le paragraphe A disposait que « au premier alinéa de l'article 22-1 de la loi n° 88-1201 du 23 décembre 1988 relative aux organismes de placement collectif en valeurs mobilières et portant création des fonds communs de créances, les mots : "dont le capital est détenu majoritairement par des personnes physiques ou par des personnes morales détenues par des personnes physiques" sont remplacés par les mots : "dont le capital n'est pas détenu majoritairement, directement ou indirectement, par une ou plusieurs personnes morales ayant des liens de dépendance avec une autre personne morale au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies du code général des impôts" ».

L'instruction fiscale n° 5 B-16-00 du 23 juin 2000 repose d'ailleurs sur cette dernière version, significativement plus souple.

Cette omission n'est toutefois pas sans portée juridique puisque l'article 78 la loi de finances pour 2002 (n° 2001-1275 du 28 décembre 2001) a modifié cet article L. 214-41 du code monétaire et financier, ce qui en emporte en principe ratification.

Par ailleurs, le II de cet article L. 241-41 du code monétaire et financier, tout comme l'article 5 de la loi sur l'innovation et la recherche du 12 juillet 1999, font référence, pour l'appréciation d'un critère de dépendance, au 1 bis de l'article 39 terdecies du code général des impôts, qui est abrogé.

Dans un double souci de sécurité juridique des épargnants et d'intelligibilité de la loi, votre rapporteur vous propose donc d'adopter un article additionnel transposant dès maintenant dans le code monétaire et financier :

- d'une part, les dispositions précitées de l'article 5 de la loi n° 99-587 sur l'innovation et la recherche du 12 juillet 1999 ;

- d'autre part, le critère de dépendance de l'ancien 1 bis de l'article 39 terdecies du code général des impôts.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 15 -
Aménagement du dispositif de réduction d'impôt sur le revenu
au titre de la souscription au capital de sociétés non cotées

(Article 199 terdecies -0 A du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose de relever le plafond du montant des souscriptions au capital de sociétés non cotées pouvant ouvrir droit à réduction d'impôt sur le revenu, et d'apporter des précisions relatives aux sociétés éligibles .

I. Le droit existant

L'article 199 terdecies -0 A du code général des impôts prévoit que « les contribuables domiciliés fiscalement en France peuvent bénéficier d'une réduction de leur impôt sur le revenu égale à 25 % des souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés non cotées ».

Cette réduction d'impôt, dite « Madelin » ( ( * )1), qui vise à inciter les épargnants à investir en fonds propres dans les petites et moyennes entreprises, a été aménagée sur plusieurs points et prolongée pour cinq ans (c'est-à-dire pour les versements effectués jusqu'au 31 décembre 2006), par l'article 81 de la loi de finances initiale pour 2002 (loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001).

Les sociétés concernées doivent satisfaire à quatre conditions :

- ne pas être cotées sur un marché réglementé ;

- relever de l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun (de plein droit ou sur option) ;

- en cas d'augmentation du capital, réaliser un chiffre d'affaires hors taxes inférieur à 40 millions d'euros ou présenter un total de bilan inférieur à 27 millions d'euros ( ( * )1) ;

- disposer d'un capital majoritairement détenu par des personnes physiques ou des « holdings » de famille ( ( * )2) sauf, depuis la loi de finances pour 2002, pour les entreprises solidaires définies par l'article L. 443-3-1 du code du travail.

La réduction d'impôt est alors égale à 25 % du montant des versements effectués au cours d'une année, dans la limite d'un plafond de 6.000 euros pour les célibataires, veufs ou divorcés, et de 12.000 euros pour les contribuables mariés ( ( * )3).

Le bénéfice de cette réduction d'impôt n'est définitivement acquis que si le contribuable conserve ses titres jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant la souscription. A défaut, il est pratiqué, au titre de l'année de cession des actions ou des parts, une reprise des réductions, dans la limite du prix de cession. Cependant, aucune reprise n'est effectuée en cas de licenciement, d'invalidité rendant impossible l'exercice d'une profession ou nécessitant d'avoir recours à une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie, ou encore de décès du contribuable ou de son époux soumis à imposition commune.

Afin d'éviter le cumul d'avantages fiscaux, n'ouvrent pas droit à la réduction d'impôt les souscriptions donnant lieu :

- aux déductions prévues au 2° quater de l'article 83 du code général des impôts (déduction des intérêts d'emprunt contractés pour souscription au capital d'une société nouvelle), ainsi qu'aux article 163 septdecies (déduction des souscriptions au capital de SOFICA ( ( * )1)) et 163 duovicies (déduction des souscriptions en capital aux sociétés agréées de pêche artisanale - SOFIPÊCHE) ;

- à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies A pour les investissements dans les départements d'outre-mer.

En sens inverse, mais toujours pour éviter le cumul d'avantages fiscaux, les actions ou parts dont la souscription a ouvert droit à la réduction d'impôt ne peuvent pas figurer dans un plan d'épargne en actions (PEA), ni dans un plan d'épargne d'entreprise (PEE), ni un plan d'épargne interentreprises (PEI), ni enfin un plan partenarial d'épargne salariale volontaire (PPESV).

Selon les « bleus » des voies et moyens annexés aux projets de loi de finances pour 2001 et pour 2002, le coût de ce dispositif peut être évalué à 53 millions d'euros en 2000, 64 millions en 2001 et 67 millions en 2002 : près de 270 millions d'euros de souscriptions ont donc bénéficié de la réduction d'impôt au titre de 2002.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, environ 65.000 foyers fiscaux seraient concernés (pour un montant moyen de souscriptions d'un peu plus de 4.000 euros par foyer), seuls 18 à 19 % d'entre eux saturant les plafonds en vigueur.

NOMBRE DE FOYERS FISCAUX BÉNÉFICIANT DU DISPOSITIF « MADELIN »

Année d'imposition des revenus

Nombre de foyers fiscaux bénéficiaires imposables

Nombre de foyers fiscaux bénéficiaires non imposables

Nombre total de foyers bénéficiaires

1998

46.746

17.243

63.989

1999

45.977

17.267

63.244

2000

49.072

18.455

67.527

2001

45.711

19.162

64.873

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

L'étude de la répartition des foyers fiscaux bénéficiaires par tranche de revenu montre d'ailleurs que le bénéfice de cette mesure n'est pas concentré sur les ménages aux revenus les plus élevés.

RÉPARTITION DES BÉNÉFICIAIRES DE LA RÉDUCTION D'IMPÔT
PAR TRANCHE DE REVENU IMPOSABLE (ANNÉE 2000)

Tranche de revenu imposable

Nombre de foyers fiscaux (en %)

Entre 0 et 7.622 €

6,12

De 7.622 à 15.245 €

17,40

De 15.245 à 30.490 €

28,85

De 30.490 à 45.735 €

19,45

De 45.735 à 60.980 €

9,42

De 60.980 à 76.225 €

5,65

Supérieur à 76.225 €

13,11

Total

100

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

II. Le dispositif proposé

A. L'aménagement des conditions devant être remplies par les sociétés éligibles

Le présent article propose tout d'abord d'apporter trois aménagements aux conditions devant être remplies par les sociétés éligibles.

Il insère tout d'abord une précision visant à tenir compte de l'évolution des marchés de capitaux et consistant à substituer à la condition selon laquelle ces sociétés doivent être « non cotées » celle selon laquelle « les titres de la société ne sont pas admis aux négociations sur un marché réglementé français ou étranger ».

Il propose ensuite de prévenir les détournements du dispositif rendus possibles du fait de son aménagement par l'article 81 de la loi de finances pour 2002.

On peut en effet rappeler qu'à l'initiative de sa commission des finances et de notre collègue député M. Jean-Louis Dumont, l'Assemblée nationale avait alors supprimé toutes les restrictions relatives à la nature de l'activité des sociétés éligibles, ouvrant de la sorte aux entreprises exerçant une activité bancaire, financière, d'assurance, et de gestion ou de location immobilières le bénéfice de souscriptions ouvrant droit à la réduction d'impôt.

Or, cette extension a conduit à des abus : ont en effet bénéficié du dispositif des sociétés holding pures dont l'activité consistait en fait à détenir des participations dans des sociétés non éligibles, ce qui n'était évidemment pas conforme à l'intention du législateur.

C'est pourquoi le 4° du A du I du présent article propose, sans remettre en cause l'extension du dispositif à toutes les activités économiques adoptée dans le cadre de la loi de finances pour 2002, d'en exclure les sociétés holding (c'est-à-dire les sociétés qui ont pour objet principal de détenir des participations dans d'autres sociétés), à l'exception de celles qui détiennent des sociétés elles-mêmes éligibles au dispositif.

Enfin, le 2° du A du I de cet article, qui a bénéficié d'une précision rédactionnelle apportée par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission spéciale, propose de manière plus générale, pour une société détenant des participations , que la détermination du chiffre d'affaires et du bilan tienne compte du chiffre d'affaires et du total du bilan des sociétés dans lesquelles elle détient directement ou indirectement une participation, et ce, en proportion de cette participation.

B. Le triplement du plafond des souscriptions ouvrant droit à la réduction d'impôt

Le B du I du présent article propose par ailleurs de porter le plafond des souscriptions ouvrant droit à la réduction d'impôt de 6.000 à 20.000 euros pour les personnes seules et de 12.000 à 40.000 euros pour les couples mariés soumis à imposition commune, le relèvement de ce plafond s'appliquant aux versements réalisés à compter du 1 er janvier 2003.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie estime à 36 millions d'euros le coût de ce triplement, ce qui porterait à un peu plus d'une centaine de millions d'euros par an la dépense fiscale attachée au dispositif. Cette estimation est toutefois empreinte d'une grande marge d'incertitude dès lors qu'il est très difficile d'apprécier ex-ante l'impact psychologique de cette mesure.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale approuve les aménagements techniques proposés par le présent article pour la définition des entreprises éligibles.

Elle se félicite par ailleurs tout particulièrement du relèvement du plafond des souscriptions ouvrant droit à la réduction d'impôt.

On peut au demeurant souligner que cette mesure fait depuis plusieurs années l'objet de préconisations convergentes :

- notre collègue député M. Eric Besson , dans un rapport d'information sur la création d'entreprise ( ( * )1), avait proposé un mécanisme de réduction d'impôt similaire, réservé exclusivement à la création d'entreprise mais avec des plafonds de souscription plus élevés que ceux actuellement en vigueur ;

- dans un rapport relatif aux dispositifs publics d'aide à la création d'entreprise, l'inspection générale des finances proposait de même en juillet 2001 un « approfondissement » au profit des seules jeunes entreprises de ce dispositif qu'elle jugeait « intéressant », mais dont elle estimait l'avantage octroyé « manifestement insuffisant » en cas de création d'entreprise (l'inspection générale des finances estimant forfaitairement que le dispositif ne servait que pour moitié à financer des créations d'entreprises) ;

- parallèlement, notre collègue député M. Michel Charzat avait souhaité, dans un rapport remis au Premier ministre en juillet 2001 ( ( * )1), la revalorisation dans tous les cas des plafonds à 12.500 euros pour les contribuables célibataires et à 25.000 euros pour les contribuables mariés ;

- de même, le Sénat avait adopté, lors de l'examen de la loi de finances pour 2002, à l'initiative de sa commission des finances, le doublement de ces plafonds à 12.000 euros pour les contribuables célibataires et à 24.000 euros pour les contribuables mariés, cette mesure ayant toutefois été ensuite rejetée par l'Assemblée nationale à la demande du précédent gouvernement.

Loin de constituer seulement un effet d'aubaine pour la fraction des souscripteurs qui atteignent les plafonds actuels de versements, le triplement de ces plafonds est en effet de nature :

- d'une part, selon le rapport de l'inspection générale des finances précité, à renforcer « la faculté [pour le créateur d'entreprise] d'accroître les fonds propres dont il dispose pour mener à bien son projet », notamment en mobilisant l'épargne de ses proches ;

- et d'autre part à sortir le dispositif de sa relative confidentialité, à promouvoir la reconnaissance sociale de la création d'entreprise, et à donner de ce fait un signal fort de soutien aux créateurs d'entreprise.

Au total, les auditions conduites par votre rapporteur suggèrent que la présente mesure pourrait significativement faciliter l'action des réseaux d'accompagnement et de promotion de la création d'entreprise.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

Article 16 -
Doublement du plafond de déductibilité des pertes subies
à la suite d'une souscription au capital d'une société nouvelle

(Article 163 octodecies A du code général des impôts)

Commentaire : le présent article tend à doubler, pour le porter à 60.000 euros pour les couples mariés soumis à imposition commune et à 30.000 euros pour les autres contribuables, le plafond de déductibilité des pertes en capital subies à la suite d'une souscription au capital d'une société nouvelle ou d'une augmentation de capital réalisée par une entreprise dans le cadre d'un plan de redressement organisant sa continuation.

I. Le droit existant

Les personnes physiques disposent de deux mécanismes de déduction des pertes constatées sur les titres d'une société en liquidation judiciaire :

- l' imputation des moins-values constatées sur d'éventuelles plus-values de même nature réalisées au cours de la même année ou des dix années suivantes ( ( * )1) ;

- ou la déduction des pertes du revenu global , dans la limite annuelle de 15.250 euros pour une personne seule et de 30.500 euros pour un couple soumis à imposition commune, pour les seules pertes en capital consécutives à la souscription au capital soit de certaines entreprises nouvelles constituées à compter du 1 er janvier 1994 et se trouvant en cessation de paiement dans les huit ans qui suivent la date de leur constitution, soit d'une société procédant à une augmentation de capital de capital dans le cadre d'un plan de redressement organisant la continuation de l'entreprise et se trouvant en cessation de paiement dans les huit ans qui suivent la date de son plan de redressement.

Ce second régime résulte de l'article 25 de la loi « Madelin » n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative économique, codifié à l'article 163 octodecies A du code général des impôts. Il permet plus précisément aux contribuables concernés de déduire de leur revenu net global les pertes en capital ( ( * )2) subies à la suite de la cessation de paiement d'une société soumise à l'impôt sur les sociétés au capital de laquelle ils ont directement souscrit :

- si cette société était une société de moins de huit ans remplissant les conditions énumérées par l'article 44 sexies du code général des impôts pour l'exonération de l'impôt sur les sociétés pendant deux ans ouverte aux entreprises nouvelles installées dans certaines zones, telles les zones de redynamisation urbaine ( ( * )1) ;

- ou bien si cette souscription avait été effectuée dans le cadre d'une augmentation de capital réalisée, moins de huit ans auparavant, dans le cadre d'un plan de redressement organisant la continuité de l'entreprise, conformément aux dispositions de l'article L. 621-62 du code commerce, par une société en difficulté exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole.

Ne peuvent être déduites que des pertes consécutives à une souscription en numéraire au capital, ce qui exclut notamment le rachat d'actions ou de parts précédemment émises.

En outre, cette déduction n'est pas possible :

- lorsque la responsabilité personnelle du contribuable dans les pertes sociales a été reconnue par une condamnation prononcée en application de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires ;

- lorsqu'une des personnes appartenant au foyer fiscal du contribuable a déduit du revenu imposable des sommes versées au titre d'un engagement de caution souscrit au profit de la même société.

De même, ne peuvent ouvrir à déduction les souscriptions qui ont bénéficié d'autres avantages fiscaux, comme les déductions prévues au 2° quater de l'article 83 du code général des impôts (déduction des intérêts d'emprunt contractés pour souscription au capital d'une société nouvelle) et à l'article 163 septdecies de ce même code (déduction des souscriptions au capital de SOFICA), ainsi que les déductions ou réductions d'impôt des articles 83 bis , 83 ter et 199 terdecies en faveur du rachat d'une entreprise par ses salariés, et les réductions d'impôt des articles 199 undecies et 199 undecies A pour les investissements dans les départements d'outre-mer.

Il convient toutefois de préciser que peuvent être déduites les souscriptions effectuées depuis le 1 er janvier 1996 qui ont bénéficié de la réduction d'impôt de 25 % pour la souscription au capital de sociétés non cotées (présentée dans le commentaire supra de l'article 15 du présent projet de loi), sous réserve qu'une reprise de la réduction d'impôt soit effectuée au titre de l'année au cours de laquelle le contribuable choisit de bénéficier du présent dispositif de déduction des pertes en capital, ce qui peut être avantageux dès lors que son taux marginal d'imposition sur le revenu dépasse le seuil de 25 % correspondant à la réduction d'impôt dont il a antérieurement bénéficié.

En d'autres termes, s'ils ne peuvent cumuler les deux dispositifs de réduction d'impôt au moment de la souscription et de la déductibilité des pertes, les contribuables concernés ont cependant la faculté, le cas échéant, de choisir ex post le dispositif qui leur est le plus avantageux, de même qu'il peuvent alternativement choisir d'imputer leurs pertes en capital sur les plus-values de même nature réalisées au cours de la même année et des dix années suivantes.

On peut d'ailleurs constater que le nombre de contribuables bénéficiant du dispositif de déductibilité des pertes en capital était jusqu'ici très limité, comme le montre le tableau figurant page suivante.

Il convient cependant de rappeler que l'imputation des pertes constatées sur les titres d'une société en liquidation judiciaire était particulièrement malaisée jusqu'à la loi de finances rectificative pour 2002 de décembre 2002. En effet, les détenteurs de titres de sociétés en très grande difficulté ne pouvaient pas imputer leurs pertes de la même façon selon qu'il s'agissait de personnes morales ou de personnes physiques :

- les personnes morales peuvent constater dans leurs comptes une provision pour pertes, qu'elles réintégreront à leur bénéfice imposable en cas de retour à meilleure fortune ;

- en revanche, les personnes physiques, qui ne disposent pas de comptabilité, ne pouvaient imputer leurs pertes que lorsque celles-ci étaient considérées comme définitives. Le code général des impôts prévoyait ainsi que, pour les personnes physiques, deux conditions devaient être réunies : l'annulation juridique des titres et l'aboutissement de la procédure judiciaire (c'est-à-dire soit le jugement de clôture de la liquidation judiciaire, soit la cession définitive de la société). Ces conditions étaient particulièrement contraignantes pour les actionnaires concernés. En effet, la cession définitive de la société peut intervenir quelques trois à cinq ans après le dépôt de bilan, et le jugement de clôture de la liquidation judiciaire quelques dix ans plus tard.

NOMBRE DE FOYERS CONCERNÉS PAR LE DISPOSITIF
DE DÉDUCTIBILITÉ DES PERTES EN CAPITAL

Année d'imposition
des revenus

Nombre de déclarants (foyers fiscaux imposables + foyers fiscaux non imposables)

1998

2 404
(1 665 + 739)

1999

2 544
(1 526 + 1 018)

2000

1 827
(1 282 + 544)

2001

1 973
(1 388 + 585)

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

C'est pourquoi, l'article 32 de la loi de finances rectificative pour 2002 (loi n° 2002-1276 du 30 décembre 2002), adopté à l'initiative de notre collègue député M. Charles de Courson, sensibilisé aux difficultés rencontrées par les actionnaires de Moulinex, permet désormais ( ( * )1) aux seules personnes physiques qui en font l'option expresse ( ( * )2) de déclarer leurs pertes (pour les déduire de leur revenu global ou les imputer sur d'éventuelles plus-values de même nature, selon le cas) « à compter de l'année au cours de laquelle intervient le jugement ordonnant la cession de l'entreprise (...), en l'absence de tout plan de continuation, ou prononçant sa liquidation judiciaire », ce qui permet d'avancer de plusieurs années la déclaration des pertes, ce dispositif étant applicable pour l'imposition des revenus des années 2003 et suivantes, et pour les jugements intervenus à compter du 1 er janvier 2000. .

Il résulte de cette avancée que le recours au dispositif de déductibilité des pertes en capital pourrait être plus rapide et plus aisé.

II. Le dispositif proposé

Au regard de la complexité du droit existant, le présent article, adopté par l'Assemblée nationale avec des précisions rédactionnelles, est d'une extrême simplicité puisqu'il prévoit de doubler le montant des pertes en capital déductibles de l'impôt sur le revenu dans le cadre du régime de l'article 163 octovies A, pour les porter de 15.250 à 30.000 euros pour une personne seule et de 30.500 à 60.000 euros pour un couple soumis à imposition commune.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, le coût de cette mesure a été évalué à 1,5 millions d'euros à l'aide d'une simulation réalisée sur un fichier de 500.00 contribuables.

III. La position de votre commission spéciale

On peut s'interroger à bon droit, au regard du très faible montant de la dépense fiscale correspondante (3 millions d'euros par an selon le fascicule des voies et moyens annexé au projet de loi de finances pour 2003), sur la pertinence d'un dispositif occupant 79 lignes du code général des impôts renvoyant elles-mêmes à 21 autres articles de ce même code et du code commerce, ainsi qu'à un décret en Conseil d'Etat, de sorte que sa lecture est d'une rare complexité.

Cela étant, le principe consistant à octroyer un régime fiscal favorable aux pertes en capital subies par des personnes physiques finançant la création d'entreprises, le développement de jeunes sociétés ou la recapitalisation d'entreprises en grande difficulté, ne peut que recueillir l'adhésion .

En outre, le seuil de déductibilité des pertes n'a pas été réévalué depuis la loi de finances pour 1987, qui avait mis en oeuvre pour la première fois ce principe, précisé et étendu en 1994 par la loi « Madelin » aux sociétés en situation de redressement.

Dans ces conditions, votre commission estime que le doublement de la déductibilité des pertes ainsi proposé constitue une mesure d'équité , susceptible, au delà de son modeste impact budgétaire, d'adresser un signal favorable à ceux de nos concitoyens qui prennent des risques en investissant directement dans la création, le développement ou le redressement d'entreprises.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 16 bis (nouveau) -
Possibilité de sortie anticipée d'un plan d'épargne en actions
en cas de création ou de reprise d'entreprise

(Articles 150-0 A, 150-0 D et 163 quinquies D du code général des impôts, article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, article 16 de l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 et article 4 de la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992 )

Commentaire : le présent article vise à autoriser le retrait des fonds investis dans un plan d'épargne en actions (PEA) en cas de création ou de reprise d'une entreprise dans les deux mois, sans remise en cause de l'avantage fiscal prévu pour les sommes placées au-delà de cinq années et sans clôture anticipée du plan.

I. Le PEA : un encours d'épargne important lié à des conditions de placement dans la durée

A. Le PEA, un placement attractif sur la durée

Créé par la loi n° 92-666 du 16 juillet 1992 pour inciter les ménages à investir durablement dans les actions françaises par le biais d'un dispositif fiscal attractif, le plan d'épargne en actions (PEA) permet de gérer un portefeuille d'actions françaises et européennes dans la limite de 132.000 euros ( ( * )1) en franchise totale d'impôt, dès lors qu'aucun retrait n'est effectué avant cinq ans. Entre cinq et huit ans, tout retrait entraîne la clôture du plan mais l'exonération des plus-values et des dividendes, comme les avoirs fiscaux, sont définitivement acquis. Seuls sont alors applicables les prélèvements sociaux (CRDS et CSG, soit un taux de 10 %) sur les gains réalisés. Au-delà de huit ans, les retraits partiels n'entraînent pas la clôture du plan mais aucun versement n'est plus possible après le premier retrait.

Les sommes versées dans les plans d'épargne en actions doivent être investies en « valeurs éligibles au PEA » ( ( * )2), c'est-à-dire :

- soit en actions ou certificats d'investissement de sociétés et certificats coopératifs d'investissement ;

- soit en parts de sociétés à responsabilité limitée ou de sociétés dotées d'un statut équivalent dans d'autres États-membres de la Communauté européenne ;

- soit en droits ou bons de souscription ou d'attribution attachés à ces actions et parts de sociétés ;

- soit en actions de sociétés d'investissement à capital variable qui emploient plus de 60 % de leurs actifs en titres et droits mentionnés ci-dessus (ce pourcentage ayant été porté à 75 % à compter du 1 er janvier 2003) ;

- soit enfin en parts de fonds communs de placement qui emploient plus de 75 % de leurs actifs en titres et droits mentionnés ci-dessus.

B. Le PEA, un encours d'épargne aujourd'hui très important

Le PEA constitue un produit d'épargne très répandu. On comptait 7,3 millions de PEA en décembre 2002 : plus de 16 % des Français âgés de plus de quinze ans détiennent un PEA . Fin juin 2002, la valeur moyenne des PEA s'élevait à 9.913 euros et la valeur globale détenue par les titulaires de ces comptes à 73 milliards d'euros, en hausse de 7,2 % par rapport au trimestre précédant. Malgré la baisse de la valorisation boursière de la place de Paris, l'encours du PEA reste encore considérable.

La valeur des titres figurant dans les PEA représente environ 27 % de l'encours des portefeuilles-titres des ménages. Contrairement à ce qui est observé pour l'ensemble des comptes-titres, la part de la détention d'OPCVM (organisme de placement collectif en valeurs mobilières) est supérieure à celle de la détention directe d'actions : le portefeuille des PEA se compose ainsi de 64,6 % d'OPCVM et de 34,3 % d'actions.

Le PEA constitue un outil de placement régulier et de moyen terme pour les ménages : à fin 2000, près de 20 % des PEA bancaires étaient ouverts depuis huit ans ou plus ; l'encours des titres logés dans des PEA arrivés à maturité représentait 40 % du total des valeurs mobilières placées sous PEA.

II. Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a adopté un article additionnel nouveau visant à permettre de débloquer les fonds investis dans un PEA de manière anticipée pour le financement, sous certaines conditions, de la création ou de la reprise d'une entreprise .

Le présent article modifie l'article 150-0 A du code général des impôts qui, dans sa deuxième partie, assujettit à l'impôt sur le revenu les gains nets réalisés depuis l'ouverture d'un PEA en cas de retrait de titres ou de liquidités ou de rachat avant l'expiration du délai de cinq années cité ci-dessus. Il introduit une exception à la règle des cinq années pour les sommes ou valeurs affectées, dans les deux mois suivant leur retrait du PEA, au financement de la création ou de la reprise d'une entreprise dont le titulaire du plan, son conjoint ou son descendant assure personnellement l'exploitation. Ces fonds doivent être utilisés pour la souscription en numéraire au capital initial d'une entreprise, à l'achat d'une entreprise existante ou au versement au compte d'une entreprise individuelle créée depuis moins de deux mois.

L'article 16 bis modifie ensuite l'article 150-O D du code général des impôts et redéfinit la notion de gain net réalisé depuis l'ouverture du PEA en déduisant de ce gain net les retraits réalisés au profit de la création ou de la reprise de l'entreprise.

Il ajoute un troisième alinéa au III de l'article 163 quinquies du code général des impôts qui dispose que le retrait des sommes et valeurs d'un PEA utilisées pour la création ou la reprise d'une entreprise n'entraîne pas la clôture du plan. En revanche, aucun versement n'est plus possible dans le PEA après ce retrait.

Enfin, il précise, en modifiant l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale, que les retraits, pour la fraction du gain net réalisé sur le PEA qui les concerne, sont soumis aux prélèvement sociaux dans les conditions de droit commun.

III. La position de votre commission spéciale

Devant les réticences des investisseurs et des prêteurs confrontés à une conjoncture économique morose, les créateurs ou les repreneurs d'entreprise ne peuvent « compter que sur leurs propres forces ». Le taux d'épargne français, supérieur à 17 % du PIB en début d'année 2003, ne laisse pas craindre une pénurie d'épargne, bien au contraire. Dans ce contexte, la mobilisation de l'épargne que les créateurs ou repreneurs ont investie dans des supports d'épargne en relation avec l'entreprise, comme cela est le cas du PEA, qui vise depuis l'origine à renforcer les fonds propres des sociétés françaises, et depuis peu européennes, paraît constituer une « mesure de choc » justifiée, dès lors que le coût pour les finances publiques de retraits anticipés d'un support d'épargne bénéficiant d'un avantage fiscal restera limité.

Il est exact que le futur entrepreneur n'est pas en mesure, au moment où il constitue son épargne, de définir le moment où il va réellement entreprendre et créer son activité, ce qui peut le conduire à souhaiter libérer des fonds investis dans des placements soumis à condition de durée. Reste que la mesure proposée, qui concerne la libération anticipée de fonds investis dans les PEA, ne devrait avoir qu'un impact concret limité : outre que 40 % de l'encours des PEA a plus de huit ans, l'ampleur des pertes recensées sur les portefeuilles des petits épargnants depuis plusieurs mois rend illusoire dans beaucoup de cas l'idée de gains, et donc infondée la crainte d'une taxation de ces gains au titre de l'impôt sur le revenu.

Ainsi, le dispositif proposé constitue davantage un signal afin que l'épargnant solde ses pertes sur son PEA pour investir le cas échéant dans la création ou la reprise d'entreprise, qu'une réelle incitation fiscale.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 17 -
Aménagement du taux de l'usure pour
les prêts accordés à une personne morale

(Article L. 313-3 du code de la consommation et articles L. 313-4,
L. 313-5-1 nouveau et L. 313-5-2 nouveau du code monétaire et financier)

Commentaire : le présent article propose, d'une part , de supprimer les sanctions pénales en cas d'octroi d'un prêt à taux usuraire à des personnes morales se livrant à une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale, et d'autre part, de supprimer la notion de taux d'usure s'agissant des prêts à ces personnes morales autres que les seuls découverts en compte.

I. Le droit existant

L'article L. 313-3 du code de la consommation, repris in extenso par l'article L. 313-5 du code monétaire et financier, dispose en son premier alinéa que « constitue un prêt usuraire tout prêt conventionnel consenti à un taux effectif global qui excède, au moment où il est consenti, de plus du tiers, le taux effectif moyen pratiqué au cours du trimestre précédent par les établissements de crédit pour des opérations de même nature comportant des risques analogues, telles que définies par l'autorité administrative après avis du Conseil national du crédit ».

Par ailleurs, les deuxième et troisième alinéas de cet article étendent ce dispositif aux ventes à tempérament et précisent que « les conditions de calcul et de publicité des taux effectifs moyens visés au premier alinéa sont fixés par voie réglementaire ».

A cet égard, l'article D. 313-7 du code de la consommation, issu du décret n° 90-506 du 25 juin 1990, précise que « la Banque de France procède chaque trimestre à une enquête, portant sur les prêts en euros, destinés à collecter auprès des établissements de crédit les données nécessaires au calcul des taux effectifs moyens. Ce calcul est effectué selon une moyenne arithmétique simple des taux effectifs globaux observés. Les prêts dont les taux sont réglementés, administrés ou bonifiés par l'Etat ne sont pas pris en compte. Pour ce qui concerne les entreprises, les prêts ne sont pas pris en compte pour le calcul du taux effectif moyen lorsqu'ils sont supérieurs à des montants définis par arrêté du ministre chargé de l'économie et des finances ».

En pratique, la Banque de France a indiqué à votre rapporteur procéder à cette enquête auprès d'un échantillon confidentiel comportant près de huit cents guichets pour les banques à réseau, ainsi que dix sociétés financières et dix banques spécialisées. Les informations collectées portent sur les autorisations nouvelles de crédit, soit près de 40.000 données individuelles, et la période de collecte couvre les derniers jours du premier mois de chaque trimestre.

Il en résulte in fine onze taux d'usure en fonction de la nature des crédits considérés, dont cinq concernent les entreprises, comme le fait apparaître le tableau figurant page suivante.

TAUX DE L'USURE PAR CATÉGORIE DE PRÊT
APPLICABLE AU 1 ER TRMIESTRE 2003

Catégorie de prêt

Taux effectif pratiqué au quatrième trimestre 2002 par les établissements de crédit

Seuil de l'usure applicable à compter du 1 er janvier 2003 (1)

Prêts immobiliers aux particuliers

Prêts à taux fixe

5,95 %

7,93 %

Prêts à taux variable

5,54 %

7,39 %

Prêts relais

5,97 %

7,96 %

Prêts aux particuliers sous la forme de crédits de trésorerie

Prêt d'un montant inférieur ou égal à 1.524 €

16,56 %

22,08 %

Découverts en compte, prêts permanents et financements d'achats ou de ventes à tempérament d'un montant supérieur à 1.524 €

13,23 %

17,64 %

Prêts personnels et autres prêts d'un montant supérieur à 1.524 €

8,10 %

10,80 %

Prêts aux entreprises

Prêts consentis en vue d'achats ou de ventes à tempérament

7,28 %

9,71 %

Prêts d'une durée initiale supé-rieure à deux ans, à taux variable

5,64 %

7,52 %

Prêts d'une durée initiale supérieure à deux ans, à taux fixe

6,14 %

8,19 %

Découverts en compte

8,84 %

11,79 %

Autres prêts d'une durée initiale inférieure ou égale à deux ans

7,50 %

10,00 %

(1) Avis pour le 1 er trimestre 2003 publié au J.O. des 25-26 décembre 2002

Il convient de souligner que l'article L. 313-1 du code de la consommation définit les taux considérés d'une manière prenant en compte le maximum d'éléments à la charge de l'emprunteur, puisqu'il dispose que « pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions et rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels . Toutefois, pour l'application des articles L. 312-4 à L. 312-8 [du code de la consommation ( ( * )1)], les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d'officiers ministériels ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus, lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat ».

L'article L. 313-2 du code de la consommation précise par ailleurs que « le taux effectif global déterminé comme il est dit à l'article L. 313-1 [du code de la consommation] doit être mentionné dans tout écrit constatant un contrat de prêt régi par la présente section » et que toute infraction à ces dispositions sera punie d'une amende de 4.500 euros.

Les articles L. 313-4 et L. 313-5 du code de la consommation exposent les conséquences de l'octroi d'un prêt usuraire :

- l'article L. 313-4 dispose en premier lieu que « les perceptions excessives au regard des articles L. 313-1 à L. 313-3 [du code de la consommation] sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance. Si la créance est éteinte en capital et en intérêts, les sommes indûment perçues doivent être restituées avec intérêts légaux du jour où elles auront été payées » ;

- l'article L. 313-5 ajoute en second lieu que « quiconque consent à autrui un prêt usuraire ou apporte sciemment à quelque titre que ce soit et de quelque manière que ce soit, directement ou indirectement, son concours à l'obtention ou à l'octroi d'un prêt usuraire ou d'un prêt qui deviendrait usuraire au sens de l'article L. 313-3 [du code de la consommation] du fait de son concours, est puni d'un emprisonnement de deux ans et d'une amende de 45.000 euros ou de l'une de ces deux peines seulement ». En outre, le tribunal peut ordonner la publication de sa décision et surtout « la fermeture, provisoire ou définitive, de l'entreprise dont l'une des personnes chargées de l'administration ou de la direction est condamnée en application du premier alinéa du présent article ».

Enfin, l'article L. 313-6 du code de la consommation ouvre la faculté aux autorités judiciaires compétentes de saisir une commission consultative, dont la composition est fixée par arrêté, afin de lui demander son avis sur le taux de référence et sur les taux pratiqués dans le cas d'espèce qu'elles instruisent ou jugent.

II. Le dispositif initialement proposé par le Gouvernement

Le dispositif initialement proposé par le gouvernement au travers du présent article comportait deux volets de facto relativement distincts.

A. La suppression des sanctions pénales en cas d'octroi d'un prêt à taux usuraire à des personnes morales se livrant à une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale

En premier lieu, le présent article proposait :

- d'un côté d'exclure des dispositions des articles L. 313-3 et L. 313-6 du code de la consommation les prêts « accordés à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale » ;

- de l'autre, de transposer directement dans l'article L. 313-4 du code monétaire et financier les dispositions des articles L. 313-1 et L. 313-2 précités du code de la consommation, et dans un nouvel article L. 313-5-2 du code monétaire et financier les dispositions de l'article L. 313-4 précité du code de la consommation.

Cette initiative visait à répondre définitivement aux incertitudes juridiques issues de la loi n° 93-949 du 23 juillet 1993 procédant à la codification dans le seul code de la consommation des dispositions de la loi n° 66-1010 du 28 décembre 1966 relatives à l'usure. En effet, l'insertion de ces dispositions dans un code régissant les relations entre professionnels et non professionnels a conduit certains justiciables à soutenir au contentieux que le délit d'usure et l'obligation de mention du taux effectif global ne concernaient plus les emprunteurs professionnels, si bien que la Cour de cassation a exprimé le souhait, dans son rapport annuel pour 1999, que ces dispositions soient aussi introduites dans le code monétaire et financier.

Or, l'ordonnance n° 2000-1223 du 14 décembre 2000 relative à la partie législative du code monétaire et financier a seulement introduit dans ce nouveau code un article L. 313-5 renvoyant à l'article L. 313-3 du code de la consommation pour la définition du taux de l'usure et précisant ainsi que ce dernier était également applicable aux entreprises.

Le présent article 17 du projet de loi vise à compléter cette insertion en introduisant également dans le code monétaire et financier les dispositions des articles L. 313-1, L. 313-2 et L. 313-4 du code de la consommation, de sorte que les dispositions relatives à l'usure dans le code monétaire et financier puissent être appréhendées de manière plus autonome.

Il convient de souligner que cet article 17 ne propose pas d'introduire également dans le code monétaire et financier les dispositions des articles L. 313-5 et L. 313-6 du code de la consommation, relatives aux conséquences pénales de l'octroi d'un prêt usuraire. Ce faisant, il conduit à rendre ces dispositions inapplicables pour les prêts accordés à une personne morale se livrant à une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale.

Demeureraient toutefois applicables pour ces prêts :

- l'amende de 4.500 euros en cas de défaut de mention du taux effectif global « dans tout écrit constatant un contrat de prêt » prévue par l'article L. 313-2 du code de la consommation, lequel serait désormais repris dans l'article L. 313-4 du code monétaire et financier ;

- le fait, prévu par l'article L. 314-4 du code de la consommation et qui serait désormais repris par le nouvel article L. 313-5-2 du code monétaire et financier, que « les perceptions excessives... sont imputées de plein droit sur les intérêts normaux alors échus et subsidiairement sur le capital de la créance [et] si la créance est éteinte en capital et en intérêts, les sommes indûment perçues doivent être restituées avec intérêts légaux du jour où elles auront été payées ».

B. Le relèvement des taux de l'usure pour des personnes morales se livrant à une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale

En second lieu, le présent article 17 proposait initialement de remplacer, pour les seuls prêts aux personnes morales se livrant à une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale, le mode actuel de calcul du seuil de l'usure (soit le taux effectif moyen constaté augmenté d'un tiers) par la formule suivante : taux effectif moyen constaté + 15 %.

Cette disposition conduisait à relever le seuil de l'usure de manière très importante (de douze à treize points selon le type de prêts au premier trimestre 2003), comme le montre le tableau figurant page suivante.

COMPARAISON DES TAUX DE L'USURE EN VIGUEUR
AVEC CEUX INITIALEMENT PRÉVUS PAR LE PROJET DE LOI

Catégorie de prêt aux entreprises

Taux effectif moyen au 4 ème trimestre 2002

Taux de l'usure applicable au 1 er janvier 2003

Taux de l'usure dans le nouveau dispositif initialement proposé

Prêts consentis en vue d'achats ou de ventes à tempérament

7,28 %

9,71 %

22,28 %

Prêts d'une durée initiale supérieure à deux ans, à taux variable

5,64 %

7,52 %

20,64 %

Prêts d'une durée initiale supérieure à deux ans, à taux fixe

6,14 %

8,19 %

21,14 %

Découverts en compte

8,84 %

11,79 %

23,84 %

Autres prêts d'une durée initiale inférieure ou égale à deux ans

7,50 %

10,00 %

22,5 %

Source : rapport n° 572 de l'Assemblée nationale, XII ème législature

Comme le relevait par ailleurs notre collègue députée Mme Catherine Vautrin, rapporteure de cet article pour la commission spéciale de l'Assemblée nationale, le gouvernement entendait que le champ d'application de ce nouveau régime soit relativement large, puisqu'« il s'applique à toute personne morale exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale. Le champ d'application de la mesure est donc plus large que celui des seules entreprises, mentionné dans l'exposé des motifs : il comprend en effet les personnes morales de droit privé et les personnes morales de droit public (en particulier les entreprises publiques et les associations). Les fonds communs de placement et les fonds communs de créance, dénués de personnalité morale, sont exclus du champ d'application de la mesure, de même que les entrepreneurs individuels (...) [En outre], les personnes publiques exerçant des activités d'intérêt général sont exclues du champ de cet article ».

III. Les travaux de l'Assemblée nationale

Sans se prononcer explicitement sur le premier volet du présent article, la commission spéciale de l'Assemblée nationale s'est déclarée « sensible aux arguments présentés par les adversaires » de son second volet, c'est-à-dire du relèvement du seuil de l'usure, et a adopté à l'unanimité un amendement de suppression de l'article 17. Présentant cet amendement en séance publique, notre collègue députée Mme Catherine Vautrin, rapporteure, a précisé que « les arguments avancés à l'appui de cet article reposent sur l'idée que le taux de l'usure actuel exclut de l'accès au crédit les entreprises présentant les niveaux de risque les plus élevés. Il est vrai, toutefois, qu'un taux d'intérêt élevé n'est pas forcément dissuasif lorsque l'emprunt est contracté pour une échéance courte et que, dans certains cas, il est certainement vital pour le créateur d'obtenir un minimum de capitaux permanents. Par ailleurs, tant au cours des auditions que pendant les débats en commission, on a vu la difficulté de mesurer l'efficacité d'une telle disposition, tandis que le risque d'un relèvement des taux pratiqués à l'égard des entreprises existantes semblait, lui, réel. C'est la raison pour laquelle la commission a adopté à l'unanimité cet amendement ».

Après avoir reconnu que ce sujet suscitait des craintes, M. Renaud Dutreil , secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, a alors longuement exposé les arguments du Gouvernement en faveur de cette mesure :

- « à l'heure actuelle, les taux pratiqués en France n'atteignent pas le taux de l'usure. (...) A contrario , et logiquement, si on relevait les plafonds, il n'y aurait pas de raison pour que les taux augmentent, puisqu'ils peuvent déjà le faire, mais qu'ils ne le font pas » ;

- « nous avons ici affaire à un cas exceptionnel de prix administré -l'un des derniers dans notre société de liberté des prix. C'est donc une première anomalie. (...) Une anomalie, après tout, ce n'est pas grave, dès lors qu'elle n'a pas d'effets négatifs. Or, si je comprends que cette réforme est politiquement difficile pour l'ensemble des députés, je suis également persuadé qu'elle recèle un enjeu économique majeur : (...) certaines entreprises, fragilisées par des difficultés conjoncturelles - pénurie de clients, problèmes de trésorerie - sont bien souvent contraintes de déposer leur bilan, tout simplement parce que le banquier leur a refusé un crédit. Pour quelle raison ? Il a fait son calcul en tenant compte du butoir qu'est le taux de l'usure et, après avoir évalué le risque que représente l'entreprise, il a estimé, et c'est son droit le plus strict, qu'il n'était pas intéressant pour lui de prêter. On pourrait envisager qu'au lieu d'opposer un refus, le banquier accorde un crédit à un taux qui correspondrait au niveau de risque que son client représente à ses yeux, ce qui permettrait peut-être à un grand nombre d'entreprises de passer le cap difficile, donc de ne pas succomber. Pourquoi le taux de défaillance de nos entreprises est-il anormalement élevé ? Parce que notre système rationne le crédit... » ;

- « j'en viens à une deuxième anomalie, liée, du reste, au plafonnement des taux de crédit : le crédit inter-entreprises et le crédit fournisseurs tels qu'ils sont pratiqués en France. J'entends très souvent des patrons de PME s'en plaindre parce qu'ils ont le sentiment d'être dépendants, non pas de leur banquier, mais de leurs clients. En effet, puisque notre système interdit au banquier de prêter à un taux qui lui paraît correct, le mécanisme du crédit s'est reporté au sein des relations client-fournisseur ... » ;

- « j'ajouterai un troisième argument, social. Il est bien vrai que l'on ne prête qu'aux riches. Ce sont donc les plus petits opérateurs, ceux qui ont besoin du crédit, qui trouvent aujourd'hui porte close, précisément parce qu'ils présentent un risque et que le banquier ne peut pas obtenir le niveau de rémunération qu'il exige. Evidemment, partout en France, on fait le procès des banquiers. (...) Mais en poursuivant la réflexion, on s'aperçoit que le taux plafond pour les prêts supérieurs à deux ans, par exemple, est actuellement de 7,52 %. Or, avec un coût de la ressource aujourd'hui d'environ 4,5 % et un coût de gestion du crédit de l'ordre de 2,5 points, soit au total 7 %, il ne reste plus qu'un demi-point pour rémunérer le risque. Cette très faible marge explique que la plupart des banques disent tout simplement non à ceux qui leur demandent du crédit ! Il ne faut pas s'étonner ensuite que l'on ait un tel niveau de défaillances d'entreprises en France, ni que certains entrepreneurs individuels recourent au crédit à la consommation à 18,6 % afin précisément de contourner l'impossibilité pour eux d'accéder au crédit destiné aux entreprises. Autrement dit, au détournement du crédit inter-entreprises s'ajoute celui du crédit à la consommation. Le crédit à la consommation est fait pour les consommateurs, pas pour les entreprises. Nous voyons donc bien à quel point le système français actuel est pervers et ne sert pas l'intérêt général de notre économie. ».

Après ce plaidoyer, l'Assemblée nationale a alors adopté l'amendement de suppression du présent article proposé par sa commission spéciale, mais aussi un amendement présenté par le Gouvernement portant création d'un article additionnel proposant une nouvelle rédaction du dispositif initialement proposé. Dans un souci de clarté, cet article additionnel fut ensuite substitué à l'article 17 initialement proposé par le Gouvernement.

Le dispositif finalement adopté par l'Assemblée nationale reprend ainsi sans modification le premier volet du dispositif initialement proposé par le Gouvernement, relatif à la suppression des sanctions pénales en cas d'octroi d'un prêt à taux usuraire à des personnes morales se livrant à une activité industrielle commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle non commerciale. En revanche, il remplace le premier régime proposé par le Gouvernement pour le taux de l'usure relatif aux prêts aux personnes morales précitées (soit le taux effectif moyen + 15 %) par un dispositif consistant :

- d'une part, au travers de l'insertion d'un nouvel article L. 313-5-1 dans le code monétaire et financier, à maintenir le droit en vigueur (considérant comme usuraire le concours à un taux d'intérêt supérieur au taux effectif moyen augmenté d'un tiers) pour les seuls découverts en compte ;

- d'autre part, à supprimer purement et simplement la notion de taux d'usure pour les autres prêts aux personnes morales précitées .

IV. La position de votre commission spéciale

A titre liminaire, il convient de rappeler qu'un établissement de crédit n'est économiquement fondé à accorder un prêt que si la rémunération de celui-ci couvre le coût de son refinancement, le coût administratif de son instruction et de sa gestion, enfin le coût du risque de défaillance associé.

Le coût d'instruction et de gestion d'un prêt est évidemment proportionnellement plus élevé pour un crédit de faible montant. Or, ces frais doivent être imputés sur le taux effectif global, puisque l'article L. 313-1 du code de la consommation dispose que « pour la détermination du taux effectif global du prêt, comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts les frais, commissions et rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaires intervenus de quelque manière que ce soit dans l'octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des débours réels » . En conséquence, le taux effectif global nécessaire à l'équilibre économique, pour l'établissement de crédit, de l'octroi d'un prêt de faible montant est, toutes choses égales par ailleurs, d'autant plus élevé que le montant du crédit est faible.

En outre, le taux de défaillance des jeunes d'entreprises et, dans une moindre mesure, de l'ensemble des petites et moyennes entreprises, est malheureusement assez élevé, tandis que les établissements de crédit ne récupèrent en moyenne, en cas de procédure collective, qu'une fraction relativement faible du montant de leurs créances, compte tenu notamment de la nature de leurs privilèges. Cela explique que les banques n'aient avantage à accorder leurs concours à la création d'entreprise ou au développement des PME que s'ils sont assortis de taux d'intérêt plus élevés que ceux des concours qu'elles accordent aux grandes entreprises, ou si elles bénéficient de garanties importantes, garanties qu'au demeurant l'article 6 du présent projet de loi conduit par ailleurs à limiter.

Or, le droit existant plafonne les taux d'intérêt des concours bancaires aux entreprises à des niveaux d'autant plus faibles que :

- la détente des taux d'intérêt depuis la seconde moitié des années 1990 a réduit le taux effectif moyen des prêts, donc l'écart d'un tiers entre le taux effectif moyen et le taux de l'usure, c'est-à-dire in fine l'écart entre le coût des ressources pour les établissements de crédit et le taux d'intérêt plafond pour l'octroi de concours aux entreprises ;

- parallèlement, les nouvelles normes prudentielles (Cooke, et bientôt Mac Donough) de ratios de fonds propres pour les banques tendent à renchérir pour celles-ci l'octroi de prêts à la création d'entreprise et aux PME.

Dans ces conditions, il n'est pas étonnant que le droit existant conduise  à un rationnement du crédit à la création d'entreprise (seule une petite fraction des créations étant financée à crédit), mais aussi aux PME souhaitant se développer ou bien bénéficier d'un relais de trésorerie pour surmonter un « trou d'air » de leur activité.

Le droit existant est d'ailleurs largement contourné , à la fois par des entrepreneurs individuels finançant leur activité à l'aide de prêts à la consommation, et par des moyennes ou grandes entreprises en difficulté qui recherchent à l'étranger, au travers de montages aussi complexes que coûteux, les concours risqués dont elles peuvent avoir besoin.

Au total, le rationnement du crédit induit par le plafonnement actuel des taux d'intérêt sur les concours aux entreprises tend à étouffer certaines activités économiques risquées .

On peut d'ailleurs relever :

- d'une part, que la réforme du plafonnement du taux d'intérêt des crédits aux entreprises est préconisée de longue date (voir par exemple le rapport de M. Vermès intitulé « L'accès des PME au financement bancaire : comment l'améliorer ? » , adopté par l'Assemblée générale de la Chambre de commerce et d'industrie de Paris (CCIP) le 18 février 1999) ;

- d'autre part, que le dispositif français contre les taux de crédits aux entreprises excessifs apparaît beaucoup plus rigoureux que celui de nos principaux partenaires, comme le démontre l'encadré figurant page suivante.

Enfin, votre rapporteur souscrit à l'analyse selon laquelle la combinaison de la concurrence entre les établissements de crédits, d'une part, de dispositions protégeant l'information des emprunteurs et la transparence des conditions de prêt, d'autre part, constitue un instrument beaucoup plus efficient de modération des taux d'intérêt que la détermination par l'administration de taux plafonds.

Dans ces conditions, votre rapporteur regrette que l'assouplissement proposé par le présent article ne bénéficie pas aux prêts consentis aux entrepreneurs individuels . En effet, les entrepreneurs individuels sont sans doute ceux qui auraient eu le plus à y gagner dans la mesure où, à la fois, ils sont ceux dont l'accès au crédit est le plus rationné, et nombre d'entre eux pourraient avoir avantage à obtenir des prêts à des taux d'intérêt plus élevés en contrepartie de garanties moindres.

Mme Maria Nowak, présidente de l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE), qui finance et accompagne la création d'entreprise par des chômeurs et des allocataires de minima sociaux, a d'ailleurs brillamment démontré, lors de son audition par la commission spéciale, que l'exclusion de l'assouplissement proposé des personnes physiques souhaitant créer leur micro-entreprise risquait de se retourner contre elles en les incitant à solliciter des crédits « revolving » à la consommation, et faisait en tout état de cause obstacle au développement des micro-crédits .

COMPARAISON INTERNATIONALE
DES TAUX DE L'USURE AUX ENTREPRISES

Aux Etats-Unis et au Canada , il n'existe pas de taux de l'usure.

En Italie , est usuraire tout taux supérieur de 50 % au taux moyen élaboré par le ministère du Trésor. Néanmoins, un taux même inférieur appliqué à un emprunteur en grave difficulté financière peut être considéré comme usuraire.

En Allemagne , la notion d'usure est jurisprudentielle : le code civil prévoit la nullité des contrats usuraires sans fixer de taux. Le code vise de manière générale l'abus de faiblesse du cocontractant en vue de se procurer un avantage disproportionné par rapport à la prestation. La jurisprudence fixe donc une double limite : est usuraire un prêt dont le taux effectif annuel est supérieur à deux fois le taux usuellement pratiqué sur le marché (taux Bundesbank + 2,5 % de frais de dossier), ou qui excède de 12 points le taux usuellement pratiqué sur le marché.

En Espagne , la loi du 23 juillet 1908 prévoit la nullité de tout contrat dont l'intérêt est « notablement supérieur au taux normal de l'argent et manifestement disproportionné ». Le juge apprécie donc le caractère excessif de l'intérêt. Par ailleurs, la loi de 1984 relative au consommateur et à la défense de l'usager impose, uniquement pour les avances en compte courant, un taux d'intérêt maximum, égal à 2,5 fois le taux d'intérêt légal.

Au Royaume-Uni et en Irlande , la législation interdit les « contrats de crédit exorbitants ». Le contrôle est effectué par les tribunaux avec une large marge d'interprétation, puisqu'elle tient compte de l'âge et de la situation sociale de l'emprunteur.

En Autriche , le code civil prévoit la nullité des contrats « portant atteinte à une interdiction légale ou aux bonnes moeurs », et en particulier lorsqu'il y a manifestement exploitation de la situation d'un des contractants ou abus de position dominante. En revanche, il n'existe pas de taux plafond.

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

Cela étant, votre rapporteur constate que le débat sur le présent article prend parfois un tour passionnel en raison notamment du « pouvoir maléfique », selon les termes employés à l'Assemblée nationale par M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, dont est chargée l'expression même de « taux de l'usure », qu'il serait à cet égard sans doute opportun de réviser pour cette raison. Il observe aussi que le relèvement du taux plafond des crédits suscite une certaine angoisse chez les petits entrepreneurs, dont le législateur ne saurait ne pas tenir compte.

On peut ainsi estimer que le dispositif proposé par le présent article, qui maintient le droit en vigueur pour tous les entrepreneurs individuels ainsi que pour les découverts en compte, qui peuvent parfois être négociés dans des conditions difficiles, constitue un heureux compromis .

Votre commission spéciale approuve par ailleurs l'aménagement, apporté à l'Assemblée nationale, consistant à supprimer le plafonnement des taux des crédits aux personnes morales plutôt que de l'augmenter jusqu'à un niveau - le taux d'intérêt effectif moyen + 15 points - tellement élevé que la législation eût été presque sans effet, tout en adressant un signal maladroit.

Enfin, elle se félicite de l'engagement pris à l'Assemblée nationale par le secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation « de procéder à une évaluation du dispositif après une période expérimentale d'un an ».

Votre commission spéciale vous propose donc d'adopter le dispositif de cet article 17, sous réserve d'un amendement tendant à préciser que l'assouplissement qu'il propose est applicable aux personnes morales se livrant à des activités financière, bancaire, d'assurance ou immobilière. L'inclusion de ces activités dans les activités « industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou professionnelle » explicitement mentionnées dans le I du présent article est en effet conforme à son objet, mais elle peut sembler ne pas aller de soi, dès lors par exemple qu'il a fallu une disposition législative expresse (l'article 81 de la loi de finances rectificative pour 2002) pour que ces activités soient incluses dans le champ d'éligibilité du dispositif « Madelin » de l'article 199 terdecies -0 A (présenté dans le cadre du commentaire de l'article 15 du présent projet de loi), auparavant réservé aux seules activités « industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale ».

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 17 bis (nouveau) -
Sortie en sifflet du régime de zone franche pour la Corse

(Articles 44 decies et 244 quater E du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose la création d'un dispositif de sortie en sifflet pour le régime de zone franche de Corse prévu par l'article 44 decies du code général des impôts, dont le bénéfice serait désormais cumulable avec celui du crédit d'impôt institué par la loi du 22 janvier 2002 relative à la Corse.

I. Le droit existant

Les entreprises corses redevables de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés pouvaient, jusqu'à la loi n° 2000-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse, bénéficier de quatre régimes d'exonération, ayant tous vocation à s'appliquer de manière temporaire. Depuis le 1 er janvier 1999, deux d'entre eux ne s'appliquaient d'ailleurs déjà plus qu'aux entreprises qui en bénéficiaient à cette date, et les deux autres devaient s'éteindre progressivement dans le courant de la décennie :

- l'article 208 quater A du code général des impôts organise une exonération d'impôt sur les sociétés pour celles créées après le 1 er janvier 1991 et avant le 1 er janvier 1999, dans les secteurs de l'industrie, du bâtiment, de l'agriculture et de l'artisanat, et ayant été agréées par le ministre de l'économie et des finances. Elles bénéficient de cette exonération pendant 95 mois, soit près de huit années ;

- l'article 208 sexies prévoit une exonération d'impôt sur les sociétés pour les entreprises créées entre le 1 er janvier 1988 et le 1 er janvier 1999, exerçant dans les secteurs de l'industrie, de l'artisanat, du bâtiment et des travaux publics, et dont les droits de vote ne sont pas détenus pour plus de 50 % par d'autres sociétés. Cette exonération est applicable pendant 95 mois ;

- l'article 44 sexies fixe les modalités d'une exonération d'impôt sur les sociétés pendant 23 mois en faveur des entreprises nouvelles créées dans les zonages d'aménagement du territoire et de politique de la ville avant le 31 décembre 2004 ;

- enfin, l'article 44 decies , issu de la loi n° 96-1143 du 26 décembre 1996 relative à la zone franche de Corse , prévoit, pour les contribuables exerçant leur activité en Corse entre le 1 er janvier 1997 et le 31 décembre 2001, une exonération pendant soixante mois d'impôt sur les sociétés ou d'impôt sur le revenu à laquelle toutes les entreprises industrielles, commerciales, artisanales ou agricoles de Corse peuvent prétendre, à l'exception de celles exerçant dans l'un des domaines d'activité explicitement exclus (comme la location et la gestion d'immeubles).

Ce dernier avantage fiscal est conditionné au maintien dans l'exploitation des bénéfices exonérés . L'exonération est totale pour les entreprises de moins de trente salariés et partielle au-delà. Le montant de l'avantage consenti est plafonné à 61.000 euros par période de douze mois . Le coût de cette exonération, qui s'est imposée comme la plus attractive pour les entreprises corses, a été évalué, lors de l'examen en janvier 2002 du projet de loi relatif à la Corse, à 34 millions d'euros pour 2001.

On relèvera que l'article 2 de la loi relative à la zone franche de Corse prévoit en outre que les entreprises éligibles à l'exonération de l'article 44 decies du code général des impôts sont également exonérées de l'imposition forfaitaire annuelle.

Alternativement à la prolongation du dispositif de « zone franche » de l'article 44 decies , la loi n° 2000-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse a créé un nouvel avantage fiscal au profit des entreprises de Corse sous la forme d'un crédit d'impôt . Inséré dans le code général des impôts à l'article 244 quater E, ce dispositif est largement inspiré de la réduction d'impôt sur le revenu mise en place par l'article 19 de la loi de finances pour 2001 (n° 2000-1352 du 30 décembre 2000) au bénéfice des entreprises exerçant leur activité outre-mer (article 199 undecies B du code général des impôts).

Cet article 244 quater E propose donc aux entreprises redevables de l'impôt sur les sociétés et de l'impôt sur le revenu de déduire du montant de l'impôt dû une somme correspondant à une fraction du montant de certains investissements qu'elles réalisent. Si cette somme excède le montant de l'impôt dû au titre d'un exercice, elle peut être imputée sur les impôts dus au titre des exercices suivants.

Ainsi, plus une entreprise investit, plus son avantage fiscal est élevé, contrairement aux dispositifs existant précédemment où l'exonération était accordée à toutes les entreprises, indépendamment du fait qu'elles investissent ou pas, à la seule condition qu'elles soient imposables.

L'article 244 quater E prévoit que le crédit d'impôt est accordé « au titre des investissements réalisés jusqu'au 31 décembre 2011 et exploités en Corse » et précise que les entreprises qui choisissent de bénéficier du crédit d'impôt doivent renoncer aux exonérations existantes . Cette option est « irrévocable ». Elle s'exerce « à compter du premier jour de l'exercice ou de l'année au titre duquel elle est exercée ». Une entreprise bénéficiant de l'exonération « zone franche » à la date à laquelle elle opte pour le crédit d'impôt renonce donc de fait aux dernières années d'exonération totale auxquelles elle pouvait prétendre.

Le montant du crédit d'impôt (la somme pouvant être déduite de la cotisation d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés) était initialement égal selon les investissements considérés à 10 % ou à 20 % du prix de revient hors taxe de l'investissement réalisé, mais il a été porté à 20 % pour tous les investissements éligibles par l'article 41 de la loi de finances rectificative pour 2002 du 30 décembre 2002 . On peut rappeler qu'outre-mer, ce taux est tantôt de 50 %, tantôt de 60 %. Au-delà des raisons de coût budgétaire, l'écart de taux entre le régime de l'outre-mer et le régime corse s'explique par les contraintes du droit communautaire en matière d'intensité des aides à l'investissement des entreprises.

Si le montant de l'impôt dû est inférieur à celui du crédit d'impôt, l'avantage fiscal n'est pas perdu puisqu'il pourra être imputé sur l'impôt dû au titre des neufs exercices suivants. Si, au terme de ce délai, l'avantage fiscal n'est pas épuisé, le Trésor public rembourse la différence à l'entreprise, dans la limite de 50 % du montant total du crédit d'impôt et d'un montant de 300.000 euros.

Enfin, il convient de souligner que ce régime de crédit d'impôt est réservé aux petites et moyennes entreprises définies par référence à l'annexe I du règlement communautaire n° 70/2001 du 12 janvier 2001 : elles doivent avoir moins de 250 salariés et un chiffre d'affaires inférieur à 40 millions d'euros, et leur capital entièrement libéré doit être détenu, de manière continue, pour 75 % au moins, par des entreprises satisfaisant aux mêmes conditions. Pour les sociétés membres d'un groupe, les critères d'effectifs et de chiffre d'affaires s'appliquent à l'ensemble du groupe et la condition de composition du capital doit être remplie par la société mère du groupe. Pour être éligibles, les entreprises doivent par ailleurs être soumises à un régime réel d'imposition.

II. Le dispositif proposé l'Assemblée nationale

Le présent article additionnel résulte d'un amendement présenté par notre collègue député M. Camille de Rocca Serra, qui a reçu un avis favorable de la commission spéciale et du Gouvernement, ce dernier en levant le gage.

Le a du 1° du I de l'article propose tout d'abord de prolonger les effets du dispositif de « zone franche » prévu par l'article 44 decies du code général des impôts en instituant une période d'abattement progressif à l'issue de la période d'exonération totale. Ainsi, les entreprises ayant bénéficié de l'exonération totale pendant cinq ans seront exonérées à hauteur de 80 %, puis 60 %, 40 %, et enfin 20 % des bénéfices qu'elles auront réalisés au titre des quatre périodes de douze mois suivant la période d'exonération totale. En d'autres termes, le présent article propose d'instituer une « sortie en sifflet » pour le dispositif de zone franche.

Le b du 1° du I de l'article 17 bis propose ensuite de supprimer l'obligation pour les exploitants individuels ou entreprises bénéficiant de ce dispositif de conserver dans l'exploitation la fraction des bénéfices ainsi exonérés , ce qui passe aujourd'hui, pour les sociétés, par l'inscription de la fraction exonérée des bénéfices à une réserve spéciale.

Le 2° du I de cet article propose par ailleurs de supprimer l'obligation d'opter de manière irrévocable entre le bénéfice du régime de zone franche de l'article 44 decies du code général des impôts et celui de crédit d'impôt pour investissement de l'article 244 quater E du même code. En d'autres termes, cet alinéa autorise le cumul des deux dispositifs.

Enfin, le II du présent article propose que ce cumul soit ouvert pour les investissements réalisés à compter du 1 er janvier 2002, au cours d'un exercice clos à compter de la date de publication de la loi n° 2000-92 du 22 janvier 2002 relative à la Corse.

Ces dispositions s'inscrivent dans le prolongement de la mission relative à « l'étude des avantages fiscaux accordés aux entreprises en Corse » confiée en septembre 2002 à M. Jean-Claude Hirel, inspecteur général des finances, par MM. Nicolas Sarkozy, ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieur et des libertés locales, et Francis Mer, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.

Cette mission, conduite sous la forme d'un groupe de travail associant représentants de l'administration, élus locaux et représentants du tissu économique insulaire, a en effet réévalué à la baisse, à 35 millions d'euros par an au lieu du montant de 74 millions d'euros par an avancé par le précédent gouvernement lors de l'examen de la loi du 22 janvier 2002, l'avantage fiscal résultant du dispositif de crédit d'impôt institué par ladite loi. Aussi, tout en affirmant la nécessité de maintenir le dispositif afin de soutenir l'investissement et en confirmant le principe de l'abandon de la zone franche, la mission a préconisé deux mesures principales permettant d'atténuer la minoration de l'effort budgétaire de l'Etat par rapport à ce qui avait été initialement annoncé :

- d'une part, l' uniformisation à 20 % du taux du crédit d'impôt , mesure qui a fait l'objet de l'article 41 de la loi de finances rectificative du 30 décembre 2002, notifié le 14 janvier 2003 à la Commission européenne, qui l'a approuvé le 21 février suivant ,

- d'autre part, la sortie en sifflet du dispositif de zone franche qui, selon les informations transmises à votre rapporteur, concerne 58 % des entreprises insulaires. C'est cette mesure qui fait l'objet du présent article.

Contrairement à celui-ci, cependant, le rapport précité préconisait de conserver la condition relative au maintien des bénéfices exonérés dans l'exploitation ainsi que la nécessité pour les entreprises d'opter entre les dispositifs de crédit d'impôt et de zone franche. Selon les informations transmises à votre rapporteur, l'ouverture de la faculté de cumuler les deux dispositifs vise toutefois à éviter que des contribuables ayant réalisé des investissements éligibles au crédit d'impôt et opté pour ce dispositif se trouvent dans certains cas dans une situation moins favorable que ceux n'ayant réalisé aucun investissement.

Quoi qu'il en soit, il convient de signaler que l'article 17 bis ne prévoit pas de sortie en sifflet pour le dispositif corollaire d'exonération de l'imposition forfaitaire annuelle prévu par le quatrième alinéa de l'article 223 nonies du code général des impôts pour les entreprises entièrement exonérées d'impôt sur les sociétés au titre de l'article 44 decies .

III. La position de votre commission spéciale

Cet article s'inscrit bien dans le cadre du titre III du projet de loi pour l'initiative économique puisqu'il favorise le financement de petites et moyennes entreprises.

Par ailleurs, même si les travaux conduits par votre commission spéciale n'ont pas permis d'appréhender toute la portée du présent dispositif pour l'économie corse, il convient de rappeler que la sortie en sifflet de la zone franche de Corse avait été préconisée lors de l'examen en première lecture du projet de loi sur la Corse par la commission spéciale du Sénat, dont le rapporteur était notre collègue M. Paul Girod.

Le rapport de cette commission spéciale ( ( * )1)concluait en effet :

« Le Gouvernement fait valoir que la perte du bénéfice du régime de la zone franche s'accompagne, pour les entreprises, de la mise en place d'une sortie "en sifflet", les exonérations disparaissant de manière progressive en trois ans.

« Cette présentation n'est exacte que pour la perte du bénéfice de l'exonération de taxe professionnelle mise en place par la zone franche.

« Pour les deux autres exonérations (au titre de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, et au titre de l'imposition forfaitaire annuelle), rien n'est prévu (même si le crédit d'impôt devrait prendre le relais pour un certain nombre de ces entreprises). L'absence de mécanisme de sortie progressive du régime de la zone franche sera particulièrement pénalisante , d'une part, pour les entreprises dont les besoins en investissements nouveaux sont satisfaits, et qui ne pourront donc pas profiter du crédit d'impôt avant plusieurs années, et, d'autre part, pour les entreprises qui exercent leur activité dans les secteurs non éligibles au crédit d'impôt au taux de 20 % mais qui étaient éligibles au précédent dispositif ».

Dans ces conditions, votre commission spéciale vous propose d'adopter le présent article.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 17 bis -
Rapport au Parlement sur les achats de l'Etat aux PME

Commentaire : le présent article tend à prévoir le dépôt par le Gouvernement d'un rapport annuel au Parlement sur les achats des services de l'Etat aux petites et moyennes entreprises.

Dans son rapport d'information au nom de la commission des affaires économiques intitulé « Aider les PME : l'exemple américain » ( ( * )1), notre collègue M. Francis Grignon , président de la commission spéciale, relevait dès 1997 que la législation fédérale américaine posait comme principe que l'administration doit assurer aux PME un juste accès à ses marchés publics, et que l'agence fédérale chargée du soutien aux PME aux Etats-Unis, la Small Business Administration (SBA), fixait chaque année aux administrations d'Etat un objectif chiffré réaliste - autour de 20 % ( ( * )2) - pour la part de leurs marchés publics allouée aux PME.

Ces objectifs sont fixés la plupart du temps par concertation entre la SBA et l'agence ou l'administration fédérale concernée. Ils diffèrent d'une administration à l'autre en fonction de la nature de leurs achats. Ils sont déclinés en plusieurs sous-objectifs (marchés alloués aux PME, marchés alloués aux PME dirigées par des personnes défavorisées, marchés alloués à des PME dirigés par des femmes, etc.). A la fin de l'année chaque administration fait un rapport à la SBA sur la façon dont elle a rempli ses objectifs. Sur cette base, le Président des Etats-Unis adresse ensuite au Congrès un rapport rédigé par la SBA qui détaille les résultats obtenus par chaque administration.

La poursuite de ces objectifs est favorisée par diverses dispositions législatives prévoyant de réserver certains marchés publics aux PME ou imposant aux administrations de créer en leur sein un bureau en charge des achats publics et des PME, ayant notamment pour mission d'apporter un soutien comptable, technique et administratif aux PME qui veulent conclure des marchés avec cette administration. Par ailleurs, la SBA veille à ce que les grandes entreprises qui contractent avec l'administration s'engagent à sous-traiter en partie auprès des PME, élabore un fichier détaillé de plus de 200.000 petites entreprises candidates à l'obtention de marchés publics, et peut délivrer à des PME un certificat de compétence technique.

Tout en en relevant la lourdeur administrative, M. Francis Grignon avait porté une appréciation positive sur l'efficacité de ce dispositif et, constatant « l'absence de culture des PME » dans l'administration française, proposé d'en transposer certains éléments dans le droit français. Outre une réforme du code des marchés publics pour en faciliter l'accès aux PME, en instituant une « préférence PME » pour les marchés publics, il avait suggéré :

- que soit dressé un état statistique précis des marchés publics obtenus par les PME , cette mesure ayant été jugée techniquement réalisable par les services du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, par le rapprochement du fichier SIRENE de l'INSEE et du numéro SIRENE des entreprises attributaires figurant sur la fiche de recensement de chaque marché ;

- que soit fixé à chaque administration de l'Etat un objectif annuel d'attribution de marchés publics à des PME ;

- que soit présenté à l'ouverture du débat budgétaire un rapport annuel au Parlement sur l'état des PME .

La plupart de ces propositions, et notamment la dernière d'entre elles, avaient été reprises dans la proposition de loi déposée par M. Jean-Pierre Raffarin à l'issue des travaux du groupe de travail « Nouvelles entreprises et territoires », que la commission des affaires économiques du Sénat avait constitué en juin 1998 et qui avait publié un rapport présenté à nouveau par notre collègue M. Francis Grignon ( ( * )1). Celui-ci avait en effet notamment préconisé la rédaction par le Conseil national de la création d'entreprise (qu'il proposait par ailleurs d'instituer) d'un rapport annuel sur les PME, remis au Président de la République et transmis au Premier ministre et au Parlement.

Votre rapporteur vous suggère de donner force de loi à cette idée , tout en l'adaptant au contexte nouveau résultant de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, en adoptant un article additionnel prévoyant, à partir de 2004, la remise au Parlement par le Gouvernement, avant le 1 er juin de chaque année, c'est à dire concomitamment au dépôt du projet de loi de règlement, d'un rapport annuel relatif aux achats des services de l'Etat aux PME .

A terme, les éléments d'information contenus dans ce rapport pourraient ainsi nourrir le débat d'orientation budgétaire et s'inscrire dans le cadre des objectifs et des indicateurs associés à chacun des programmes prévus par l'article 7 de la loi organique relative aux lois de finances. Cette mesure trouve toute sa place dans le présent titre, car la commande publique participe évidemment de manière importante au financement des PME.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

TITRE IV -
ACCOMPAGNEMENT SOCIAL DES PROJETS
Article 18 A (nouveau) -
Aménagement du calcul des cotisations sociales
des travailleurs indépendants

(Articles L.131-6 et L.136-3 du code de la sécurité sociale)

Commentaire : l'article 18 A nouveau vise à simplifier le système de calcul du montant des cotisations dues par les travailleurs indépendants sur la base des revenus effectivement réalisés, diminués d'un abattement forfaitaire variable selon la nature de l'activité.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

A. Le régime actuel

Aux termes de l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale, les travailleurs non salariés non agricoles doivent s'acquitter des cotisations d'assurances maladie et maternité et d'allocations familiales, des cotisations d'assurance vieillesse de base, ainsi que de la CSG et la CRDS qui sont assises sur le revenu professionnel non salarié ou, le cas échéant, sur des revenus forfaitaires. Ces cotisations sont calculées chaque année, à titre provisionnel, en pourcentage du revenu professionnel de l'avant-dernière année ou des revenus forfaitaires.

Ce n'est que lorsque le revenu professionnel est définitivement connu que les cotisations font l'objet d'une régularisation proportionnellement au chiffre d'affaires effectivement réalisé . Or, cette régularisation, différente selon les caisses, peut intervenir deux ans après l'année d'acquittement.

Pour les travailleurs indépendants qui débutent leur activité, le dernier alinéa de l'article L. 131-6 prévoit que les cotisations sont calculées, à titre provisionnel, sur la base d'un revenu forfaitaire qui ne peut excéder, la première année d'activité, dix-huit fois la valeur de la base mensuelle de calcul des prestations familiales en vigueur au 1 er octobre de l'année précédente et, la deuxième année d'activité, vingt-sept fois la valeur de cette base.

Pour ces entreprises nouvellement créées, la charge financière induite par ce système est très lourde. En effet, elles doivent s'acquitter d'acomptes provisionnels dès l'issue du premier trimestre d'activité, étant entendu que les cotisations sont calculées les deux premières années sur des assiettes forfaitaires.

Ces modalités sont à l'origine de sérieux inconvénients pour les créateurs ou repreneurs d'entreprise :

- une absence de lisibilité du montant prévisionnel de leurs charges ;

- une pénalisation de leur trésorerie à cause de cotisations sociales élevées que la modestie de leur chiffre d'affaires ne leur permet pas d'assurer au moment de l'acquittement en début d'activité ;

- une sortie longue du régime des non-salariés, interdisant toute fluidité dans le choix alternatif ou successif des statuts sociaux.

B. La modification proposée

Adopté par l'Assemblée nationale sur proposition du Gouvernement, l'article 18 A nouveau comporte deux paragraphes qui ajoutent deux nouveaux alinéas aux articles L. 131-6 et L. 136-3 du code de la sécurité sociale.

Par dérogation au dispositif décrit ci-dessus, le paragraphe I complète l'article L. 131-6 pour donner la possibilité aux travailleurs non salariés de demander à ce que les cotisation qu'ils doivent acquitter soient, dès l'année où elles sont dues, calculées sur la base du revenu effectivement réalisé .

Quand au paragraphe II, il complète l'article L. 136-3 pour préciser que la contribution calculée sur les revenus tirés par le travailleur indépendant de la location d'un fonds de commerce ou d'un établissement artisanal, commercial ou industriel, qu'elle comprenne ou non du mobilier ou du matériel attaché à ce fonds de commerce, est également calculée sur la base du revenu effectivement réalisé lorsque l'intéressé souhaite être soumis au régime décrit au paragraphe I.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale estime judicieuse l'extension du régime fiscal des micro-entreprises aux charges sociales des travailleurs indépendants, qu'elle juge simplificatrice et plus juste . Elle permettra aux entrepreneurs concernés de prévoir leurs charges plus sereinement.

Désormais, le revenu sera déterminé sur la base du chiffre d'affaires réel après un abattement forfaitaire. Pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à un plafond fixé à 28.000 euros pour les services et 76.000 euros pour les ventes, le taux d'abattement variera de 37 % à 72 % selon la nature de l'activité, sans qu'il soit nécessaire d'effectuer une régularisation annuelle.

Afin de laisser aux caisses de sécurité sociale concernées le temps de mettre en place ce nouveau mode de calcul des cotisations pour les travailleurs indépendants, votre commission spéciale vous propose un amendement tendant à prévoir la mise en oeuvre du dispositif à compter de l'année 2004 .

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 18 -
Report et étalement du paiement des cotisations sociales
de la première année d'activité

(Articles L. 131-6-1 et L.243-1-1( nouveaux ) du code de la sécurité sociale)

Commentaire : le présent article a pour objet de permettre de reporter le paiement des charges sociales personnelles dues au titre des douze premiers mois d'activité et ce, sans majoration de retard, et d'étaler leur acquittement sur une période maximale de cinq ans, par fractions de 20 %, dans le but d'alléger les charges qui pèsent sur la trésorerie de l'entreprise nouvellement créée par l'employeur ou le travailleur non salarié.

I. Le texte initial

Les règles actuelles de prélèvement des cotisations des travailleurs non salariés non agricoles peuvent constituer une charge financière difficilement supportable pour les nouvelles entreprises, établies sous forme individuelle ou sociétale.

L'article 18 comporte trois paragraphes, qui ajoutent deux articles nouveaux aux titres III et IV du livre Ier du code de la sécurité sociale.

Par dérogation aux dispositions de l'article L. 131-6, le paragraphe I crée un nouvel article L. 131-6-1 tendant reporter aux années suivantes le paiement des cotisations sociales dues la première année de l'activité indépendante . En outre, le deuxième alinéa de ce nouvel article donne la possibilité au travailleur indépendant de demander que l'acquittement de ces cotisations se fasse par fractions annuelles durant une période qui ne peut excéder cinq ans. Cet étalement n'entraîne aucune majoration de retard.

Actuellement, aucun report ni étalement n'est possible mais des aménagements particuliers ont été envisagés :

- le cinquième alinéa de l'article L. 131-6 prévoit pour le créateur d'entreprise la possibilité de demander que la cotisation soit, à titre provisionnel, calculée sur la base d'une assiette forfaitaire inférieure, s'il apporte la preuve que ses revenus professionnels sont inférieurs à l'assiette retenue par les dispositions en vigueur ;

- le travailleur indépendant peut aussi bénéficier d'une dispense des cotisations d'allocations familiales si son revenu réel est inférieur à un montant déterminé ;

- enfin, depuis le 1 er juillet 2000, le travailleur indépendant a la faculté de s'acquitter de ses cotisations selon une périodicité mensuelle, trimestrielle ou semestrielle, à partir du moment où le paiement de la première tranche intervient le premier jour du quatrième mois qui suit l'affiliation.

A ce dispositif s'ajouterait désormais une possibilité de report et d'étalement du paiement des cotisations dues par le travailleur indépendant débutant. Deux limites sont, cependant, apportées à cette mesure :

- le bénéfice cette disposition ne serait accordé qu'une fois par période de cinq ans pour l'entreprise créée ou reprise ;

- si les conditions d'exercice de l'activité étaient modifiées, le travailleur indépendant ne pourrait plus demander le bénéfice de ces dispositions.

Le paragraphe II du présent article 18 crée un article L. 243-1-1 au livre II du code de la sécurité sociale pour instituer un dispositif analogue au profit des créateurs ou des repreneurs d'entreprises installées sous forme de sociétés .

Les bénéficiaires éventuels sont cités aux 6°, 11°, 12°, 13° et 23° de l'article L. 311-3, à savoir :

- les gérants non salariés des coopératives et les gérants de dépôts de sociétés à succursales multiples ou d'autres établissements commerciaux ou industriels ;

- les gérants de sociétés à responsabilité limitée et de sociétés d'exercice libéral à responsabilité limitée ;

- les présidents-directeurs et directeurs généraux des sociétés anonymes et des sociétés d'exercice libéral à forme anonyme ;

- les membres des sociétés coopératives ouvrières de production ainsi que les gérants, les directeurs généraux, les présidents du conseil d'administration et les membres du directoire des mêmes coopératives ;

- les présidents et les dirigeants des sociétés par actions simplifiées.

Désormais, tout comme les travailleurs non salariés des professions non agricoles, ces personnes pourraient demander, d'une part, un report des cotisations salariales et patronales sur leurs rémunérations à l'année qui suit la création ou la reprise d'une entreprise et, d'autre part, un étalement du paiement de ces cotisations sur cinq années maximum, sans majoration de retard. Les mêmes limites sont appliquées à celles qui sont prévues pour les travailleurs non salariés des professions non agricoles.

Ce dispositif présente un coût réel limité pour les organismes gestionnaires (CANAM, CANCAVA, ORGANIC et URSSAF) dans la mesure où la perte de trésorerie initiale (110 millions d'euros la première année et 350 millions d'euros en année pleine) est progressivement compensée au fur et à mesure que les bénéficiaires s'acquittent des contributions reportées, sous réserve des entreprises ayant disparu sans apurer leurs dettes.

Le paragraphe III du présent article 18 précise que l'ensemble de ces dispositions sont applicables à partir du 1 er janvier 2004, ce qui est supposé permettre aux URSSAF de préparer matériellement l'application de la mesure.

II. Les travaux de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a apporté quatre amendements à cet article, dont un strictement rédactionnel.

Les deux suivants proposent que, pour les deux catégories de chefs d'entreprises visées par l'article 18, l'acquittement des cotisations sur les cinq années soit effectué en cinq versements annuels qui ne peuvent être inférieurs à 20 % du montant total des cotisations dues . Alors que le Gouvernement avait prévu un échéancier plus souple supposé permettre au créateur d'entreprise de varier ses versements en fonctions de ses contraintes, ces amendements visent à éviter que le jeune créateur, profitant d'un effet d'aubaine, attende le dernier moment pour s'acquitter de son dû. Néanmoins, pour les créateurs qui souhaiteraient s'acquitter de leurs cotisations avant terme, les amendements prévoient que ce remboursement puisse être anticipé.

Le dernier amendement modifie le paragraphe III de l'article 18 en avançant la date de son application à septembre 2003.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale estime tout à fait légitime que les cotisations ne soient appelées que lorsque l'entreprise a dégagé un revenu, afin de ne pas fragiliser sa première activité par des prélèvements sociaux altérant sa trésorerie. Il n'est pas opportun d'alourdir le bilan d'entreprises en création, ce que le fractionnement du paiement des cotisations sociales permet d'éviter.

Parallèlement, la nécessité de responsabiliser les entrepreneurs, qui sont appelés à gérer une prise de risque quotidienne, appelle la détermination d'un montant minimum des versements annuels à effectuer par l'entrepreneur.

Enfin, la possibilité de s'acquitter avant terme des cotisations dues donne au dispositif une souplesse utile à son adaptation aux contraintes très diverses des 127.000 entrepreneurs destinataires de la mesure.

Votre commission spéciale souhaite compléter ce très important et opportun dispositif par deux modifications :

- la première tend à rétablir la date initialement prévue par le Gouvernement du 1 er janvier 2004 pour la mise en oeuvre des dispositions de l'article 18, un délai minimal étant en effet nécessaire entre la promulgation de la présente loi et son application par les caisses de sécurité sociale ;

- la seconde vise à étendre le présent dispositif aux créateurs ou repreneurs d'entreprise démarrant leur activité dans le cadre des couveuses d'entreprises , et affiliés à ce titre au régime général de sécurité sociale en vertu du 25° de l'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 18 bis (nouveau) -
Détermination d'un organisme unique chargé de recouvrer les cotisations sociales des professions artisanales, industrielles et commerciales

(Art. L. 131-6-2 nouveau, L. 136-5, L. 200-2, L. 213-1,
L. 611-3 et L. 623-2 du code de la sécurité sociale)

Commentaire : le présent article, introduit par l'Assemblée nationale à l'initiative de sa commission spéciale, le Gouvernement en ayant demandé le retrait, prévoit qu'un organisme unique procédera au recouvrement des cotisations et contributions dont sont redevables à titre personnel les travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales.

I. Le dispositif proposé : un mécanisme de recouvrement unique pour des cotisations et des contributions aujourd'hui appelées par de nombreux organismes

A. Une mesure de simplification pour les travailleurs indépendants

En son paragraphe I, le présent article confie à un organisme unique, qui sera déterminé par décret, le recouvrement des cotisations et contributions sociales dues, au titre de leur couverture sociale personnelle, par les travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales (en revanche, les professions libérales, qui sont également des professions indépendantes, ne sont pas concernées). Les cotisations et contributions visées par cette disposition sont :

- les cotisations d'assurance maladie-maternité, actuellement recouvrées par des organismes (assurances, mutuelles) conventionnés par les caisses maladies régionales des professions indépendantes, elles-mêmes coordonnées par la CANAM (Caisse nationale d'assurance maladie des professions indépendantes) ;

- les cotisations d'assurance vieillesse-invalidité-décès, actuellement recouvrées par des caisses professionnelles ou interprofessionnelles de retraite, elles-mêmes coordonnées par deux caisses nationales à savoir, d'une part, la CANCAVA (caisse autonome nationale de compensation de l'assurance vieillesse artisanale), qui gère le régime des artisans et, d'autre part, l'ORGANIC (organisation autonome du commerce et de l'industrie), qui gère le régime des professions industrielles et commerciales ( ( * )1) ;

- les cotisations personnelles d'allocations familiales, actuellement recouvrées par les URSSAF ( ( * )2) de la branche recouvrement du régime général de sécurité sociale, et dont le produit est affecté à la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) ;

- la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus d'activité et de remplacement, actuellement recouvrée par les URSSAF, et dont le produit est réparti entre la CNAF, le Fonds de solidarité vieillesse (FSV) et les régimes obligatoires d'assurance maladie ;

- la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), actuellement recouvrée par les URSSAF ( ( * )1), et dont le produit est affecté à la Caisse d'amortissement de la dette sociale (CADES).

La logique de collecteur unique retenue par le présent article conduirait à confier à un seul organisme la mission de centraliser « physiquement » le recouvrement de ces diverses cotisations et contributions, avant de les reverser, ensuite, aux organismes sociaux affectataires . En cas de paiement partiel desdites cotisations et contributions, les sommes ainsi collectées seraient versées aux régimes bénéficiaires au prorata de leur créance.

Selon les informations aujourd'hui disponibles, il serait envisagé de confier la gestion de ce guichet unique aux caisses de l'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales (ORGANIC et CANCAVA).

B. Des adaptations de coordination

Les autres paragraphes du présent article procèdent, dans le code de la sécurité sociale, aux coordinations rédactionnelles rendues nécessaires par le principe général défini en son paragraphe I.

Les paragraphes II et III de l'article modifient ainsi la rédaction de l'article L. 136-5 du code de la sécurité sociale, relatif aux modalités de recouvrement de la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement.

Il convient de souligner que la nouvelle rédaction ainsi proposée par ces paragraphes II et III n'apparaît guère cohérente. Tout d'abord, elle fait coexister deux dispositions contradictoires, à savoir :

- d'une part, la première phrase du premier alinéa de l'article L. 136-5, qui demeure en vigueur, et selon lequel le recouvrement de la CSG sur la totalité des revenus d'activité et de remplacement (articles L. 136-1 à L. 136-4 du code de la sécurité sociale), y compris ceux des professions indépendantes, incombe aux URSSAF ;

- et, d'autre part, un nouvel alinéa, dont l'insertion est proposée au même article L. 136-5, et qui confie au nouvel organisme collecteur unique le soin de recouvrer la CSG sur les revenus d'activité et de remplacement des mêmes professions indépendantes (visée à l'article L. 136-3 dudit code).

Sauf à ce que ce soit l'URSSAF qui soit retenue pour assurer le recouvrement de toutes les cotisations et contributions considérées, la juxtaposition de ces deux dispositions n'est donc pas possible.

Par ailleurs, le champ de compétence de l'organisme collecteur, tel qu'il résulte de cette nouvelle rédaction, paraît plus étendu que celui défini au paragraphe I du présent article puisqu'il inclut :

- d'une part, la CSG due par les professions libérales (celles-ci font également partie des travailleurs indépendants visés à l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale), qui ne relèvent pourtant pas du mécanisme ainsi institué ;

- et, d'autre part, la CSG due au titre du revenu des exploitations agricoles (visé à l'article L. 136-4), y compris par les exploitants assujettis à la mutualité sociale agricole. Or, le II de l'article L. 136-5 du code de la sécurité sociale, qui n'est pas modifié, dispose, par ailleurs, que la CSG due par ces exploitants agricoles est directement recouvrée par les caisses de mutualité sociale agricole.

Les paragraphes IV et V procèdent à des adaptations similaires en ce qui concerne le recouvrement de certaines recettes du régime général de sécurité sociale. La branche recouvrement du régime général (URSSAF) ne serait plus, par exemple, compétente pour percevoir directement, au profit de la CNAF, la CSG « famille » et les cotisations personnelles d'allocations familiales dues par les professions artisanales, industrielles et commerciales. Ces recettes lui seraient reversées par le collecteur unique, dans l'hypothèse bien entendu où il s'agirait d'un autre organisme. Il conviendrait donc de veiller à ce que cette nouvelle procédure ne se traduise pas par des délais préjudiciables à la trésorerie de la CNAF et du régime général, et susceptibles de faire dépasser, par ces derniers, les plafonds qui leur sont autorisés, en ce domaine, par la loi de financement de la sécurité sociale.

Le paragraphe VI applique le même principe aux organismes conventionnés (assurances, mutuelles) par les caisses régionales d'assurance maladie des professions indépendantes, qui n'assureraient plus directement, désormais, que le service des prestations maladie au profit des professions artisanales, industrielles et commerciales, le recouvrement des cotisations correspondantes relevant de la compétence du collecteur déterminé par décret.

Enfin, le paragraphe VII procède à une adaptation rédactionnelle similaire en ce qui concerne le recouvrement des cotisations d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles et commerciales.

C. Une nouvelle mesure de simplification qui s'inscrit dans la continuité des efforts précédemment engagés par les pouvoirs publics

La philosophie du dispositif proposé par le présent article s'inscrit dans la continuité des mesures déjà mises en oeuvre par les pouvoirs publics, au cours de ces dernières années, afin de simplifier les formalités sociales à la charge des professions artisanales, industrielles et commerciales, et notamment :

- la création du centre de formalités des entreprises (CFE), qui est le « guichet unique » et obligatoire de déclaration en cas de création ou de reprise d'activité professionnelle non salariée. Pour les travailleurs indépendants, l'accomplissement des formalités de création auprès du CFE compétent ( ( * )1) entraîne leur inscription à l'URSSAF et aux caisses d'assurance maladie et vieillesse des non-salariés ;

- la déclaration annuelle commune des revenus (DCR) des professions indépendantes non agricoles permet d'établir la base de calcul de toutes les cotisations obligatoires dues pour leur activité indépendante aux caisses d'assurance maladie, d'assurance vieillesse et aux URSSAF (allocations familiales, ainsi que la base de calcul de la CSG et de la CRDS). Cette déclaration permet également de déterminer le régime d'assurance maladie habilité à rembourser les dépenses de soins (régime de l'activité principale) des personnes exerçant simultanément une activité indépendante et une activité salariée ou agricole. La DCR est à retourner, chaque année avant le 1 er mai, au régime d'assurance maladie des professions indépendantes, qui « ventile » ensuite les informations entre les différents destinataires ;

- l'unification de l'affiliation des pluriactifs exerçant, d'une part, une activité non salariée agricole et, d'autre part, une activité non salariée non agricole (article 53 de la loi n° 99-574 du 9 juillet 1999 d'orientation agricole) ;

- la simplification et l'harmonisation des règles relatives aux cotisations sociales des travailleurs indépendants (décrets n os 2002-588 et 2002-589 du 23 avril 2002) ;

- la création d'un guichet unique « virtuel » afin, notamment, de simplifier les formalités liées à la déclaration et au paiement des cotisations et contributions sociales personnelles des professions indépendantes : le portail Internet « Net entreprises ».

Comme il a été indiqué dans le commentaire de l'article 6 quarter , « Net entreprises » est organisé dans le cadre d'un groupement d'intérêt public (GIP) regroupant l'ensemble des organismes sociaux compétents (dont la CANAM, l'ORGANIC et la CANCAVA). Ayant pour base législative le I de l'article L. 133-5 du code de la sécurité sociale, ce service d'aide en ligne a pour objectif, grâce à des procédures automatisées, de permettre aux employeurs et aux membres des professions indépendantes, pour eux-mêmes et au titre de leurs salariés, :

- d'une part, de procéder à l'ensemble des formalités et déclarations sociales obligatoires (les informations étant télétransmises à leurs différents destinataires par le biais de procédures sécurisées) ;

- d'autre part, d'effectuer directement, par télérèglement, le paiement des cotisations et contributions sociales dues. Dans ce cas, et à la différence du guichet unique « physique » institué par le présent article, les flux financiers correspondants sont directement envoyés à leur destinataire final, sans transiter par un organisme tiers.

II. La position de votre commission spéciale

Les raisons de méthode et de cohérence formulées à l'occasion de l'examen des articles 6 quater et 6 quinquies conduisent également votre commission spéciale à proposer la suppression du présent article , afin que la mise en oeuvre de cette mesure de simplification soit entreprise dans le cadre des ordonnances de simplification .

On rappellera en effet que l'article 19 du projet de loi d'habilitation, adopté le mercredi 19 mars 2003 par le conseil des ministres, prévoit en particulier de :

- permettre la déclaration et le recouvrement par un organisme unique des cotisations et contributions sociales des travailleurs non salariés non agricoles ;

- simplifier le mode de calcul des cotisations et contributions sociales des travailleurs non salariés non agricoles et harmoniser les dates d'échéance des versements.

Votre commission spéciale observe à cet égard que les deux objectifs ci-dessus précisés sont étroitement liés, la réalisation du second commandant le succès du premier. En effet, il serait inutile d'instituer un collecteur unique si celui-ci était conduit à exiger les cotisations et contributions dues aux dates d'échéances actuellement fixées pour chacun des organismes sociaux concernés, et qui sont très souvent différentes les unes des autres : malgré la centralisation de la collecte, les travailleurs indépendants seraient toujours soumis à une multiplicité des appels de cotisations et ne trouveraient sans doute au dispositif institué aucun effet pratique réel en termes de simplification. Au contraire, une harmonisation concomitante des dates d'échéances des versements, associée de surcroît à une simplification du mode de calcul des cotisations et contributions sociales, rend d'autant plus opportune la centralisation de la collecte.

Dans ces conditions, votre commission spéciale ne discerne pas quel intérêt il y aurait à prévoir l'organisation de cette collecte unique dans le cadre du présent projet de loi dès lors qu'il faudrait attendre une ordonnance pour en autoriser, dans la pratique, la mise en oeuvre.

Par ailleurs, selon les informations recueillies par votre rapporteur et au regard même des termes du dispositif de l'article 18 bis ( ( * )1), il était prévu par les auteurs de l'amendement de confier cette collecte conjointement à l'ORGANIC et à la CANCAVA. Or, il est ressorti des auditions auxquelles votre commission spéciale a procédé que plusieurs dispositifs d'unicité de la collecte pouvaient être envisagés . A cet égard, la palette des solutions est assez large, allant de la désignation d'un seul réseau collecteur jusqu'à l'association de tous les organismes collecteurs actuels au sein d'une structure qui, à l'instar du GIP-MDS, constituerait en « front office » un interlocuteur unique pour les travailleurs indépendants (il s'agirait alors bien là d'un « guichet unique », tout au moins pour l'acquittement des cotisations et des contributions sociales), alors qu'en « back office » subsisterait l'actuelle et complexe organisation de notre dispositif social. Or, le choix de l'une ou l'autre de ces solutions n'est pas sans conséquence sur ladite organisation, et donc sur l'activité de tel ou tel réseau, notamment en termes d'effets sociaux.

L'importance d'évaluer de manière très attentive les avantages et les inconvénients des différentes options possibles, afin de parvenir à une décision qui tienne compte à la fois des possibilités matérielles de mettre effectivement en place l'organisation retenue, des attentes des professions indépendantes et des éventuelles conséquences sociales du choix effectué, n'a d'ailleurs pas échappé au Gouvernement.

Celui-ci, en effet, au regard de la complexité du dossier, a décidé « d'expertiser, préalablement à toute décision, l'ensemble des voies d'évolution permettant d'aboutir à une véritable simplification » . Aussi le Premier ministre a-t-il chargé, le 18 février dernier, une mission conjointe de l'inspection générale des affaires sociales, de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'industrie et du commerce, de lui remettre, d'ici la fin du mois de mars , un rapport d'expertise sur la base duquel le Gouvernement fondera ses décisions ( ( * )1). Cette initiative du Gouvernement conforte pleinement votre commission spéciale dans son opinion qu' une rigoureuse analyse technique préalable est indispensable , tout comme un temps donné à la concertation .

Force est cependant de constater que cette mission ne rendra ses conclusions qu'après que le Sénat aura été amené à débattre du projet de loi , ce qui, à l'évidence, ne lui permet pas de poursuivre plus avant l'examen de cet article 18 bis dans de bonnes conditions d'expertise. Il serait en effet paradoxal que, dans le cadre des indispensables améliorations techniques à apporter au texte issu de l'Assemblée nationale, le Sénat soit conduit à retenir une solution plutôt qu'une autre alors que le Gouvernement lui-même juge nécessaire d'approfondir sa réflexion en la matière, et attende pour y procéder de recevoir le produit des travaux de ses meilleurs experts.

Ainsi, convaincue que la mise en oeuvre de cette réforme d'importance, qu'attendent légitimement un nombre important d'entrepreneurs individuels, ne saurait être engagée dans la précipitation, et attentive à ce que la cohérence d'ensemble du dispositif puisse être garantie par une analyse technique minutieuse et approfondie, votre commission spéciale estime plus opportun de retenir la méthode initialement choisie par le Gouvernement, c'est-à-dire de procéder par la voie des ordonnances .

Votre commission spéciale souscrit ainsi pleinement aux propos tenus avec constance par d'éminents représentants du Gouvernement -M. Renaud Dutreil, secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, lors de l'examen de ce texte à l'Assemblée nationale au début du mois de février, ou M. François Fillon, ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, à l'occasion de la discussion par le Sénat de la proposition de loi relative à la création d'un chèque-emploi associatif, le 13 mars dernier - quant à l'intérêt de cette méthode pour associer concertation, rigueur et efficacité.

Elle relève au demeurant que cette volonté du Gouvernement est confirmée par l'adoption, par le conseil des ministres du mercredi 19 mars, du projet de loi portant habilitation du Gouvernement à prendre par ordonnances des mesures de simplification et de codification du droit, qui comporte en son article 19 la demande d'habilitation pour permettre la déclaration et le recouvrement par un organisme unique des cotisations et contributions sociales des travailleurs non salariés non agricoles. Six semaines exactement après que cet article 18 bis ait été inséré dans le présent texte, le Gouvernement a ainsi manifesté de manière résolue son souhait de mener, dans le cadre des ordonnances plutôt que par la voie législative traditionnelle, les projets de simplification sur lesquels il s'est solennellement engagé .

Reste sans doute une question de principe : le Parlement peut-il accepter d'habiliter le Gouvernement à simplifier ou doit-il faire prévaloir ses prérogatives législatives ? Une telle interrogation dépasse le simple cadre du dispositif de l'article 18 bis et concerne bien davantage le principe même des ordonnances de simplification : votre commission spéciale ne saurait donc s'engager dans un tel débat. Pour en rester au cas d'espèce, elle estime en tout état de cause approprié le recours à la procédure des ordonnances dans un domaine où les considérations à caractère technique présentent une importance essentielle et sont étroitement liées à la définition des principes . Cette méthode permet en outre d'avoir une vision d'ensemble qui fait prévaloir la cohérence et d'articuler efficacement, dès lors que les dossiers sont abordés globalement, ce qui relève de la négociation, de la circulaire, du règlement et de la loi.

C'est pourquoi, ne voyant pas, en la matière, qu'il soit porté une atteinte particulière aux prérogatives du Parlement, votre commission spéciale approuve le recours aux ordonnances pour permettre la déclaration et le recouvrement par un organisme unique des cotisations et contributions sociales des travailleurs non salariés non agricoles, ainsi que l'harmonisation des dates d'échéance des versements qui en est le corollaire.

Aussi votre commission vous propose-t-elle la suppression de cet article.

Article 19 -
Renforcement du dispositif d'aide à la création d'entreprises
en faveur des populations en difficulté

(Articles L. 351-24 et L. 351-24-1 ( nouveau ) du code du travail)

Commentaire : le présent article vise à renforcer le dispositif d'aide à la création d'entreprise aux populations en difficulté en élargissant le dispositif d'aide à la création d'entreprises aux populations privés d'emploi qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise.

I. Le texte initial

Le paragraphe I du présent article modifie la rédaction de l'article L. 351-24 du code du travail afin d'étendre et de renforcer le dispositif d'aide à la création d'entreprises aux populations privées d'emploi, créateurs ou repreneurs d'entreprise.

A. Le dispositif actuel d'aide à la création d'entreprise au profit des populations en difficulté

1. Les bénéficiaires

Actuellement, le dispositif d'aide à la création d'entreprises par les populations en difficulté bénéficie aux personnes visées à l'article L. 351-24 du code du travail, c'est-à-dire :

- les demandeurs d'emploi indemnisés au titre de l'allocation de conversion, de l'allocation unique dégressive, de l'allocation d'aide au retour à l'emploi ou de l'allocation solidarité chômage ;

LE DEMANDEUR D'EMPLOI INDEMNISÉ

Phase antérieure à l'immatriculation

Phase postérieure à l'immatriculation

Il continue à percevoir ses allocations, les démarches accomplies en vue de la création d'une entreprise constituant des actes positifs de recherche d'emploi.

Le versement des allocations de chômage cesse en principe à la date de création de l'entreprise.

Il peut prétendre :

- à l'aide aux demandeurs d'emploi créant ou reprenant une entreprise (ACCRE), qui consiste en une exonération de cotisations sociales pendant un an ;

- aux chéquiers-conseil.

Il a la qualité d'assuré social.

Toutefois, le maintien des allocations peut être accordé par les ASSEDIC, sous certaines conditions et si le créateur demeure inscrit sur la listes des demandeurs d'emploi en catégorie 6, 7 ou 8 (dispositif de reprise d'une activité réduite).

En cas d'échec, il peut se réinscrire à l'ANPE et retrouver le solde de ses droits pendant une période :

- démarrant à la date d'ouverture de ses droits ;

- égale à la durée des droits ouverts augmentée de trois ans.

S'il a obtenu l'ACCRE, il est exonéré de cotisations sociales pendant un an.

Source : Lettre bimensuelle de l'APCE

- les demandeurs d'emploi non indemnisés inscrits à l'Agence nationale pour l'emploi (ANPE) six mois au cours des dix huit derniers mois ;

- les bénéficiaires du revenu minimum d'insertion (RMI), de l'allocation de solidarité spécifique (ASS) et de l'allocation parent isolé (API) ;

- les bénéficiaires des contrats emploi-jeunes (jeunes de 18 à 26 ans titulaires d'un CES, d'un contrat d'insertion par l'activité ou d'un contrat emploi-consolidé) et les personnes handicapées de moins de trente ans ou qui ne remplissent pas les conditions d'activité antérieure leur ouvrant le droit au bénéfice de l'allocation d'assurance chômage ;

LE TITULAIRE DU RMI

Phase antérieure à l'immatriculation

Phase postérieure à l'immatriculation

Il peut préparer son projet tout en percevant le RMI.

Pour les bénéficiaires de l'ACCRE :

Le maintien du versement du RMI est possible dans les conditions suivantes :
- lors des deux révisions trimestrielles suivant la création ou la reprise d'entreprise, les revenus de l'activité professionnelle ne sont pas pris en compte ;
- les revenus professionnels sont évalués (par tous moyens) par l'administration lors des troisième et quatrième révisions trimestrielles avec un abattement de 50 % ( décret n° 98-1070 du 27 novembre 1998).

Il bénéficie des prestations maladie et de la protection contre les accidents survenus à l'occasion des actions d'insertion.

Il peut prétendre :

- à l'aide aux demandeurs d'emploi créant ou reprenant une entreprise (ACCRE) qui consiste en une exonération de cotisations sociales pendant un an ;

- aux chéquiers-conseil ;

- au dispositif EDEN (prime et mesures d'accompagnement).

Ils sont exonérés de cotisations sociales pendant un an.

Pour les autres :

Le cumul est possible intégralement jusqu'à la deuxième révision trimestrielle suivant le démarrage de l'activité professionnelle.

Ensuite, lors des 3 révisions trimestrielles suivantes, un abattement de 50 % est appliqué sur la moyenne mensuelle des revenus professionnels de chaque trimestre précédent ( décret n° 2001-1078 du 16 novembre 2001) .

Source : Lettre bimensuelle de l'APCE

- les bénéficiaires d'un contrat emploi-jeune rompu avant le terme des aides de l'Etat qui y sont rattachées ;

- les créateurs ou repreneurs d'entreprise sous contrat emploi-solidarité dont l'allocation de demandeur d'emploi indemnisé est maintenue ;

- les personnes salariées ou licenciées d'une entreprise soumises à l'une des procédures prévues par la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985 relative au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises qui reprennent tout ou partie de cette entreprise dès lors qu'elles s'engagent à investir en capital la totalité des aides et à réunir des apports complémentaires en capital n'excédant pas le total de ces aides.

2) Les aides

Les formalités administratives auxquelles sont tenus les populations en difficulté souhaitant créer ou reprendre une entreprise constituent un obstacle difficile à surmonter pour les personnes non accompagnées.

Le schéma ci-joint, fourni par l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE), démontre la complexité actuelle pour monter un projet de taille somme toute modeste.

DÉMARCHES NÉCESSAIRES À LA CRÉATION D'UNE VENTE AMBULANTE

Pour vendre des sandwichs en ambulant, un bénéficiaire du RMI va devoir entreprendre pas moins de dix démarches différentes :

CLI

CCAS

DDTE

2

CANAM

11

8

1

CRÉATEUR

Mairie

3

10

ORGANIC

4

Préfecture

7

URSSAF

6

5

9

Centre des impôts

CCI

1. Prévenir son travailleur social (au CCAS) qu'il veut prendre un registre afin que celui-ci prépare un contrat d'insertion et le fasse valider par une commission locale d'insertion (CLI). C'est seulement deux mois après, au retour de son contrat d'insertion par la CLI, qu'il saura si sa démarche est validée par le dispositif RMI.

2. Aller retirer des chéquiers conseils à la Direction du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (DDTEFP) pour pouvoir bénéficier d'heures de conseil à prix réduit. Rédiger son projet avec un organisme de conseil agréé par la DDTEFP (une boutique de gestion, par exemple). Cette démarche est indispensable si la personne veut obtenir l'exonération des cotisations et ce, même si le projet est prêt à démarrer, car la DDTEFP a une approche très formelle des dossiers.

3. Demander à la mairie un emplacement de vente.

4. Faire agréer son véhicule par les services vétérinaires en préfecture. L'agrément du véhicule est une démarche lourde car le degré d'exigence des services vétérinaires est élevé.

5. Aller s'inscrire à la Chambre de commerce et d'industrie (CCI).

6. Opter pour un régime fiscal et un mode d'assujettissement à la TVA (Centre des impôts).

7. Apporter une attestation d'inscription en préfecture pour obtenir l'autorisation définitive d'exercice du commerce ambulant.

8. Envoyer une attestation d'inscription à la DDTEFP en cas d'accord de l'aide pour pouvoir recevoir les documents qui lui permettront d'être exonéré de cotisations sociales au démarrage.

9-10-11. Renvoyer un volet d'exonération à chaque caisse de cotisation (URSSAF, ORGANIC, CANAM).

Plusieurs dispositions du code du travail et du code de la sécurité sociale décrivent les aides dont peuvent bénéficier les populations en difficulté qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise.

Il s'agit tout d'abord d' exonérations de cotisations sociales , prévues par les articles L. 161-1 et L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale) :

- maintien gratuit pendant douze mois de l'affiliation au régime d'assurances sociales (maladie, maternité, invalidité, décès) et des prestations familiales dont les bénéficiaires relevaient au titre de leur dernière activité ;

- exonération des cotisations dues aux régimes d'assurance maladie, maternité, veuvage, vieillesse, invalidité et décès et d'allocations familiales. L'exonération porte sur une durée de douze mois. Elle est totale pour les demandeurs d'emploi indemnisés et les personnes salariées ou licenciées qui reprennent une entreprise en redressement ou en liquidation judiciaire. Elle est en revanche limitée à un plafond de revenus ou de rémunération égal à 120 % du montant du SMIC pour tous les autres bénéficiaires.

Il s'agit ensuite d' aides financières , visées par les articles L. 351-24 et R. 351-41 du code du travail :

- financement partiel par l'Etat des actions de conseil, de formation ou d'accompagnement (système des chèques-conseil) ;

- aide financière attribuée sous forme de prime au profit de certains créateurs ou repreneurs d'entreprises( ( * )1) ;

- pour les bénéficiaires des contrats emploi-jeunes (y compris lorsque le contrat est rompu avant le terme des aides de l'Etat qui y sont rattachées) et les personnes handicapées de moins de trente ans ou qui ne remplissent pas les conditions d'activité antérieure leur ouvrant droit au bénéfice de l'allocation d'assurance chômage, une aide financée par l'Etat qui peut prendre la forme d'une avance remboursable (article 22 de la loi d'orientation du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions)

- enfin, pour les bénéficiaires du RMI, de l'ASS et de l'API, une éventuelle participation financière de l'Etat lorsque le projet de création a un but d'insertion professionnelle durable.

Il s'agit enfin des aides portant sur l'accompagnement à la création d'entreprise mentionnées à l'article L. 351-24 du code du travail, qui concernent la participation éventuelle de l'Etat aux actions de suivi ou d'accompagnement organisées avant la création ou la reprise d'entreprise et pendant trois ans après au bénéfice des contrats-jeunes et de certains handicapés.

A cela s'ajoute la possibilité de mise en place d'une ingénierie par les régions, en application de la loi n° 97-940 du 16 octobre 1997 relative au développement d'activités pour l'emploi des jeunes.

B. Les modifications proposées par l'article 19 du projet de loi

Le présent article propose de modifier l'article L. 351-24 du code du travail pour étendre et renforcer le dispositif d'aides proposées aux populations en difficulté, tout en conditionnant à la création ou à la reprise d'une entreprise le bénéfice de ces aides. En outre, il décrit les modalités de participation des pouvoirs publics.

L'extension concerne tout d'abord les bénéficiaires du contrat d'accompagnement introduit par l'article 10 du présent projet de loi. En outre, les titulaires du RMI, de l'ASS ou de l'API pourront continuer à cumuler leur allocation avec un revenu d'activité, à la condition de créer ou de reprendre une entreprise. Dans ce cas, ils pourront bénéficier d'une double aide :

- les mesures d'exonération des cotisations, prévues au premier alinéa de l'article L.351-24, conformément à la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions ;

- l'aide de l'Etat et des collectivités publiques prévue à l'article L. 322-8 du code du travail pour le soutien aux contrats d'accompagnement, conformément à l'article 11 du présent projet de loi.

Par ailleurs, le dispositif d'« encouragement au développement des entreprises nouvelles » (EDEN) est élargi à une nouvelle catégorie de bénéficiaires : les demandeurs d'emploi inscrits de cinquante ans et plus . Jusqu'à présent, le bénéfice du dispositif EDEN était réservé à trois catégories de personnes :

- les bénéficiaires de minima sociaux que sont les allocataires du RMI ainsi que leurs conjoints, de l'allocation parent isolé, de l'allocation solidarité spécifique, de l'allocation d'insertion et de l'allocation veuvage ;

- les candidats aux emplois-jeunes qui en remplissent les conditions ou les personnes qui n'en bénéficient plus à la suite de la rupture de leur contrat avant terme, les personnes handicapées de moins de trente ans ou qui ne remplissent pas les conditions d'activité ouvrant droit au bénéfice de l'allocation d'assurance chômage ;

- les personnes salariées ou licenciées d'une entreprise soumise à une procédure collective.

De plus, le bénéfice de cette aide entraînera automatiquement celui des mesures d'exonération des cotisations sociales et de la garantie d'une couverture sociale gratuite prévues aux articles L. 161-1 et L. 161-1-1 du code de la sécurité sociale.

A l'origine, EDEN était une aide financière qui se présentait sous la forme d'un prêt sans intérêt financé par l'Etat. Traditionnellement, l'ensemble des chômeurs qui créaient ou reprenaient une entreprise bénéficiait d'une aide attribuée par l'Etat, que la loi de finances pour 1997 a supprimée pour la remplacer par une exonération de cotisations sociales pendant un an.

Ce dispositif a été complété par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions par deux nouvelles mesures : une nouvelle aide qui pouvait prendre la forme d'une aide remboursable et une aide à l'accompagnement après la création ou la reprise d'entreprise, appelée EDEN, qui a été attribuée sous forme d'avance remboursable entre 1998 et 2001. La somme était versée par l'Etat après expertise du projet de création ou de reprise d'entreprise sous réserve qu'elle soit intégrée au capital de la société crée ou reprise ou utilisée pour le fonctionnement de l'entreprise individuelle concernée. Le montant de l'avance se situait entre 40 et 60.000 francs (soit entre 6.097 et 9.146 euros environ) selon que le projet était personnel ou associait plusieurs participants. En cas de reprise par les salariés de leur entreprise en difficulté, le montant total maximum des avances remboursables cumulées était porté à 500.000 francs (soit 76.219 euros).

Un décret du 5 septembre 2001 a apporté deux nouvelles et substantielles modifications au dispositif :

- il a transformé l'aide remboursable en prime ;

- il modifié les conditions d'intervention en matière de gestion et d'attribution de l'aide des organismes experts dans la création et la reprise d'entreprises.

Cependant, l'ensemble des aides du nouvel article L. 351-24 ne sont accordées à ces personnes que s'ils créent ou reprennent une entreprise, ou en exercent effectivement le contrôle s'il s'agit d'une société. Le droit actuel considère qu'il y a contrôle d'une société si la personne détient au moins 35 % du capital et plus de la moitié avec ses proches, ou lorsqu'elle détient au moins 25 % du capital et plus du tiers avec ses proches, à condition qu'aucun autre actionnaire ne détienne plus de la moitié du capital, ou lorsqu'elle partage avec plusieurs bénéficiaires de l'aide prévue à l'article L. 351-24 plus de la moitié du capital avec un minimum de 10 % pour chaque bénéficiaire.

Cette condition vient bouleverser la philosophie d'un texte issu de la loi du 16 octobre 1997 précité, qui ne limitait cette condition qu'aux bénéficiaires de contrats emploi-jeunes et aux personnes de moins de trente ans handicapées dont le contrat se trouve rompu avant son terme.

L'extension du dispositif EDEN aux personnes de plus de cinquante ans procède de la nécessité de favoriser le maintien de ces personnes sur le marché du travail . L'objectif de cette mesure est de doubler le nombre de bénéficiaires d'EDEN, en les portant de 8.000 à 16.000, voire 20.000, pour un coût estimé à environ 12 millions d'euros la première année. Cette augmentation du nombre de bénéficiaires sera sans doute rendue possible par le remboursement d'une partie des aides remboursables, qui permettra d'octroyer de nouvelles aides. Dès lors que le taux d'échec s'élève à environ 30 %, cette mesure permet d'optimiser les crédits consacrés au dispositif.

Les deux derniers alinéas du paragraphe I portent sur la participation éventuelle de certaines collectivités publiques.

D'une part, est confirmée la possibilité pour l'Etat de participer, par convention, au financement d'actions de conseils, de formation et d'accompagnement. De plus, la participation financière de l'Etat à l'accompagnement est élargie pour permettre à tous les bénéficiaires du dispositif EDEN (et non plus seulement les contrats-jeunes) de bénéficier de cette participation pendant une période de trois ans (au lieu d'une année) après la création ou la reprise d'entreprise.

D'autre part est rappelée au dernier alinéa que les régions et la collectivité territoriale de Corse peuvent contribuer à la mise en place d'une ingénierie susceptible d'aider à la création et à la reprise d'entreprise.

Le décret en Conseil d'Etat pris pour l'application de l'article L. 351-24 du code du travail précisera :

- les conditions d'accès aux aides de l'article L. 351-24 à partir des caractéristiques du projet de création ou de reprise d'entreprise. L'alinéa pose d'ores et déjà les orientations générales du décret, en disposant que ces caractéristiques doivent être analysées en fonction du projet lui-même (sa réalité, sa consistance et sa viabilité), des intentions de l'auteur (sa volonté de s'insérer durablement au plan professionnel) et d'un souci d'aménagement du territoire (la prise en compte de l'environnement économique local) ;

- la forme de l'aide financière de l'Etat mentionnée au neuvième alinéa de l'article L. 351-24. Là encore, l'alinéa précise dès maintenant que cette aide financière peut prendre la forme d'une avance remboursable , marquant un retour au droit antérieur au décret du 5 septembre 2001 , mais surtout une volonté de responsabiliser les créateurs ou repreneurs d'entreprises ;

- les conditions dans lesquelles la décision d'attribution de ces aides peut être déléguée à des organismes habilités à cet effet par l'Etat.

A cet article, l'Assemblée nationale n'a apporté qu'une modification formelle tendant à remplacer la référence à l'article 19 de la présente loi par une référence plus précise, celle de l'article L. 322-8 nouveau du code du travail, relatif aux « aides de l'Etat et des collectivités publiques » .

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale partage les choix opérés par le Gouvernement pour actualiser et améliorer le dispositif d'aide à la création ou à la reprise d'entreprise par les populations économiquement fragilisées. L'adaptation des mesures existantes aux réalités du marché de la création ou de la reprise d'entreprise apparaît salutaire, dans la mesure où elle procède de la double volonté du Gouvernement de réinsérer sur le marché du travail des publics qui en sont jusqu'à présent exclus , et d' optimiser les crédits affectés à la création ou à la reprise d'entreprise .

Ainsi, le dispositif EDEN voit son efficacité renforcée puisque les crédits qui lui sont affectés sont préservés voire augmentés, et son public élargi. EDEN, qui n'est pas un revenu de solidarité, doit demeurer une aide économique dont l'objet est de faciliter la création ou la reprise d'entreprise. Cependant, selon les précisions apportées par le secrétaire d'Etat aux petite et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation, le remboursement de l'avance ne sera exigé que si le projet de création ou de reprise a réussi ; dans le cas contraire, elle ne sera pas remboursée . Parallèlement, votre commission spéciale se félicite de l'ouverture du dispositif aux demandeurs d'emploi de plus de cinquante ans, dont l'expérience et le talent doivent pouvoir être mis utilement au service de la création ou de la reprise d'entreprise.

A cet article, votre commission spéciale propose l'adoption d'un amendement visant à intégrer les entreprises libérales parmi les projets de création ou de reprise auxquels l'Etat peut accorder des aides.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi amendé.

Article 20 -
Allongement du délai de maintien de certaines allocations
en cas de création ou de reprise d'entreprise

(Article L. 351-24-2 (nouveau) du code du travail)

Commentaire : le présent article vise à porter de six mois à un an le délai de maintien de certaines allocations de solidarité (allocation de solidarité spécifique, allocation de parent isolé et allocation veuvage) pour les titulaires qui souhaitent créer ou reprendre une entreprise. Cette mesure permet, dans le même temps, d'aligner la durée pendant laquelle l'ASS, l'API et l'AV sont maintenues sur la réglementation applicable au RMI.

I. Le texte initial

L'harmonisation prévue à l'article 20 s'inspire directement des règles relatives au revenu minimum d'insertion et à l'allocation parent isolé.

En effet, tant le versement du RMI que celui de l'API ne tiennent pas compte des revenus d'activité professionnelle tirés de la création ou de la reprise d'une entreprise pendant les deux révisions trimestrielles qui suivent celle-ci . Pour les six mois suivants, qui correspondent aux révisions trimestrielles restantes, le montant du RMI est déterminé sur la base de 50 % des revenus tirés de la nouvelle activité. S'agissant de l'API, les revenus tirés de la nouvelle activité sont forfaitairement évalués à 50 % de la base mensuelle de calcul des allocations familiales et ne sont pris en compte qu'à hauteur de 50 % lors de la troisième et de la quatrième révision trimestrielle.

Sur le fondement des règles établies pour ces deux allocations, les modalités de perception de l'allocation spécifique de solidarité (ASS) et de l'allocation veuvage (AV) sont modifiées lorsque leurs titulaires reçoivent l'aide de l'Etat prévue à l'article L. 351-24 nouveau du code du travail.

S'agissant de l'ASS, l'article 136 II de la loi n° 96-1181 du 30 décembre 1996 actuellement en vigueur dispose que « les personnes admises au bénéfice des dispositions de l'article L. 351-24 du code du travail qui perçoivent l'allocation de solidarité spécifique prévue à l'article L. 351-10 du même code reçoivent une aide de l'Etat d'un montant égal à celui de l'allocation de solidarité spécifique à taux plein. Cette aide est versée mensuellement, pour une durée de six mois, à compter de la date de création ou de la reprise d'entreprise ».

En ce qui concerne l'AV, instituée par l'article L. 356-1 du code de la sécurité sociale, le décret du 13 avril 1999 accorde à ses titulaires le droit de conserver leur allocation selon des modalités qui ne tiennent pas compte des revenus d'activité professionnelle pendant une durée de six mois après la création ou la reprise d'une entreprise. Pendant les six mois qui suivent, les revenus tirés de la nouvelle activité sont forfaitairement évalués à 38 % du montant mensuel maximum de l'AV et ne sont pris en compte qu'à hauteur de 50 % pour la détermination du montant de l'allocation.

En portant de six mois à un an la période durant laquelle ces revenus de solidarité sont maintenus en cas de création d'entreprise , l'article L. 351-24-2 nouveau du code du travail permet désormais à ces titulaires de se prémunir, durant une période plus longue, des accidents de parcours liés à la création ou à la reprise d'une entreprise. Il reviendra à un décret en Conseil d'Etat de fixer le mode de calcul et les conditions d'attribution de l'aide. Elle devrait coûter 6 millions d'euros à l'Etat.

L'Assemblée nationale n'a adopté qu'un amendement de précision à cet article.

II. La position de votre commission spéciale

Les bénéficiaires de minima sociaux créateurs ou repreneurs d'entreprises bénéficient d'un droit au maintien de leurs revenus selon des modalités qui diffèrent :

- en fonction du revenu concerné : RMI, allocation d'insertion, ASS, API et allocation veuvage ;

- en fonction de leur qualité de bénéficiaire de l'ACCRE ou non.

Aucune raison particulière ne semblant justifier de telles distinctions, votre commission spéciale apprécie pleinement l'opportunité de procéder à la mise en cohérence proposée par l'article 20 du projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 21 -
Aménagement et extension du régime de déduction des dons aux organismes d'aide à la création et à la reprise de P ME

(Article 238 bis du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose une nouvelle rédaction du régime de mécénat en faveur des organismes agréés d'aide et d'accompagnement à la création et à la reprise de petites et moyennes entreprises afin, d'une part, de mettre ce régime en conformité avec le droit communautaire et, d'autre part, de l'étendre à l'appui à la reprise d'entreprise et à accroître le champ des entreprises éligibles.

I. Le droit existant

A. Le droit existant jusqu'à la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000)

Le premier alinéa du 1 de l'article 238 bis du code général des impôts permet aux entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés de déduire du montant de leur résultat, dans la limite de 0,225 % de leur chiffre d'affaires, les versements qu'elles ont effectués au profit d'oeuvres ou d'organismes d'intérêt général ayant un caractère philanthropique, éducatif, scientifique, social, humanitaire, sportif, familial ou culturel ou concourant à la mise en valeur du patrimoine artistique, à la défense de l'environnement naturel ou à la diffusion de la culture, de la langue ou des connaissances scientifiques françaises, notamment quand ces versements sont faits au profit d'une fondation d'entreprise, même si cette dernière porte le nom de l'entreprise fondatrice.

Le second alinéa du 1 de cet article précise d'ailleurs que ces dispositions s'appliquent « même si le nom de l'entreprise versante est associée aux opérations réalisées par ces organismes ».

Le 2 de cet article porte à 0,325 % du chiffre d'affaires le plafond de déductibilité des dons à certains organismes, parmi lesquels :

- les fondations et les associations d'utilité publique répondant aux conditions précédentes ;

- les associations cultuelles ou de bienfaisance qui sont habilitées à recevoir des dons et legs ;

- les établissements publics des cultes reconnus des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ;

- et les établissements d'enseignement supérieur ou artistique publics, ou privés à but non lucratif agréés par le ministre chargé du budget, ainsi que par le ministre chargé de l'enseignement supérieur ou par le ministre chargé de la culture.

Enfin, le 4 de l'article 238 bis du code général des impôts étendait ce régime du mécénat , dans la limite de 0,325 % du chiffre d'affaires , aux dons faits à des organismes ayant pour objet exclusif de participer, par le versement d'aides financières, à la création d'entreprises , sous réserve que ces organismes :

- répondent « à des conditions quant à leur statut et à leur fonctionnement fixées par décret en Conseil d'Etat ». Parmi ces conditions figuraient notamment, dans le décret n° 85-865 du 9 août 1985, la gestion désintéressée et l'absence de lien juridique ou économique entre l'entreprise à l'origine du don et l'entreprise bénéficiaire ;

- soient agréés par le ministre chargé du budget, l'agrément présentant un caractère discrétionnaire .

En d'autres termes, ce dispositif permettait à des entreprises de déduire de leur résultat imposable, sous certains plafonds, les dons à la création d'entreprises versés par l'intermédiaire « d'organismes-écran » à gestion désintéressée (associations, syndicats professionnels, établissements publics, régies, etc.).

Vingt-deux organismes avaient été agréés en 1998, trente-neuf en 1999 et vingt-six en l'an 2000. La plupart de ces organismes sont membres du réseau de « France initiative réseau » et constituent des plates-formes d'initiative locales (PFIL).

Il convient de souligner que ces organismes sont soumis au contrôle du ministre chargé du budget, qui peut notamment leur retirer leur agrément s'ils ne sont pas en mesure de justifier d'une utilisation des sommes recueillies conforme aux dispositions du décret précité.

En pratique, ce contrôle est exercé par les directeurs des services fiscaux du siège social des organismes agréés, ces derniers devant notamment leur adresser leurs comptes et leur bilan annuel.

B. Les aménagements apportés par l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000)

Issu d'un amendement, auquel le précédent Gouvernement avait donné un avis favorable, adopté par l'Assemblée nationale, l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000) a modifié la rédaction du 4 de l'article 238 bis du code général des impôts.

Cette nouvelle rédaction a inscrit dans la loi deux précisions auparavant apportées par le décret d'application :

- la gestion des « organismes-écrans » entre les entreprises mécènes et les entreprises bénéficiant des dons doit être désintéressée ;

- les aides apportées doivent être « non rémunérées ».

Par ailleurs, alors que l'ancien dispositif de « mécénat économique » était limité aux dons aux organismes dont l'objet exclusif était de participer à la création d'entreprises, cette nouvelle rédaction a étendu le régime du mécénat aux dons aux organismes dont l'objet exclusif est de participer à la création d'entreprises, à la reprise d'entreprises en difficulté et au « financement » d'entreprises de moins de cinquante salariés .

En revanche, cette nouvelle rédaction a restreint le régime du mécénat aux dons aux organismes qui ne versent des aides qu'à des entreprises indépendantes , au sens suivant : le capital des entreprises bénéficiaires doit être entièrement libéré et détenu de manière continue pour 75 % au moins par des personnes physiques ou par une société répondant aux mêmes conditions dont le capital est détenu, pour 75 % au moins, par des personnes physiques.

Pour le calcul des pourcentages ci-dessus, les participations des sociétés de capital-risque, des fonds communs de placement à risques (FCPR), des sociétés de développement régional (SDR) et des sociétés financières d'innovation (SFI) ne sont toutefois pas prises en compte, à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 1 bis de l'article 39 terdecies du code général des impôts entre la société bénéficiaire et ces dernières sociétés ou ces fonds.

Enfin, cette nouvelle rédaction a exclu du périmètre des entreprises éligibles celles exerçant à titre principal l'une des activités énumérées à l'article 35 du code général des impôts, c'est-à-dire :

- les marchands de biens et intermédiaires (CGI, article 35-I-1°, 2° et 4°), les lotisseurs (CGI, article 35-I-3°) et les personnes qui réalisent des profits provenant d'opérations de construction (CGI, article 35-I-1° bis ) ;

- les locations d'établissements industriels ou commerciaux équipés (CGI, article 35-I-5°) ;

- les adjudicataires, concessionnaires et fermiers de droits communaux (CGI, article 35-I-6°) ;

- les membres de copropriétés de navires (CGI, article 35-I-7°) ;

- les opérateurs professionnels qui ont opté pour le régime des bénéfices industriels et commerciaux et qui réalisent des opérations sur bons d'options ou des opérations sur des marchés à terme d'instruments financiers, de marchandises ou d'options négociables (CGI, article 35-I-8°).

C. Les craintes exprimées par la commission des finances du Sénat

Dans son rapport ( ( * )1) sur le projet de loi de finances rectificative pour 2000, M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances du Sénat, concluait :

« Très attachée au développement du mécénat, votre commission ne peut qu'approuver les orientations générales de ce dispositif, qui pourrait renforcer les réseaux de soutien au développement des PME et à la reprise d'entreprises en difficulté (...).

La rédaction du présent article appelle toutefois deux remarques :

- en premier lieu, la définition d'une entreprise en difficulté comme une entreprise qui fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire ou dont « la situation financière rend imminente la cessation d'activité » est relativement floue ;

- en second lieu, cet article introduit de facto dans le code général des impôts un nouveau seuil fondé sur deux critères - moins de cinquante salariés et indépendance - qui ne recoupe pas la définition des « petites entreprises » retenue par l'article 6 du projet de loi de finances pour 2001 (moins de 50 millions de francs de chiffre d'affaires et indépendance) : il n'est pas certain que la multiplication de seuils incohérents soit de nature à rendre la législation fiscale plus simple et plus lisible.

Plus généralement, votre commission s'interroge sur la compatibilité de ce dispositif avec la réglementation communautaire en matière d'aides d'Etat ».

D. Des craintes fondées

Les craintes exprimées par la commission des finances du Sénat se sont malheureusement avérées fondées.

En effet, le nouveau dispositif institué par l'article 43 de la loi de finances rectificative pour 2000 devait faire l'objet d'un décret en Conseil d'Etat destiné à en préciser les conditions d'application.

Cependant, le Conseil d'Etat a, selon l'administration, exprimé des réserves quant à la conformité de ce dispositif au regard du droit communautaire en matière d'aides d'Etat, et le décret prévu n'a toujours pas vu le jour, si bien qu'aucun agrément nouveau n'a pu être accordé depuis le 1 er janvier 2001.

II. Le dispositif proposé

A. L'aménagement des conditions d'octroi de l'agrément

Le présent article propose une refonte de la rédaction du 4 de l'article 238 bis du code général des impôts.

Cette nouvelle rédaction vise tout d'abord à modifier les conditions d'octroi de l'agrément .

En premier lieu, le texte proposé énumère cinq conditions pour cet octroi, ce qui a pour effet d'en supprimer le caractère discrétionnaire.

Trois de ces conditions (les première, quatrième et cinquième) reprennent des dispositions législatives en vigueur : la gestion de l'organisme doit être désintéressée ; le montant versé chaque année à une entreprise ne doit pas excéder 20 % des ressources annuelles de l'organisme ; enfin, les aides ne peuvent bénéficier aux entreprises exerçant à titre principal une activité visée à l'article 35 précité du code général des impôts. La deuxième condition précise par ailleurs que les aides et prestations de l'organisme ne sont pas rémunérées et sont utilisées dans l'intérêt direct des entreprises bénéficiaires. Enfin, la troisième condition dispose que les aides accordées entrent dans le champ d'application du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001. La portée de cette condition sera exposée infra .

Par ailleurs, le présent article propose que l'agrément accordé aux organismes qui le sollicitent pour la première fois porte sur une période probatoire comprise entre la date de sa notification et le 31 décembre de la deuxième année qui suit cette date, le renouvellement d'agrément valant ensuite pour une période de cinq ans.

B. La mise en conformité du dispositif au regard du droit communautaire

La refonte proposée par le présent article du 4 de l'article 238 bis du code général des impôts a par ailleurs pour objet de le mettre en conformité avec la réglementation communautaire en matière d'aides d'Etat.

Pour ce faire, le premier alinéa de la nouvelle rédaction proposée par le présent article pour le 4 de l'article 238 bis du code général des impôts fait référence à la réglementation communautaire en précisant que les organismes agréés doivent avoir pour « objet exclusif ( ...) de verser des aides financières permettant la réalisation d'investissements tels que définis au c de l'article 2 du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 ou de fournir des prestations d'accompagnement à des petites et moyennes entreprises telles qu'elles sont définies à l'annexe I à ce règlement. ».

On peut rappeler que le c de l'article 2 du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 relatif à l'application des articles 87 et 88 du traité instituant la Communauté européenne aux aides d'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises définit un « investissement dans des immobilisations corporelles [comme] tout investissement en actifs fixes corporels se rapportant à la création d'un nouvel établissement, à l'extension d'un établissement existant ou au démarrage d'une activité impliquant un changement fondamental dans le produit ou le procédé de production d'un établissement existant (en particulier, par voie de rationalisation, de diversification ou de modernisation). Un investissement en capital fixe réalisé sous la forme de la reprise d'un établissement qui a fermé ou qui aurait fermé sans cette reprise doit également être considéré comme un investissement dans des immobilisations corporelles ». Il résulte donc de cette première référence que les aides financières versées par les organismes agréés doivent désormais porter sur des investissements corporels .

Par ailleurs, le règlement précité définit les prestations d'accompagnement comme les aides aux petites et moyennes entreprises qui remplissent les conditions suivantes : « a) pour les services fournis par des conseillers extérieurs, l'aide brute n'excède pas 50 % des coûts afférents auxdits services. Les services en question ne constituent pas une activité permanente ou périodique et ils sont sans rapport avec les dépenses de fonctionnement normales de l'entreprise telles que services réguliers de conseil fiscal ou juridique, ou publicité ; b) pour la participation aux foires et expositions, l'aide brute n'excède pas 50 % des coûts supplémentaires résultant de la location, de la mise en place et de la gestion du stand. Cette exemption ne vaut que pour la première participation d'une entreprise à une foire ou à une exposition donnée. ».

On peut observer que ne sont éligibles que les aides à l'investissement et les prestations d'accompagnement en faveur des petites et moyennes entreprises au sens communautaire , c'est à dire les entreprises employant moins de 250 personnes, dont soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 40 millions d'euros, soit le total du bilan annuel n'excède pas 27 millions d'euros ( ( * )1) et qui respectent un critère d'indépendance ( ( * )2).

Aux références à la réglementation communautaire du premier alinéa de la nouvelle rédaction proposée par le présent article pour le 4 de l'article 238 bis du code général des impôts s'ajoute par ailleurs l'obligation précitée pour l'organisme agréé de s'engager à ce que les aides accordées entrent dans le champ d'application du règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 ou soient spécifiquement autorisées par la Commission. Cette mention répond aux dispositions du règlement précité selon lesquelles « les aides individuelles accordées en dehors de tout régime qui remplissent toutes les conditions du présent règlement sont compatibles avec le marché commun au sens de l'article 87, paragraphe 3, du traité et sont exemptées de l'obligation de notification prévue à l'article 88, paragraphe 3, du traité, à condition qu'elles contiennent une référence expresse au présent règlement, par la citation de son titre et l'indication de sa référence de publication au Journal officiel des Communautés européennes ».

Outre qu'elles mettent le dispositif en conformité avec le droit communautaire, ces références, qui renoncent à la définition des petites et moyennes entreprises et au nouveau critère d'indépendance introduit en divers points du code général des impôts depuis 1996 (par exemple pour l'imposition à taux réduit d'une fraction des bénéfices des PME soumises à l'impôt sur les sociétés), emportent principalement deux conséquences concrètes :

- en premier lieu, elles étendent significativement le champ des entreprises éligibles , puisque la définition communautaire des PME est plus large que la définition généralement retenue par notre législation fiscale ;

- en second lieu, elles étendent de facto le dispositif aux aides et à l'accompagnement accordés pour la reprise d'entreprises et non plus seulement pour la reprise d'entreprises en difficulté.

III. La position de votre commission spéciale

Le présent article répond entièrement aux préoccupations qui avaient été précédemment exprimées par le Sénat et devrait permettre de donner un nouvel élan en faveur des dons aux organismes d'aide et d'accompagnement à la création et à la reprise d'entreprise. Votre commission spéciale ne peut donc que s'en féliciter .

Il convient par ailleurs d'observer que l'article 3 du projet de loi relatif au mécénat et aux fondations, qui devrait être prochainement examiné par l'Assemblée nationale, modifie le 1 de l'article 238 bis du code général des impôts pour remplacer dans le cadre du régime du mécénat la déductibilité des dons effectuées par les entreprises dans les limites de 0,225 % ou de 0,325 % de leur chiffre d'affaires par un dispositif de réduction d'impôt égale à 60 % du montant des versements dans la limite de 0,5 % du chiffre d'affaires.

Votre commission spéciale se réjouit de cette proposition, qui rendrait les dispositions du présent article significativement plus attractives. Elle observe toutefois que l'adoption de l'article 3 précité du projet de loi relatif au mécénat et aux fondations devra se traduire, par coordination, par un nouvel aménagement de la rédaction du 4 de l'article 238 bis du code général des impôts.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.



TITRE V -
TRANSMISSION DE L'ENTREPRISE
Article 22 -
Relèvement des seuils d'exonération des plus-values professionnelles

(Articles 151 septies et 202 bis du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose de simplifier la rédaction du régime d'exonération des plus-values professionnelles pour les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu, de relever des deux-tiers les seuils d'exonération prévus par ce régime, enfin d'en réduire les effets pervers en instituant deux paliers d'imposition pour les plus-values professionnelles réalisées par des entreprises dont les recettes dépassent ces seuils de moins de 10 % et de moins de 20 %.

I. Le droit existant

Le régime d'imposition des plus-values dépend à la fois de la nature de ces plus values et des contribuables concernés.

Les plus- values réalisées par des entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés sont imposables au premier euro quel que soit le chiffre d'affaires de l'entreprise. La plupart de ces plus-values sont en outre imposées comme des bénéfices d'exploitation et donc soumises à l'impôt sur les sociétés au taux normal (soit 33,33 %) et aux taxes additionnelles à l'impôt sur les sociétés. Certaines de ces plus-values bénéficient d'une imposition à taux réduit (19 %) dans le cadre du régime des plus-values à long terme pour entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés, mais le champ de ce régime a été progressivement réduit au cours des années 1990 aux plus-values réalisées sur certaines participations et sur certains produits de la propriété industrielle.

En revanche, les plus-values provenant de cessions d'éléments de l'actif immobilisé réalisées en cours d'exploitation ou en fin d'exploitation par des entreprises soumises à l'impôt sur le revenu bénéficient d'un régime globalement plus favorable . En effet, ces plus-values sont soumises à l'impôt sur le revenu et aux prélèvements sociaux dans les conditions de droit commun, l'imposition effective dépendant alors du taux marginal d'imposition sur le revenu du contribuable. Cependant, les plus-values nettes à long terme bénéficient en principe d'une taxation au taux réduit de 16 % auquel s'ajoutent les prélèvements sociaux (notamment la CSG et la CRDS), soit au total 26 %.

Or, le champ d'application de ce régime des plus-values à long terme est plus large que celui, distinct, prévu pour les entreprises soumises à l'impôt sur les sociétés. En effet, sont considérées comme des plus-values à long terme pour des entreprises soumises à l'impôt sur le revenu toutes les plus-values réalisées à l'occasion de la cession d'éléments de l'actif détenus depuis plus de deux ans , les plus-values de cession d'éléments d'actifs amortissables n'étant toutefois considérées comme des plus-values à long terme que pour la fraction de la plus-value qui excède le montant des amortissements antérieurement déduits de l'assiette de l'impôt sur le revenu.

En outre, l'article 151 septies du code général des impôts dispose que les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité commerciale , artisanale , libérale ou agricole sont entièrement exonérées à condition que trois conditions soient conjointement réunies :

- l'activité doit avoir été exercée , à titre principal ou non, pendant au moins cinq ans , ce délai de cinq ans étant par exception décompté à partir de la date de mise en location pour les activités faisant l'objet d'un contrat de location-gérance ou assimilé ;

- les plus-values ne doivent pas provenir de cessions de terrains à bâtir (à l'exception de certains terrains expropriés). Les plus-values sur terrains à bâtir sont, en effet, dans un souci d'égalité, soumises au régime des plus-values des particuliers, consistant d'une part à déterminer le montant de la plus-value par application d'un coefficient d'érosion monétaire, d'autre part à intégrer totalement la plus-value ainsi calculée dans le revenu et à l'imposer comme tel, sous réserve d'un abattement de 5 % par année de détention au delà de la deuxième, qui conduit à exonérer entièrement toutes les plus-values réalisées au delà de vingt-deux ans de détention ;

- enfin, les recettes toutes taxes comprises retirées de ces activités ne doivent pas excéder certains seuils . Ces seuils sont aujourd'hui fixés à 152.600 euros par an pour les exploitants agricoles et au double des seuils des régimes des micro-entreprises des articles 50-0 et 102 ter du code général des impôts pour les activités artisanales, commerciales ou libérales, soit également 152.600 euros pour les entreprises « dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fournir le logement », et 54.000 euros pour les autres activités concernées (notamment les entreprises de prestations de service et les titulaires de bénéfices non commerciaux).

Le respect de ces seuils est apprécié pour les entreprises agricoles en réalisant la moyenne des recettes des deux années civiles précédant l'année civile de réalisation des plus-values. Pour les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu exerçant une activité artisanale, commerciale ou libérale, l'article 202 bis du code général des impôts précise que les plus-values réalisées en cas de cession ou de cessation de l'activité ne sont exonérées que si les recettes de l'année de cession ou de cessation, ramenées le cas échéant à douze mois, ainsi que celles de l'année précédente, n'excédent pas les seuils précités.

Le champ d'application de ce régime d'exonération est extrêmement large . Il convient en effet de préciser qu'il recouvre également les plus-values réalisées lors de cessions d'offices ministériels, ainsi que les plus-values professionnelles réalisées dans le cadre d'activités industrielles : dès lors qu'elles demeurent en deçà des seuils de recettes précités, les activités industrielles sont en effet réputées artisanales.

L'article 151 septies du code général des impôts prévoit par ailleurs un régime spécifique d'exonération des plus-values réalisées à l'occasion de la cession de matériels agricoles et forestiers par les « entreprises de travaux agricoles et forestiers » (c'est-à-dire par des entreprises dont l'activité principale est la réalisation de travaux agricoles et forestiers) dont le chiffre d'affaires toutes taxes comprises est inférieur au même seuil de 152.600 euros.

II. Le dispositif proposé

Le dispositif proposé, qui a bénéficié de précisions rédactionnelles apportées par l'Assemblée nationale, comporte quatre volets interdépendants.

En premier lieu, le présent article propose de refondre la rédaction actuelle de l'article 151 septies du code général des impôts afin d'en accroître la lisibilité, sinon l'intelligibilité, aujourd'hui relativement limitée.

En deuxième lieu, il propose de déconnecter les seuils d'exonération des plus-values de long-terme pour les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu des seuils des régimes des micro-entreprises et de les relever de manière très substantielle. Ces seuils d'exonération seraient ainsi augmentés :

- de 152.600 euros à 250.000 euros de recettes TTC (soit une hausse de 63,8 %) pour les activités agricoles , pour les activités de vente de marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place, ou de fourniture le logement, et enfin pour les entreprises de travaux agricoles et forestiers ;

- de 54.000 à 90.000 euros (soit une hausse de 66,7 %) pour les autres entreprises artisanales, commerciales ou libérales, notamment les entreprises de services et les titulaires de bénéfices non commerciaux .

En troisième lieu, cet article 22 propose de réduire l'effet de couperet résultant des seuils précédents en instituant, sauf pour le régime spécifique de taxation des plus-values réalisées à l'occasion de la cession de matériels agricoles et forestiers par les entreprises de travaux agricoles et forestiers, deux paliers de taxation pour les plus-values réalisées dans le cadre d'activités dont les recettes dépassent de peu ces seuils :

- les plus-values réalisées dans le cadre d'activités dépassant les seuils de recettes précités de moins de 10 % seraient désormais exonérées pour moitié de leur montant ;

- et les plus-values réalisées dans le cadre d'activités dépassant les seuils précités de plus de 10 % et de moins de 20 % seraient exonérées pour un quart de leur montant.

Enfin, le présent article apporte des précisions quant au régime applicable dans les cas de pluriactivité de l'entreprise réalisant la plus-value ou lorsque que le contribuable exploite personnellement plusieurs entreprises :

- le IV nouveau proposé pour l'article 151 septies du code général des impôts précise ainsi que « lorsque le contribuable exploite personnellement plusieurs entreprises, le montant des recettes à comparer aux limites prévues au présent article est le montant total des recettes réalisées dans l'ensemble de ces entreprises ». Il s'agit là d'une précision logique : dans le cas contraire, de très nombreux contribuables auraient pu s'exonérer en fractionnant leurs activités entre plusieurs entités ;

- à l'initiative de sa commission spéciale, l'Assemblée nationale a par ailleurs adopté, avec l'avis favorable du Gouvernement, un amendement précisant que la globalisation de ces recettes s'effectue par catégorie de revenus (bénéfices agricoles, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices non commerciaux). Il résulte ainsi de la construction et de la rédaction du présent article qu'à la limite, une entreprise bénéficie du régime d'exonération de ses plus-values à long terme si elle réalise 250.000 euros de recettes au titre de ses activités agricoles, 250.00 euros de recettes au titre de ses activités industrielles et de vente, et 90.000 euros au titre de ses activités de service, si elles sont imposables respectivement dans la catégorie des bénéfices agricoles (BA), dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux (BIC) et dans la catégorie des bénéfices non commerciaux (BNC) ;

- enfin, le III nouveau proposé par le présent article pour l'article 151 septies du code général des impôts prévoit un régime d'exonération spécifique pour les entreprises artisanales, commerciales ou libérales, dont les activités sont toutes imposables dans la catégorie des BIC, mais se partagent entre des activités relevant du seuil de 250.000 euros et des activités relevant du seuil de 90.000 euros, ce qui concerne notamment nombre d'activités du secteur du bâtiment : la revente d'une baignoire est une activité de vente relevant du seuil de 250.000 euros, mais son installation est une activité de service relevant du seuil de 90.000 euros. Ce régime consiste à prévoir une exonération totale si les recettes totales ne dépassent pas 250.000 euros et si les recettes des activités relevant du seuil de 90.000 euros ne dépassent pas ce seuil ; une exonération de moitié si les recettes totales ne dépassent pas de plus de 10 % le seuil de 275.000 euros et si les recettes des activités relevant du seuil de 90.000 euros ne dépassent pas ce seuil de plus de 10 % ; enfin, une exonération du quart si les recettes totales ne dépassent pas de plus de 20 % le seuil de 275.000 euros et si les recettes des activités relevant du seuil de 90.000 euros ne dépassent pas ce seuil de plus de 20 % .

Il résulte par ailleurs de la rédaction de cet article 22 qu'un contribuable réalisant à la fois des activités agricoles, des activités artisanales, commerciales ou libérales relevant du seuil de 250.000 euros (par exemple exploitant un gîte à la ferme), et des activités relevant du seuil de 90.000 euros (par exemple des activités de conseil), et qui dépassent pour un ou deux seulement de ces trois types d'activités les seuils de recettes correspondant, demeure susceptible d'être entièrement ou partiellement exonérés.

La rédaction du présent article invite en effet à rattacher la plus-value à l'activité dans le cadre de laquelle elle est réalisée , de sorte que :

- si la plus-value est entièrement rattachée à une activité demeurant en deçà du seuil de recettes correspondant, elle est totalement exonérée, même si le contribuable retire de ses autres types d'activités des recettes dépassant les seuils correspondants ;

- si la plus-value se rattache partiellement à une activité demeurant en deçà des seuils d'exonération, elle est exonérée au prorata de son rattachement. Par exemple, un contribuable soumis à l'impôt sur le revenu qui réalise 350.000 euros de recettes dans le cadre de son exploitation agricole et 50.000 euros de recettes dans le cadre de son gîte à la ferme, et qui cède d'un seul bloc son exploitation agricole et son gîte, est exonéré sur la plus-value éventuellement réalisée au prorata de la plus-value rattachée à la cession de son gîte.

En pratique l'affectation et la répartition de la plus-value peut toutefois soulever des difficultés dès lors que les deux activités sont indissociables. Le régime proposé conserve donc une certaine complexité .

Cependant, ces mesures permettraient, selon le Gouvernement, d'exonérer d'imposition sur les plus-values professionnelles à long terme 80 % des entreprises imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et 90 % des entreprises imposables dans la catégorie des bénéfices agricoles , alors que seulement 50 à 60 % des entreprises sont aujourd'hui exonérées.

Les recettes fiscales perçues sur les plus-values à long-terme des entreprises soumises à l'impôt sur le revenu seraient ainsi réduites, de l'ordre des deux-tiers, pour un coût budgétaire estimé par le gouvernement à 245 millions d'euros en année pleine (la mesure s'appliquant à compter du 1 er janvier 2004).

Par ailleurs, la mesure se traduira pour les organismes de sécurité sociale par une perte de recettes, de l'ordre de 150 millions d'euros par an en année pleine, consécutive au non-recouvrement des cotisations sociales associées à la taxation des plus-values.

III. La position de votre commission spéciale

Le coût de cette seule mesure pour le budget de l'Etat constitue plus de la moitié du coût estimable de l'ensemble du présent projet de loi .

Or, cet allègement fiscal ne bénéficie qu'aux entrepreneurs individuels . Cela constitue un démenti à l'idée parfois avancée selon laquelle le présent projet de loi bénéficierait principalement aux entreprises organisées en forme sociétaire.

On peut par ailleurs observer que, si les seuils d'exonération n'avaient pas été réévalués depuis leur doublement en 1988, le présent article propose de les rehausser de 63,8 % (pour le seuil actuellement fixé à 152.600 euros) et de 66,7 % (pour le seuil actuellement fixé à 54.000 euros), alors que l'inflation cumulée des prix à la consommation constatée au cours des quinze dernières années ne s'élève qu'à 35 %.

Votre commission spéciale estime cependant cet effort budgétaire nécessaire et salutaire . En effet, l'exonération des plus-values réalisées par la plupart des entrepreneurs qui prendront leur retraite au cours des prochaines années est de nature à faciliter la transmission de leur activité en en réduisant le prix pour l'acheteur sans pour autant éroder le capital dont les cédants espéraient bénéficier pour leur retraite.

On peut par ailleurs relever que les plus-values professionnelles à long terme résultent aussi pour partie, en application du principe du nominalisme monétaire, de l'inflation constatée au cours de la période, même si cet effet s'atténue avec le ralentissement de l'inflation depuis la seconde moitié des années 1980. C'est d'ailleurs ce qui justifie le régime de faveur aujourd'hui accordé aux plus-values professionnelles à long terme pour les entreprises soumises à l'impôt sur le revenu.

Le présent article répond ainsi aux préconisations formulées depuis plusieurs années par le Sénat , à l'initiative notamment de sa commission des finances, visant à réduire l'imposition des plus-values de fonds de commerce et à diminuer la progression rampante des prélèvements obligatoires résultant de la non-indexation et de la non-réévaluation d'un certains nombre de seuils.

Il répond aussi aux engagements pris au nom du Gouvernement par M. Alain Lambert, ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2003, en réponse à nos collègues MM. Henri de Raincourt et Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances.

Il convient par ailleurs de souligner que M. Renaud Dutreil a confirmé, à l'occasion l'examen par l'Assemblée nationale du présent article, la parution imminente d'une instruction fiscale prévoyant expressément l'étalement en cas de crédit-vendeur des impôts qui demeureraient dus au titre de l'imposition des plus-values professionnelles à long terme. Cette disposition à caractère réglementaire est également de nature à faciliter significativement les transmissions d'entreprise.

Cela étant, on peut se demander s'il n'aurait pas été opportun de profiter d'une réforme aussi coûteuse pour « remettre à plat » ce régime de taxation et d'exonération des plus-values à long-terme des entreprises assujetties à l'impôt sur le revenu.

En effet, fonder l'exonération de ces plus-values sur un critère de chiffres d'affaires résulte de notre histoire fiscale, mais ne répond évidemment à aucune justification économique : des activités d'une valeur identique et dégageant des revenus identiques vont ainsi être exonérées ou non selon qu'elles se rattachent à des secteurs où les marges sont élevées ou à des activités (comme les stations-service) dont les marges sont faibles. Les seuils d'exonération n'ont qu'un lien distendu avec le montant des plus-values exonérées, ce qui ne semble guère satisfaisant .

Les réformes alternatives , consistant à rapprocher l'imposition des plus-values professionnelles soit de celle des plus-values immobilières des particuliers, par application d'un coefficient d'érosion monétaire et/ou d'un abattement en fonction de la durée de détention, soit de celle des autres revenus, par application d'une imposition cédulaire progressive, soulevaient toutefois des difficultés pratiques et des problèmes de principe :

- en premier lieu, contrairement à la mesure proposée, aucune de ces réformes ne pouvait être mise en oeuvre isolément sans pénaliser certains des contribuables concernés, tandis que la combinaison de ces réformes risquait de conduire à un coût budgétaire significativement plus élevé et/ou peu maîtrisable (l'application d'un coefficient d'érosion monétaire pouvant ainsi faire apparaître des moins-values), ce qui paraissait inopportun dans un contexte particulièrement difficile pour les finances publiques ;

- en second lieu, les réformes alternatives soulevaient elles aussi des problèmes d'application, de principe ou d'équité : ainsi, l'application d'un coefficient d'érosion monétaire en fonction de l'inflation est difficile à mettre en oeuvre pour des actifs immatériels et conduirait par exemple à avantager ceux qui ont racheté leur fonds de commerce par rapport à ceux qui l'ont créé ; l'imposition des plus-values selon un barème progressif inciterait à des ventes fractionnées et échelonnées sans fondement économique ; l'instauration d'un abattement en fonction de la durée de détention pourrait dans certains cas conférer un avantage exorbitant à des entrepreneurs exerçant des activités importantes en nom personnel par rapport à leurs concurrents organisés en forme sociétaire (notamment en EURL) ; enfin, et de manière plus générale, il convient de rappeler que les plus-values professionnelles, notamment celles réalisées lors de cessions de fonds de commerce, représentent aussi pour partie des revenus différés dont la taxation au moment où ils sont constatés et perçus est légitime au regard du principe constitutionnel d'égalité devant l'impôt.

Votre commission spéciale se félicite donc de ce dispositif , relevant avec satisfaction les efforts entrepris pour améliorer l'intelligibilité de la norme fiscale et pour, en instituant des paliers plutôt qu'un seuil unique de recettes pour bénéficier du régime d'exonération, en limiter les effets distorsifs.

Elle observe toutefois que ces efforts se sont partiellement annihilés, la rédaction proposée pour les paliers étant fort complexe. En outre, ceux-ci sont loin de supprimer tous les effets pervers du dispositif, lequel incite en l'état certains entrepreneurs préparant leur succession à minorer leurs recettes lors des deux années précédant la cession de leur activité (par exemple en fermant une partie de l'année) afin que ces recettes s'inscrivent en deçà des seuils d'exonération, ce qui réduit d'autant les recettes publiques en amont et, surtout, ce qui fragilise les activités reprises dans ces conditions.

C'est pourquoi, votre commission spéciale vous proposera de « lisser » ou de linéariser les deux paliers prévus par les I et II nouveaux du texte proposé par le présent article pour l'article 151 septies du code général des impôts, en remplaçant le dispositif d'exonération pour moitié (respectivement du quart) des plus-values réalisées dans le cadre d'une activité dont les recettes dépassent de moins de 10 % (respectivement 20 %) les seuils afférents, par un dispositif prévoyant que le taux de l'exonération décroît de manière linéaire et continue de 100 % jusqu'à 0 % en fonction du pourcentage dépassement des seuils précités .

Cette mesure serait d'un coût budgétaire relativement limité, tout en réduisant les effets pervers décrits ci-dessus, dès lors que la « pente » du taux d'exonération n'est pas trop forte. Ce dernier point, ainsi que l'impact économique des seuils prévus par le présent article, nécessitant des évaluations complémentaires, votre commission spéciale propose à titre conservatoire un dispositif de lissage dont elle sera éventuellement conduite à modifier la formule de calcul par rectification de l'amendement qu'elle a adopté.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 23 -
Réduction d'impôt sur le revenu au titre des intérêts des emprunts souscrits pour la reprise d'une société non cotée

(Article L. 199 terdecies -0 B du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose d'instituer un régime de réduction d'impôts sur le revenu égale à 25 % des intérêts des emprunts souscrits pour l'acquisition d'une fraction du capital donnant la majorité des droits de vote d'une société non cotée.

I. Le dispositif proposé

Le présent article, qui a bénéficié de la part de l'Assemblée nationale d'améliorations rédactionnelles à l'initiative de sa commission spéciale, propose d'instituer une réduction d'impôt sur le revenu égale à 25 % du montant des intérêts des emprunts contractés par les contribuables domiciliés fiscalement en France pour acquérir, dans le cadre d'une opération de reprise , une fraction du capital d'une société dont les titres ne sont pas admis aux négociations sur un marché français ou étranger.

L'octroi de cette réduction d'impôt serait soumis aux conditions suivantes, mentionnées au I de l'article 199 terdecies -0 B inséré dans le code général des impôts :

a) L'acquéreur prend l'engagement de conserver les titres de la société reprise jusqu'au 31 décembre de la cinquième année suivant celle de l'acquisition ;

b) L'acquisition confère à l'acquéreur la majorité des droits de vote attachés aux titres de la société reprise ;

c) A compter de l'acquisition, l'acquéreur exerce dans la société reprise l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis du code général des impôts et dans les conditions qui y sont prévues. Cette condition signifie que l'acquéreur doit, à compter de l'opération de reprise, exercer effectivement et personnellement des fonctions dirigeantes au sens des dispositions régissant les exonérations de l'outil de travail au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune (c'est-à-dire qu'il doit être gérant d'une SARL ou d'une société en commandite par actions, associé en nom propre d'une société de personnes, ou bien président, directeur général ou président du conseil de surveillance d'une société par actions), ces fonctions donnant lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus de l'intéressé imposables dans les catégories des traitements et salaires, des BIC, des BNC, des BA et des revenus des gérants et associés ;

d) La société reprise a son siège en France ou dans un autre Etat membre de la Communauté européenne et est soumise à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun ou à un impôt équivalent ;

e) Le chiffre d'affaires hors taxes de la société reprise n'a pas excédé 40 millions d'euros ou le total du bilan n'a pas excédé 27 millions d'euros au cours de l'exercice précédent l'acquisition. Ces seuils constituent la reprise partielle des critères communautaires définissant les petites et moyennes entreprises.

Par ailleurs, les III à VI de l'article 199 terdecies -0 B nouveau apportent des précisions quant au cumul de cet avantage fiscal, à son imputation , à sa reprise et à sa durée :

- le III précise que les titres dont l'acquisition a ouvert droit à la réduction d'impôt ne pourront figurer ni dans un plan d'épargne en actions (PEA), ni dans un plan d'épargne d'entreprise (PEE) ou assimilé (plan d'épargne interentreprises, PEI ; plan partenarial d'épargne salariale volontaire, PPESV) ;

- le IV ajoute que l'imputation de cette réduction s'effectue conformément aux dispositions du 5 du I de l'article 197 du code général des impôts, c'est-à-dire qu'elle s'impute sur l'impôt dû « avant imputation de l'avoir fiscal, des crédits d'impôts et des prélèvements et retenues non libératoires » et qu'elle ne peut donner lieu à remboursement ;

- le V indique que, si l'une des quatre premières conditions précitées (engagement de conservation des titres pendant cinq ans, détention de la majorité des droits de vote, exercice effectif de fonctions dirigeantes, établissement du siège social de la société dans l'Union européenne et assujettissement de la société à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun) n'est plus remplie au cours des cinq premières années, la réduction d'impôt est reprise au titre de l'année au cours de laquelle cette condition n'est plus remplie, sauf en cas de décès ou d'invalidité de l'acquéreur, sous réserve que la quatrième condition (siège social dans l'Union européenne et assujettissement de la société à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun) demeure remplie ;

- le VI dispose enfin qu'en cas de cession des titres ou si les conditions b), c) ou d) précitées cessent d'être remplies au delà des cinq années de l'engagement de conservation des titres, la réduction d'impôt cesse (sans être reprise). A contrario , cela signifie que le bénéfice de la réduction d'impôt n'est pas limité dans le temps , dès lors que les quatre conditions précitées demeurent remplies, et peut couvrir l'intégralité de la durée des emprunts souscrits. De même, il convient de souligner que ce dispositif, dont la date d'entrée en vigueur est celle de la présente loi, n'est pas lui-même limité dans le temps. Ces deux dernières caractéristiques sont relativement peu fréquentes.

Enfin, le II de l'article 199 terdecies -0 B nouveau prévoit un plafond pour les intérêts ouvrant droit à la réduction d'impôt, à hauteur de 20.000 euros par an pour les contribuables soumis à imposition commune et de 10.000 euros par an pour les personnes seules, ce qui correspond à une réduction d'impôt maximale de 5.000 euros par an pour les contribuables mariés soumis à imposition commune et de 2.500 euros par an pour les personnes seules.

Au total, dans le cas de contribuables mariés soumis à imposition commune, ce dispositif ouvre droit à une réduction d'impôt (ce qui revient à une bonification d'intérêt d'un quart pour les contribuables pouvant effectivement imputer cette réduction ) à raison de la totalité des intérêts annuels initialement acquittés pour un emprunt de 200.000 euros à un taux d'intérêt de 10 %, ou bien pour un emprunt de 250.000 euros à un taux d'intérêt de 8 %, ou encore pour un emprunt de 400.000 euros à un taux d'intérêt de 5 %. Dans le cas d'école d'un emprunt à 10 ans d'un montant de 200.000 euros au taux d'intérêt de 10 % et avec remboursement du capital in fine , l'avantage fiscal (soit 5.000 euros par an pendant les dix années de l'emprunt) correspond ainsi à un « coup de pouce fiscal » d'une valeur actualisée (à ce même taux de 10 %) de 32.475 euros.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale approuve tout particulièrement ce dispositif, qui avait déjà été adoptée par l'Assemblée nationale lors de la précédente législature dans le cadre du projet de loi (n° 3555 - XI ème législature) relatif au développement des petites entreprises et de l'artisanat, mais avec des plafonds plus faibles pour le montant des intérêts pouvant être pris en compte (12.000 euros par an pour les contribuables soumis à imposition commune et de 6.000 euros par an pour les personnes seules).

Ce dispositif est en effet utile à double titre :

- en premier lieu, il rapproche la fiscalité applicable aux charges d'emprunts résultant de la reprise d'activités exercées en forme sociétaire de celle d'activités exercées en nom personnel. On peut en effet rappeler que les intérêts des emprunts souscrits par un entrepreneur individuel à titre professionnel sont aujourd'hui des charges déductibles de son bénéfice imposable, alors qu'aucune réduction n'était jusqu'ici prévue pour les repreneurs de sociétés contractant un emprunt à titre personnel ;

- en second lieu, il propose une alternative simple à certains des montages actuellement utilisés pour déduire les charges d'emprunts afférentes au rachat d'une entreprise, comme la création d'une holding transparente.

Le présent dispositif est donc à la fois source d'équité et de simplicité pour les reprises de petites entreprises . Sa portée est toutefois limitée : l'administration évalue ainsi la dépense fiscale correspondante à environ 7 millions d'euros par an . Cela résulte notamment de ce que, pour les opérations moyennes ou importantes, pour lesquelles les coûts de dossier sont proportionnellement plus réduits, la reprise d'entreprises au travers d'une holding transparente demeurera plus avantageuse pour le ou les repreneurs. La constitution d'une telle holding permet en effet :

- de s'associer à plusieurs pour la reprise d'une activité, alors que le présent dispositif, qui s'inspire du régime applicable aux entrepreneurs individuels, concerne la reprise de sociétés par un seul entrepreneur ;

- de déduire sans aucune limite les intérêts, qui constituent pour la holding des charges déductibles de son résultat imposable à l'impôt sur les sociétés, ce qui confère ainsi un avantage fiscal qui peut être plus élevé ;

- de « piloter » financièrement le dispositif de reprise, le plus souvent calibré de manière à ce que les charges d'emprunt de la holding soient entièrement couvertes par les revenus retirés de la société acquise, qui finance ainsi sa propre reprise ;

- enfin, de limiter les risques encourus par les repreneurs, puisque c'est la société holding qui est endettée et que ceux-ci ne risquent que leur apport en fonds propres à cette société holding.

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 24 -
Allègement des droits de mutation à titre gratuit
en cas de transmission d'entreprise entre vifs

(Articles 787 B nouveau, 787 C nouveau, 789 A, 789 B
et 1840 G nonies du code général des impôts)

Commentaire : le présent article vise à étendre aux donations en pleine propriété le dispositif prévu aux articles 789 A et 789 B du code général des impôts qui permet d'exonérer partiellement des droits de mutation par décès les titres et parts d'une société ou les actifs d'une entreprise individuelle faisant l'objet d'un engagement de conservation.

I. Le droit existant : une incitation au maintien à long terme d'un actionnariat stratégique dans l'entreprise

Deux dispositions du code général des impôts, selon que l'entreprise est exploitée sous la forme sociale ou individuelle, permettent une exonération des droits de mutation par décès, à hauteur de 50 % de la valeur du bien transmis, en contrepartie d'un engagement de conservation sur la durée.

L'article 789 A, qui concerne les parts ou actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, agricole ou libérale ( ( * )1), et l'article 789 B, qui vise la transmission d'une entreprise individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, agricole ou libérale, ont été introduits par l'article 11 de la loi de finances pour 2000, modifié par l'article 5 de la loi de finances pour 2001. Leurs conditions d'application ont été précisées par l'instruction fiscale 7 G-6-01 n° 137 du 30 juillet 2001, le décret n° 2001-363 du 23 avril 2001 ayant établi les obligations déclaratives des redevables et des sociétés.

Ces articles 789 A et 789 B constituent les lointains descendants d'un dispositif voté en loi de finances pour 1996 mais censuré par le Conseil constitutionnel.

L'ARTICLE 9 DE LA LOI DE FINANCES POUR 1996

L'article 9 de la loi de finances pour 1996 exonérait de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 50 % de leur valeur et dans la limite de 15,24 millions d'euros pour chacun des donataires, les biens considérés comme des biens professionnels au sens de l'impôt de solidarité sur la fortune, lorsque ces biens étaient transmis dans un même acte, par un ou plusieurs donateurs tous âgés de moins de 65 ans qui eux-mêmes, soit exerçaient leur activité dans l'entreprises, soit étaient détenteurs des titres transmis, depuis cinq ans au moins.

En contrepartie, les donataires devaient s'engager à conserver pendant cinq ans les biens ainsi transmis, soit directement, soit par l'intermédiaire d'une société qu'ils contrôlaient. Il n'était toutefois pas exigé que l'un d'entre eux exerce une fonction dirigeante au sein de l'entreprise transmise, afin de laisser la possibilité de faire appel à un gestionnaire extérieur dans le cas où ce dernier aurait été plus expérimenté que les héritiers.

Cette exonération était également applicable aux donations consenties par des personnes âgées de plus de 65 ans en vertu d'actes passés entre le 1 er janvier 1996 et le 31 décembre 1997 et aux transmissions par décès accidentel d'une personne âgée de moins de 65 ans.

Enfin, la rupture de l'engagement de conservation des titres était lourdement sanctionnée puisqu'au delà des droits éludés, le donataire était tenu d'acquitter une pénalité représentant la moitié de la réduction d'impôt précédemment consentie.

Cet article a été invalidé par le Conseil constitutionnel au motif que cette exonération méconnaissait le principe d'égalité devant la loi. Après avoir rappelé que " si le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce que le législateur décide de favoriser par l'octroi d'avantages fiscaux la transmission de certains biens, c'est à la condition que celui-ci fonde son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'ils se proposent ", le Conseil constitutionnel a spécialement considéré qu'en " instituant un abattement de 50 % sur la valeur des biens professionnels transmis entre vifs à titre gratuit à un ou plusieurs donataires, à la seule condition que ceux-ci conservent ces biens pendant une période de cinq années, sans exiger qu'ils exercent de fonction dirigeante au sein de l'entreprise, et en étendant le bénéfice de cette mesure aux transmissions par décès accidentel d'une personne âgée de moins de soixante-cinq ans, la loi a établi vis-à-vis des autres donataires et héritiers des différences de situation qui ne sont pas en relation directe avec l'objectif d'intérêt général ci-dessus rappelé ; dans ces conditions et eu égard à l'importance de l'avantage consenti, son bénéfice est de nature à entraîner une rupture de l'égalité entre les contribuables pour l'application du régime fiscal des droits de donation et de succession ".

Les articles 789 A et 789 B du code général des impôts exigent dès lors, en échange de l'avantage fiscal consenti, le respect d'un certain nombre de conditions contraignantes, le non-respect de ces conditions entraînant l'application de lourdes pénalités.

A. De rigoureuses conditions d'octroi de l'exonération

1. Un engagement sur une durée supérieure à huit ans

S'agissant des sociétés visées par l'article 789 A du code général des impôts, l'abattement de 50 % sur la valeur imposable des titres transmis par décès est octroyé aux parts ou actions :

- que le défunt et ses associés ont préalablement pris l'engagement collectif de conserver pendant au moins deux ans. L'engagement collectif de conservation doit porter sur au moins 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 % ; ces pourcentages de détention doivent en outre être respectés tout au long de la durée de l'engagement collectif de conservation, opposable à l'administration à compter de la date d'enregistrement de l'acte qui le constate ;

- que les héritiers, donataires ou légataires prennent l'engagement, le jour de la déclaration de succession, de ne pas céder pendant six années supplémentaires, à compter de la date d'expiration du délai de deux ans mentionné à l'alinéa précédent. Ainsi, en cas de décès avant la fin de ce délai de deux ans, le ou les héritiers, donataires ou légataires doivent reprendre à leur compte l'engagement de conservation des titres transmis pendant la durée restant à courir.

Dès lors, la fraction du capital de la société dont la transmission bénéficie d'une exonération partielle de droits de mutation par décès est gelée pendant au moins huit années.

Enfin, il est prévu qu'en cas de démembrement de propriété, l'engagement de conservation soit signé conjointement par l'usufruitier et le nu-propriétaire. En cas de réunion de l'usufruit et de la nue-propriété, le terme de l'engagement de conservation des titres dont la pleine propriété est reconstituée demeurerait identique à celui souscrit conjointement.

Par ailleurs, en vertu de l'article 789 B, les entreprises individuelles doivent quant à elles avoir été détenues depuis plus de deux ans par le défunt lorsqu'elles ont été acquises à titre onéreux ( ( * )1) pour donner droit à l'exonération. En outre, chacun des héritiers, donataires ou légataires doit prendre l'engagement de conserver pendant six ans l'ensemble des biens affectés à l'exploitation ( ( * )2) de l'entreprise.

2. L'exercice d'une fonction dirigeante par l'un des héritiers ou associés

L'article 789 A exige que l'un des associés, partie à l'engagement collectif de conservation, ou l'un des héritiers, donataires ou légataires, assure, pendant les cinq années qui suivent la date de la transmission par décès, une fonction de direction dans l'entreprise.

Si l'entreprise est soumise à l'impôt sur les sociétés, la personne exerçant la fonction de direction doit être :

-soit gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée (SARL) ou d'une société en commandite par actions ;

-soit associé en nom d'une société de personnes ;

-soit président, directeur général, président du conseil de surveillance ou membre du directoire d'une société par actions.

S'il s'agit d'une société de personnes visée aux articles 8 et 8 ter du code général des impôts, l'une des personnes mentionnées ci-dessus doit simplement exercer son activité professionnelle principale dans la société.

L'article 789 B exige quant à lui que l'un des héritiers, donataires ou légataires poursuive l'exploitation de l'entreprise individuelle pendant les cinq années suivant sa transmission.

3. Des obligations particulières de déclaration

La déclaration de succession doit être appuyée d'une attestation de la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation certifiant que les conditions exigées, en matière de pourcentages de détention continue et de délai de conservation, ont été respectées jusqu'au jour du décès.

En outre, dans l'hypothèse où le donateur décède avant le terme de son engagement collectif de conservation, il est prévu qu'à compter du décès et jusqu'à l'expiration de l'engagement collectif de conservation, la société adresse chaque année, dans les trois mois qui suivent le 31 décembre, une attestation certifiant que lesdites conditions sont remplies au 31 décembre de chaque année.

B. Des sanctions particulièrement lourdes

Compte tenu de l'avantage octroyé, il est parfaitement légitime que la rupture de l'engagement de conservation des titres entraîne l'application d'une sanction. En l'espèce, celle-ci est particulièrement lourde.

La rupture de l'engagement individuel de conserver directement et indirectement la participation transmise au jour du décès pendant six ans entraîne pour l'héritier, le donataire ou le légataire ou, le cas échéant, ses ayants cause à titre gratuit, l'exigibilité du complément de droits de mutation par décès, de l'intérêt de retard au taux de 0,75 % par mois et, en application des dispositions de l'article 1840 G nonies du code général des impôts, d'un droit supplémentaire égal :

- à 20 % de la réduction consentie en cas de manquement survenant au cours des deux premières années suivant la date de l'engagement ;

- à 10 % de cette réduction en cas de manquement survenant la troisième ou la quatrième année suivant cette même date ;

- à 5 % de cette réduction en cas de manquement survenant la cinquième ou la sixième année.

II. La rédaction proposée par le présent article : une extension du dispositif aux donations en pleine propriété

La rédaction proposée vise, en étendant du régime des successions à celui des donations en plein propriété la possibilité d'un abattement à hauteur de 50 % de la valeur des biens transmis, à créer un dispositif fiscal unique qui, dans les mêmes conditions, soumet l'avantage fiscal à un engagement de conservation des titres et parts de la société ou des actifs de l'entreprise individuelle faisant l'objet de la transmission.

A. La création d'un dispositif unique pour les successions et les donations

Le présent article crée après l'article 787 A du code général des impôts, qui constitue le dernier article commun aux successions et aux donations, deux articles nouveaux. Le premier, l'article 787 B, vise la transmission de parts et d'actions de sociétés tandis que le second, l'article 787 C, concerne celle de l'entreprise individuelle. Concrètement, les articles 789 A et 789 B existants deviennent, après modifications visant à intégrer les donations en pleine propriété, les article 787 B et 787 C.

B. Un avantage fiscal réservé aux seules donations en pleine propriété

La rédaction proposée par le présent article prévoit d'étendre l'avantage fiscal lié à un engagement de conservation aux seules donations en pleine propriété. La disposition exclue donc les donations en nue-propriété. Il y a là une volonté affirmée de privilégier fiscalement la transmission pleine et définitive, ou du moins à considérer qu'une renonciation totale à sa propriété mérite, au regard du principe d'égalité devant l'impôt, un traitement fiscal plus favorable qu'une renonciation partielle.

C. Des retouches au dispositif initial très limitées

Trois retouches au dispositif initial issu des articles 789 A et 789 B du code général des impôts ont été opérées.

La première a supprimé un alinéa de ces deux articles qui disposait qu'en « cas de démembrement de propriété, l'engagement de conservation est signé conjointement par l'usufruitier et le nu-propriétaire. En cas de réunion de l'usufruit à la nue-propriété, le terme de l'engagement de conservation des titres dont la pleine propriété est reconstituée demeure identique à celui souscrit conjointement ». Cet alinéa n'était en effet pas utile car il reprenait une disposition de droit commun relative à l'usufruit inscrite par ailleurs dans le code général des impôts.

La deuxième a pris en compte les entreprises constituant le patrimoine commun d'époux mariés sous le régime de la communauté. L'avantage fiscal lié à l'engagement de conservation qui est alloué par le dispositif ne peut porter que sur la quote-part indivise correspondant à la part de l'époux qui décède.

La troisième a permis de conserver l'avantage fiscal perçu au titre de la transmission d'une entreprise individuelle lorsque celle-ci fait l'objet d'une transformation en société. La forme juridique de l'entreprise peut ainsi évoluer en fonction de considérations économiques sans que l'avantage fiscal soit remis en cause.

La rédaction proposée par le présent article n'a fait l'objet d'aucune modification à l'Assemblée nationale.

III. La position de votre commission spéciale

Aujourd'hui, un tiers des chefs d'entreprise en exercice, soit 684.000, ont plus de 50 ans, et 7 % ont plus de 60 ans, ce qui correspond à 120.000 entrepreneurs. Ces chiffres démontrent l'enjeu que représentera au cours des prochaines années la transmission d'entreprise. Sur le plan fiscal, les barèmes actuels des droits de mutation à titre gratuit restent, et votre commission spéciale le regrette, relativement dissuasifs. C'est pourquoi tout dispositif nouveau incitant à la transmission anticipée de l'entreprise constitue une avancée pertinente.

En conditionnant une exonération partielle des droits de mutation à titre gratuit à un engagement de conservation des parts de la société ou des actifs de l'entreprise individuelle faisant l'objet de la transmission, le dispositif permet de pérenniser et de stabiliser le capital des entreprises familiales dont la reprise par des tiers conduit fréquemment, au mieux à des délocalisations d'activités, au pire à la remise en cause de ces activités. La priorité portée dans le dispositif à la donation en pleine propriété, si elle risque de limiter le nombre d'entreprises effectivement concernées, est susceptible d'améliorer néanmoins l'efficacité de leur transmission, puisqu'elle permet une véritable passation du pouvoir économique.

Votre commission spéciale ne peut pas en revanche se satisfaire totalement d'un dispositif qui accumule les rigidités au point de dissuader parfois les candidats à un « engagement de conservation ». Le nombre d'entreprises aujourd'hui concernées par un dispositif, qui a déjà trois ans pour son volet « successions », reste trop faible.

Pour ces raisons, votre commission spéciale suggère deux assouplissements et aménagements conformes aux réalités économiques de l'entreprise.

Elle propose tout d'abord que soit retenu, pour les sociétés cotées, un seuil de 20 % des droits financiers et des droits de vote permettant aux associés d'un « engagement de conservation » de bénéficier d'une exonération au titre des droits de mutation à titre gratuit à concurrence de la moitié de la valeur des titres détenus, au lieu du seuil actuel de 25 %. Seul ce seuil de 20 % des titres détenus a en effet une véritable réalité économique. C'est à l'aune de ce pourcentage de parts qu'est établie une présomption de contrôle d'un actionnaire, personne morale ou personne physique, sur une société.

L'article L. 233-7 du code de commerce relatif aux prises de contrôle mentionne ainsi le seuil de 20 % : « toute personne physique ou morale agissant seule ou de concert qui vient à posséder un nombre d'actions représentant plus du vingtième, du dixième, du cinquième, du tiers, de la moitié ou des deux tiers du capital ou des droits de vote d'une société ayant son siège sur le territoire de la République et dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé informe cette société, dans un délai de quinze jours à compter du franchissement du seuil de participation, du nombre total d'actions de celle-ci qu'elle possède. Elle en informe également le Conseil des marchés financiers dans un délai de cinq jours de bourse à compter du franchissement du seuil de participation, lorsque les actions de la société sont admises aux négociations sur un marché réglementé. Le Conseil des marchés financiers porte cette information à la connaissance du public ».

L'article L. 233-16 relatif aux comptes consolidés est plus clair encore : « L'influence notable sur la gestion et la politique financière d'une entreprise est présumée lorsqu'une société dispose, directement ou indirectement, d'une fraction au moins égale au cinquième des droits de vote de cette entreprise » . Plus pertinent sur le plan économique, le seuil de 20 % est aussi plus réaliste : compte tenu de la valorisation boursière de certaines entreprises cotées et de la dilution du capital automatiquement entraînée par la croissance d'une société, un seuil de 25 % serait souvent impossible à atteindre pour des actionnaires minoritaires personnes physiques.

Par ailleurs, votre commission spéciale propose, par cohérence avec les amendements proposés à l'article 26 bis , que soit expressément prévue la possibilité pour les associés de l'engagement collectif de conservation d'effectuer entre eux des cessions ou donations des titres soumis à l'engagement, afin que celui-ci puisse « respirer »

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 25 -
Exonération de droits de mutation à titre gratuit en cas de
donation d'une entreprise à l'un ou plusieurs de ses salariés

(Article 790 A du code général des impôts)

Commentaire : le coût de la transmission est lié au montant élevé des droits de mutation, qui représentent, dans le cas de la transmission d'une entreprise à l'un ou à plusieurs de ses salariés, 60 % de la valeur de l'entreprise, après un abattement de 15.000 euros par donataire. Le présent article, en substituant à cet abattement une exonération lorsque la valeur des actifs est inférieure à 300.000 euros, vise à accroître le nombre de transmissions gracieuses aux salariés.

I. Le droit existant : des restrictions qui nuisent à l'efficacité de la transmission de l'entreprise aux salariés

L'article 790 A du code général des impôts, introduit par l'article 13 de la loi de finances pour 1977, modifié par l'article 19 de la loi de finances pour 1984 pour augmenter le montant de l'abattement, et amélioré dans plusieurs aspects de son dispositif par l'article 13 de la loi de finances pour 1999, permet, en cas de donation de titres à tout ou partie du personnel de l'entreprise, de procéder à un abattement sur les droits de mutation exigibles de 15.000 euros par donataire.

Ce dispositif fiscal souffre tout d'abord d'une rigidité qui l'empêche de jouer pleinement le rôle économique qui lui est dévolu. Le bénéfice de cet abattement est en effet subordonné à un agrément préalable du ministre de l'économie et des finances. Sur vingt-deux demandes présentées entre 1999 et 2002, sept ont fait l'objet d'un refus, soit plus de 30 %.

S'ajoutent à ces refus de l'administration fiscale les désistements et dossiers sans suite : entre 1999 et 2002, seules treize donations de titres ont bénéficié de l'agrément.

Ces donations concernent parfois des montants élevés - jusqu'à 2,8 millions d'euros pour un nombre de salariés supérieur à un millier -, parfois des montants plus limités - moins de 10.000 euros pour un ou deux salariés. Il n'y a donc pas de « ciblage » particulier du dispositif.

Outre la condition de l'agrément, qui limite l'attrait du dispositif, doit être signalée ensuite la faiblesse de l'avantage fiscal octroyé au regard d'autres dispositions relatives aux donations. Ainsi, la donation effectuée par les grands-parents à leurs petits enfants bénéficie depuis la loi de finances pour 2003 d'un abattement par part de 30.000 euros. De plus, la disposition n'est pas cumulable avec « tout autre abattement ».

Enfin, la donation ne peut concerner que la transmission de titres : elle exclut de facto la transmission de l'entreprise individuelle, qui constitue pourtant, en raison de montants en jeu plus limités et d'un nombre de salariés plus faible, la cible naturelle d'une incitation fiscale visant la transmission de l'entreprise aux salariés.

II. Le dispositif proposé : renforcer les donations aux salariés

A. Une disposition qui exonère de droits de mutation les biens transmis aux salariés par donation à hauteur de 300.000 euros

Le présent article modifie l'article 790 A du code général des impôts à compter du 1er janvier 2004 ( ( * )1). Il introduit, sur option des donataires, la possibilité d'une exonération des droits de mutation à hauteur de 300.000 euros pour les donations de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de clientèles, quelle que soit la forme de l'entreprise.

L'exonération ne vaut, comme pour l'article 24 du présent projet de loi, que pour les donations en pleine propriété, et ne concerne pas les donations en nue-propriété. Comme pour l'article précédent, il y a une volonté manifeste du gouvernement de privilégier la « qualité » de la transmission et d'inciter à la passation complète des pouvoirs au sein de l'entreprise, au détriment du nombre. Il est difficile de savoir si cette restriction délibérée permettra à la donation en pleine-propriété de progresser face à la pratique, plus courante, de la donation en nue-propriété, qui a le mérite pour les donataires de permettre un passage de témoin progressif et d'offrir un complément de revenu utile.

LE RAPPORT RELATIF AUX SUCCESSIONS ET DONATIONS DE M. PHILIPPE MARINI, RAPPORTEUR GÉNÉRAL, AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES : ASSURER LA NEUTRALITÉ FISCALE À L'ÉGARD DES DÉMEMBREMENTS DE PROPRIÉTÉ

« En dépit de l'inadéquation du barème fixant le partage de la valeur d'un bien entre l'usufruit et la nue-propriété, les avantages offerts aux transmissions anticipées ont conduit à la multiplication des démembrements de propriétés.

Lors de son audition par votre rapporteur général, le directeur de la législation fiscale a clairement indiqué qu'il lui semblait logique, dès lors que l'on diminuerait les taux d'imposition, de revenir sur les avantages accordés aux transmissions anticipées ne portant que sur la nue-propriété, c'est-à-dire n'impliquant pas de dessaisissement effectif et immédiat du bien transmis.

Tout en considérant cette position comme trop catégorique, dans la mesure où il convient d'inciter les Français à anticiper sur leurs dispositions successorales, votre rapporteur général considère néanmoins qu'il ne faut pas encourager des mécanismes complexes qui aboutissent, en fait, à défavoriser tous ceux qui ne peuvent pas recourir à des conseillers fiscaux.

De façon plus générale, le démembrement de propriété doit être choisi parce qu'il convient aux parties en vue d'organiser leurs rapports économiques et juridiques et non pour bénéficier d'un régime fiscal plus favorable. Les modalités de taxation ne sont que l'accessoire du concept économique et juridique... et non l'inverse.

Le régime fiscal propre au démembrement doit être maintenu. Il n'est ainsi pas question de revenir sur la non-taxation de la réunion de l'usufruit à la nue-propriété. En revanche, il paraît effectivement plus légitime de donner des avantages plus importants aux donations portant sur l'ensemble des droits de propriété attachés aux biens. »

1. Une extension du dispositif aux entreprises individuelles

Le présent article vise l'ensemble des entreprises, contrairement au dispositif actuel, sociétés et entreprises individuelles, dès lors qu'elles exercent une activité industrielle, commerciale, artisanale ou libérale.

2. Un avantage fiscal ciblé sur la transmission des fonds artisanaux, des fonds de commerce ou des clientèles

Bénéficieraient de l'exonération, si leur valeur n'excède pas 300.000 euros, les donation de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de clientèles d'une entreprise individuelle ou de parts ou actions d'une société, à concurrence de la fraction de la valeur de leurs titres représentant leur fond artisanal, de commerce ou de clientèle. Contrairement au dispositif actuel, qui concerne l'ensemble des actifs de l'entreprise s'il s'agit d'une société, le présent article limite le champ des biens transmis à une fraction des actifs d'une entreprise, le fonds de commerce ou de clientèle. Implicitement, la disposition proposée concerne plutôt les petites entreprises, les artisans, commerçants ou professions libérales.

3. Les conditions applicables au donateur et aux donataires

Les fonds mentionnés ci-dessus ou les parts ou actions de société ayant été acquis à titre onéreux doivent être détenus par le donateur depuis au moins deux ans. La condition minimale de durée de dotation ne concerne donc pas les fonds ou les parts de société ayant fait l'objet précédemment d'une transmission par donation ou par succession .

En ce qui concerne les donataires, le dispositif concerne les salariés de l'entreprise titulaires d'un contrat de travail à durée indéterminée et qui travaillent à temps plein ou titulaires d'un contrat d'apprentissage en cours au jour de la donation. Les donataires doivent poursuivre pendant cinq années après la donation, « à titre d'activité professionnelle unique et de manière effective et continue », l'exploitation du fonds ou de la clientèle transmis ou l'activité de la société dont les parts ou actions ont été transmises. L'un des salariés donataires doit de plus assurer la direction effective de l'entreprise. Le non-respect de ces conditions entraîne le remboursement de l'exonération augmentée des intérêts de retard.

Enfin, les donataires ayant opté pour le bénéfice fiscal de la présente disposition ne peuvent prétendre, pour les actifs de l'entreprises autres que le fonds, aux dispositions des articles 787 B et 787 C nouveaux du code général des impôts introduits par l'article 24 du présent projet de loi, qui prévoient un abattement de 50 % sur la valeur des biens de l'entreprise faisant l'objet d'une donation à la condition de souscrire un engagement de conservation. En revanche, les autres dispositifs d'abattement sur les donations, qui offrent des abattements en cas de donation à la famille du donateur, s'appliquent.

B. Les modifications apportées par l'Assemblée nationale

Outre un amendement rédactionnel, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements au présent article.

Le premier introduit une condition supplémentaire pour que le donataire puisse bénéficier de l'exonération ainsi prévue : détenir un contrat à durée déterminée depuis au moins deux ans. Cette disposition constitue un garde-fou utile contre les abus éventuels d'une embauche de complaisance, par exemple d'un membre de la famille, pour bénéficier de l'exonération.

Le second permet aux salariés donataires de ne pas perdre le bénéfice de l'avantage fiscal lorsque l'entreprise fait l'objet d'une liquidation judiciaire dans les cinq années suivant la donation.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale considère que la donation de l'entreprise aux salariés constitue, avec la transmission au sein de la sphère familiale, un des vecteurs les plus sûrs pour pérenniser l'activité. Le dispositif proposé, réaliste sur le plan économique, équilibré quant aux conditions posées, est ainsi de nature à renforcer le processus, tombé en déshérence depuis quelques années, de la donation aux salariés.

La restriction du dispositif aux seules donations en pleine propriété doit se comprendre comme le prélude d'une réforme plus générale du barème des droits de mutation qui devrait, elle, profiter à l'ensemble des donations. Cette réforme du barème des donations, que votre commission spéciale appelle de ses voeux, devra assurer la neutralité fiscale à l'égard des démembrements de propriété sans qu'il paraisse illégitime, bien au contraire, de donner des avantages plus importants aux donations portant sur l'ensemble des droits de propriété attachés aux biens.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 26 -
Abattement pour les droits de mutation sur les cessions de parts
sociales de sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions

(Article 726 du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose d'instituer pour les droits de mutation un abattement sur les cessions de parts sociales de sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions, le montant de cet abattement étant égal à 23.000 euros multiplié par le pourcentage des parts ainsi cédées.

I. Le droit existant

Les droits de mutation à titre onéreux applicables aux cessions d'entreprise sont aujourd'hui :

- depuis la loi de finances pour 1991, de 1 % (avec un plafond de 3.049 euros) pour les cessions, constatées par un acte, d'actions de sociétés par actions (sauf pour les cessions d'actions de sociétés non cotées à prépondérance immobilière, qui sont soumises au mêmes droits que les mutations d'immeubles), ainsi que les cessions de parts ou titres en capital souscrits par les clients des établissements mutuels ou coopératifs. Avant 1991, ces droits d'enregistrement sur cessions, constatées par un acte, d'actions de sociétés par actions, étaient de 4,8 % , sans plafond ;

- pour les fonds de commerce ou de clientèle, de 4,8 % de la fraction du prix de vente supérieure à 23. 000 euros (les ventes de fonds de commerce d'une valeur inférieure à 23.000 euros étant soumises à un droit fixe de 15 euros). Ces droits ont été progressivement réduits entre 1988 (où ils pouvaient atteindre 16,6 %) et l'an 2000, par les lois de finances pour 1989, pour 1990 et pour 1992, puis par la première loi de finances rectificative pour 1993, par la loi du 12 avril 1996 portant diverses dispositions d'ordre économique et financier, et enfin par la loi de finances pour 2000. Les cessions de débit de boissons, ainsi que les cessions dans certaines zones d'aménagement du territoire, bénéficient par ailleurs sous certaines conditions de droits à taux réduit ;

- enfin, de 4,8 % sur les cessions de parts sociales de sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions (SARL, sociétés en nom collectif, sociétés civiles ou sociétés en commandite simple), ainsi (hormis pour la part représentative de vente d'immeubles) que sur les cessions de parts de sociétés de fait ou de sociétés en participation, que cette cession fasse ou non l'objet d'un acte. Font toutefois exception les cessions d'actions ou de parts de sociétés immobilières de copropriété, soumises en principe aux mêmes droits de mutation que les ventes d'immeubles, ainsi que les cessions de sociétés et groupements agricoles et les cessions de participations dans les groupements d'intérêt économiques ou assimilés, qui sont soumises à un droit fixe de 75 euros.

II. Le dispositif proposé

Le présent article propose de rapprocher le régime des cessions de parts sociales de sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions de celui des cessions de fonds de commerce, en instituant pour ce premier régime un abattement du montant de la cession égal au pourcentage des parts cédées multiplié par 23.000 euros, la cession de l'ensemble des parts sociales d'une SARL donnant ainsi droit à un abattement maximal de 23.000 euros. Par exemple, la cession de 50 % des parts d'une SARL serait exonérée à concurrence de 11.500 euros (soit 50 % x 23.000 euros), ce qui correspond à un avantage fiscal de 552 euros (soit 4,8 % x 11.500 euros).

Le présent article propose toutefois d'exclure les sociétés immobilières du bénéfice de cet abattement, afin de préserver la neutralité de la fiscalité immobilière.

Selon les informations transmises à votre rapporteur, le coût de cette mesure, dont l'entrée en vigueur est prévue pour le 1 er janvier 2004, serait de l'ordre de 60 millions d'euros .

III. La position de votre commission spéciale

Tout en se demandant si la date d'entrée en vigueur proposée n'est pas de nature à retarder de quelques mois certaines opérations prévues au second semestre de 2003, votre commission spéciale se félicite de cette mesure qui s'inscrit dans le mouvement nécessaire de réduction des droits de mutation engagé depuis plus de quinze ans.

Cette mesure est en effet de nature à réduire le frottement fiscal de la cession de sociétés dont le capital n'est pas divisé en actions, donc à en faciliter la transmission .

Elle permet en outre de supprimer la différence de traitement fiscal entre la cession de fonds de commerce et la cession de parts représentatives de ces mêmes fonds.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 26 bis (nouveau) -
Exonération partielle d'impôt de solidarité sur la fortune pour les parts ou actions de société que les propriétaires s'engagement à conserver dans le cadre d'un accord collectif

(Article 885 I bis du code général des impôts)

Commentaire : le présent article vise à exonérer au titre de l'ISF, à hauteur de 50 % de leur valeur, les titres et parts de société faisant l'objet d'un engagement collectif de conservation d'une durée minimale de six ans, à condition que cet engagement porte sur au moins 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 %, et qu'un des associés de l'engagement collectif exerce une fonction dirigeante dans l'entreprise.

Cet article, adopté à l'initiative de la commission spéciale de l'Assemblée nationale, représente un aménagement ciblé du régime des biens exonérés au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune. Il ne constitue en rien une réforme de l'ISF, qui méritera sans doute des dispositions autrement ambitieuses. Cet impôt souffre en effet de sa non-réforme.

L'évolution au cours de cinq dernières années du nombre de redevables, du produit de l'impôt de solidarité sur la fortune et de la structure du patrimoine taxé, laisse constater un certain nombre d'effets pervers, aux premiers rangs desquels figure le prélèvement rampant engendré par la non-actualisation du barème, mais aussi l'accroissement de la pression fiscale due à l'augmentation « virtuelle » de la valeur du patrimoine des ménages - que l'on pense à l'inflation constatée sur les logements dans certaines grandes villes ou aux effets de la « bulle technologique » sur la valeur des actions. Les chiffres de la dernière campagne de l'ISF permettent par ailleurs de remettre en cause un certain nombre d'idées reçues ( ( * )1).

Les chiffres du tableau ci-après, qui sont issus de la dernière campagne de l'ISF, montrent que les redevables restent, à 85 %, concentrés dans les deux premières tranches de l'actif net imposable.

VENTILATION DE L'ISF 2001 PAR TRANCHE DE PATRIMOINE IMPOSABLE

Tranches d'actif net imposable

Nombre de redevables

Patrimoine imposable

(en millions d'euros)

Montant
(en millions d'euros)

Pourcentage

de 0,72 M€ à 1,16 M€

124 594

46,4 %

116 979

24,3 %

de 1,16 M€ à 2,3 M€

105 474

39,3 %

164 679

34,3 %

de 2,3 M€ à 3,6 M€

22 148

8,3 %

62 252

13,0 %

de 3,6 M€ à 6,9 M€

11 401

4,2 %

53 818

11,2 %

de 6,9 M€ à 15 M€

3 530

1,3 %

33 919

7,1 %

supérieure à 15 M€

1 301

0,5 %

48 396

10,1 %

Ensemble

268 448

100,0 %

480 044

100,0 %

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

L'impôt perçu au titre de 2001 s'élève à 2.395 millions d'euros. Il a augmenté de 130 % depuis 1993. Cette évolution est imputable à l'accroissement du nombre des redevables, passé de 160.800 à 268.448, soit + 67 % entre 1993 et 2001. Mais le montant total du patrimoine net imposable a augmenté significativement plus que les effectifs, passant de 251 milliards d'euros à 480 milliards d'euros, soit + 91 %. Pour expliquer l'évolution de l'impôt, cette augmentation de la masse imposable se conjugue, d'une part, à la progressivité du barème et, d'autre part, à diverses modifications de la législation fiscale intervenues depuis 1993 (création d'une majoration de 10 % en 1995, intégrée au barème en 1999 ; limitation du plafonnement en 1996 ; création d'une tranche marginale à 1,8 % en 1999 ; absence de revalorisation du barème depuis 1998). Seule l'instauration d'un abattement de 20 % sur la valeur de la résidence principale à compter de 1996 introduit un effet inverse d'allégement de l'impôt.

Ainsi, la croissance continue du produit de l'impôt de solidarité sur la fortune résulte moins d'un enrichissement réel des détenteurs de patrimoine, soumis à l'impôt, d'ailleurs aujourd'hui affectés par des effets de richesse négatifs du fait de la baisse continue des marchés financiers, que des réformes ou non-réformes intervenues depuis 1997.

ÉVOLUTION DU PATRIMOINE DES REDEVABLES DE L'ISF (EN MILLIONS D'EUROS)

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie


I. Un impôt sur la fortune qui pèse fortement sur les capitaux investis dans l'action économique

L'impôt de solidarité sur la fortune présente la particularité de peser fortement sur les capitaux investis dans l'économie. Malgré la prise en compte, dès les débuts de cet impôt, de la particularité des « biens professionnels », les critères parfois discutables de ce régime, les limites strictes posés par la définition de « dirigeant d'entreprise » et l'absence de reconnaissance du rôle économique joué, tant par l'actionnariat minoritaire, organisé sous la forme de pactes d'actionnaires, en faveur de la stabilité du capital de l'entreprise, que par l'actionnariat salarié, dans le cas notamment d'opérations de reprise d'activités, conduit à des délocalisations de patrimoine qui nuisent à la compétitivité de l'économie française. Ces délocalisations strictement liées à l'ISF représentent chaque année plus de 1.200 millions d'euros.

A. Une exonération des biens professionnels selon des critères parfois discutables

L'impôt de solidarité sur la fortune a des effets pervers importants sur l'initiative économique. Pour les limiter, sans y parvenir totalement tant cet impôt peut nuire au dynamisme des affaires, les biens professionnels ne sont pas, pour la majeure partie, compris dans l'assiette sur laquelle pèse la cotisation. La section IV du chapitre I bis du code général des impôts relatif à l'impôt de solidarité sur la fortune détermine les conditions dans lesquelles les biens professionnels peuvent être exclus de l'assiette de cet impôt.

Sont considérés, d'une part, comme biens professionnels, les biens nécessaires à l'exercice à titre principal d'une profession industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale. Il s'agit d'une manière générale des activités placées sous le régime des bénéfices industriels et commerciaux (BIC), des bénéfices agricoles (BA) ou des bénéfices non commerciaux (BNC).

Sont définis, d'autre part, aux articles 885 O et suivants du code général des impôts, les titres de société susceptibles de bénéficier de l'exonération au titre des biens professionnels. Il s'agit, sous certaines conditions, des parts de sociétés des personnes relevant de l'impôt sur le revenu et des parts ou actions de sociétés assujetties à l'impôt sur les sociétés. Pour ces dernières, leurs propriétaires peuvent les considérer comme biens professionnels :

- s'ils exercent des fonctions de direction au sein de leur entreprise (gérants de droit des SARL et des sociétés en commandite par actions, présidents, directeurs généraux, membres du directoire et présidents du conseil de surveillance des sociétés par actions...) ;

- et s'ils détiennent plus de 25 % des droits de vote et des droits financiers attachés aux titres et parts de la société.

Ce seuil de 25 % s'apprécie en fonction non seulement du contribuable lui-même, mais aussi de son entourage familial : conjoint, concubin notoire ou partenaire pour les personnes liées par PACS, ascendants, descendants, frères et soeurs, ainsi que ceux de son conjoint, partenaire ou concubin notoire.

Les effets de seuil liés à ces 25 % sont très importants dans le régime des biens professionnels. De même, la conception restrictive de ce qu'est un dirigeant, aujourd'hui binaire, entre un certain nombre de fonctions reconnues et toutes les autres, exclues du dispositif, engendre des distorsions dans le traitement fiscal de personnes placées pourtant dans une situation proche. Enfin, l'ignorance d'une « zone grise » autour du régime des biens professionnels, qui concerne l'ensemble des personnes détenant collectivement le contrôle d'une entreprise sans y exercer de fonction dirigeante, et l'absence d'un régime intermédiaire, qui permet au dirigeant de cesser son activité sans perdre un avantage fiscal essentiel pour pérenniser sa participation de l'entreprise, empêchent la transmission de l'entreprise, aujourd'hui enjeu essentiel pour une population de dirigeants vieillissante, de s'opérer dans des conditions satisfaisantes . C'est au moment de cette transmission d'entreprise que se produisent de plus en plus fréquemment des expatriations de patrimoine, mais aussi une perte de contrôle du pouvoir au sein de la société par la famille actionnaire qui peut engendrer, selon le repreneur et sa gestion, des délocalisations ou des cessations d'activité.

B. Malgré les exonérations, un impôt qui pèse lourdement sur les capitaux investis dans l'action économique

Compte-tenu du caractère trop restrictif du régime des « biens professionnels », le poids que représente le produit de l'ISF qui pèse sur les capitaux investis dans l'économie est manifestement très lourd.

Comme le montre l'analyse du patrimoine par nature d'actifs présentée dans le tableau ci-dessous, les actifs mobiliers sont prépondérants, puisque leur part atteint 69 % contre 31 % pour celle des immeubles. Le montant déclaré au titre de la résidence principale participe à hauteur de 11 % au montant total de l'actif brut, contre 19 % pour les autres immeubles bâtis et 1,2 % pour les immeubles non bâtis. Le patrimoine mobilier est constitué pour les deux tiers par des droits sociaux et autres valeurs mobilières, et pour un tiers par des liquidités et des biens meubles, soit respectivement 45,2 % et 23,4 % de l'actif brut.

La structure du patrimoine évolue en fonction de son niveau : l'immobilier est prépondérant pour les patrimoines les moins élevés, les valeurs mobilières pour les patrimoines les plus importants. Pour les patrimoines compris entre 0,72 et 1,16 millions d'euros, la part de l'actif immobilier représente 44 % de l'actif brut. Pour les patrimoines supérieurs au seuil de l'avant-dernière tranche du barème (6,9 millions d'euros), le patrimoine mobilier représente 90 % de l'actif brut, tandis que pour les patrimoines supérieurs au seuil de la dernière tranche du barème (15 millions d'euros), il constitue 94 % de l'actif brut.

RÉPARTITION DES BASES IMPOSABLES PAR TYPE D'ACTIF EN 2001



Éléments du patrimoine déclaré après abattement éventuel



Ensemble des redevables de l'ISF



En pourcentage de l'actif net imposable

Ensemble des redevables dont le montant de patrimoine net imposable est supérieur à la dernière tranche de barème



En pourcentage de l'actif net imposable

Montant (en M€)

Montant (en M€)

Immeubles bâtis

Résidence principale

56 215

10,9 %

834

1,6 %

Autres immeubles

98 050

19,0 %

2 170

4,2 %

Sous-total

154 265

30,0 %

3 004

5,8 %

Immeubles non bâtis

Bois, forêts et groupements forestiers

532

0,1 %

50

0,1 %

Biens ruraux loués à long terme

1 013

0,2 %

10

0,0 %

Parts de GFA

295

0,1 %

10

0,0 %

Autres biens

4 209

0,8 %

69

0,1 %

Sous-total

6 049

1,2 %

139

0,3 %

Total des immeubles

160 314

31,1 %

3 143

6,1 %

Biens meubles

Droits sociaux

14 356

2,8 %

3 582

6,9 %

Autres valeurs mobilières

218 469

42,4 %

32 040

61,8 %

Liquidités

56 375

10,9 %

3 374

6,5 %

Autres biens meubles

64 468

12,5 %

9 667

18,7 %

Total des biens meubles

353 668

68,7 %

48 663

93,9 %

Total des immeubles et meubles

513 982

99,8 %

51 807

100,0 %

Forfait mobilier

1 057

0,2 %

3

0,0 %

Total de l'actif brut

515 039

100,0 %

51 809

100,0 %

Passif et autres déductions

34 995

3 413

Patrimoine net imposable

480 044

48 396

Source : ministère de l'économie, des finances et de l'industrie

La part des droits sociaux dans le patrimoine taxable des tranches supérieures du barème est particulièrement inquiétante. En effet, ces tranches subissent un taux d'imposition marginal qui peut aller jusqu'à 1,8 %. Ceci signifie que les actionnaires de ces sociétés doivent obtenir une rémunération de leur capital supérieure à 1,8 % . Ils doivent donc obtenir, quelles que soient les circonstances économiques et la santé de l'entreprise, des dividendes représentant au minimum 1,8 % du capital investi. Ce taux est très élevé par rapport à la politique de distribution des entreprises. Les actionnaires minoritaires, dès lors qu'il exercent un contrôle de l'entreprise, sont donc amenés, pour des raisons exclusivement fiscales, à demander la distribution de dividendes dans des proportions sans relation directe avec la performance de l'entreprise et au détriment d'une politique, plus profitable sur le plan de la compétitivité, de réinvestissement des bénéfices.

Faute de distribution de dividendes, les actionnaires peuvent a contrario être amenés à vendre leurs parts pour acquitter l'impôt : ces cessions peuvent provoquer des pertes de contrôle des entreprises et la venue dans le capital de ces entreprises familiales de prédateurs éventuels qui, moins ancrés dans le territoire, moins investis dans l'histoire d'entreprises parfois anciennes, peuvent prendre des décisions de gestion (délocalisation d'activités, cession d'actifs ou arrêt de certains investissements), lourdes de conséquence sur le plan de l'emploi et de l'aménagement du territoire.

La taxation des participations minoritaires décourage ainsi les partenaires familiaux de conserver leur titre. Plus généralement, le régime des biens professionnels, s'il est adapté à la situation d'un créateur d'entreprise, il ne prend en aucun cas en considération le cas du développement de l'entreprise et de sa transmission.

II. Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale : reconnaître le rôle des actionnaires minoritaires pour favoriser la stabilité du capital et la pérennité des entreprises

Sur proposition du rapporteur de la commission spéciale chargé d'examiner le projet de loi pour l'initiative économique, M. Gilles Carrez, l'Assemblée nationale a adopté un article additionnel qui transpose à l'impôt de solidarité sur la fortune le dispositif « Migaud-Gattaz » existant à l'article 789 A du code général des impôts en matière de successions, et décrit dans le commentaire de l'article 24 du présent projet de loi. Le dispositif proposé conditionne l'octroi d'un abattement de 50 % au titre de l'ISF sur la valeur des parts et actions détenues dans une entreprise à la conclusion d'un engagement collectif de conservation des titres sur la durée.

La rédaction proposée est « mot pour mot » celle de l'article 789 A du code général des impôts.

A. Un engagement sur la durée portant sur une part significative du capital

Seraient exonérées d'ISF à hauteur de 50 % de leur valeur les parts ou les actions d'une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale faisant l'objet d'un engagement collectif de conservation pris par le propriétaire, pour lui et ses ayants cause à titre gratuit, avec d'autres associés et portant sur au moins 25 % des droits financiers et des droits de vote attachés aux titres émis par la société s'ils sont admis à la négociation sur un marché réglementé ou, à défaut, sur au moins 34 % des parts ou actions de la société. Ces pourcentages doivent être respectés tout au long de la durée de l'engagement collectif de conservation, qui ne peut être inférieure à six ans.

B. La nécessité de la présence au sein de l'engagement collectif d'un dirigeant de l'entreprise

L'un des associés doit exercer effectivement, dans la société dont les parts ou actions font l'objet de l'engagement collectif de conservation, son activité professionnelle principale si celle-ci est une société de personnes visée aux articles 8 et 8 ter du code général des impôts, ou l'une des fonctions énumérées au 1° de l'article 885 O bis du code général des impôts lorsque elle est soumise à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option ( ( * )1).

C. Les pénalités en cas de non-respect des conditions liées à l'engagement

En cas de non-respect d'une des conditions posées par le présent article, le redevable serait tenu de rembourser l'exonération dont il aurait bénéficié, augmentée des intérêts de retard.

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale ne peut qu'être sensible à la prise en compte au titre de l'ISF des parts et actions de société faisant l'objet d'un engagement collectif de conservation. Les engagements collectifs de conservation qui pourraient être conclus au titre du présent article devraient constituer un support appréciable pour garantir la stabilité des entreprises à actionnariat familial, sauvegarder leur ancrage territorial et éviter les délocalisations de capitaux. Cette préoccupation est déjà ancienne au Sénat puisque dès 1997, une proposition de loi était déposée pour reconnaître sur le plan législatif les pactes d'actionnaires et en tirer les conséquences en termes de fiscalité.

A. Des propositions déjà anciennes de la commission des finances du Sénat

Dès 1997, M. Philippe Marini, rapporteur général de la commission des finances déposait une proposition de loi relative aux pactes d'actionnaires ( ( * )1). L'exposé des motifs visait à obtenir une reconnaissance législative des pactes d'actionnaires : « Cherchant à organiser, généralement pour une longue période, le contrôle de la gestion d'une société, la composition de son capital ou encore la sortie d'un actionnaire de la société, ces accords extra-statutaires présentent une indéniable utilité. Ils contribuent à assurer la stabilité indispensable à la réalisation d'objectifs complexes, de moyenne ou longue durée, notamment dans le cadre des groupes de sociétés, des holdings, et plus spécifiquement encore dans le cadre des filiales communes. De même, leur utilité en ce qui concerne les sociétés familiales n'est plus à démontrer. Les pactes d'actionnaires permettent alors d'organiser le contrôle du capital et de conserver le caractère propre de ces entreprises. »

Toute la problématique liée à la nécessité de préserver la structure du capital d'entreprises, par essence fragiles, était déjà présente.

La proposition de loi avait pour conséquence logique la prise en compte des pactes d'actionnaires au regard de l'ISF.

Elle proposait qu'au-delà du seuil de 25 % prévu par l'article 885 O du code général des impôts, les actions et parts sociales détenues par des associés liés durablement par un pacte d'actionnaires soient considérées comme des biens professionnels. Ce nouveau régime fiscal présentait un effet d'autant plus vertueux qu'il aurait incité les épargnants à investir dans le capital des sociétés, notamment petites et moyennes, dont le besoin en fonds propres est crucial.

L'article 885 O bis 1 (nouveau) du code général des impôts qui aurait été ainsi créé introduisait le dispositif suivant :

1. Conditions d'application

Les associés liés par un pacte devaient collectivement détenir 25 % des droits financiers ou des droits de vote attachés aux titres émis par la société. Ce pourcentage correspondait au seuil d'éligibilité au régime des biens professionnels, s'agissant de la détention par les associés dirigeants sociaux de parts ou actions de sociétés assujetties à l'impôt sur les sociétés.

Ce régime était subordonné à une condition de durée, les associés liés par la convention de vote s'engageant à conserver les titres pendant une période de cinq ans au moins. De plus, le pacte devait avoir pour objet d'exercer le contrôle de l'entreprise aux côtés de son dirigeant effectif.

2. Modalités d'application

Le deuxième alinéa du texte précisait les modalités de communication et de notification des documents conditionnant le bénéfice du régime fiscal proposé. L'engagement de conserver les titres pendant cinq ans au moins et la convention de vote devaient en effet être notifiés par les intéressés à la société émettrice des titres, tout en précisant le nombre de titres visés. Dans un souci de transparence entre associés, ces documents devaient pouvoir être communiqués à tout associé qui en faisait la demande. Ils devaient être naturellement transmis à l'administration fiscale.

3. Sanctions de la rupture des conditions d'application

La rupture de l'engagement de conservation des titres pendant cinq ans au moins entraînait l'obligation pour l'associé à l'origine de cette rupture de souscrire des déclarations rectificatives sur les trois années précédentes, assorties d'intérêts de retard et de la pénalité prévue à l'article 1731 du code général des impôts.

Dans ce dernier cas, dans l'hypothèse où le seuil de 25 % de détention des droits de vote et financiers n'était plus atteint par les actionnaires « pactés » au 31 décembre de l'année d'imposition, les autres associés concernés perdaient le bénéfice de ce régime fiscal, jusqu'à ce que ce seuil soit de nouveau franchi.

B. Des adaptations nécessaires au dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Votre commission spéciale est favorable à un dispositif qui restaure un semblant de neutralité fiscale entre les actionnaires actuellement exonérés en application du régime des biens professionnels et les actionnaires minoritaires qui, bien que participant au contrôle de l'entreprise, totalement assujettis à l'ISF. Le dispositif proposé par le présent article passe cependant sous silence les modalités de respiration d'un engagement collectif de conservation qui, s'il a un impact fiscal, doit également avoir un sens sur le plan économique. Le basculement du dispositif d'une logique d'exonération partielle de droits de mutation à une logique d'exonération d'impôt annuel doit nécessairement avoir des répercussions dans la rédaction de l'article, en ce qui concerne notamment le régime des pénalités éventuelles. Le dispositif proposé constitue en effet une incitation à la détention du capital sur la durée : c'est à l'aune de cet objectif que doivent être imaginées les conditions liées à l'entrée et à la sortie de l'engagement collectif de conservation.

1. La prise en compte de seuils ayant un réel sens économique

Votre commission spéciale propose de substituer pour les sociétés cotées un seuil de 20 % au seuil de 25 % des droits financiers et des droits de vote permettant aux associés d'un « engagement collectif de conservation » de bénéficier d'une exonération au titre de l'ISF à concurrence de la moitié de la valeur des titres détenus.

Seul le seuil de 20 % des titres détenus a en effet une véritable réalité économique. C'est à l'aune de ce pourcentage de parts qu'est établie une présomption de contrôle d'un actionnaire, personne morale ou personne physique, sur une société. L'article L. 233-7 du code de commerce relatif aux prises de contrôle mentionne ainsi le seuil de 20 % : « Toute personne physique ou morale agissant seule ou de concert qui vient à posséder un nombre d'actions représentant plus du vingtième, du dixième, du cinquième, du tiers, de la moitié ou des deux tiers du capital ou des droits de vote d'une société ayant son siège sur le territoire de la République et dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé informe cette société, dans un délai de quinze jours à compter du franchissement du seuil de participation, du nombre total d'actions de celle-ci qu'elle possède. Elle en informe également le Conseil des marchés financiers dans un délai de cinq jours de bourse à compter du franchissement du seuil de participation, lorsque les actions de la société sont admises aux négociations sur un marché réglementé. Le Conseil des marchés financiers porte cette information à la connaissance du public. ». L'article L. 233-16 relatif aux comptes consolidés est plus clair encore : « L'influence notable sur la gestion et la politique financière d'une entreprise est présumée lorsqu'une société dispose, directement ou indirectement, d'une fraction au moins égale au cinquième des droits de vote de cette entreprise ».

Plus pertinent sur le plan économique, le seuil de 20 % est aussi plus réaliste : compte tenu de la valorisation boursière de certaines entreprises cotées et de la dilution du capital automatiquement entraînée par la croissance d'une société, un seuil de 25 % serait souvent impossible à atteindre pour des actionnaires minoritaires personnes physiques .

2. La nécessité de laisser « respirer » l'engagement collectif

Votre commission spéciale propose plusieurs améliorations pour que l'engagement collectif de conservation, pour l'heure simple objet fiscal, puisse devenir un support de détention collective d'une fraction significative du capital d'une société utile sur le plan économique .

Elle propose d'abord d'admettre que les associés au sein de l'engagement puissent effectuer entre eux des cessions ou des donations de titres sans remettre en cause l'avantage fiscal attaché à l'engagement collectif. Cette possibilité est admise pour l'article 789 A du code général des impôts, qui propose le même dispositif pour les transmissions à titre gratuit par l'instruction fiscale n° 137 du 30 juillet 2001.

Elle suggère ensuite qu' un nouvel associé puisse adhérer à un engagement collectif de conservation existant pour la durée restant à courir jusqu'à la fin de l'engagement, lorsque cette durée est supérieure à trois ans. L'engagement collectif de conservation doit pouvoir être ouvert à de nouveaux entrants en fonction des stratégies d'alliance conclues au sein de l'actionnariat, qui ne peuvent qu'évoluer sur la durée.

Elle estime aussi nécessaire de préciser que la durée de l'engagement collectif de conservation peut être prolongée lorsqu'une disposition expresse de tacite reconduction le prévoit, ou, au terme du délai initialement prévu, par avenant.

Elle souhaite par ailleurs préserver l'égalité entre les actionnaires personnes physiques quelle que soit la forme de détention de capital pour laquelle ils ont opté. Compte tenu de la multiplicité des structures de détention de capital et de la possibilité d'existence de plusieurs degrés d'interposition entre la société concernée et la personne physique actionnaire, il paraît peu réaliste de n'autoriser qu'un seul degré d'interposition. La prise en compte d'au moins deux niveaux d'interposition est indispensable .

Elle croit enfin utile de définir les conséquences du non-respect des conditions posées selon des modalités qui ne soient pas dissuasives en distinguant :

- entre l'associé qui prend l'initiative de la rupture de l'engagement collectif de conservation , qui subit les pénalités résultant logiquement de cette rupture, et tout d'abord le rappel des impôts passés pour les trois dernières années,

- et les autres associés qui, subissant cette rupture, ne peuvent dès lors que perdre leur avantage fiscal. Dans ce cas précis, l'engagement collectif de conservation serait suspendu jusqu'à ce que les conditions soient de nouveau réunies, dans un délai ne pouvant excéder une année.

Le régime proposé par votre commission spéciale est plus simple que celui de l'article 789 A du code général des impôts, qui a aujourd'hui un effet clairement dissuasif, comme en témoigne d'ailleurs le très faible nombre d'engagements collectifs de conservation souscrits.

3. Dans le cas de sociétés cotées, la nécessité d'informer l'autorité des marchés financiers

En raison de la signification économique pour une société cotée que représentera un engagement collectif de conservation portant sur plus de 20 % du capital et des clauses annexes qui pourront lui être jointes (convention de vote, cessions préférentielles de titre...), votre commission spéciale propose à des fins de transparence la transmission de l'engagement à l'autorité des marchés financiers. Elle souhaite faire référence dans le dispositif à l'article L. 233-11 du code de commerce qui dispose que « toute clause d'une convention prévoyant des conditions préférentielles de cession ou d'acquisition d'actions admises aux négociations sur un marché réglementé et portant sur au moins 0,5 % du capital ou des droits de vote de la société qui a émis ces actions doit être transmise dans un délai fixé par décret au Conseil des marchés financiers qui en assure la publicité. A défaut de transmission, les effets de cette clause sont suspendus, et les parties déliées de leurs engagements, en période d'offre publique. ».

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 26 ter (nouveau) -
Exonération d'impôt de solidarité sur la fortune pour
les souscriptions en numéraire au capital de PME non cotées

(Article 885 I ter du code général des impôts)

Commentaire : le présent article vise à exonérer au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) les apports en capital aux PME ayant leur siège de direction dans un Etat membre de la communauté européenne.

I. Le contexte actuel

Aucune disposition du code général des impôts relative à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) ne prévoit d'instrument fiscal visant à orienter l'épargne de contribuables pourtant fortunés vers des buts d'intérêt général, dans quelque secteur que ce soit, qu'il s'agisse de culture, d'oeuvres philanthropiques et sociales ou d'investissements dans l'économie. S'il existe bien des dispositifs d'exonération, ils ne font que viser des stocks déjà investis, soit dans les oeuvres d'art, soit dans les bois et forêts, soit dans l'entreprise, sans inciter de nouveaux flux à s'investir dans des domaines bien identifiés de l'intérêt général.

Au lieu d'utiliser l'ISF de manière dynamique pour inciter les Français détenant des patrimoines importants à le mobiliser en faveur, par exemple, de l'emploi et de la création d'entreprise, cette taxation du patrimoine cumule les inconvénients sans créer aucun avantage pour l'économie.

La liberté de choix qui peut exister pour le contribuable dans l'impôt sur le revenu, entre acquitter l'impôt ou oeuvrer en faveur de l'emploi, de la culture, des associations ou du logement social, n'existe pas en matière d'ISF. Il y a ainsi stérilisation de l'outil fiscal que représente l'ISF.

II. Le dispositif proposé par l'Assemblée nationale

Le dispositif proposé vise à combler en partie cette lacune. Le présent article additionnel, adopté à l'Assemblée nationale sur l'initiative du Gouvernement, répond à un objectif d'intérêt général qui est, dans une période peu favorable à l'activité économique, de drainer des richesses vers les petites et moyennes entreprises , pour développer la création d'emplois .

Seraient ainsi exonérés les titres reçus par le redevable en contrepartie de sa souscription en numéraire au capital d'une PME si les conditions suivantes sont réunies au 1 er janvier de l'année d'imposition :

- la société exerce exclusivement une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion des activités bancaires, financières, d'assurance, de gestion ou de location d'immeubles ;

- la société a son siège de direction effective dans un Etat membre de la Communauté européenne ( ( * )1).

La définition de la PME retenue dans le présent article est celle de l'annexe I au règlement (CE) n° 70/2001 de la Commission du 12 janvier 2001 concernant l'application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides de l'Etat en faveur des petites et moyennes entreprises. Ainsi que cela a été précisé dans le commentaire de l'article 21 du présent projet de loi, il s'agit d'une entreprise employant moins de 250 personnes, dont soit le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 40 millions d'euros, soit le total du bilan annuel n'excède pas 27 millions d'euros, et qui respectent le critère de l'indépendance (dont la définition figure infra au commentaire de l'article 21, voir note (2) page 201).

III. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale partage l'objectif poursuivi par le présent article, qui devrait permettre de renforcer significativement les apports en capital aux PME.

Au plan économique, elle ne comprend cependant pas l'exclusion du champ du dispositif des activités financières, bancaires et d'assurance, qui paraissent aussi pertinentes, sur le plan de l'intérêt général, que les activités industrielles, commerciales, artisanales, agricoles ou libérales. Elle propose donc de les réintégrer en évitant toutefois que soient concernées les sociétés dont l'actif est principalement constitué de droits patrimoniaux ne permettant pas d'exercer le contrôle d'une entreprise éligible au dispositif proposé.

Elle souhaite par ailleurs que ne soient pas établies de distorsions entre les différentes formes d'apport en capital , les apports en numéraire ou en nature étant aussi utiles les uns que les autres pour une PME. Pour éviter tout abus, qui serait contraire à l'esprit du présent article, elle propose par conséquent que seule la fraction des titres correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaire à l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société puisse bénéficier de l'exonération prévue.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 26 quater (nouveau) -
Assouplissement des critères permettant la qualification de biens professionnels au sens de l'impôt de solidarité sur la fortune

(Article 885 O bis du code général des impôts)

Commentaire : le présent article prévoit que les dirigeants d'entreprises, qui ne détiennent pas les 25 % du capital de leur entreprise ouvrant droit à exonération automatique au titre de l'ISF, bénéficient de l'exonération dès lors que leurs parts représentent plus de 50 % de la valeur brute de leur patrimoine imposable, contre 75 % actuellement.

I. Le droit existant

Sont considérés comme des biens professionnels susceptibles d'être exonérés au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune les parts et actions de société dont le propriétaire :

- d'une part, exerce des fonctions de direction au sein de l'entreprise (gérant de droit des SARL et des sociétés en commandite par actions, président, directeur général, membre du directoire et président du conseil de surveillance des sociétés par actions...) ;

- d'autre part, détient plus de 25 % des droits de vote et des droits financiers attachés aux titres et parts de la société.

Par exception avec cette règle de détention d'un minimum de 25 % des droits financiers et des droits de vote, deux dispositions sont prévues par le code général des impôts :

- la condition de possession de 25 % au moins du capital de la société n'est pas exigée des gérants et associés visés à l'article 62, c'est-à-dire les gérants majoritaires statutaires d'une SARL, les gérants d'une société en commandite par action ou les associés d'une société de personnes ou d'une société civile soumises à l'impôt sur le sociétés ;

- sont également considérées comme des biens professionnels les parts ou actions détenues directement par le gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée ou en commandite par actions, le président, le directeur général, le président du conseil de surveillance ou le membre du directoire d'une société par actions lorsque leur valeur excède 75 % de la valeur brute des biens imposables, y compris les parts et actions précitées.

II. Le dispositif proposé et la position de votre commission spéciale

Le présent article additionnel adopté par l'Assemblée nationale, sur proposition de sa commission spéciale, vise à assouplir cette seconde disposition en permettant aux parts et actions détenues par un dirigeant d'entreprise de bénéficier de l'exonération d'ISF au titre des biens professionnels lorsque leur valeur représente plus de 50 %, au lieu de 75 % aujourd'hui, de la valeur brute des biens imposables.

Cet assouplissement semble le bienvenu à votre commission spéciale . Il rend compte de manière plus réaliste de la structure du patrimoine des chefs d'entreprises.

Cette disposition s'appliquera à partir de l'impôt de solidarité sur la fortune dû pour 2004. Elle aura un coût annuel de 50 millions d'euros.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 26 quater (nouveau) -
Exonération d'impôt de solidarité sur la fortune pour les souscriptions dans les fonds d'investissement de proximité (FIP)

(Article 885 I quater du code général des impôts)

Commentaire : le présent article additionnel vise à exclure les titres reçus par le contribuable en contrepartie de sa souscription aux fonds d'investissement de proximité (FIP) de l'assiette de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

I. Le contexte actuel

La commission spéciale de l'Assemblée nationale chargée d'examiner le projet de loi pour l'initiative économique avait adopté un amendement introduisant une réduction de la cotisation d'impôt sur le fortune (ISF) au titre des souscriptions de parts de fonds communs de placement pour l'innovation (FCPI) et de fonds d'investissement de proximité (FIP). Cet amendement, qui aurait conduit à instituer pour la première fois une réduction d'impôt de l'ISF significative, a été retiré en séance publique à la demande du Gouvernement.

Le dispositif proposé, consistant en une réduction d'impôt et non d'assiette, aurait eu un impact non négligeable pour les finances publiques.

II. Le dispositif proposé par votre commission spéciale

Votre commission spéciale considère tout d'abord que les fonds communs de placement pour l'innovation (FCPI), qui bénéficient d'un avantage fiscal en matière d'imposition sur le revenu, collectent une épargne déjà importante (370 millions d'euros en 2002) qui peine à être investie dans les délais impartis. Ces fonds n'ont donc pas besoin d'une incitation fiscale supplémentaire .

Tel n'est pas le cas des fonds d'investissement de proximité à naître, dont l'ambition de collecte d'une épargne de proximité à destination des PME régionales risque d'être confrontée à une conjoncture financière morose et à une crise de confiance du petit épargnant auxquels il s'adresse. Malgré un avantage fiscal identique à celui du FCPI , le pari des FIP est loin d'être gagné .

Par cohérence avec l'article 26 ter, qui exonère d'ISF les apports en capital aux PME, il est ainsi proposé de faire de même pour les apports en capital aux PME qui seraient « intermédiés » par l'intermédiaire des FIP. Il s'agit bien ici d'une exclusion des souscriptions de l'assiette du patrimoine soumis à imposition .

En raison du risque encouru par des épargnants, dont 10 % des fonds seront investis dans des entreprises nouvelles, et de l'objectif d'intérêt général poursuivi, une exonération des souscriptions aux fonds d'investissement de proximité se justifie pleinement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article additionnel après l'article 26 quater (nouveau) -
Exonération d'impôt de solidarité sur la fortune à hauteur de la moitié de leur valeur des titres et parts de sociétés détenues par leurs salariés

(Article 885 I quinquie s du code général des impôts)

Commentaire : le présent article vise à exonérer d'impôt de solidarité sur la fortune les titres et parts de sociétés détenus par les salariés détenant un contrat à durée indéterminée de plus de trois ans dans leur entreprise.

I. Le contexte actuel

Alors que certains cadres exercent des fonctions dirigeantes proches de celles exigées pour bénéficier du régime des biens professionnels de l'ISF, le recensement systématique par le code général des impôts des fonctions ouvrant droit à exonération entraîne des distorsions entre des situations professionnelles similaires sur le plan du rôle joué au sein de l'entreprise et de leur intérêt économique .

De même n'est pas reconnue la place occupée par l'actionnariat salarié au regard de l'ISF, malgré le rôle qu'elle joue pour stabiliser le capital des entreprises en croissance et pour apporter des capitaux en période de pénurie d'investisseurs individuels et institutionnels sur les marchés financiers.

Enfin, les modalités complexes de reprise d'une entreprise par des salariés, par le biais notamment de plans d'épargne en entreprise (PEE), ne pourront pas être couvertes par le champ de l'article 26 bis du présent projet de loi qui prend en compte sur le plan économique et fiscal le contrôle d'une entreprise par des actionnaires minoritaires.

II. Le dispositif proposé par votre commission spéciale

Votre commission spéciale souhaite relancer la dynamique de l'actionnariat salarié , durement atteinte par la chute des marchés financiers, mais toujours indispensable pour l'avenir de l'économie française , en exonérant de l'ISF à hauteur de 50 % les parts et actions détenues par les salariés dans leur société lorsqu'ils détiennent un contrat de travail à durée indéterminée depuis au moins trois ans et exercent une fonction dont la rémunération représente plus de 75 % de leurs revenus d'activité.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article additionnel après l'article 26 quater (nouveau) -
Exonération d'impôt de solidarité sur la fortune des apports
en numéraire aux groupements fonciers agricoles

(Articles 885 H et 885 Q du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose d'exonérer au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune les apports en numéraire aux groupements fonciers agricoles.

I. Le droit existant

Deux exonérations existent au titre de l'ISF pour les groupements fonciers agricoles.

L'article 885 H du code général des impôts prévoit que les parts de groupements fonciers agricoles sont, sous réserve d'être représentatives d'apports constitués par des immeubles ou des droits immobiliers à destination agricole et que les baux à long terme consentis par le groupement soient au minimum de dix-huit ans, exonérées à concurrence des trois quarts si la valeur totale des parts détenues n'excède pas 76.000 euros, et pour moitié au-delà de cette limite.

L'article 885 Q du code général des impôts dispose quant à lui que les parts de groupements fonciers agricoles sont considérées comme des biens professionnels, sous réserve qu'elles soient représentatives d'apports constitués par des immeubles ou des droits immobiliers à destination agricole, que les baux à long terme consentis par le groupement soient au minimum de dix-huit ans, qu'ils aient été consentis au détenteur de parts, à son conjoint, à leurs ascendants ou descendants, ou à leurs frères ou soeurs, et enfin que le bien loué soit utilisé par le preneur dans l'exercice de sa profession principale. En cas de location au sein de la famille, il y a donc une exonération totale des parts de groupements fonciers agricoles.

II. Le dispositif proposé par votre commission spéciale

Pour développer les groupements fonciers agricoles, qui peuvent fortement contribuer au lancement de nouvelles activités, il est proposé, par le présent article additionnel, une incitation nouvelle à investir dans ces groupements en exonérant d'ISF les apports en numéraire . Cet article est donc dans la droite ligne de l'article 26 ter qui exonère d'ISF les apports en capital dans les petites et moyennes entreprises. Il obéit à un intérêt économique certain qui consiste, par le développement de l'offre, à :

- inciter à l'installation de jeunes agriculteurs sur des terroirs où les exploitations sont chères (céréales, betteraves, vignobles, champagne) ;

- éviter la fuite des exploitations vinicoles (cas des châteaux bordelais) vers des structures financières, éventuellement étrangères ;

- drainer l'épargne sur le foncier, valeur-refuge dans une conjoncture difficile, qui offre une faible rémunération mais une espérance de plus-value régulière sur le long terme.

Le présent article vise, pour la partie concernant l'article 885 H du code général des impôts, à permettre l'installation de jeunes agriculteurs et à développer l'emploi agricole.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article additionnel après l'article 26 quater (nouveau) -
Non-application du droit de reprise de l'administration fiscale
en cas de déclaration rectificative ou nouvelle en matière d'impôt de solidarité sur la fortune

(Article 885 I quinquie s du code général des impôts)

Commentaire : le présent article propose d'écarter le droit de reprise de l'administration fiscale en cas de dépôt spontané d'une déclaration rectificative ou nouvelle à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF).

I. Le droit existant

L'article L. 180 du livre des procédures fiscales prévoit que le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant la déclaration d'impôt de solidarité sur la fortune.

Par ailleurs, en cas d'absence de déclaration, l'article L. 186 du livre des procédures fiscales prévoit que le droit de reprise de l'administration s'exerce pendant dix ans à partir du jour du fait générateur de l'impôt.

II. Le dispositif proposé par votre commission spéciale

La complexité et la lourdeur des dispositions relatives aux biens professionnels en matière d'ISF engendrent des déclarations parfois erronées. De même, en raison de l'inflation de la valeur de certains biens, et de divers effets de « bulle » ayant pu être constatés au cours des dernières années, certains contribuables estiment ne pas être concernés par l'ISF alors qu'ils en sont redevables. Des délocalisations ont pu par ailleurs être opérées. Il s'ensuit une perte de recettes dommageable pour le budget de l'Etat.

Compte tenu du nouveau contexte créé par le présent projet de loi, plus réaliste au regard des capacités contributives des contribuables et des enjeux économiques liés à cet impôt, il paraît opportun d' écarter de manière temporaire le délai de reprise de l'administration pour que les contribuables en décalage avec leurs obligations puissent désormais y faire face.

Le droit de reprise prévu aux articles L. 180 et L. 186 du livre des procédures fiscales ne s'appliquerait pas en cas de dépôt au titre des années antérieures d'une déclaration nouvelle ou rectificative de l'impôt de solidarité sur la fortune pendant les six mois suivant la date de publication de la présente loi . Par cohérence, les rappels d'imposition, intérêts de retard et pénalités susceptibles d'être induits par ces déclarations au titre de tout autre impôt ne seraient pas davantage appelés.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

TITRE VI -
DISPOSITIONS DIVERSES
Article 27 A -
Assouplissement du régime applicable au
volontariat international en entreprise

(Article L. 122-5 du code du service national)

Commentaire : le présent article ouvre la possibilité aux volontaires internationaux en entreprise d'effectuer leur volontariat dans des PME n'ayant pas de représentation permanente à l'étranger.

I. Les travaux de l'Assemblée nationale

A l'initiative de son rapporteur, l'Assemblée nationale a adopté, sur l'avis favorable du Gouvernement, un amendement qui modifie les articles L. 122-5 et L. 122-12 du code du service national pour assouplir le régime applicable en matière de volontariat international en entreprise. L'objectif est de permettre aux volontaires internationaux en entreprise d'effectuer leur volontariat dans de petites et moyennes entreprises qui ne disposent pas nécessairement d'une représentation permanente à l'étranger. Le dispositif adopté par l'Assemblée nationale permet ainsi de faire bénéficier du statut de volontaire international en entreprise les volontaires qui effectueront des séjours d'au moins deux cents jours à l'étranger au cours d'une même année.

La loi n° 2000-242 du 14 mars 2000 a défini le régime du volontariat civil. Lorsqu'il est effectué sur le territoire national, ce ne peut être qu'auprès d'une personne morale à but non lucratif ; en revanche, à l'étranger, il peut être effectué auprès de toute personne morale.

Selon les informations recueillies par votre commission spéciale, plus de mille entreprises à vocation internationale ou exportatrices de biens ont déjà fait appel à ces missions. En 2001, 2.183 jeunes sont ainsi partis pour le compte de 585 entreprises françaises, dont 57 % avaient un chiffre d'affaires inférieur à 60 millions d'euros.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale souscrit à cet ajout de l'Assemblée nationale qui est de nature à faciliter et donc encourager le volontariat civil en entreprise, pour le plus grand bénéfice des petites et moyennes entreprises qui ne disposent pas d'établissement permanent à l'étranger.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 27 -
Application à l'outre-mer

Commentaire : le présent article étend certaines dispositions du titre I du projet de loi à la Polynésie française, aux Iles Wallis-et-Futuna et à la Nouvelle-Calédonie.

I. Le texte initial

L'article 27 propose de rendre applicables dans les collectivités situées outre-mer soumises au principe de la spécialité législative que sont la Polynésie française, les Iles Wallis-et-Futuna et la Nouvelle-Calédonie, certaines dispositions du titre I du présent projet de loi ne nécessitant pas d'adaptation pour tenir compte des spécificités locales, ainsi que les modifications introduites par la loi du 15 mai 2001 relative aux nouvelles régulations économiques sur l'article L. 223-7 du code de commerce relatif à la possibilité de libération du capital social sur une période de cinq années.

Les dispositions étendues en vertu du projet de loi initial sont celles relatives à la suppression du seuil légal pour la détermination du capital social lors de la création d'une SARL (article 1 er ), au récépissé de création d'entreprise (article 2) et à la domiciliation de l'entreprise au domicile de l'entrepreneur individuel ou du représentant légal de l'entreprise s'il s'agit d'une personne morale (article 4).

L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification, omettant dès lors d'étendre à l'outre-mer les modifications qu'elle a introduites sur les articles susvisés ainsi que certains articles additionnels qui méritaient de l'être.

II. La position de votre commission spéciale

Votre commission spéciale vous soumet un amendement tendant à procéder aux extensions oubliées par l'Assemblée nationale : elle vous propose ainsi de rendre notamment également applicables à la Polynésie française, aux Iles Wallis-et-futuna et à la Nouvelle-Calédonie les dispositions relatives à la procédure de mainlevée d'un nantissement de fonds de commerce et à l' extension du champ de compétence des groupements de prévention agréés .

Cet amendement permet en outre d'éviter de désigner les Iles Wallis-et-Futuna comme un « territoire » : en effet, en vertu de la réforme constitutionnelle approuvée par le Congrès du Parlement le 17 mars 2003, les Iles Wallis-et-Futuna, de même d'ailleurs que la Polynésie française qui n'était cependant pas désignée comme un territoire par le projet de loi, ces collectivités situées outre-mer et soumises au principe de la spécialité législative entrent désormais dans la catégorie constitutionnelle des « collectivités d'outre-mer », la catégorie des « territoires d'outre-mer » ayant disparu.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

ANNEXE -
AUDITIONS

I. PERSONNES ENTENDUES PAR LA COMMISSION

• MERCREDI 26 FÉVRIER 2003

M. Renaud Dutreil , Secrétaire d'Etat aux petites et moyennes entreprises, au commerce, à l'artisanat, aux professions libérales et à la consommation

• JEUDI 27 FÉVRIER 2003

- M. François Hurel , Délégué général de l'Agence pour la création d'entreprises (APCE)

- MM. Claude Cazes , Président du Conseil supérieur de l'ordre des experts comptables (CSOEC), Joseph Zorgniotti , Vice-président du CSOEC en charge des entreprises, et Didier Kling , Président d'honneur du Bureau de la compagnie nationale des commissaires aux comptes

- MM. Pierre Fonlupt , membre du conseil exécutif du Mouvement des entreprises de France (MEDEF), Jean-Pierre Bournac , Directeur du GPA Entrepreneur du MEDEF, et Mme Marie-Pascale Antoni , Directeur adjoint

- M. Jean-François Bernardin , Président de l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI)

-Mme Dominique Senequier, Présidente de la commission « capital-investissement » de l'Association française de gestion (AFG)

- M. Gilles Guitton , Directeur général de la Fédération bancaire française (FBF)

- Mme Danièle Rouganne , Présidente de la Fédération des organisations contribuant à la création des entreprises et à leur reprise (FORCE), et M. Jean-Jacques Laurent , Délégué général de la FORCE

- MM. Yvon Gattaz , Président de l'Association syndicale des moyennes entreprises patrimoniales (ASMEP), et Jacques-Henri Bourdois , Délégué général de l'ASMEP

- M. Jean-François Humbert , Vice-président du Conseil supérieur du notariat

- Mme Maria Nowak, Présidente de l'Association pour le droit à l'initiative économique (ADIE)

• JEUDI 6 MARS 2003

- MM. Jean-François Roubaud , Président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME), et Pascal Labet , Directeur du service économique et fiscal de la CGPME

- MM. Alain Griset , Président de l'Assemblée permanente des chambres de métiers (APCM), et François Moutot , Directeur général de l'APCM

- Mme Eglantine de Granvilliers , représentant le Barreau de Paris, MM. Jacques-Philippe Gunther , représentant le Conseil national des barreaux, et Pascal Mayeur , représentant la Conférence des bâtonniers

- MM. Sylvain Breuzard , Président national du Centre des jeunes dirigeants d'entreprises (CJD), et Thomas Chaudron , Vice-président du CJD

- Mme Arianne Obolensky , Présidente de la Banque de développement des petites et moyennes entreprises (BDPME), et M. Marc Auberger , Directeur général délégué de la Société française de garantie des financements des petites et moyennes entreprises (SOFARIS)

- Mme Jeanne Lecine-Barat , Présidente du Conseil national des greffiers et des tribunaux de commerce (CNGTC), MM. Pascal Daniel , Secrétaire adjoint du CNGTC, Olivier Denfert , représentant le greffe du tribunal de commerce de Paris, Jean-Marc Bahans , représentant le greffe du tribunal de commerce de Bordeaux, et Philippe Modat , représentant le greffe du tribunal de commerce de Melun

- MM. Robert Buguet , Président de l'Union des professions artisanales (UPA), et Pierre Burban , Secrétaire général de l'UPA

- M. Guy Rigaud , Vice-président de l'Union nationale des investisseurs en capital pour les entreprises régionales (UNICER), et Mme Virginie Goupy , consultante.

II. PERSONNES ENTENDUES PAR MME ANNICK BOCANDÉ

• MARDI 4 MARS 2003

MM. Robert Buguet , Président de l'Union des professions artisanales (UPA), et Pierre Burban , Secrétaire général de l'UPA

• MERCREDI 5 ET JEUDI 6 MARS 2003

( auditions consacrées au chèque-emploi entreprises (article 6 quinquies ), au service d'aide aux entreprises recourant à ce dispositif (article 6 quater ) et à la désignation d'un collecteur unique pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales des travailleurs indépendants (article 18 bis ), ouvertes à l'ensemble de la commission spéciale )

- MM. Louis Grassi, Président de l'ORGANIC, Gérard Rouchy , Président de la CANCAVA, Jean-Jacques Jammet, Directeur général de l'ORGANIC, et Eric Pardineille , Directeur général de la CANCAVA

- MM. André Renaudin , Délégué général de la fédération française des sociétés d'assurance (FFSA), et Jean-François Balthazar , Directeur général de l'Assurance maladie des professions indépendantes et des exploitants agricoles

- Mme Yvonne Delamotte , Secrétaire nationale de la CFDT, et M. Yves Verollet, Secrétaire confédéral de la CFDT

- MM. Gérard Quevillon , Président de la Caisse d'assurance maladie des professions indépendantes (CANAM), et Daniel Postel-Vinay , Directeur général de la CANAM

- MM. Christophe Rateau , Directeur général adjoint de la Fédération nationale de la mutualité française (FNMF), Marcel Ducroux , Président de l'Union nationale des mutuelles des travailleurs indépendants (UNMTI), et Mme Fabienne Chomette , Responsable coordination de l'UNMTI

- M. Jacques Sauret , Directeur du Groupement d'intérêt public « Modernisation des relations sociales » (GIP - MDS)

- Mme Gabrielle Simon , Secrétaire générale adjointe de la CFTC

- M. Michel Lamy , représentant de la CGC

- Mme Dominique Didier , Secrétaire de la fédération des organismes sociaux de la CGT, MM Pierre-Yves Chanu , Conseiller confédéral de la CGT, et Donat Decisier .

- MM. Pierre Burban, Président de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACCOS), Frederic van Rockeghem , Directeur général de l'ACCOS, Philippe Renard et Didier Malric

III. PERSONNES ENTENDUES PAR M. RENÉ TRÉGOUËT

• MERCREDI 26 FÉVRIER 2003

- M. Emmanuel Le Prince , Délégué général du Comité Richelieu

- M. Jean-François Gaudot , Directeur général de France Initiative Réseau

- M. Michel Guilbauld , Directeur général adjoint de l'Anvar

• MARDI 4 MARS 2003

- M. Claude Rameau , Co-président de France Angels

- MM. Jean-Baptiste Massignon, Chef du bureau, et Karim Tadjeddine , bureau financement et compétitivité des entreprises, direction du Trésor

- M. Laurent Kott , Président de CapInTech, et Mme Anne Guillaumat de Blignières , Déléguée générale

• MERCREDI 5 MARS 2003

M. Frédéric Iannucci, sous-directeur « fiscalité des personnes et de l'épargne », direction de la législation fiscale

• JEUDI 6 MARS 2003

M. Guy Rigaud , Vice-président de l'Union nationale des investisseurs en capital pour les entreprises régionales (UNICER), et Mme Virginie Goupy , consultante

• MARDI 11 MARS 2003

- M. Philippe Jeannel et Mme Laure Colli-Pattel , Commission des opérations de bourse (COB)

- MM. Didier Kling , Président de la commission « Financement » du Conseil national de la création d'entreprise, et Jean-Luc Massol , de l'Agence pour la création d'entreprises (APCE)

- MM. André Leclerc , Georges Gaspard et Marc Roquette , Entreprises et Cités

* (1) La liste des personnes entendues figure à l'annexe du présent rapport. Les comptes rendus des auditions sont parus aux n° 18 à 20 des 1 er , 8 et 15 mars 2003 du Bulletin des commissions du Sénat. Ils sont également consultables sur le site Internet du Sénat (http://www.senat.fr).

* (2) Le compte rendu de ces réunions est paru au Bulletin des commissions n° 21 du 22 mars 2003 et peut être également consulté sur le site Internet du Sénat.

* (1) Cette proposition de loi, rapportée par notre collègue M. Francis Grignon au nom de la commission des affaires économiques (rapport n°189, 1999-2000) et adoptée par le Sénat le 10 février 2000, n'a pas été inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale.

* (1) Ce qui correspond à une baisse de près de 500 millions d'euros, soit un montant du même ordre aux dépenses fiscales associées aux mesures proposées par le présent projet de loi, dont le champ est, il est vrai, plus large.

* (1) Les noms et qualités des personnes que votre commission spéciale et ses rapporteurs ont entendues dans le cadre de la préparation de leurs travaux figurent en annexe au présent rapport.

* (1) Rapport pour avis n° 201 (1999-2000) fait, au nom de la commission des Lois, par M. Paul Girod, sur la proposition de loi n° 254 (1998-1999) tendant à favoriser la création et le développement des entreprises sur le territoire ( v. pp. 33 et suivantes).

* (1) Cette mention complémentaire est aussi apportée par votre commission spéciale aux articles 7, 9 et 11 du projet de loi.

* (1) Dans son rapport au Premier ministre de 1996 sur la modernisation du droit des sociétés, M. Philippe Marini observe que le niveau du capital minimum exigé « est devenu manifestement insuffisant » et propose de « le relever à 100.000 francs en cas de SARL pluripersonnelle et de le laisser à 50.000 francs pour l'exercice unipersonnel » (page 24).

* (1) Cour de cassation, 23 novembre 1999, « Prades c/ Arnaud » : commet une faute de gestion le gérant d'une SARL qui « [créé] une société sans apporter de fonds propres suffisants pour assurer son fonctionnement dans des conditions normales et [poursuit] l'activité de la société sans prendre aucune mesure pour remédier à cette insuffisance de fonds propres » .

* (1) J.O. Débats AN du 6 février 2003, page 913.

* (1) J.O. Débats Sénat, séance du 25 janvier 1994, page 544.

* (1) Cour d'appel de Paris, 24 septembre 1999.

* (1) J.O. Débats AN du 6 février 2003, page 925.

* (2) Rapport pour avis n° 201 (1999-2000) présenté par M. Paul Girod au nom de la commission des lois ( v. pp. 33 et suiv.).

* (1) Il convient de relever, à ce sujet, une ambiguïté rédactionnelle entre ces deux articles . En effet, en application de l'article 6 quinquies , le chèque-emploi entreprises peut être utilisé, soit au titre des salariés dont l'activité n'excède pas cent jours, consécutifs ou non, par année civile, dans la même entreprise (et ce quels que soient, apparemment, les effectifs de ladite entreprise), soit au titre des salariés des très petites entreprises employant au plus trois équivalents temps plein. Or, de son côté, la rédaction de l'article 6 quater précise que le nouveau service d'aide est organisé au profit des « petites entreprises » utilisant le chèque-emploi entreprises. Au regard de ces deux rédactions, les champs respectifs d'application du chèque-emploi entreprises et du nouveau service d'aide ne semblent donc pas être en rigoureuse adéquation au plan juridique.

* (1) Compte rendu analytique n° 71 (séance du jeudi 13 mars 2003).

* (2) JO Débat n° 11 AN [CR], séance du 5 février 2003, p. 939.

* (1) Le particulier employeur d'une aide domestique échappe, de droit, à la plupart de ces obligations (qu'il utilise ou non le « chèque-emploi services » pour payer cette aide).

* (1) Bien entendu, cela ne signifie pas que le salarié soit dépourvu de tout justificatif écrit de la réalité son travail, de sa rémunération et du paiement des cotisations sociales correspondantes. S'agissant, par exemple, du chèque-emploi services, ce justificatif écrit, qui est envoyé à l'aide domestique d'un particulier employeur par l'URSSAF compétente, prend la forme d'une feuille de paie simplifiée.

* (1) La validité d'une clause d'exclusivité est soumise à trois conditions : être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l'entreprise, justifiée par la nature de la tâche et proportionnée au but recherché.

* (1) Voir notamment l'article L. 120-4 du code du travail : « Le contrat de travail est exécuté de bonne foi » et l'arrêt de la Cour de cassation du 10 mai 2001 ( Metropolight contre Mme Harter ) , selon lequel le fait, pour un salarié, d'effectuer une formation au sein d'une société concurrente de son employeur constitue un manquement à l'obligation de loyauté auquel il est tenu envers son employeur, même pendant les périodes de suspension de son contrat de travail, et caractérise une faute.

* (1) Voir par exemple le cinquième alinéa de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques et l'article 139 du décret du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, aux termes desquels le contrat de travail de l'avocat ne doit pas comporter de stipulation limitant la liberté d'établissement ultérieur du salarié.

* (1) Cass. soc., 10 novembre 1998, SA L'Oréal c/Goncalves, n°96-45-857.

* (2) C. Cass. 1er décembre 1999, AETA c/Mme Gabourg, n°97-45333.

* (3) C. Cass. 15 mars 2000, Sté European university de Toulouse c/M. Gibson, n°98-46096.

* (4) C. Cass. 1er février 2001, AXA Conseil c/M. Rochelle, N°98-46204.

* (1) L'article 3 du décret loi du 29 octobre 1936 prévoit que les fonctionnaires peuvent produire des oeuvres scientifiques, littéraires ou artistiques, donner des enseignements, des consultations, et se livrer à des expertises sur autorisation de l'autorité administrative. En outre, les personnels enseignants peuvent exercer les professions libérales qui sont liées à la nature même de leur fonction.

* (1) Évaluation confiée à un cabinet de recherche-action, le Collège Coopératif Provence , et ayant donné lieu, dans le cadre de quatre comités de pilotage nationaux et de groupes de travail, à des échanges avec des représentants des différents services de l'Etat, l'ANPE, l'AFPA, l'UNEDIC, des organisations syndicales de salariés, une organisation patronale, des représentants de réseaux de couveuses associatifs et coopératifs, des chercheurs.

* (1) Voir le rapport sur les réseaux d'accompagnement des créateurs d'entreprises établi par M. Olivier Storch, inspecteur des finances, et Mme Marie-Christine Colomb d'Ecotay, inspectrice de l'industrie et du commerce (septembre 2001).

* (2) Le système d'information sur les nouvelles entreprises (SINE) a été créé par l'INSEE en 1994 avec l'interrogation des entreprises créées ou reprises au premier semestre 1994. Ces entreprises ont été suivies pendant cinq ans par au cours de trois enquêtes. Le suivi d'une seconde génération a été lancé en 1998.

* (1) C. Cass, 3ème chambre civile, 5 février 1985, M. Pernot et autres c. SCI Les nouveaux marchés d'Osny .

* (2) C. Cass. Ch. Com, 1er octobre 1991, Ateliers St Eloi c. Soc. Brodart .

* (1) La rupture doit cependant toujours être notifiée par écrit au bénéficiaire du concours (Cass. Com, 19 février 1991).

* (1) Rapport de l'Assemblée nationale n° 3606, XI ème législature.

* (1) Le secteur du capital-investissement a effectué dans son ensemble une levée de cinq milliards d'euros en 2001 (source : AFIC).

* (2) Ces données sont issues de l'annuaire des investisseurs régionaux publié en juillet 2002 à l'initiative de l'UNICER (Association de fonds de capital-risque régionaux).

* (3) Selon les chiffes 2002 de CDC-PME, les investissements des organismes régionaux de capital-investissement se répartissent entre le développement (45 %), la transmission (19 %) et le capital-risque (36 %).

* (1) Les FCPR, organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM), sont dénués de la personnalité morale. Les épargnants reçoivent, à concurrence de leur apport géré par un gérant professionnel, les gains liés aux participations détenues par le fonds.

* (1) Elle résulte de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle.

* (1) Il s'agit très exactement de deux des critères de la PME en droit communautaire (recommandation 96/280/CE du 3 avril 1996) .

* (2) Plus de 50 % des droits sociaux attachés aux actions ou parts de la société sont détenus directement, soit uniquement par des personnes physiques, soit par une ou plusieurs sociétés formées uniquement de personnes parentes en ligne directe ou entre frères et soeurs ainsi qu'entre conjoints et ayant pour seul objet de détenir des participations dans une ou plusieurs sociétés répondant aux conditions précédentes.

* (3) Initialement fixés à 20.000 et 40.000 francs (soit 3.049 et 6.098 euros), les plafonds ont été progressivement rehaussés : 25.000 et 50.000 francs (soit 3.811 et 7.622 euros) par la loi du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire ; puis 37.500 et 75.000 francs (soit 5.717 et 11.434 euros) à titre provisoire (loi de finances rectificative du 4 août 1995), cette majoration des plafonds ayant ensuite été prorogée jusqu'à l'extinction du dispositif prévue tout d'abord au 31 décembre 1998 (loi de finances pour 1997), puis au 31 décembre 2001 (loi de finances pour 1999) ; enfin 6.000 et 12.000 euros depuis la loi de finances pour 2002.

* (1) Sociétés de financement du capital d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles.

* (1) « Pour un plan d'urgence d'aide à la création des très petites entreprises » , Assemblée nationale, rapport d'information n° 1804, XI ème législature.

* (1) « Rapport au Premier ministre sur l'attractivité du territoire français » , M. Michel Charzat, parlementaire en mission, juillet 2001.

* (1) A l'initiative de la commission des finances du Sénat, cette limite a été portée de cinq à dix ans par la loi de finances rectificative du 30 décembre 2002.

* (2) C'est à dire le montant de leur souscription moins les sommes éventuellement récupérées.

* (1) Ces conditions sont les suivantes :

a°) exercer une activité industrielle, commerciale ou artisanale au sens de l'article 34 du code général des impôts définissant les bénéfices industriels et commerciaux (sont ainsi exclues les sociétés ayant une activité bancaire, financière, d'assurances, de gestion ou de location d'immeubles, ainsi que les sociétés de pêche maritime crées à compter du 1 er janvier 1997 et les sociétés exerçant une activité mentionnée à l'article 35 du code général des impôts, comme les marchands de biens) ou, pour les sociétés constituées à compter du 1 er janvier 1995 et disposant d'au moins trois salariés, une activité professionnelle au sens du 1 de l'article 92 du code général des impôts (ce qui comprend les professions libérales ainsi que les activités des titulaires de charges et offices n'ayant pas la qualité de commerçant comme les notaires, huissiers et commissaires-priseurs) ;

b°) ne pas être détenues, directement ou indirectement, à plus de 50 % par d'autres sociétés, sachant que, pour les souscriptions effectuées à compter du 1 er septembre 1998, il n'est pas tenu compte des participations des fonds communs de placement à risques, des fonds communs de placement pour l'innovation, des sociétés de capital-risque, des sociétés de développement régional et des sociétés financières d'innovation, à la condition qu'il n'existe pas de lien de dépendance au sens du 12 de l'article 39 du code général des impôts entre la société bénéficiaire de l'apport et ces catégories de sociétés.

* (1) Par exception aux dispositifs actuels qui subsistent.

* (2) L'option doit concerner tous les titres de la société détenus par un même actionnaire, en bloc. Le mécanisme d'option a par ailleurs été choisi car le nouveau dispositif pourrait se révéler défavorable à l'actionnaire qui n'aurait pas de plus-values adéquates pour y imputer ses moins-values.

* (1) La limite a été portée de 120.000 à 132.000 euros par la loi de finances pour 2003.

* (2) Les émetteurs des titres doivent avoir leur siège en France ou dans un autre État-membre de la Communauté européenne.

* (1) Articles relatifs à la publicité et aux documents publicitaires.

* (1) Rapport n° 49 (2000-2001) de M. Paul Girod, au nom de la commission spéciale du Sénat, sur le projet de loi relatif à la Corse.

* (1) Rapport du Sénat n° 374 (1996-1997).

* (2) La définition des PME est toutefois plus large aux Etats-Unis qu'en France.

* (1) Rapport de la commission des affaires économiques du Sénat n° 254 (1999-2000).

* (1) L'ORGANIC assure également le recouvrement de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) et de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA).

* (2) Unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales.

* (1) Les URSSAF assurent également le recouvrement de la contribution à la formation professionnelle (personnelle) des industriels et des commerçants. Les artisans, quant à eux, acquittent cette contribution à leur centre des impôts.

* (1) Pour les artisans et les entreprises artisanales : la chambre des métiers ; pour les commerçants et les sociétés commerciales : la chambre de commerce et d'industrie ; pour les professions indépendantes autres que commerciales, artisanales ou agricoles : l'URSSAF.

* (1) « La contribution (...) est directement recouvrée et contrôlée par l'organisme déterminé par le décret (...) selon les règles applicables au recouvrement des cotisations dues aux régimes d'assurance vieillesse des travailleurs non salariés des professions artisanales, industrielles et commerciales. »

* (1) Communiqué du Premier ministre en date du 18 février 2003 :

« L'Assemblée nationale a adopté en première lecture du projet de loi pour l'initiative économique un amendement qui crée un guichet unique pour le recouvrement des cotisations et contributions sociales des commerçants et des artisans.

« Le Gouvernement entend bien les inquiétudes que suscite cette mesure de simplification dans les organismes de sécurité sociale, inquiétudes qui s'expriment par le mouvement social du lundi 17 février au sein du réseau des URSSAF. Les représentants des salariés ont été reçus au cabinet du Premier ministre le mardi 18 février en présence des directeurs de cabinet du ministre des affaires sociales, du travail et de la solidarité, et du ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

« Le Gouvernement tient à réaffirmer sa volonté de répondre aux attentes des commerçants et des artisans en simplifiant et en allégeant les formalités sociales auxquelles ils sont confrontés. Il le fera dans le respect des intérêts des personnels et des organismes de sécurité sociale et avec la plus large concertation.

« Le Gouvernement souhaite expertiser, préalablement à toute décision, l'ensemble des voies possibles d'évolution permettant d'aboutir à une véritable simplification. C'est pourquoi une mission conjointe de l'inspection générale des affaires sociales, de l'inspection générale des finances et de l'inspection générale de l'industrie et du commerce a été diligentée. Celle-ci examinera sans a priori les différentes solutions envisageables avec leurs incidences pour les régimes et leurs agents et rendra ses conclusions dans les plus brefs délais ».

* (1) A l'exception des personnes bénéficiant de la dotation des jeunes agriculteurs, en sont bénéficiaires les allocataires du RMI, de l'ASS et de l'API, les bénéficiaires de contrats emploi-jeunes ainsi que les personnes salariées ou licenciées d'une entreprise soumises à une des procédures relatives au redressement et à la liquidation judiciaires des entreprises.

* (1) Rapport du Sénat n°149 (2000-2001).

* (1) Pour le calcul des seuils de nombre d'employés, de taille du bilan et de chiffre d'affaires, il convient d'additionner les données de l'entreprise bénéficiaire et de toutes les entreprises dont elle détient directement ou indirectement 25 % ou plus du capital ou des droits de vote. Cela étant, lorsqu'une entreprise, à la date de clôture du bilan, vient de dépasser, dans un sens ou dans un autre, les seuils de l'effectif ou les seuils financiers énoncés, cette circonstance ne lui fait acquérir ou perdre la qualité de PME que si elle se reproduit pendant deux exercices consécutifs. Par ailleurs, les seuils retenus pour le chiffre d'affaires ou le total de bilan sont ceux afférents au dernier exercice clôturé de douze mois. Dans le cas d'une entreprise nouvellement créée et dont les comptes n'ont pas encore été clôturés, les seuils à considérer font l'objet d'une estimation de bonne foi en cours d'exercice.

* (2) Ce dernier critère est le suivant : « Sont considérées comme indépendantes les entreprises qui ne sont pas détenues à hauteur de 25 % ou plus du capital ou des droits de vote par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises ne correspondant pas à la définition de la PME ou de la petite entreprise, selon le cas. Ce seuil peut être dépassé dans deux cas : si l'entreprise est détenue par des sociétés publiques de participation, des sociétés de capital à risque ou des investisseurs institutionnels et à la condition que ceux-ci n'exercent, à titre individuel ou conjointement, aucun contrôle sur l'entreprise ; s'il résulte de la dispersion du capital qu'il est impossible de savoir qui le détient et que l'entreprise déclare qu'elle peut légitimement présumer ne pas être détenue à 25 % ou plus par une entreprise ou conjointement par plusieurs entreprises qui ne correspondent pas à la définition de la PME » .

* (1) Sont exclues du champ de l'article 789 A les sociétés ayant une activité financière à l'exception des sociétés holdings animatrices de leurs groupes de sociétés, définies comme les sociétés holdings qui, outre la gestion d'un portefeuille de participations, participent activement à la conduite de la politique du groupe et au contrôle des filiales et rendent, le cas échéant et à titre purement interne, des services spécifiques, administratifs, juridiques, comptables, financiers et immobiliers.

* (1) Aucun délai de détention n'est exigé lorsque le défunt a acquis l'entreprise individuelle autrement qu'à titre onéreux (mutation à titre gratuit, création).

* (2) Ensemble des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels, affectés à l'exploitation d'une entreprise.

* (1) L'avantage fiscal alloué aux donations aux salariés ne sera donc pas applicable avant le 1er janvier 2004.

* (1) Ainsi, le poids des exonérations au titre de l'ISF est limité. L'effet pour le budget de l'Etat des exonérations partielles (biens ruraux et bois et forêts) est d'environ 32 millions d'euros, et celui de la disposition relative à l'évaluation de la résidence principale (abattement de 20 %) d'environ 107 millions d'euros. En revanche, l'effet de l'exonération des biens professionnels et des oeuvres d'art ne peut pas être évalué.

* (1) La personne exerçant la fonction de direction doit être :

- soit gérant nommé conformément aux statuts d'une société à responsabilité limitée (SARL) ou d'une société en commandite par actions,

- soit associé en nom propre d'une société de personnes,

- soit président, directeur général, président du conseil de surveillance, ou membre du directoire d'une société par actions.

* (1) Proposition de loi n° 319 (1996-1997).

* (1) Cette obligation vise à satisfaire les obligations communautaires en matière de libre circulation des capitaux et de concurrence.

Page mise à jour le

Partager cette page